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Lorsque j'étais plus jeune
et plus influençable,
mon père me donna un conseil.
"Efforce-toi de voir
ce qu'il y a de meilleur en autrui."
Depuis,
je préfère réserver mes jugements.
Mais même pour moi, il y a des limites.
En ce temps-là,
nous buvions tous avec excès.
Plus nous étions en phase
avec notre époque,
plus nous buvions.
Et aucun de nous
n'apportait le moindre renouveau.
À mon retour de New York,
j'étais dégoûté.
Je vois ça, M. Carraway.
Dégoûté de tout le monde et de tout.
Alcoolique
Insomniaque, Colérique
Seul un homme échappait à mon dégoût.
Un homme...
M. Carraway ?
Gatsby.
L'un de vos amis ?
C'était...
la personne la plus encline à l'espoir
que j'aie jamais rencontrée.
Et que je rencontrerai jamais.
Il était
particulier. Très sensible.
Un peu comme
les machines qui détectent les séismes
à 15 000 km de distance.
Où l'avez-vous connu ?
Lors d'une fête
à New York.
Cet été-là, en 1922,
le rythme de la ville frisait
l'hystérie.
La Bourse atteignait
des sommets,
et à Wall Street,
l'or coulait à flots dans
un fracas assourdissant.
Les fêtes étaient plus folles.
Les spectacles,
plus osés.
Les gratte-ciel, plus hauts.
Les murs, plus libres
et les effets pervers de la prohibition
avaient rendu l'alcool moins cher.
Wall Street enjôlait
les jeunes ambitieux.
Dont je faisais partie.
Je louai une maison à 30 km de New York,
sur Long Island,
à West Egg.
Une maisonnette de garde forestier,
coincée entre les demeures
des nouveaux riches.
J'achetai une dizaine de volumes
sur le crédit et les placements,
dont j'ignorais tout.
Encore
une hausse record...
Évidemment, rien n'est sûr à 100 %.
Ne placez pas tout.
À Yale, je rêvais d'être écrivain.
Mais j'y avais renoncé.
Avec le soleil radieux
et cette verdure éclatante,
je comptais
bûcher tout l'été.
Et
je l'aurais fait
sans
les réjouissances
tapageuses qui m'aguichaient...
par-delà
les murs
d'un palais monumental,
propriété d'un gentleman
que je ne connaissais pas encore,
appelé Gatsby.
Donc,
c'était votre voisin ?
Mon voisin.
Quand j'y pense,
l'histoire de cet été-là commence
le soir où je suis allé dîner
chez ma cousine Daisy.
Elle habitait de l'autre côté de la baie,
royaume des vieilles fortunes...
East Egg.
Son mari descendait de l'une
des familles les plus riches d'Amérique.
Il s'appelait
Tom
Buchanan.
À Yale,
c'était un héros
des stades.
Son heure de gloire étant passée,
il se contentait
d'autres aventures.
Ne m'appelle pas ici.
Boaz !
Shakespeare !
- Alors, ce grand roman américain ?
- Je suis devenu courtier chez Walter Chase.
Après dîner, on va en ville.
- Impossible.
- Voir la bande.
- Grosse journée, demain.
- Foutaise ! On y va.
Équipe première, l'élite du pays.
Tu vois ?
Ça m'a forgé.
Forest Hills.
Le prince de Galles.
Une lopette.
La vie,
ça se domine.
Quand on en a dans le ventre.
Henri !
Où êtes-vous ?
Les portes !
Fermez-les.
Pardon. Merci.
Est-ce toi, mon charmant ?
Daisy Buchanan.
La princesse d'or.
Une chaleur humaine
à couper le souffle.
L'assurance qu'elle n'attendait
personne au monde
plus que vous.
Je leur manque à Chicago ?
Oui.
Une dizaine de personnes t'embrassent.
Sensationnel.
Ils sont en deuil.
Ils pleurent.
Ils se lamentent.
- Je ne te crois pas.
- Ils crient !
"Daisy Buchanan,
"comment vivre
- "sans vous ?"
- Je suis paralysée de bonheur.
Jordan Baker,
très
célèbre golfeuse.
Jamais vu personne plus terrifiante.
Je vous ai vue
en couverture de Sporting Life.
Nick Carraway.
Mais sa vue me ravissait.
Je suis allongée
depuis une éternité.
Je vais vous réunir
en vous poussant dans des placards
et au large, dans une barque !
Je n'écoute pas.
Daisy me dit
que tu vis à West Egg,
que tu t'acoquines
avec ces arriérés
de parvenus.
Je vis dans un carton
à 80 $ par mois.
Quelle vie adorable.
Je connais quelqu'un à West Egg.
Moi, personne
de ce côté-là.
Vous devez connaître Gatsby.
Gatsby ?
Quel Gatsby ?
Je te révèle
un secret de famille ?
- Je suis là pour ça.
- Sur le nez du majordome.
C'est allé de mal en pis.
Je dé*** le mot "malabar".
Il paraît que tu devais
- te marier.
- Ragot.
- Je suis fauché.
- Âgés,
ils meurent vite.
Parlons d'autre chose.
Des moissons !
Tu me fais douter de ma civilité.
La civilisation court à sa ruine.
As-tu lu
L'Essor des empires de couleur,
du dénommé Goddard ?
Tout le monde devrait
le lire. D'après lui,
c'est à nous, la race dominante,
d'éviter que...
les autres races
prennent le pouvoir.
Tom devient très docte.
Il lit des livres compliqués.
C'est prouvé.
Scientifiquement.
Nous devons les réduire à néant.
Monsieur Wilson, du garage.
Désolé, je reviens.
Excusez-moi.
Ce M. Gatsby
est mon voisin.
Taisez-vous.
Je veux tout entendre.
Que se passe-t-il ?
- Vous n'êtes pas au courant ?
- Non.
Tom s'est dégoté
- une fille à New York.
- Une fille ?
Elle pourrait éviter d'appeler
à l'heure du dîner, non ?
J'adore te voir à ma table.
Tu ressembles à une rose.
Une rose parfaite.
Après dîner...
Je n'ai rien d'une rose.
... Nick voulait aller
au Yale Club.
Reste.
Je me lève tôt.
Foutaise.
- Nous avons tant à nous dire.
- Juste
un verre.
Comment ignorer cette 5e convive
à la supplique
métallique stridente ?
- Nicky.
- Quoi ?
J'ai une terrible vision des choses,
de toute façon.
Vraiment ?
J'ai voyagé partout, tout vu, tout fait.
J'ai vécu des moments affreux.
Je suis devenue assez cynique.
Ta fille
parle et mange ?
Pammy ?
Oui.
Tu sais, Nick, à sa naissance,
Tom était Dieu sait où.
Avec Dieu sait qui.
J'ai demandé
si c'était un garçon ou une fille.
Et c'était une fille.
J'ai pleuré.
"Je suis heureuse
que ce soit une fille.
"Et j'espère qu'elle sera sotte.
"C'est le meilleur des destins
pour une fille.
"Être une ravissante petite sotte."
Les instants lumineux de la vie
s'évanouissent si vite...
sans espoir de retour.
De retour chez moi,
je remarquai une silhouette
sur la jetée voisine.
Quelque chose me disait que c'était...
M. Gatsby.
Il semblait vouloir atteindre
quelque chose, là-bas, dans le noir.
La lumière verte.
Je ne veux pas parler de ça.
Alors, écrivez.
Écrire ?
Et pourquoi donc ?
Vous disiez qu'écrire
vous réconfortait.
Oui, enfin, ça ne réconfortait guère que moi.
Je n'étais pas doué.
Personne ne le lira.
Vous pourriez le brûler.
J'écrirais sur quoi ?
Peu importe.
Pourvu que cela vous apaise.
Un souvenir,
une pensée, un lieu.
Écrivez.
Un lieu.
La Vallée de cendres était un lieu
monstrueusement grotesque.
Le dépotoir de New York,
à mi-chemin entre West Egg et New York.
Le charbon calciné
qui électrifiait
la cité flamboyante
était pelleté par des hommes
aux mouvements flous,
qui se désagrégeaient
dans l'atmosphère cendreuse.
Cette ferme fantasmagorique
était surveillée
parle docteur T.J. Eckleburg,
oculiste oublié
dont le regard planait sur tout cela,
comme le regard
de Dieu.
Tom m'avait invité en ville.
Un déjeuner au Yale Club, avait-il dit.
Mais
la journée prit
un tour
inattendu.
Amène-toi.
- Amène-toi !
- Pourquoi ?
Fais-moi confiance.
Où allons-nous ?
Saute !
Attends-moi, quoi !
Domine, Nick.
Domine !
Bonjour, Wilson.
Comment vont les affaires ?
Je me plains pas.
Alors, vous me la vendez,
- cette voiture ?
- Mon gars est toujours dessus.
C'est pas un rapide, dites donc.
Je peux la vendre ailleurs.
Je dis pas ça...
Les affaires,
c'est mon rayon.
Apporte des chaises,
qu'on se pose.
Parlons affaires.
J'apporte les chaises.
Myrtle,
- tu veux bien...
- Dépêche-toi.
M. Buchanan.
Une sucrerie ?
Non, merci.
Mme Wilson, Nick Carraway.
Ravie.
Il est écrivain.
Je suis courtier.
Tiens.
Prends le prochain train.
Maintenant ?
On achète le chien ?
- Pour l'appartement.
- Ce que tu voudras.
M. Buchanan !
Un soda ?
Non, ça ira.
Appelle ta sur, pour lui.
Non, ce n'est pas la peine.
Catherine plaît beaucoup
aux connaisseurs.
Je ne peux pas.
Tu veux la mettre mal à l'aise ?
C'est impoli.
Catherine.
On est pas censé faire la fête ?
Le moment
est mal choisi.
Je m'en vais.
Salut.
Chester, ça doit être le cousin.
Vous êtes à croquer !
Chester McKee. Enchanté.
- Je te plais pas ?
- Une plante.
Myrtle !
Myrtle Myrtille !
Je dois m'en aller.
À boire ! On s'endort.
Je m'en vais.
Attends !
- Faut que je sorte d'ici.
- Foutaise.
Va parler à Catherine.
Quand même, Daisy est ma cousine !
Toi, tu aimes regarder.
Je m'en souviens.
Je ne porte aucun jugement.
On a tout l'été !
Tu veux rester sur la touche
et regarder ou marquer des buts ?
Des buts !
On est pas assez bien pour toi ?
Il va regarder
ou marquer des buts ?
Enlève ça et reste un peu.
McKee
- est dans le domaine artistique.
- La photo.
Nick est un artiste.
Sans blague ?
- J'écris un peu.
- Sans blague ?
Tu vis à Long Island ?
- À West Egg.
- Je suis allée à une fête,
il y a un mois. Chez un certain Gatsbys.
Tu le connais ?
Nous sommes voisins.
C'est un cousin du Kaiser Guillaume.
L'affreux roi allemand.
McKee !
Une petite photo !
Je suis pas de ce genre-là.
Mais vas-y.
Ils supportent pas leur conjoint.
Elle n'aime pas Wilson ?
C'est un pauvre
petit merdeux.
Non, merci.
Je me sens aussi bien sans rien.
Des calmants.
Par un médecin dans le Queens.
T'en veux ?
Non, je suis très calme.
Je n'ai été ivre
que deux fois dans ma vie.
Et la seconde fois,
ce fut cet après-midi-là.
Ce soir-là,
dans l'appartement
que Tom louait pour Myrtle,
nous fûmes emportés
par un délire chimique.
Une fièvre ardente
dont la déflagration tonitruante
nous inonda.
Et soudain,
New York commença à me plaire.
C'est mieux que le Yale Club.
Haut perchées
sur la ville,
nos fenêtres dorées
devaient dévoiler leur part
de mystère humain...
au badaud
qui passait par là.
J'étais ce badaud
aussi,
qui levait un regard interrogateur.
J'étais dedans
et dehors.
Envoûté et écuré...
par l'inépuisable diversité de la vie.
Je t'interdis
de dire son nom !
Daisy...
- Je t'interdis de dire son nom !
- Je le dirai...
- Mon Dieu, t'es cinglé !
- Sale putain !
Comment suis-je rentré ?
Mystère.
Une chose est sûre,
au réveil, j'eus la nette
et désagréable impression
que Gatsby m'observait.
Vous observait ?
Il m'observait en permanence.
Et comment le saviez-vous ?
J'ai reçu une invitation.
J'étais
le seul.
Je dis bien, personne à part moi
n'avait jamais reçu
d'invitation officielle de sa part.
New York venait,
tout simplement sans être convié.
La ville entière
s'entassait dans des automobiles,
et le week-end, tous les week-ends,
se retrouvait chez Gatsby.
Et vraiment, tout le monde,
de tous milieux
et des moindres recoins
de New York.
Cette mascarade
kaléidoscopique
s'engloutissait
chez Gatsby.
Mon invitation.
Mon invitation.
Par ici !
Un caravansérail
d'éditeurs jouisseurs et milliardaires
flanqués de leurs nounous blondes.
Des héritières comparaient
leur patrimoine sur la plage.
Mon patron, Walter Chase,
se faisait plumer à la roulette.
Des échotiers côtoyaient
malfrats et gouverneurs,
qui échangeaient leurs numéros.
Vedettes de cinéma.
Metteurs en scène de Broadway,
moralisateurs,
étudiants déserteurs.
Et Ewing Klipspringer,
improbable descendant de Beethoven.
Où puis-je trouver M. Gatsby ?
J'habite à côté.
Je ne l'ai jamais vu.
Personne, d'ailleurs.
Seul
et mal à l'aise,
j'entrepris de m'offrir
une cuite
retentissante.
Je pensais bien vous voir ici.
Vous habitez à côté.
Quel parc d'attractions !
On y va ?
- Avez-vous reçu une invitation ?
- Personne
n'en reçoit.
Moi, si.
Apparemment, je suis le seul.
Qui est ce Gatsby ?
- Un espion allemand pendant la guerre.
- Teddy Barton,
Nick Carraway.
Un espion allemand ?
Non, le tueur attitré du Kaiser.
Il aurait tué un homme.
- C'est vrai.
- Il tue pour le plaisir, gratis.
Il est plus riche que Dieu.
Croyez-vous vraiment qu'il ait tué ?
Allons le trouver,
vous lui poserez la question.
On applaudit bien fort
l'incroyable
Mlle Gilda Gray !
M. Gatsby ?
Venez.
Vous vous méprenez !
C'est moi,
le mystérieux
M. Gatsby.
Vous ne le trouverez pas.
Cette demeure
et son contenu
constituent
un habile camouflage.
Mais M. Gatsby n'existe pas.
Faux ! Je l'ai rencontré.
Ah oui ? Lequel ?
Le prince ?
L'espion ?
L'assassin ?
Je ne trouve personne
qui ait une information réelle
sur M. Gatsby.
Peu m'importe.
Il donne de grandes fêtes
et j'adore les grandes fêtes.
Elles sont si intimes.
Les petits comités
n'offrent aucune intimité.
Mais si c'est vrai,
à quoi bon tout cela ?
Là, mon cher ami,
est la question.
Vous dansez ?
Petite pédale pouilleuse !
À moi
de la voler.
L'Histoire du monde racontée par le jazz
et son grand...
feu d'artifice !
Ouvrez les yeux !
Une riche n'épouse pas un pauvre.
Elle est à moi.
On se connaît, non ?
3e division, pendant la guerre ?
- Oui, 9e d'artillerie.
- Moi, 7e.
Vous vous amusez, vieux frère ?
C'est extraordinaire.
J'habite à côté.
Il m'a envoyé une invitation.
Je suis le seul.
Je ne connais pas encore M. Gatsby.
Personne, d'ailleurs.
Ce serait un parent du Kaiser
et le cousin du diable.
Je suis un piètre maître de maison,
vieux frère.
Voyez-vous...
c'est moi, Gatsby.
Son sourire était
l'un de ces sourires peu communs
que l'on ne rencontre que 4 ou 5 fois.
Qui semblait vous comprendre
et croire en vous comme vous aimeriez
qu'on vous comprenne
et qu'on croie en vous.
Je croyais que vous le saviez.
Je vous en prie...
Je ne sais que dire.
- Pardonnez-moi.
- Il n'y a pas de mal.
J'ai beaucoup bu.
M. Gatsby,
Chicago au bout du fil.
Dans un instant.
J'étrenne mon hydravion demain matin.
Vous m'accompagnez ?
À quelle heure ?
L'heure qui vous conviendra.
C'est très aimable à vous.
Ravi de vous revoir, Mlle Baker.
Quoi que
vous désiriez,
il suffit de demander, vieux frère.
Excusez-moi.
Je vous retrouve tout à l'heure.
Je le voyais...
Vieux et bedonnant ?
Les jeunes gens
n'émergent pas de nulle part
pour s'acheter un palais ici.
Il m'a dit
être un ancien d'Oxford.
Mais je n'y crois pas.
Pourquoi ?
Je ne sais pas.
Je n'y crois pas, c'est tout.
Veuillez m'excuser.
M. Gatsby souhaite vous parler.
En privé.
À moi ?
J'ai une nouvelle ahurissante.
Où étais-tu ?
La voiture est là.
C'est renversant.
Tout s'explique.
Tout s'explique.
Venez.
- Qu'est-ce qui s'explique ?
- Tout !
C'est la folie,
- allons-nous-en.
- J'excite votre curiosité
et j'ai juré de me taire.
Dites-le-moi.
Je suis désolée, j'ai juré
de ne rien dire.
Navré de l'avoir retenue, vieux frère.
Souvenez-vous,
l'hydravion.
M. Gatsby,
Philadelphie au téléphone.
Bonne nuit, vieux frère.
Bonne nuit.
Merci.
Vous êtes
à sec ?
Venez me voir !
Prenons le thé cette semaine.
Je suis dans le bottin.
Je vous téléphone.
Nous avons fait de l'hydravion
et je suis allé
à deux autres fêtes.
J'ai même profité de sa plage.
Mais vous voyez, docteur,
je me suis rendu compte
que je ne savais absolument rien
sur Gatsby. Rien du tout.
Jusqu'au jour où...
Jolie, n'est-ce pas, vieux frère ?
Vous l'aviez vue ?
Un modèle unique.
Turbocompresseur.
Habillez-vous.
Nous allons déjeuner.
Enfin...
Dites-moi, vieux frère.
Que pensez-vous de moi, au fond ?
Ce que je pense...
Oui, ce que vous pensez.
N'allez pas vous faire une fausse idée
à cause des calomnies qu'on colporte.
Tissu de mensonges !
Vous avez dû en entendre.
Je vais vous dire l'exacte vérité.
Je descends de gens très riches
du Middle West,
tous morts, hélas.
Élevé en Amérique,
j'ai étudié à Oxford,
comme
tous mes ancêtres.
Tradition familiale.
Quel laïus !
Pas étonnant qu'on le crut menteur.
À la mort de mes proches,
j'ai fait un gros héritage.
J'ai vécu comme un prince
dans les capitales européennes.
En Europe !
Paris, Venise,
Rome, Vienne,
Zurich, Helsinki,
Moscou, Istanbul.
Je collectionnais les bijoux
en rubis,
je chassais
le gros gibier,
je peignais, pour le plaisir uniquement.
Je trouvais cela
déjà totalement extravagant.
- Puis vint la guerre.
- Et le voilà
héros de guerre, vainqueur
de l'armée allemande à lui tout seul.
En Argonne, j'ai conduit
2 détachements d'artilleurs...
Ils étaient 5 fois plus.
Un fossé d'un kilomètre !
Pas un Allemand n'a survécu.
2 jours et 2 nuits !
Une hécatombe.
130 hommes avec 16 fusils-mitrailleurs.
Tous les Alliés m'ont décoré,
même le Monténégro.
La médaille
du Monténégro.
"Commandant Jay Gatsby,
- "pour acte de bravoure exceptionnel."
- Eh oui.
Ceci ne me quitte jamais.
Souvenir d'Oxford.
Trinity College.
À ma gauche,
- le comte de Doncaster.
- Que dire ?
La photographie
était indubitablement authentique.
Tout cela était-il donc vrai ?
Vous n'êtes pas obligé de me croire.
Je vais vous présenter
un illustre homme d'affaires new-yorkais,
M. Meyer Wolfshiem, mon cher ami.
Il confirmera tout
- et répondra de ma moralité.
- Ce ne sera pas nécessaire.
Mais si.
Je me suis livré à vous
pour éviter que...
vous me preniez
pour n'importe qui.
Voyez-vous, j'ai un très grand service
à vous demander.
Un grand service ?
Mlle Baker vous expliquera tout
cet après-midi.
Jordan ?
Qu'a-t-elle à voir là-dedans ?
Il n'y a rien
d'équivoque.
Mlle Baker, sportive honnête,
ne ferait rien
d'irrégulier.
Garez-vous !
- Garez-vous.
- D'accord, vieux frère.
Entendu.
Je ferai attention,
la prochaine fois.
- Excusez-moi.
- Merci.
Un ami d'Oxford ?
J'ai rendu service au chef de la police.
Il m'envoie ses vux à Noël.
Il devrait être là ce midi.
Arrivés
au pont, j'étais déboussolé.
Je ne savais que penser.
Mais Manhattan,
depuis le pont de Queensboro,
reste tel qu'on le découvre
pour la première fois,
recelant la promesse folle
de révéler tout le mystère
et la beauté
du monde.
Tout
peut arriver, maintenant
que nous avons survolé
ce pont, me dis-je.
Tout.
Même Gatsby pouvait arriver.
Mon garçon !
Meyer...
Ce doux parfum.
- Quelle allure !
- Et vous donc.
M. Carraway,
mon cher ami, M. Meyer Wolfshiem.
Enchanté,
- M. Carraway.
- De même.
Je sais tout de vous.
- Je vois.
- M. Gatsby
n'a que vous à la bouche.
On y va ?
Venez.
Allons prendre
notre déjeuner.
Dites à Walter Chase de la fermer,
ou il n'aura pas un sou.
Nous en parlerons
- plus ***.
- Whisky-soda, M. Gatsby ?
Whisky-soda, oui.
Prenez soin de mon ami.
Regardez
ces pognes.
Prochain champion
- poids lourds.
- Salue ton patron.
Jay !
Je vous arrête !
Attention, le jazz vous monte à la tête,
M. le chef de la police.
C'est le chef de la police.
Pas de folies,
sénateur.
Je mise un coup pour vous !
Le homard
est garni de truffes et fines herbes.
Ça marche,
les obligations, M. Carraway ?
Très bien, merci.
Et donc, vous avez besoin
d'un contact.
Ce n'est pas lui.
Monsieur est l'ami
dont je vous ai parlé.
Je vous demande pardon.
Erreur sur la personne.
Je dois aller passer
mon coup de fil.
Quel gentleman.
Issu d'une grande famille
du Middle West.
Tous morts, hélas.
Quand j'ai eu le plaisir de faire
sa connaissance à la sortie de la guerre,
j'ai su que j'avais découvert un homme
parfaitement éduqué.
Un héros de guerre,
couvert de médailles.
Et
un ancien d'Oxford.
Vous connaissez Oxford ?
J'en ai entendu parler.
Donc, en matière de femmes mariées,
on peut lui faire confiance.
Avec un ami,
quelqu'un comme vous,
il n'aurait pas un regard
pour votre épouse.
Je ne suis pas marié.
Mais vous travaillez bien
à Wall Street ?
Vous regardez mon épingle ?
Magnifique spécimen
de molaire humaine.
Tout va bien ?
Oui, nous...
Nous parlions des épouses des autres.
Les épouses des autres ?
J'ai rempli ma tâche.
Je vous laisse parler
de votre sport et de vos femmes.
Les épouses des autres ?
Qui est-ce ?
Un acteur ?
Meyer ?
Non. Un joueur.
Il a truqué la finale de base-ball
de 1919.
Truqué ?
Truqué.
Comment s'y est-il pris ?
Il a saisi l'occasion, j'imagine.
C'est un malin.
Venons-en, vieux frère,
à Mlle Baker et à ce service.
Tom ! Ça par exemple !
La forme ?
- Ça va.
- Daisy est furieuse.
Tu ne l'as pas appelée.
M. Gatsby, M. Buchanan.
Heureux de vous rencontrer.
Toi ici, dans ce temple
- de la vertu ?
- Je déjeune
avec M. Gatsby.
- Vous cherchez...
- Jordan Baker.
La célèbre sportive, la golfeuse ?
Je la vois, merci.
À quoi vous jouez,
vous et Gatsby ?
Nick, asseyez-vous.
Il m'embarque dans son bolide...
Moins fort.
Tout le monde
entend.
Quel est
cet immense service ?
Que vous invitiez Daisy
à prendre le thé.
Daisy ?
Et Gatsby ?
Pourquoi ?
Par où commencer ?
Je n'ai compris que l'autre soir
que j'avais déjà vu Gatsby.
Il y a 5 ans. À Louisville.
J'avais reçu
mes nouvelles chaussures de golf.
Daisy
était de loin la jeune fille
la plus courtisée du camp Taylor.
Bonjour, Jordan.
L'un des officiers
était avec elle.
C'était Gatsby.
Il la regardait
comme on en rêve toutes.
Et alors,
qu'est-il arrivé ?
Je l'ignore.
Chargez !
Gatsby fut envoyé
au front.
Quand la guerre prit fin,
Daisy patienta,
mais pour une raison mystérieuse,
Gatsby ne put revenir.
FIANÇAILLES DU CÉLIBATAIRE
LE PLUS RICHE D'AMÉRIQUE
Un an plus ***, Tom Buchanan, de Chicago,
fit irruption et gagna ses faveurs.
Il lui offrit un collier
d'une valeur de 350 000 dollars.
Mais le matin du mariage,
- Daisy reçut une lettre.
- Dis-lui
que Daisy a changé d'avis !
Que se passe-t-il ?
Donnez-moi ça.
Laissez-moi tranquille !
Personne ne doit savoir...
- Que disait la lettre ?
- Je ne sais pas.
Elle ne m'a rien dit.
C'était trop ***.
Ce jour-là,
à 17 h, Daisy Fay
épousa Tom Buchanan
dans un faste et une opulence
jamais vus à Louisville.
LE MARIAGE DE L'ANNÉE
Après la lune de miel,
je les ai vus à Santa Barbara.
C'était touchant.
Elle était follement éprise de son mari.
Huit jours après, Tom
a embouti sa voiture.
Il était avec une femme de chambre.
Ça a fait toutes les unes.
- Étrange coïncidence.
- Quoi donc ?
Que Gatsby habite
de l'autre côté de la baie.
Ce n'est pas une coïncidence.
Il s'est installé là
pour être près d'elle.
Il a organisé ces fêtes
dans l'espoir de la voir arriver.
Il cherchait des gens qui la connaissent.
J'étais la première.
Tout cela alors que 5 ans ont passé.
Et je n'ai qu'à inviter Daisy
à prendre le thé ?
Quelle simplicité.
C'est confondant,
- n'est-ce pas ?
- Bonsoir les amoureux.
Où c'est qu'on va ?
- Long Island, s'il vous plaît.
- Dois-je accepter ?
Daisy a-t-elle envie de voir Gatsby ?
Elle ne doit rien savoir.
Invitez-la
et il passera par là.
Je me sentais tiraillé.
Était-ce bienséant de rapprocher
ma cousine, une femme mariée,
d'un homme que je connaissais à peine ?
À mon retour, la demeure de Gatsby
brillait de mille feux,
comme pour une nouvelle fête
extravagante.
Mais le silence régnait.
Bonne soirée, monsieur.
On se croirait
à l'Exposition universelle
ou à Coney Island.
Vous trouvez ?
Je suis allé jeter un il
dans certaines pièces.
Allons à Coney Island, vieux frère.
Ma voiture...
Il est trop ***.
Alors, piquons une tête.
La piscine ne m'a pas servi.
Je dois aller me coucher.
Très bien.
Je le ferai volontiers.
Je vais inviter Daisy
- pour le thé.
- Inutile...
- Quel jour ?
- Comme il vous plaira.
Je ne veux pas vous importuner.
Après-demain ?
Après-demain.
Il faudra tailler la pelouse.
Écoutez...
Vous ne roulez pas sur l'or.
- Pas vraiment.
- Pardonnez-moi.
J'ai une petite affaire annexe,
un à-côté.
Vous me suivez, n'est-ce pas ?
Vous vendez bien
des obligations ?
J'essaie.
C'est une affaire
confidentielle,
qui pourrait vous rapporter.
- Non, merci, je suis débordé.
- Rien à voir
avec Wolfshiem,
rassurez-vous.
Ce n'est qu'une petite faveur, Jay.
Ça me fait plaisir.
Une faveur ?
Bonne nuit.
Bonjour.
J'ai lu que la pluie
cesserait vers 16 h.
Dans le Wall Street Journal.
En entrant à droite.
Dans le séjour. Merci.
Tout va bien ?
La pelouse est belle.
La pelouse ?
Quelle pelouse ?
J'ai acheté des gâteaux.
Il manque quelque chose ?
Des fleurs, peut-être.
C'est très réussi, non ?
Magnifique.
C'est trop ?
C'est ce que vous souhaitez.
Absolument.
Je n'ai pas
toute la journée.
Je m'en vais.
C'est idiot, il est moins deux.
Personne ne viendra...
C'est elle.
Est-ce véritablement ici que tu vis,
mon adoré ?
Oui, ça me convient.
Tu m'as conviée
seule.
Es-tu amoureux de moi ?
C'est le secret du château Carraway.
- Dis au chauffeur de s'éloigner.
- Revenez dans une heure,
Ferdie.
Il s'appelle Ferdie.
Dieu du ciel !
Je n'en crois pas mes yeux.
Tu as pillé une serre ?
Il est vraiment amoureux de moi.
S'il te plaît.
C'est drôle.
Quoi donc ?
Que faites-vous ?
Je suis absolument ravie de vous revoir.
Absolument ravi de vous revoir,
moi aussi.
Nous...
Nous nous connaissons.
Je ferai venir quelqu'un
pour la réparer.
Désolé pour la pendule.
- Elle est vieille.
- Mais très jolie.
Cela remonte à des années.
Cinq ans en novembre.
Du thé ?
- Oui, merci.
- Très cher, merci.
- Citron, sucre ?
- Non.
Nature.
Je dois faire un tour
en ville.
Je reviens.
Un mot.
Oui. Je reviens !
Quelle erreur !
Quelle terrible erreur !
Vous êtes mal à l'aise,
et Daisy aussi.
Elle l'est aussi ?
Autant que vous.
Pas si fort.
Ne faites pas l'enfant !
Vous êtes impoli.
Daisy est toute seule et...
Si je fais le point, jusque-là,
il m'apparaît que pour la deuxième fois
cet été-là,
je protégeais les secrets des autres.
Une fois de plus, j'étais dedans
et dehors.
Il ne pleut plus.
En effet.
Qu'en pensez-vous, Daisy ?
Venez voir.
Nicky, ça alors !
Regarde, c'est ma maison.
Là-bas, en face.
Je sais.
J'ai la même vue de chez moi.
Où est-ce ?
Venez chez moi avec Daisy,
je voudrais lui faire visiter.
À moi aussi ?
Absolument, vieux frère.
Absolument.
Ouvrez la grille.
Ouvrez la grille !
La grille provient
d'un château normand.
- C'est grandiose !
- Vous aimez ?
J'adore.
Vous habitez ici
- tout seul ?
- Non.
J'invite en permanence
des gens intéressants, du beau monde.
Venez.
C'est beau, non ?
La façade accroche bien la lumière.
C'est splendide.
Venez, je veux
une visite royale.
J'aime tout ce qui est moderne.
Le jus sort par là.
Un petit golf ?
- Vous savez que j'excelle au golf.
- Formidable !
En piste.
C'est une caméra dernier cri.
Admirez le style.
Continuez à filmer.
Swing en vue.
Balle !
Quelle brute !
- Prêts pour le gros plan ?
- Immortalisez tout.
Vous êtes radieux.
Elle est digne de Vogue.
Allez, filme !
- Où étiez-vous passés ?
- Doucement !
Quelle splendeur.
- Un Wurlitzer sur mesure.
- Quelqu'un
sait en jouer ?
Klipspringer. Réveillez-le.
- Tout de suite, monsieur.
- Musique !
Dansons
- toute la nuit.
- Ewing est un génie, il sait tout jouer.
- Un charleston !
- Elle illumine les lieux,
n'est-ce pas, vieux frère ?
Quelqu'un, en Angleterre,
m'achète mes vêtements.
Je n'ai jamais rien vu de tel.
Pour la demoiselle.
Il m'envoie une sélection
de chaque saison.
Soie.
Flanelle.
Qu'elles sont belles !
Coton indien.
Arrêtez !
Toile de lin.
- Il est fou !
- Je ne peux rien faire.
Il faudra les replier
une à une.
Ça les abîme !
Arrêtez !
Tenez !
Qu'y a-t-il ?
Daisy chérie, qu'y a-t-il ?
Cela me rend triste.
Pourquoi ?
Parce que...
Cinq années perdues
chancelaient sur les lèvres de Daisy.
Mais elle ne parvint qu'à dire...
Pourquoi ?
Je n'avais jamais vu
de si belles chemises.
Sans cette brume...
nous verrions la lumière verte.
Quelle lumière verte ?
Celle qui brûle, la nuit,
à la pointe de votre jetée.
Peut-être
s'était-il rendu compte
que la signification prodigieuse
de cette lumière
s'était évanouie à jamais.
Ce n'était à nouveau
qu'une lumière verte sur une jetée.
Une pièce de sa collection enchantée
venait de disparaître.
Qui est-ce ?
Votre père ?
C'est Dan Cody.
Il est mort.
C'était mon meilleur ami, autrefois.
Vous aviez
une coupe Pompadour
et un yacht ?
J'ai quelque chose à vous montrer.
Asseyez-vous.
Je conserve tout ce que je trouve...
à votre sujet.
Vous avez gardé mes lettres.
Ma première
photo de vous.
- Vous vous souvenez ?
- Nous ne pouvons pas nous perdre
et laisser
s'éteindre
ce sublime amour. Revenez.
DAISY FAY
PROMISE EN MARIAGE
Je vous attends,
pleine d'espoir
que chaque
long rêve de vous se réalise.
Excusez-moi.
- Détroit, monsieur.
- Pas maintenant, vieux frère.
Il sait bien
ce qu'est une petite ville.
Toi, écoute-moi.
J'ai dit une petite ville.
Écoute. Il ne nous sert à rien
s'il estime que Detroit
est une petite ville !
On se reparle plus ***.
Klipspringer.
Il est debout !
On y va ?
J'aimerais avoir tout partagé avec vous.
Toute ma vie.
Si seulement nous pouvions rester ainsi.
Ayez confiance.
Si seulement Gatsby
avait su se contenter
de tenir Daisy dans ses bras.
Mais il avait un grand dessein pour sa vie
et le rôle que Daisy devait y jouer.
Ce n'est qu'à la fin de l'été,
lors de ma dernière soirée avec Gatsby,
qu'il me raconta
la vie qu'il s'était rêvée
depuis l'enfance.
Voyez-vous, docteur...
Gatsby s'appelait en réalité...
James Gatz.
Ses parents étaient des fermiers miséreux
du Dakota du Nord.
Il n'accepta jamais
qu'ils fussent ses parents.
Il imaginait être le fils de Dieu...
au destin
nimbé de gloire.
Suivant l'appel de ce destin, à 16 ans,
il s'enfuit très loin de chez lui.
Un après-midi, sur le lac Supérieur,
il remarqua un yacht en péril.
À la rame, il sauva l'embarcation
et son capitaine,
le millionnaire alcoolique Dan Cody.
Les hauts-fonds !
On va heurter les hauts-fonds !
Qu'est-ce que vous fabriquez...
- vieux frère ?
- C'était
sa chance. Il sut la saisir.
Et là,
je me suis rebaptisé Jay Gatsby.
Le yacht hors de danger,
son avenir s'illumina.
Gatsby était habile et ambitieux.
Pendant 5 ans,
ils naviguèrent aux quatre vents.
Ce bon vieux Dan
m'a tout appris.
À se vêtir, se comporter
et s'exprimer en gentleman.
Jay Gatsby.
La mer est belle !
Gatsby espérait hériter de Cody.
- Vieux frère.
- Mais à sa mort,
Gatsby se vit dérober l'héritage
par la famille de Cody.
Il était capable
de passer pour un gentleman,
mais replongeait à nouveau
dans la misère.
LA FORTUNE COLOSSALE DE GATSBY
À l'été, il faisait toutes les unes.
GATSBY INVESTIT
DANS LES GRATTE-CIEL !
JAY DÉCROCHE LE GROS LOT !
D'OÙ VIENT L'ARGENT, GATSBY ? FOLLES
RUMEURS AUTOUR DE MYSTÉRIEUX MILLIONS
D'où venait l'argent ?
Tout New York
voulait le savoir.
Et la même question taraudait Tom
le soir où il accompagna Daisy chez Gatsby
à l'une de ses fêtes éblouissantes.
Je reviens.
Beaucoup
de parvenus
- sont de sales bootleggers.
- Pas Gatsby.
Il a fait des affaires
dans les drugstores.
Des affaires !
Je vous présente le sénateur Gulick.
M. Carraway.
- Mme Buchanan.
- Charmé.
Enchantée.
Et M. Buchanan,
le joueur de polo.
- Non, pas moi.
- Un plaisir
de rencontrer un Buchanan.
- De même.
- Je vous rejoins
- à la table de craps.
- J'aime autant ne pas être le joueur de polo.
Tu peux être fier de ta réussite.
Je vous fais visiter ?
Vous devez reconnaître
des visages connus.
Nous sortons peu.
Je ne reconnais
- personne.
- Vraiment ?
Cette femme,
- peut-être ?
- C'est Marlene Wood. J'adore ses films.
Je vous la présente ?
J'aime autant ne pas être
le joueur de polo.
Comme c'est excitant !
Ils se trémoussent bien.
Nous nous sommes déjà rencontrés.
Il y a un mois.
Mais oui.
Vous étiez avec Nick.
Chez le barbier.
C'est cela.
Je connais votre épouse.
Ah oui ?
M. Gatsby.
- M. Slagle est là.
- Pas maintenant.
"Le Fox-trot."
M. Buchanan.
M'obligeriez-vous ?
Bien sûr.
J'ai de quoi me divertir.
Si tu dois noter des adresses...
Faites place.
Encore extra, cette soirée, Jay.
Méfiez-vous de cette charmeuse
de serpents, M. McLennehan.
Tout ceci n'est-il que le fruit
de ton imagination ?
Non.
Tu as toujours été là.
Dans chaque idée.
Chaque décision.
Si quelque chose te déplaît,
je le changerai.
C'est parfait.
À la mesure
de ton irrésistible imagination.
Où diable
a-t-il pu la rencontrer ?
À tout à l'heure.
Suis-moi.
Tu n'as pas vu ma femme ?
Non.
Pas depuis un moment.
Whisky.
C'est drôle,
le sénateur l'a vue par ici.
Si seulement
nous pouvions fuir ensemble.
Fuir ?
Daisy, ma chérie,
- ce ne serait pas convenable.
- Tu vis
dans le coin ?
À côté.
Ah oui ?
Nous vivrons ici.
Dans cette maison.
Toi...
et moi.
Ma chérie...
il faut tout dire à Tom.
Quel cirque.
Si tu la vois...
je la cherche.
Dis-le-lui.
Nous nous amusions tant.
Pourquoi ne pas
nous amuser à nouveau ?
Nous nous disputions.
- À quel sujet ?
- Au sujet
de choses.
Au sujet de l'avenir.
L'avenir
des empires de couleur.
Tom
arpente les lieux à ta rech...
M. Gatsby,
M. Slagle est très agité.
Excusez-moi.
M'obligeriez-vous ?
Bien sûr.
Gatsby disparut
pour régler un mystérieux différend.
Daisy attendit.
Mais Gatsby n'eut pas le loisir
de revenir.
Avec ces enragés, je compte sur toi !
Tu étais introuvable !
Il y a eu un esclandre.
Qu'est-ce qui te prend ?
Où étais-tu ?
Avec Nicky.
M. Gatsby nous faisait visiter.
Il a dû
se donner du mal
pour rassembler cette ménagerie.
J'aimerais savoir qui il est,
ce qu'il fait.
Je vais mettre un point d'honneur
à le découvrir.
Vous voilà !
Daisy vient de partir.
Elle a passé
une excellente soirée.
Elle n'a pas aimé.
Bien sûr que si !
Non, elle n'a pas aimé.
Ça ne lui a pas plu.
Je me sens
si loin d'elle.
J'ai du mal à lui faire comprendre.
Vous parlez de la fête ?
La fête ?
Je me fiche pas mal de ces fêtes.
Ce sera tout pour l'instant, messieurs.
Merci.
Il faut qu'elle dise à Tom
qu'elle ne l'a jamais aimé.
Quoi ?
Ensuite, nous retournerons à Louisville,
chez ses parents.
Ses parents sont charmants, vieux frère.
On s'y mariera.
Nous allons tout recommencer,
comme il y a cinq ans.
Ne lui demandez pas trop.
Pas trop ?
Veuillez m'excuser, vieux frère.
Je suis triste d'avoir du mal
à lui faire comprendre.
J'ai du mal à lui faire comprendre.
J'ai acheté tout ça pour elle,
et voilà qu'elle veut fuir.
Même ça,
elle n'en veut pas.
On ne revit pas le passé.
On ne revit pas le passé ?
Mais bien sûr que si.
Bien sûr que si.
Je vais faire en sorte
que tout soit comme avant.
Tout est tellement confus depuis lors.
Il parlait beaucoup du passé.
Comme pour retrouver quelque chose.
Si je pouvais simplement
repartir à zéro.
Si je repartais à zéro,
ça reviendrait.
Une idée
de lui-même
qu'il avait liée à son amour pour Daisy.
Un soir, à Louisville,
cinq ans auparavant,
Gatsby s'était retrouvé chez Daisy
par un prodigieux hasard.
La première fois,
j'étais avec quelques officiers.
Je n'avais jamais vu si belle maison.
Vous me gardez une danse ?
Son uniforme masquait
le fait qu'il était
sans le sou,
avec pour seul bagage
la haute idée qu'il avait de lui-même.
- Ne trottez pas.
- Non, mère.
Que de jeunes et beaux officiers !
Et d'illustres lignées.
Je savais que je pourrais m'élever.
Mais je ne pourrais
m'élever que seul.
Je savais
que si
j'embrassais cette jeune fille...
mon destin
serait uni au sien.
Alors, j'ai suspendu mon geste.
J'ai suspendu mon geste et...
j'ai attendu.
Encore
un instant.
Il savait
que son esprit ne serait
plus jamais libre de s'ébattre comme...
l'esprit de Dieu.
Que tomber amoureux
transformerait son destin
à jamais.
Et je me suis abandonné.
Elle s'ouvrit à lui, telle une fleur.
Et l'incarnation s'accomplit.
Quelle erreur, pour un homme
comme moi, de tomber amoureux.
Un grand destin m'attend
si j'oublie que
j'ai perdu Daisy, mais...
ma vie, vieux frère,
doit être ainsi.
Aller toujours plus haut.
Elle doit aller voir Tom
et lui dire qu'elle ne l'a jamais aimé.
Je dois lui laisser du temps,
vieux frère.
Du temps.
N'ayez crainte, vieux frère.
Je la protégerai ici.
Bonne nuit, vieux frère.
Vous vous trompez, pour le passé.
Vous vous trompez.
De la musique avait retenti chez lui
tout l'été.
Dans ses jardins bleutés,
les invités voletaient
parmi les chuchotements,
les rires et les étoiles.
Petit-déjeuner.
Merci.
Les rires.
Merci.
Les chuchotements,
le champagne et les étoiles.
Mais...
après la visite de Tom et Daisy,
chez Gatsby,
les lumières s'éteignirent une à une.
LE PALAIS DES PLAISIRS
Il n'y eut plus de fête.
PLONGÉ DANS LE NOIR
Daisy lui rendait visite discrètement...
car la renommée même,
qui tout l'été,
avait empli d'aise Jay Gatsby,
était devenue une menace.
QUI EST LA FEMME-MYSTÈRE ?
Je ne veux pas rentrer chez moi.
Vous avez congédié vos domestiques ?
Daisy vient me voir de temps en temps
l'après-midi.
Je voulais éviter les ragots jusqu'à ce que
nous décidions quoi faire.
Ces petites villes
sont proches l'une de l'autre,
vieux frère.
Si la presse s'en mêle,
vous comprenez...
Ce sont des gens
que Wolfshiem voulait aider.
Du moment qu'ils savent cuisiner
et faire les lits.
Daisy est prête.
Une seule chose.
Elle voudrait que vous et Mlle Baker
veniez déjeuner demain, chez elle.
Vous viendrez, vieux frère ?
Daisy a besoin de vous.
Nous avons besoin de vous.
Vous viendrez, vieux frère ?
J'ai lu quelque part
que le soleil se réchauffe chaque année.
Non, attendez.
C'est le contraire.
Le soleil se refroidit
chaque année.
Comme j'aimerais naviguer
sur cette baie aujourd'hui.
J'habite en face.
Là-bas.
En effet.
Le soir, je vois
la lumière
sur votre jetée, qui clignote.
Quelle lumière ?
Je voulais
me rapprocher.
- Daisy et moi...
- Quelle chaleur !
Tout est
si confus.
Que ferons-nous cet après-midi,
demain
ou ces 30 prochaines années ?
Ne sois pas si sombre.
Qui veut aller en ville ?
En ville ?
Les femmes ont
de ces lubies.
Vous êtes si élégant.
Toujours si élégant.
Comme l'homme sur l'affiche,
à Times Square.
L'homme
aux belles chemises élégantes.
Elle avait dit
à Gatsby qu'elle l'aimait.
Tom
l'avait vu.
Allons en ville !
Ça me va parfaitement.
Quelle bonne idée !
Henri !
La voiture !
Peut-on fumer
- une cigarette ?
- Nous n'avons pas arrêté.
Amusons-nous !
Il fait trop chaud pour se quereller.
C'est ton idée de génie.
Allons tous en ville.
J'ai changé d'avis, malotru.
Prenons
une belle chambre au Plaza,
un seau de glaçons,
du whisky
et on s'amusera.
Allez.
C'est ton idée.
Très bien, comme tu voudras.
Viens, Jordan.
Vous nous accompagnez, M. Gatsby ?
Enveloppez deux bouteilles de whisky.
Viens, Nick !
M. Gatsby !
Soyez gentil, prenez
mon coupé. Je conduirai
- la roulotte de cirque.
- Il n'y a pas
beaucoup d'essence.
Bien assez.
Sinon, je trouverai bien
un drugstore. Il paraît
qu'on trouve de tout
dans un drugstore.
Emmène Nick et Jordan.
C'est vrai.
Rendez-vous au Plaza.
Je serai l'homme
aux deux cigarettes.
Vous devez me trouver idiot.
Mon sixième sens me guide, parfois.
J'ai enquêté sur ce type.
Il vient bien
- d'Oxford ?
- Au Nouveau-Mexique, oui.
Il porte un costume rose !
Tom, on est presque à sec.
Alors, ça vient ?
Le plein !
Dois-je m'y coller ?
Je viens pas pour le paysage.
- Je me sens pas bien.
- Pourquoi ?
- Qu'y a-t-il ?
- Je sais pas.
Je suis crevé.
Et j'ai plus
un rond.
Avec ma femme, on part à l'Ouest.
Votre femme ?
Tom ressentait
les brûlures de la panique.
Sa maîtresse
et sa femme
qui une heure plus tôt
étaient siennes,
lui glissaient entre les doigts.
J'en apprends de belles,
depuis deux jours.
Elle ira à l'Ouest,
point.
Combien je vous dois ?
- 1,20 dollar.
- Je fais livrer la voiture
demain !
Ça ira.
Ouvrez une autre fenêtre.
Il n'y en a plus.
Alors faites monter
une hache.
Oublie un peu la chaleur.
Tes jérémiades n'arrangent rien.
Fichez-lui la paix, vieux frère.
Elle vous plaît,
cette expression.
Laquelle ?
"Vieux frère."
- D'où la sortez-vous ?
- Dis donc,
garde tes piques
ou je m'en vais immédiatement.
M. Gatsby.
Donc, vous êtes un ancien d'Oxford ?
Pas exactement.
Mais si, vous êtes allé
à Oxford.
- Oui, j'y suis allé.
- Bien sûr.
Le costume rose sort d'Oxford.
Je l'ai dit, n'est-ce pas ?
J'ai entendu.
J'aimerais savoir quand.
Vous aimeriez le savoir.
Eh bien, M. Gatsby ?
En 1919, pendant 5 mois.
Donc, je ne suis pas exactement
un ancien d'Oxford.
Ils offraient cette opportunité
aux officiers
qui avaient fait la guerre.
Je lui aurais volontiers
tiré mon chapeau.
Je vais te servir un verre, Tom.
- Tu te sentiras moins bête.
- Une seconde.
J'aimerais poser à M. Gatsby
une dernière question.
Je vous en prie, allez-y.
Quelle sorte de discorde
cherchez-vous à semer chez moi ?
C'est toi qui sèmes la discorde.
Tiens-toi un peu.
Me tenir ?
Alors la dernière mode,
c'est de laisser
M. Personne,
de Nulle Part,
courtiser sa femme.
Si c'est ça,
ne comptez pas sur moi.
Aujourd'hui,
on dénigre
la famille et ses institutions...
et bientôt,
tout partira à vau-l'eau.
On mariera
Noirs et Blancs !
Votre femme ne vous aime pas.
Elle ne vous a
jamais aimé.
C'est moi qu'elle aime.
Vous déraillez.
Non, vieux frère.
Voyez-vous,
elle ne vous a jamais aimé.
Elle vous a épousé car j'étais pauvre,
lassée d'attendre.
C'était une terrible erreur
mais au fond d'elle-même,
au fond, elle n'a jamais aimé
que moi.
- Partons.
- Rentrons tous.
Assieds-toi, Daisy.
Assieds-toi.
Allons.
Que se passe-t-il ?
Je viens de vous le dire.
Et ce, depuis 5 ans.
Tu le fréquentes...
depuis 5 ans ?
Non, elle ne me fréquente pas.
C'était impossible.
Mais nous nous aimons
depuis tout ce temps.
C'est tout ?
Vous déraillez !
Il y a 5 ans,
je ne connaissais pas Daisy.
Mais je ne vois pas
comment vous l'auriez approchée,
à part en nous livrant
les commissions.
Tout le reste
n'est que mensonge.
Daisy m'aimait
quand elle m'a épousé,
et elle m'aime encore.
- Non, je regrette, M. Buchanan.
- Oh si !
Elle m'aime.
Et je l'aime aussi.
Je t'aime, Daisy.
Il m'arrive de faire
des escapades,
mais je reviens toujours.
Et je ne cesse de l'aimer.
Tu es révoltant.
Sais-tu pourquoi
nous avons quitté Chicago ?
Personne ne t'a raconté
cette escapade ?
C'est terminé, ma chérie.
Terminé.
Dis-lui la vérité.
Que tu ne l'as jamais aimé.
Et tout ceci sera effacé.
Comment pourrais-je
- l'aimer ?
- Dis-lui que
tu ne l'as jamais aimé,
et toutes ces souffrances
seront effacées.
Daisy, dis-le-lui.
Je ne l'ai jamais aimé.
Jamais ?
Même à Kapiolani ?
Même quand je t'ai portée
pour protéger tes chaussures ?
Jamais ?
Je t'en prie, arrête.
Voilà, Jay.
Tu demandes trop.
Je t'aime,
ça ne te suffit pas ?
Je ne peux empêcher
le passé.
Je l'ai aimé, mais je t'aimais aussi.
Tu m'aimais aussi ?
Tu m'aimais...
Mensonge !
Vous aviez disparu.
Nous avons partagé des choses
que vous ignorez,
- que nous n'oublierons jamais.
- Je dois
lui parler seul à seule.
Vous l'avez énervée,
vieux frère.
Je ne peux pas dire
que je n'ai jamais aimé Tom.
Évidemment !
- Ça t'intéresse, toi ?
- Évidemment !
Je m'occuperai mieux de toi.
Vous ne vous occuperez plus d'elle.
Elle vous quitte.
Foutaise !
Si, c'est vrai !
Elle ne me quittera pas.
Certainement pas
pour un petit escroc
comme vous.
M. Gatsby, qui êtes-vous au juste ?
Je me suis renseigné
sur vos manigances
avec Meyer Wolfshiem.
Je vous en prie, rentrons.
Lui et Wolfshiem
ont racheté un tas de drugstores
pour vendre
de l'alcool de contrebande.
Et alors, vieux frère ?
Gardez vos "vieux frère".
Et ces combines
ne sont rien
à côté de votre trafic d'obligations
avec Wolfshiem.
Votre ami Walter Chase
- y a goûté.
- J'y ai
réfléchi.
Comment un banquier réputé
comme Chase
se retrouve-t-il
à devoir des fortunes
à un youpin comme Wolfshiem ?
- Par cupidité.
- C'est ça !
La moitié de Wall Street s'enfile
votre bibine
dans votre parc d'attractions.
Il t'a pas embobiné, toi ?
Il a essayé.
Il n'a rien à voir...
Avec vos arnaques ?
Ne vois-tu pas qui est ce type ?
Avec son manoir,
ses fêtes et ses beaux costumes ?
Il n'est qu'une façade
pour que Wolfshiem, un gangster,
exploite un homme respectable
comme Chase.
La seule chose respectable chez vous,
c'est votre argent.
Votre argent, c'est tout.
Nous sommes donc égaux.
Nous sommes différents.
Moi.
Eux.
Elle.
Nous sommes différents de vous.
Nous sommes nés
différents.
Ça coule dans nos veines.
Et vous aurez beau faire, dire, voler
ou rêver, ça n'y changera rien.
Une fille comme Daisy...
La ferme !
Gatsby, à cet instant...
semblait vraiment avoir
tué un homme.
Je vous demande...
Je vous demande pardon.
Il semble que j'aie...
perdu mon sang-froid.
C'est ça, M. Gatsby.
Montrez-nous
- vos bonnes manières d'Oxford.
- Daisy, ma chérie.
Tout ceci sera
sans conséquence.
Daisy, parle-moi, ma chérie.
J'ai perdu mon sang-froid, c'est tout.
Il se mit à parler
avec animation.
Mais à chaque mot,
Daisy se repliait davantage
sur elle-même.
Tom ! Je n'en peux plus !
Partez devant, tous les deux.
Dans sa voiture.
Allez-y.
Il ne t'ennuiera plus.
Il sait
que ce flirt est terminé.
Quelqu'un en veut ?
Jordan ?
Nick ?
Quoi ?
Tu en veux ?
Je viens de me souvenir.
C'est mon anniversaire.
Bon anniversaire.
Trente ans.
La promesse d'une décennie de solitude.
Le terrible choc des trente ans
se dissipa
alors que Gatsby et Daisy
fendaient la fraîcheur du crépuscule
vers la mort.
Arrête de mentir !
Ça vient d'où, ça ?
J'ai été dupe,
mais pas Dieu !
Dieu voit tout !
Myrtle !
T'es où ?
Je suis là !
Chérie !
Ralentissez !
Un grave accident.
C'est bien, enfin du boulot pour Wilson.
Allons jeter un il.
Est-ce bien nécessaire ?
Un petit coup d'il.
Reculez ! Un peu d'air !
Si vous avez vu quelque chose
et voulez m'en parler,
vous m'en parlerez dehors.
Ne me touchez pas !
Tout va bien.
Tout va bien.
Vous la connaissiez ?
Pas vraiment, non.
Reculez, monsieur.
Que s'est-il passé ?
Elle s'est précipitée sur la route.
Le salaud ne s'est même pas arrêté.
J'ai tout vu.
C'était une voiture jaune.
Une grosse voiture jaune.
Sortie de nulle part.
Une grosse
Duesy jaune.
Un modèle unique.
Pas la peine de me dire
quelle voiture c'était.
Je sais quelle voiture c'était.
- Je sais quelle voiture c'était.
- Ressaisissez-vous !
Sortez !
Il a besoin d'être au calme.
Écoutez. Je viens d'arriver.
Non ! Wilson !
Je vous apportais le coupé.
Asseyez-vous.
Donnez-lui à boire.
La jaune n'est pas à moi.
Vous entendez ?
Je ne l'ai pas vue
de l'après-midi.
De quelle couleur
est la vôtre ?
Bleue.
Un coupé.
Nous venons d'arriver.
À l'instant.
Bleue.
Tenez.
Laissez-nous seuls.
Elle est à qui la jaune ?
À un certain Gatsby.
Jay Gatsby.
C'est une crapule, George.
C'est lui, les fêtes qui font la une.
C'est peut-être lui
qui fricotait avec Myrtle.
C'est pour ça
qu'il l'a tuée.
Oui. Peut-être.
Un type pareil...
Mais pourquoi il l'a tuée ?
Gatsby.
Faut lui régler son compte
à ce type-là.
Il va payer.
Ça, il va payer.
Le lâche !
Il ne s'est même pas arrêté.
Et là, tu le défends ?
Je vais commander un taxi.
Entre manger un morceau,
en attendant.
Non merci, j'attends dehors.
Qu'est-ce qui
te prend ?
Entrez, Nick.
Non, merci.
Il est 21 h 30...
J'en ai ma claque.
De vous tous.
Bonsoir, vieux frère.
Qu'est-ce que vous faites ?
Je suis assis là.
Oui, je vois ça.
Des soucis sur la route ?
La femme
- que vous avez percutée est morte.
- Je m'en doutais.
J'ai dit à Daisy...
Daisy ? Vous vous entendez ?
Comment avez-vous
pu faire ça ?
Moins fort.
Espèce
- de lâche !
- Moins fort.
Je vous en prie.
À quoi bon s'arrêter ?
À quoi bon ?
Et cette femme ?
À quoi bon ?
Elle est morte sur le coup.
Éventrée, je l'ai vue !
Je comprends.
C'était ma faute !
Ma faute. Cette femme
s'est jetée sur nous
comme pour nous parler.
Tout est allé si vite.
Elle a essayé... J'ai essayé...
Elle ?
C'était Daisy.
En partant de New York,
elle était très tendue.
Elle pensait que
conduire la calmerait.
Mais cette femme s'est jetée
sur nous.
Tout est allé si vite.
Daisy n'y est
pour rien.
Personne ne doit savoir
que Daisy était au volant.
Promettez-le-moi.
Rentrez vous reposer.
Je vais attendre ici.
Toute la nuit,
s'il le faut.
- Non, ne faites pas ça.
- S'il l'importune
au sujet de notre friction,
s'il l'importune,
s'il la brutalise un tant soit peu...
Tom ne la touchera pas.
Il ne pense pas à elle.
Je ne lui fais pas confiance.
Attendez ici.
Je vais voir s'il y a du grabuge.
Vous voulez bien ?
Merci, vieux frère.
Elle était en tort...
Mon trésor,
tu n'as rien à craindre.
Je vais m'occuper de tout ça.
Nous partirons à la campagne.
Va dormir.
Ne t'inquiète pas.
Ça va aller.
Vieux frère.
Tout va bien ?
Tout va très bien.
Vers 4 h, elle est venue à la fenêtre.
Elle est restée là un moment...
et elle a éteint la lumière, alors...
Un petit coup de main ?
J'aurais dû lui dire
ce que je venais de voir, mais...
je n'ai dit que...
Avec tout ce qui s'est passé,
vous devriez partir.
Cette nuit.
Ils trouveront la voiture.
Partir ? Pas maintenant.
Pas cette nuit.
Une femme est morte.
Daisy appellera demain matin.
Nous préparerons notre départ.
Elle a besoin de réfléchir.
Herzog !
Nous parlons. Merci.
Elle a besoin de temps pour réfléchir.
Elle a besoin de temps.
Elle appellera demain matin.
Attendez avec moi.
Le soleil se lève.
Cette nuit-là,
il me raconta enfin la vérité.
Toute la vérité.
J'ai cru un moment
que je possédais beaucoup de choses,
mais en réalité, je suis vide.
Donc, je m'invente un personnage.
Mais je voulais tout vous raconter
depuis très longtemps.
J'ai grandi dans une grande pauvreté,
vieux frère.
- Mes parents...
- Il révéla ses origines modestes,
son voyage initiatique avec Dan Cody,
la guerre, Oxford,
et comment il s'était associé
avec Wolfshiem.
C'est aussi cette nuit-là
que je pris conscience
de sa prodigieuse aptitude à espérer.
J'étais stupéfait de l'aimer.
Et elle m'aimait aussi.
Une aptitude que je n'ai trouvée
chez personne d'autre.
J'ignorais combien une jeune fille bien
pouvait être extraordinaire.
Et je doute de jamais la retrouver.
J'imaginais ma vie avec Daisy.
On se marierait,
les fins de mois seraient justes.
Que disait la lettre ?
La raison pour laquelle, après la guerre,
je n'avais pas pu revenir.
Je lui demandais d'attendre
que je sois devenu quelqu'un, mais...
Je me sentais uni à elle.
C'est tout.
C'était pour elle.
La maison, les fêtes.
Tout.
Dieu voit tout.
M. Gatsby, veuillez m'excuser.
Chicago au bout du fil.
Pas maintenant.
Libérez la ligne
pour un appel personnel.
Un appel personnel ?
Bien sûr.
Je vais vider la piscine
avant que les feuilles tombent.
Pas aujourd'hui.
Pas aujourd'hui. Il fait si beau.
Vous savez, vieux frère, je n'ai pas encore
profité de la piscine. Allons nous baigner.
Descendez le téléphone.
Je dois partir.
J'ai du travail.
Je comprends.
Je vous raccompagne.
Je vous appelle.
N'hésitez pas, vieux frère.
Daisy appellera, elle aussi.
Sans doute.
Au revoir.
C'est une bande de salauds.
Vous valez mieux
que toute cette racaille.
Je suis content
de lui avoir dit ça.
Ce fut mon seul
compliment.
Ce matin-là...
à Wall Street, l'or coulait à flots
dans le fracas habituel.
Mais j'étais incapable
d'abattre la moindre tâche.
J'attendais des nouvelles de Gatsby.
Et lui attendait
for Daisy.
M. Gatsby sera très heureux
de votre appel.
Daisy.
Tout va bien ?
Le reste de la journée
ne fut qu'un défilé ininterrompu
de policiers, photographes, et journalistes
de la presse à sensation.
Les gros titres furent ignobles.
UN BOOTLEGGER
TUE SA MAÎTRESSE
Gatsby fut accusé de tout.
La liaison avec Myrtle,
le délit de fuite, tout.
GATSBY COUPABLE DE MEURTRE
Qu'aurais-je pu dire d'autre
que la seule et indicible réalité,
rien de tout cela n'était vrai.
Mon trésor, papa va prendre soin
de ses deux chéries.
On va où ?
- En vacances.
- Allons-y.
Toi,
moi et papa.
Mme Buchanan, je vous prie.
Ici M. Carraway, son cousin.
Madame
n'est pas disponible.
Dites-lui que les obsèques
ont lieu demain.
Je regrette, monsieur, ils sont partis.
Partis ?
Savez-vous jusqu'à quand ?
Ils ne sont déjà plus là.
Je vous en prie.
Elle tiendrait à être présente.
Passez-lui le message.
- Passez-la-moi.
- Vous voulez la contacter ?
Je n'ai pas d'autre information.
Je vous en prie !
Des irresponsables,
Tom et Daisy.
Ils brisaient les choses et les gens,
puis se réfugiaient dans leur argent
et leur irresponsabilité abyssale.
Sortez d'ici !
Allez !
Foutez le camp d'ici !
J'ai téléphoné,
écrit,
supplié.
Personne, parmi la horde rutilante
qui avait profité de son hospitalité,
n'assista aux obsèques.
Et de Daisy...
pas même une fleur.
Il n'avait que moi.
Que moi pour le pleurer.
Gatsby mort...
New York devenait
un lieu hanté pour moi.
Cette ville...
mirage miroitant autrefois à mes yeux...
me répugnait à présent.
Lors
de ma dernière soirée
à New York,
je rendis une dernière visite
à cette demeure colossale et absurde.
Les associés de Wolfshiem
avaient tout nettoyé.
Il organisait ces fêtes
dans l'espoir de la voir arriver.
Quel parc d'attractions.
Vous habitez ici tout seul ?
Elle illumine les lieux,
n'est-ce pas, vieux frère ?
Musique ! Dansons
toute la nuit.
Vous viendrez, vieux frère ?
Nous avons besoin de vous.
Si seulement
nous pouvions rester ainsi.
Ayez confiance.
Je me remémorais comment, en arrivant chez
Gatsby nous estimions son degré de corruption
alors qu'il se tenait là,
dissimulant
un rêve incorruptible.
C'est parfait.
À la mesure de ton irrésistible imagination.
La lune s'éleva.
Comme je méditais
sur ce vieux monde inconnu...
je songeais à l'émerveillement de Gatsby
lorsqu'il découvrit la lumière verte
sur la jetée de Daisy.
Il en avait fait, du chemin.
Son rêve devait lui sembler si proche
qu'il ne pouvait manquer de l'empoigner.
Mais il ignorait
que ce rêve était déjà derrière lui.
Gatsby croyait en la lumière verte,
en l'avenir orgastique,
qui d'année en année,
recule devant nous.
Il nous a échappé cette fois ?
Qu'importe.
Demain, nous courrons plus vite,
nous tendrons les bras plus loin,
et un beau matin...
C'est ainsi que nous avançons,
barques à contre-courant,
sans cesse ramenés
vers
le passé.
LE MAGNIFIQUE
GATSBY LE MAGNIFIQUE
GATSBY LE MAGNIFIQUE
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