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Un film d'Anna Bron et d'Andrew Whyte
Comment pense Nikita Khrouchtchev?
Dans la peau de Khrouchtchev
Au cours de la crise des missiles, comment réagit ce chef soviétique à sa situation?
De quoi s'inspire-t-il?
À quoi se réfère-t-il?
Que cherche-t-il à trouver en puisant au plus profond de lui-même?
Pour se mettre dans la peau de Khrouchtchev
Au moment crucial, où la guerre semblait imminente.
Il faut retourner à la Deuxième Guerre mondiale.
S'imaginer sur le front oriental, au centre du théâtre européen,
où Khrouchtchev était un soldat soviétique. De grade intermédiaire. Rien de plus ou de moins.
L'Union soviétique a perdu 20 millions des siens.
Vingt millions de morts à l'issue de la Deuxième Guerre mondiale.
Tués par un fusil, une bombe.
Certains sont morts de froid, d'autres de faim.
Certains disparurent tout simplement.
Une horrible, une affreuse, tragédie.
Jamais vue auparavant, ni depuis.
Et Nikita Khrouchtchev se trouvait au cœur de cette tragédie.
Il était un homme terre à terre.
Un homme ordinaire au sens pur du mot.
Il était très volubile,
créatif et astucieux,
mais sans éducation scolaire.
Son père et son grand-père travaillaient dans les mines de charbon et d'étain.
Le travail le plus sale, le plus terrible que l'on peut s'imaginer.
Khrouchtchev travailla aussi la mine dans sa jeunesse.
« Cambridge, Oxford, Harvard pour moi, ce sont les mines. »
« C'est là que j'ai appris à être un homme. » Disait-il.
Khrouchtchev ne s'attendait pas à affronter Kennedy au cours de la crise des missiles.
Il pensait qu'il allait se rendre à Cuba, à la fin de novembre 1962,
pour donner un discours où il annoncerait au monde entier
qu'il avait placé ses missiles à Cuba. Donc, problème réglé.
Ce n'est que pour faire contrepoids à ceux placés par les États-Unis en Turquie et ailleurs
et qui nous menacent tous depuis longtemps.
« Maintenant que nous sommes égaux
et que nous pouvons chacun poser des missiles à la porte de l'autre,
arrêtons de nous disputer et passons aux négociations. »
Il s'imaginait que les choses allaient se passer ainsi.
Quel choc ce fut pour lui!
Le discours de Kennedy l'a laissé complètement stupéfait.
« Nous n'allons pas tolérer ça! »
« Les missiles doivent partir! »
Mais, comment les enlever?
L'objectif était de les mettre là pour commencer.
C'est ce que Cuba voulait.
Son armée y était pour construire les missiles le plus rapidement possible.
Mais maintenant, vers la fin de cette semaine culminante de la crise des missiles,
ses comptes rendus de renseignements indiquent
que les Américains s'apprêtent à envahir et à attaquer.
Il envoie une lettre à Kennedy.
On dirait presque un poème,
mais un poème écrit par un homme sans éducation et terre à terre.
Il écrit : « Nous allons être comme deux taupes aveugles. »
« Qui vont se cogner la tête en creusant chacune leur trou. N'est-ce pas? »
Dans un autre contexte, il fait allusion aux deux chèvres sur un pont.
Aucune chèvre voulant laisser l'autre passer.
Elles se battent à coups de cornes et tombent en bas du pont.
Et comme les chèvres ne savent pas nager, elles se noient.
« Allons-nous devenir ces chèvres? »
« Est-ce vraiment ce que nous allons devenir? »
Khrouchtchev tire ces images terre à terre de son vécu en tant que paysan russe.
Et c'est justement ce qu'il est.
Un paysan russe à la tête de la deuxième force nucléaire au monde.
Par le plus grand des hasards.
Il a vu, comme il le dit dans sa lettre :
J'ai vu la guerre traverser des villes et des villages et ne laisser qu'un lot de destruction.
Je cite la lettre presque mot pour mot.
Il ne pouvait deviner à quel point il allait toucher une corde sensible chez Kennedy.
Mais c'est ce qui est arrivé parce que Kennedy avait lui aussi vécu la guerre à l'autre bout du monde.
Mais aux yeux de Khrouchtchev,
ce vingt millions de morts, ce vingt millions de Russes disparus
à la fin de la Deuxième Guerre mondiale...
se compare bien peu, dit-il
à la destruction ultime de la race humaine aux suites d'une guerre nucléaire.
« Et monsieur le Président Kennedy, nous ne pouvons pas laisser les choses se passer ainsi. »
L'envoi d'une telle lettre à ce moment précis,
a grandement réduit le risque d'un tel dénouement.
Quand Kennedy reçut la lettre,
tout semble indiquer qu'il lut la lettre en pensa :
« Mon Dieu! Il pense comme moi. »
« Je crois que nous allons nous en tirer. »
Traduction française : KSLinguistics.ca