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Salut Dallas, comment vas-tu ?
Bien, et toi ?
Ca va, merci d'être ici avec nous.
Merci de m'avoir invité.
Comment ça se passe
depuis la sortie du disque ?
Toujours pareil, tu sais.
Je suis content qu'il soit sorti.
Je l'ai enregistré il y a longtemps.
On va se focaliser sur l'album
et passer en revue toutes les chansons.
Le premier morceau porte le titre de l'album.
Il pose les bases de l'album en quelque sorte.
C'est vrai. C'est ce que tu penses ?
Oui, je trouve.
Je ne le voyais pas comme ça,
mais c'est une bonne chose.
Je le prends comme un compliment.
Le nom de l'album vient de cette chanson.
Oui, c'est la chanson qui a inspiré le titre du disque.
Elle semblait être la bonne
pour ouvrir l'album une fois qu'on avait tout terminé.
Qu'est-ce que ça signifie pour toi,
«why are we so worried about the hurry
and less about the harm» ?
Pour moi c'est une sorte d'observation générale
de ces dernières années.
Ou même plus que ça,
quand tu vois la vitesse à laquelle la société avance.
J'ai l'impression que notre génération
a adopté cette doctrine du «you only live once»
ce truc de YOLO.
Dès que quelqu'un pense à quelque chose
il se sent obligé de le mettre sur Internet
aux yeux de tous
et tout le monde veut tout, tout de suite,
qu'il s'agisse d'informations avérées ou non.
Voilà ce à quoi ça fait référence.
Selon moi ce genre d'attitude
est en train de submerger ce que nous sommes vraiment
et ça m'a inspiré cette chanson.
La deuxième s'appelle
"Harder Than Stone"
et met en valeur la force du son de City And Colour en tant que groupe.
Oui, je dirais ça.
Il y a un socle solide dans cette chanson.
Concernant les paroles,
je décris la façon dont mon esprit était divisé
sur le plan créatif lorsque j'étais dans Alexisonfire.
Elle contient des extraits de "Born And Raised".
Exact.
J'avais commencé à écrire cette chanson
il y a de nombreuses années.
Mais ça a pris beaucoup de temps
et je ne trouvais pas la bonne direction
pour la chanson,
donc je l'ai laissée de côté.
Je l'ai finalement terminée en utilisant les męmes paroles.
La suivante est "Of Space And Time".
Elle est plus organique et
rappelle un peu tes débuts.
C'est vrai.
En fait je l'avais écrite pour "Little Hell"
mais en essayant de l'enregistrer,
on y a passé une journée entière
et ça ne le faisait pas.
Parfois tu as une idée de comment
tu vois la chose terminée et une fois enregistrée
et le résultat est totalement différent.
Je l'ai donc abandonnée.
C'est pour moi le signe
que la chanson n'est pas prête.
C'était le cas pour celle-ci,
c'est sans doute la raison pour laquelle
plusieurs personnes m'ont dit
qu'elle leur rappelait mes plus vieux morceaux.
Cette chanson parle implicitement de ton départ d'Alexisonfire
Pourtant, tu n'avais pas encore quitté le groupe,
mais dans ta tête tu n'y étais plus.
Oui, je pense que c'est une autre raison.
Je n'arrivais pas à la terminer
parce que j'étais en plein dans ce processus,
je n'avais pas encore passé le pas.
De quoi parle la suivante, "The Lonely Life" ?
"The Lonely Life" est centrée autour de la supposition
et du « et si ».
Et si tu avais pris une décision
qui t'aurait mené au mauvais endroit dans ta vie.
Qu'est-ce que tu serais ?
Oů est-ce que tu serais ?
C'est comme jeter un œil
dans un futur hypothétique,
et que tu regardes avec méfiance.
La cinquième est "Paradise".
Il y a un petit nombre de chansons sur ce disque
que l'on pourrait mettre dans le même sac :
"Harder Than Stone", "Of Space And Time",
"Paradise"
Elles ont ce sentiment de l'attente,
de la recherche d'une sorte de bonheur,
quelque chose de mieux
que ce que je vivais à un moment de ma vie.
Peux-tu nous parler de Wendell Berry
et "The Peace Of Wild Things" ?
C'est un poème que j'ai lu
au moment de l'écriture de ces chansons.
Il m'a fait découvrir le reste de sa bibliographie
dont je suis ensuite devenu fan,
mais il m'a surtout redonné envie de chanter,
il m'a remotivé pour créer ces chansons.
Quand les problèmes envahissent son esprit,
il va dans la nature pour se rappeler qui il est,
car il est agriculteur à l'origine.
De la même manière,
quand je ne suis pas bien
ou que le désespoir m'envahit,
je me tourne vers la musique pour aller mieux
et ce poème m'a redonné cette envie-là.
Il n'est pas très connu en France.
Je crois qu'il n'est pas connu du tout.
Son œuvre est superbe.
Je ne me retrouve pas beaucoup dans la poésie.
Les gens croient d'après mes chansons
que je suis un grand amateur de poésie
mais je n'en lis quasiment pas.
Mais quelque chose dans ses mots
me touche et me parle.
La prochaine, "Commentators",
elle a un message fort.
Oui, "Commentators" est un peu ma chanson clash.
Si j'étais un rappeur
et que je devais m'en prendre à quelqu'un,
ce serait ma chanson.
Mais j'ai une voix faite pour le chant
donc je ne peux pas le faire,
je ne sais pas rapper.
Qui veux-tu clasher alors ?
Tous ces gens ignares
et sans visage qui commentent tout
et n'importe quoi de nos jours.
On en revient à "The Hurry And The Harm".
Je suis juste dégoûté par le fait que...
la contribution à la société de beaucoup de gens soit :
"T'es un pédé"
ou une quelconque remarque raciste sur YouTube
parce qu'ils ne sont pas d'accord avec quelqu'un d'autre.
Ou le fait que l'on puisse tweeter
tout ce que l'on veut à quelqu'un,
alors qu'on ne le ferait jamais dans la vraie vie.
L'autre jour, ma femme m'a lu un tweet
que quelqu'un avait écrit :
"Dallas Green et Leah Miller forment un couple affreux."
Pourquoi dire ça ?
Même si on l'est,
pourquoi as-tu ressenti le besoin de mettre ça sur Internet
pour que les autres le lisent ?
Quel est le but ?
Que fais-tu pour les autres ? Rien.
Voilà de quoi parle cette chanson.
N'est-ce pas lié à un manque de confiance en soi ?
Je pense que oui.
C'est ce que ça semble être, n'est-ce pas ?
Tu ne te sens pas bien,
tu n'as pas confiance en toi,
alors pourquoi pas briser quelqu'un pour te sentir mieux ?
Beaucoup de gens ont l'air d'être obsédés par ça aujourd'hui.
Et tu penses que c'est venu avec Internet ?
Non mais ça leur a donné une plateforme pour le faire.
Évidemment il y a toujours eu des gens mauvais
mais il semble que la technologie leur donne aujourd'hui
un espace pour s'exprimer.
C'est une histoire de mauvaises manières.
"Thirst" est le premier single de l'album
et j'ai lu que c'est une chanson que tu avais au départ
écrite pour quelqu'un d'autre.
Oui, c'est la première fois que j'essayais ça.
On ne me l'avait jamais demandé
et je n'avais jamais pensé pouvoir écrire une chanson,
J'ai essayé et ça n'a pas marché
et qu'ils l'apprécient.
J'ai essayé
ça n'a pas marché pour la personne en question,
mais plus je l'écoutais,
plus elle me plaisait.
Elle m'a aussi prouvé que
je n'ai nécessairement besoin
d'être vraiment lié aux paroles.
J'ai très longtemps cru
que je devais écrire des choses personnelles
sur ma vie pour pouvoir avoir cette connexion avec la chanson,
alors que je n'ai pas à le faire.
Je peux simplement écrire une chanson
ou une histoire qui fasse un bon morceau
Pour qui l'avais-tu écrite ?
Elle était censée être pour Kimbra.
Tu vois qui c'est ?
Non.
Tu connais cette chanson
"Somebody That I Used To Know" ?
C'est la fille qui chante.
D'accord
Mais j'imagine qu'elle n'était pas faite pour elle
ou qu'on ne lui a pas montrée,
enfin ce n'est pas grave.
Est-ce quelque chose
que tu aimerais refaire dans le futur ?
Non, pas vraiment.
Si quelqu'un me le demandait,
je ferais un autre essai
mais ce n'est pas quelque chose qui m'attire.
Peux-tu nous parler de "Two Coins" ?
"Two Coins" est ma chanson préférée de l'album.
Tu te souviens de ce que je disais tout à l'heure,
parfois tu as une idée de ce que va donner la chanson
et quand tu l'enregistres elle n'a rien à voir ?
"Two Coins" sonne exactement
comme je l'avais imaginée.
Lorsque je l'ai écrite,
j'avais en tête quelque chose de grandiose
et c'est exactement ce que ça a donné.
Dans la chanson, tu dis :
« I've always been dark with light somewhere in the distance. »
Je pense que ça résume bien
ce dont parlent mes chansons.
Beaucoup de gens me qualifieraient d'auteur triste
mais je trouve que si tu examines mes paroles,
tout en abordant des sujets graves,
il y a toujours de l'espoir et de la lumière à la fin du morceau.
Je pense que tes fans seraient d'accord avec ça.
Je trouve que cette phrase me représente bien
en tant qu'auteur et en tant que personne.
Que peux-tu nous dire sur "Take Care" ?
"Take Care", je l'ai écrite pour moi.
Quand je la chante ou lorsque je l'ai écrite,
on pourrait croire que je m'adresse
à quelqu'un d'autre.
J'étais dans une période sombre de ma vie.
Je ne faisais pas forcément du bien
autour de moi ou à moi-même.
C'était une sorte de rappel pour moi-même d'être meilleur.
La suivante, "Ladies And Gentlemen",
est aussi très sombre.
Oh oui, "Ladies And Gentlemen"
est sans doute la plus sombre.
Il y a une chanson de Howlin' Wolf
qui s'appelle "Evil".
Elle parle d'un homme qui quitte sa ville
et sa femme le trompe avec un de ses amis
et il dit que c'est « le mal qui rôde ».
Ça m'a donné l'idée d'écrire un morceau
avec la perspective de ces « mauvaises » choses
que, parfois, le monde embrasse.
C'est de ça que traite "Ladies And Gentlemen".
Assez étrange je sais,
mais ça m'est venu comme ça
et j'ai pensé que c'était une bonne idée.
Au milieu de la chanson, tu souhaites
« bonne chance » aux gens.
Oui, parfois c'est comme ça
que tu le ressens.
Lorsque tu regardes la télé
et que tu vois les manifestations en Turquie
ou les drames en Syrie en ce moment...
Toutes ces inondations dans le monde aussi,
si tu as regardé les informations,
l'Europe est quasiment sous l'eau.
Ces choses-là,
sur lesquelles se concentrent les médias,
ce sont toujours de mauvaises choses.
Parfois tu as l'impression
de devoir juste dire « bonne chance »
à tout le monde car on ne sait pas ce qui peut arriver.
Je me sens mieux quand j'écris sur ces choses-là
plutôt que de parler...
de la super crêpe au Nutella que je viens de manger.
Tu penses qu'on devrait davantage
se concentrer sur ce qui va bien ?
Eh bien, ce serait une bonne chose
si nous faisions tous ça,
mais les humains ne fonctionnent pas comme ça.
Nous avons l'habitude de nous dévaloriser nous-mêmes.
"The Golden State"
paraît exprimer à quel point
tu hais la Californie,
mais semble être davantage
le reflet de ton aversion pour l'image
que la Californie renvoie
et surtout de ton amour pour le Canada.
C'est censé être ironique, du second degré.
Je dis simplement :
« ce n'est pas pour moi. »
En fait si quelqu'un qui vit en Californie écoute cette chanson
et décide qu'il me dé***
ou dé*** ma musique,
il n'aurait pas dû m'écouter depuis le départ.
Ça vient de tous ces gens qui viennent me voir
et me disent « Alors tu vis à Los Angeles maintenant ? »
comme si, parce que je suis musicien
et que j'ai eu du succès,
je devais obligatoirement déménager en Californie.
Je ne le veux pas.
C'est de là que vient ce titre.
La ville en elle-même, tu l'apprécies ?
Non, pas du tout.
Je t'ai aussi entendu dire que tu étais un peu jaloux
qu'ils aient toujours beau temps.
Évidemment je suis le Canadien
qui a dû endurer 33 ans d'hivers rudes
et je suis juste blasé et jaloux
de tous les gens qui vivent en Californie
et qui n'ont pas à s'occuper de la neige.
Tu aimerais aller à la plage ?
Je ne veux pas aller à la plage.
Mais c'est mon droit en tant que Canadien
de me plaindre de la météo.
En parlant de ça, c'est le premier disque
que tu as enregistré en dehors du Canada.
Oui. Je suis allé l'enregistrer à Nashville.
La dernière est "Death's Song", dernier titre évident.
Oui, je trouve.
Encore une fois quand je lis certains trucs,
les gens croient forcément que ça parle
de la mort mais ce n'est pas le cas.
Ça parle de la mort de « ça ».
L'idée qu'en tant que musicien ou auteur,
tu te demandes ce qu'il se passe
si les gens arrêtent de t'écouter.
Qu'arrivera-t-il lorsque
tu ne seras plus intéressé par ce que je fais ?
Que ferai-je alors ?
En fin de compte,
dans cette industrie,
il n'y a qu'une poignée de groupes
qui ont pu durer 50 ans.
Je pense parfois à ça,
y aura-t-il un autre stade dans ma vie,
que je ne connais pas encore ?
Ce morceau parle de ça.
As-tu les réponses à ces questions ?
Non.
Personne ne sait ce qui nous attend.
On ne fait qu'y penser.
Mais peut-être qu'il y a des choses
que tu aimerais faire ?
Non, je ne m'intéresse à rien d'autre en réalité.
Mais j'espère que quelque chose se présentera à moi
et que j'en ferai ma vie.
Pour le moment, c'est ça que je fais
mais je me pose bien sûr des questions
et j'en fais des chansons lorsqu'elles me viennent.
Super.
Est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?
Je ne crois pas, je pense qu'on a tout dit.
Merci de nous avoir parlé.
Merci de m'avoir reçu.