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Salut tout le monde ! Alors là, vous vous dites « Mais où est
passée Hermine ? ». Ne vous inquiétez pas, elle va très bien, vous allez la voir dans
quelques minutes, dans la vidéo. C’est moi qui suis responsable du montage de cette
vidéo, c’est moi qui suis responsable de sa longueur.
Je m’appelle Esther, et j’ai une chaîne YouTube où je parle de sujets divers, et
ce sont souvent des vidéos très longues. Hermine m’a contacté, avec une autre jeune
femme qui s’appelle Justine, pour faire une vidéo spécial aujourd’hui, qui est
la journée internationale des maladies rares. Et donc, c’est une collaboration à trois,
mon boulot, dans cette histoire, puisque moi, je ne suis pas atteinte de maladie, ç’a
été de mettre en perspective leur différentes expériences à toutes les deux, donc à Justine
et à Hermine, qui sont toutes les deux, donc des jeunes femmes. Hermine vous la connaissez,
vu que c’est sa chaîne, mais Justine qui est également une femme de 26 ans atteinte
de maladies rares. Ici, on va particulièrement se focaliser
sur toute la période d’errance médicale, c’est-à-dire la période pendant laquelle
on sait qu’on a quelque chose, mais on a pas encore trouvé quoi. C’est une période
qui est assez difficile, qui est, je pense, particulièrement intéressante à regarder
pour les personnes qui sont dans le corps médical. Et sur ma chaîne, il y aura une
partie un peu plus concernant le rapport aux autres, aux personnes qui ne sont pas malades,
notamment comment vivre le quotidien. Et sur la chaîne de Justine qui a l’habitude de
faire, notamment des discutions en direct avec ses abonnés. On va faire un direct,
donc aujourd’hui, sur tout ce qui est horaires, durée, etc, ce sera, et liens, ce sera en
barre information sous cette vidéo. Et donc, on va parler des maladies rares, parce qu’en
fait, il ne se passe rien le jour de la journée internationale des maladies rares. Et on trouvait
ça dommage, donc on va en parler, et on va en discuter. Donc si vous avez envie d’en
discuter, que vous soyez atteint d’une maladie ou non, vous pouvez venir ce soir, en direct.
Je dis ce soir, même si je ne sais pas l’heure exacte, mais je pense que ce sera plutôt
dans la fin de journée. Sur ce, je m’arrête là,
et je vous laisse avec la suite de lavidéo.
Bonjour tout le monde, je m’appelle Justine, j’ai 26 ans, et je suis céramiste, c’est-à-dire
que je passe mes journées à travailler avec mes mains. Donc, pour ma part, je suis touchée
par deux maladies rares. La première qui est la maladie de Kienbock, qui touche mon
poignet gauche. Et la seconde, je garderai le nom pour moi, parce qu’en faite, c’est
une maladie assez intime. En fait, c’est un petit peu compliqué, mais le poignet est
formé de plusieurs os qui sont des os du Carpe, et au milieu, il y a un petit os qui
s’appelle le semi lunaire, et en fait, j’ai une un nécrose de ce petit os, c’est-à
dire que les vaisseaux sanguins qui alimentent l’os, n’alimentent pas très bien l’os,
et donc l’os se détruit au fur et à mesure. Malheureusement; on m’a expliqué un petit
peu, dans la théorie, mais j’ai jamais très bien compris, franchement, je répète
comme ça les mots, mais je suis pas sûre de très bien comprendre ce qui se passe.
C’est une maladie rare, qui n’a pas de traitement, qui n’a pas de solution. Ce
qu’il faut savoir, c’est qu’il y a des maladies rares qui ont un traitement, qui
ont des médicaments, qui ont des solutions. Et il y a des maladies qui n’ont pas de
solutions, ce qui s’appelle les maladies orphelines, en fait, on peut rien faire, on
vit avec.
Je m’appelle Hermine, j’ai 18 ans, et je suis atteinte du syndrome d’Ehlers Danlos
hypermobile. Les symptomes principaux, c’est l’hyperlaxité. Alors être hyperlaxe, ça
veut dire que je suis très souple, voir trop souple. Je peux me tordre un peu dans tout
les sens. Quand je marche, c’est pas rare que je tombe, à cause de mes chevilles qui
ne tiennent pas assez. La fatigue, je suis très vite fatiguée, et quand je fais une
sortie, que je vais faire mes courses, après j’ai besoin de récupérer. Les douleurs,
j’ai des douleurs permanentes, dans tout le corps. Pedant les crises, ça peut être
plus localisé, mais j’ai des douleurs partout, tout le temps. Ma peau est très douce, mais
très fragile. Je mets du temps à cicatriser, je me blesse très facilement, et je me fais
aussi des bleus très facilement. C’est une maladie génétique, donc on l’a depuis
la naissance, mais pour beaucoup de personnes, les symptômes ne sont pas handicapants tout
de suite. Donc, on s’en rend compte très ***. En fait, tout les enfants sont hyperlaxes.
Vous savez les bébés, ils se tordent dans tout les sens, et ils n’ont pas mal. Mais
cette hyperlaxité part vers 3-4 ans, sauf que moi, elle n’est pas partie.
Donc, mon poignet, les symptômes sont apparues l’année de mes 20 ans. Je commençais ma
cinquième année dans mes études de céramiste, donc sur les six ans. Je suis arrivée un
matin en cours, et je me suis adossée sur une des table. J’ai senti une petite douleur,
un petit pincement dans mon poignet. Sur le coup, j’y ai pas prêté plus attention,
mais c’est vrai que la douleur a duré un petit peu toute la journée, puis les jours
suivants. Au bout de deux mois, j’ai mis un petit peu du temps, mais j’ai été voir
mon médecin traitant. Elle m’a tout de suite dit que ça devait être une tendinite,
parce que c’est vrai qu’avec mon travail, il y a souvent ce genre de problèmes. Donc
j’ai été faire une échographie. Le médecin a conclu que c’était une tendinite, et
il m’a posé un plâtre, que j’ai gardé, je crois deux semaines. Malheureusement, ce
plâtre m’a fait plus de mal que de bien, parce que, il avait été en plus mal posé.
Et une fois que je l’ai retiré, au bout des deux semaines, j’avais vraiment encore
plus mal. Bon, j’avais beaucoup de travail au lycée, donc j’ai pas encore prêté
attention, j’ai laissé un petit peu traîner les choses. Au final, je me suis enfin bougée,
puis j’ai été faire une radio. Sur cette radio, absolument rien n’apparaissait : il
n’y avait aucun problème sur mon poignet. Donc, j’ai décidé, enfin, on m’a conseillé,
d’aller faire une IRM. J’ai fait cette IRM, qui a été assez dure puisque c’était
la première fois que je faisais une IRM. Ce n’était pas une position confortable,
ça a duré très longtemps, je crois trois quarts d’heure. Il y avait un petit truc
dans mon poignet, en tout cas qui n’allait qui pas trop. Donc, je suis retourné chez
mon médecin traitant qui m’a prescrit une scintigraphie. Une scintigraphie, en fait,
tout simplement, on vous met un liquide dans le corps, et ce liquide se colle sur les parties
de votre corps où il y a des petites lésions. Et donc on vous passe une machine sur le corps.
On voit le corps en entier, avec des petits points partout, et là où il y a beaucoup
de petits points, c’est qu’il y a une lésion. Donc, la bonne nouvelle, c’est
que la lésion était juste au niveau mon poignet, il n’y en avait pas dans d’autres
endroits de mon corps. Donc là mon médecin m’a envoyé vers un petit peu une spécialiste,
une amie à elle qui s’y connaissait au niveau des poignets. J’ai pas trop accroché
avec cette personne, parce qu’elle m’a conseillé de faire beaucoup d’exercices
du poignet. Et, je ne sais pas c’est quelque chose qu’on ressent, je crois, mais je n’avais
pas envie de faire confiance à cette femme. Mon père m’a envoyé chez un spécialiste,
quelqu’un d’assez connu, on va dire, qui était spécialisé dans les maladies du travail,
les maladies professionnelles. À chaque fois, quand on arrive chez un médecin, donc, il
regarde les analyses, les IRM. Il a mis un nom sur la maladie. Je ne sais pas si il a
vraiment dit la maladie de Kienbock, mais je sais qu’il a dit que c’était la maladie
n°69. Dans le rejet des maladies du travail, les maladies professionnelles, c’est une
maladie que, les gens par exemple, qui font du marteau piqueur attrapent, ce qui n’est
absolument pas mon cas, je fais pas du marteau piqueur. Cette personne, quand je lui ai demandé
qu’est-ce que je devais faire m’a répondu qu’il fallait que j’arrête ma formation,
qu’il fallait que j’arrête mon travail, qu’il fallait que je pense à faire autre
chose dans la vie, ce qui n’était pas du tout possible pour moi. C’était hors de
question, ça faisait déjà plus de 10 ans que je faisait ce métier. Enfin, j’avais
commencé très jeune, je voulais faire ça, c’était la seule chose que je voulais faire
dans ma vie, donc je suis sortie de là, j’ai dis « Je ne veux pas écouter cette personne
De mes 6-7 ans jusqu’au milieu du collège, voir la fin du collège, j’ai été suivi
dans un hôpital pour mon hyperlaxité, et ma scoliose. Mais on m’avait juste dit que
juste certaines personnes étaient hyperlaxes, et que ça n’avait aucune incidence sur
leur vie, que c’était pas grave du tout. Et à part des entorses à répétition, l’hyperlaxité
n’avait aucune conséquence sur ma vie quotidienne. Au lycée, j’ai commencé à avoir des douleurs
au niveau du dos. J’étais allée plusieurs fois à l’infirmerie du lycée, on m’avait
donné des médicaments, on m’avait conseillé de faire des séances de rééducation, des
séances de kiné, et on m’avait dit que ça partirait très vite. Sauf que ça ne
partait pas. Six mois plus ***, les douleurs étaient toujours là. Je ratais de plus en
plus de cours, je passais des journées entière allongée à l’infirmerie, et aucune amélioration
en vue. J’étais en internat à ce moment là, et je rentrais chez moi à peu près
une fois par mois. Donc, les médecins disaient que c’était parce que j’étais toute
seule, que c’était parce la vie en internat, au départ, c’est difficile, il faut s’intégrer,
il faut se faire des amis : on ne connait personne. Peut-être que le lycée est un
peu stressant, aussi, que la seconde c’était difficile. Toutes ces choses, qu’on pensait
être à l’origine de mon mal de dos. En fait qu’en j’y réfléchis maintenant,
je n’avais pas seulement mal au dos. J’avais des douleurs dans tout le corps. Pendant 2
ans, j’ai enchainé les spécialistes, j’ai enchainé les consultations. Je voyais presque
un médecin par mois, c’était assez affolant. Le regard des autres était très dur à gérer.
Il avaient l’air de me dire juste en me regardant "Mais tu fais rien, tu fais absolument
rien, tu restes dans ta chambre à te plaindre toute la journée". Déjà que je n’avais
pas vraiment confiance en moi, ça n’a rien amélioré. Déjà que mon corps allait pas
bien, mon moral dégringolait complètement, et j’ai été déscolarisée à peu près
deux mois en seconde, et deux mois en première. Toute cette douleur, ça a aussi terni mes
relations. Certains amis me disaient que je m’écoutais trop, ou qu’il fallait peut-être
que je fasse un effort, que j’aille dehors, et ça irait mieux. Pour ma famille aussi,
ça a été très dur à gérer, le fait que j’ai ces douleurs, et qu’on ne savait
absolument pas d’où ça venait. J’étais loin, et tout ce que mes parents entendaient
comme nouvelle, c’était « Votre fille a passé la journée à l’infirmerie. » , « Votre
fille n’est pas allée en cours. », « Votre fille reste dans sa chambre. ». Et les médecins
te renvoient un peu comme une patate chaude. Ils ne savent pas quoi faire de toi, parce
qu’ils n’ont aucune idée de ce que tu as. Certains médecins pensent que tu fais
exprès. Certains médecins savent qu’ils ne savent pas, et te le disent. Mais ils sont
rares ceux-là. ils sont rare à assumer le fait qu’ils sont humains, eux aussi, et
qu’ils ont des limites, comme tout le monde, qu’ils n’ont pas la science infuse, et
c’est absolument normal. Quand tu te retrouves face à un médecin qui te regarde les yeux
dans les yeux et qu'il te dit que tout ça, c’est faux, que tu inventes, que c’est
dans ta tête, ça fait mal. Les premières fois, ça fait juste mal, tu te dis juste
« Mince, j’ai pas été écouté ». Quand tu sais que dès que tu rentres dans un cabinet
de médecin, la phrase que tu es presque sûre d’entendre c’est « c’est dans la tête
», tu doutes. Et à cause de ça, j’ai passé presque deux ans en déprime. J’avais
plus goût à grand chose, j’avais juste mal, et je m’enfermais là dedans. Je ne
pouvais expliquer ça à personne. Pendant deux dans, j’ai été dans ce qu’on appelle
une phase d’errance médicale. Quand tu te promènes parmi les médecins, et qu’on
ne sais pas ce que tu as. Pedant ces deux ans d’errance médicale, j’ai essayé
tout les traitement médicamenteux du monde. Mais je pense vraiment, TOUT les traitement
médicamenteux du monde. Je suis passée sous énormément, énormément, énormément d’anti-douleurs,
des dérivés morphiniques, des choses qui n’étaient pas dérivés de la morphines.
Ils refusaient de me donner de la morphine en me disant que c’était le dernier médicament,
et que si on me donnait de la morphine, il n’y aurait plus rien après pour me soulager.
Donc autant me garder ça pour plus ***, et j’étais complètement d’accord. Et
tout ces médicaments, tout ces anti-douleurs que je prenais me donnaient des vertiges,
des nausées. Je n’arrivais plus à dormir, ou alors je dormais trop. Je n’arrivais
plus à parler, à me concentrer. Et j’avais complètement perdu contact avec la réalité.
J’étais dans un nuage.
J’ai cherché un autre spécialiste, vraiment du poignet, qui était en plus à la clinique
juste à côté de chez moi. Je suis arrivée, c’était quelqu’un d’assez jeune, et
je me suis tout de suite sentie bien, en confiance. La personne a regardé vite fait les IRM,
mais vraiment vite fait, et a pris mon poignet. Depuis que j’avais été voir tout ces gens,
c’est la première personne qui a pris mon poignet, et qui a commencé à manipuler de
manière très délicate, et a appuyé très fort au milieu, enfin, très fort..., a appuyé
au milieu. Et j’ai senti une douleur, et je me suis dis « Ah, cette personne, ça
y est, elle sait où j’ai mal ! », parce que depuis le début, j’avais l’impression
que personne ne savait trop ce qui se passait. Et donc, il a manipulé en me demandant « Est-ce
que vous avez mal quand je fais ça ? », « Est-ce que vous avez mal quand je fais ça ? ». Ça
a duré, je ne sais pas, ving minutes. Il m’a manipulé le poignet. J’avais beaucoup
mal, hein, mais ce n’était pas désagréable, parce qu’enfin, j’ai eu l’impression
que quelqu’un comprenait ce que j’avais vraiment. Et donc, c’est là où on a parlé
de nécrose. J’ai pu lui demandé vraiment ce que c’était. La personne m’a dit de
faire attention. De, oui, de porter une attelle, mais pas trop souvent, parce que ça pouvait
être pire, et j’avais eu la preuve quand j’avais porté ce plâtre. C’est qu’en
fait, d’immobiliser mon poignet fait tout de suite des rhumatismes. C’est très mauvais,
qu’il y avait des positions qu’il ne fallait pas que je prenne, qu’il ne faut surtout
pas que je m’appuie sur mon poignet que ce soit dans les deux sens, que je porte des
choses, évidemment, trop lourdes. Enfin, tout ce genre de choses. Là, ça été un
peu dur pour moi, surtout que j’étais jeune. Comme à l’époque j’avais, ouais… 21
ans, 20-21 ans. Il ne m’a pas dit pour mon métier, il ne m’a rien dit. Il ne s’est
pas permis de juger mon avenir. Il m’a dit que c’était quelque chose que l’on pouvait
opérer, mais qu’aucun chirurgien n’opèrerait une jeune fille de 20 ans. Je ne comprenais
pas très bien pourquoi, parce que, qu’on ait 20 ans ou 60 ans, si on a un problème
au poignet, il faut le régler. Ça, j’ai compris après, pourquoi, en fait, il m’avait
dit ça. Et, en fait, en tout, j’ai du faire une dizaines d’IRM depuis qu’on a découvert
ce que j’avais. Je retournais le voir de temps en temps, mais bien qu’il ait mis
un nom sur ma maladie, il n’avait absolument aucune solution à me donner. Tout simplement
parce qu’il n’y en a pas, de solution.
Le diagnostic a été posé il y a un mois et demi. En fait, tout est parti d’un médecin,
que je suis allée voir, dans un service de gestion de la douleur. Donc, ils ont une approche
un peu différente des soins, un peu différente des techniques de soin. Elle m’a parlé
de… Beaucoup de traitement de la douleur, donc des compresses chaudes à mettre, de
l’électrostimulation, des séances de relaxation, ou alors, de l’autohypnose. Beaucoup d’approches
qui changeaient du fameux médicament qu’on te donne, qui t’assomme, et tu ne peux plus
rien faire. Et cette spécialiste de l’hôpital, qui était donc dans le département gestion
de la douleur, m’a ausculté, et elle a regardé ma peau, le dessus de ma main. Je
me souviens très bien, elle m’a pris la main, et elle l’a regardé, elle l’a touché,
elle l’a palpé un peu. Elle a marmonné un peu en me disant « Mmh, vous avez la peau
un peu douce, la peau un peu…Écoutez, j’ai peu être un doute sur quelque chose. ». Et
elle a rempli une fiche en m’adressant à un autre service, en me disant « Peut-être
que c’est un syndrome. J’ai une suspicion sur quelque chose, mais, si c’est diagnostiqué,
c’est pas grave, ça ne vous changera pas la vie. Il n’y aura rien d’important.
Vous allez faire telle chose et telle chose pour votre douleur. Et puis, si vous avez
ce syndrome, on vous mettra des attelle, et puis ce sera bon ». Et, ça de toute la consultation,
c’est peut-être la seule chose sur laquelle elle se trompait. Je suis allée à ce service,
trois mois après, quatre mois après, et on m’a diagnostiqué le syndrome D’Ehlers
Danlos. Au bout de deux ans de douleurs, j’avais un nom. Au bout de deux ans d’errance médical,
au bout de deux ans de regards suspicieux de la part de TOUT ceux qui m’entouraient,
j’avais un nom. Et c’est bon. Je savais que c’était pas faux, je savais qu’on
allait pouvoir trouver des solutions, et que ça allait s’améliorer. Je pense que j’ai
mis plus d’un an, à vraiment réaliser que j’avais une maladie. Une maladie rare.
On connait des histoires de personnes, dans notre entourage, qui ont telle maladie bizarre,
tel syndrome étrange. Mais nous, on se dit « Non, c’est pas possible, ça m’arrivera
jamais. Pourquoi ça m’arriverait à moi ? ». Et il a fallut du temps, beaucoup de
temps, pour que j’accepte d’être en crise, pour que j’accepte d’avoir des douleurs,
pour que j’accepte de mener une vie différente. Je voulais être pilote de chasse. Il a fallut
oublier. Toute ma vie, j’ai voulu être pilote de chasse. Et là, ça s’effondrait.
Parce que j’étais inapte. Avec ce syndrome, on ne peut pas rentrer dans l’armée. Sauf
que quand tu te rends compte que tu as une maladie rare, que ça casse tout tes plans
de carrière, et que tu es en début de terminale, à quelques mois de l’ouverture d’admissions
post-bac, tu paniques un peu. C’était tout mon avenir qui était transformé. Au départ,
j’ai trouvé ça horrible, vraiment. Je ne me voyais pas d’avenir, je ne savais
pas ce que allait venir, j’avais très peur que la maladie ne fasse qu’empirer. Maintenant,
je l’accepte.
J’ai compris avec le temps, que les médecins, en fait, ont fait des études, très importantes,
mais quand ce n’est pas un symptôme précis, avec un nom de maladie précise, il y a une
interprétation de la personne sur les symptômes, en fait. Et je me suis dis, si je demande
à pleins de personnes, peut-être qu’un jour, quelqu’un aura la bonne solution.
Et la dernière personne que j’ai vu, quand je lui ai dit que j’étais céramiste...
En plus je venais d’ouvrir ma boutique, donc vraiment ça y est, je me lançais vraiment.
Ça marchait, j’étais trop heureuse. Et je lui ai dit « Voilà, je suis céramiste,
et j’aimerais vraiment que vous me donniez un peu des solutions. », et elle m’a dit
« Hé, il faut arrêter votre métier, hein. ». et elle dit ça du genre, oui je fais
un loisir, donc je peux changer, je peux faire autre chose, mais je ne sais faire que ça,
moi. Je suis peut-être un peu bête, mais c’est la seule chose que j’ai appris à
faire dans ma vie, et c’est la seule chose que j’ai envie de faire. Et elle, qui est
médecin, devrait comprendre, parce que je pense que la plupart des médecins sont passionnés
par leur métier. Et si on leur dit de faire autre chose, ben, non, c’est ça qu’ils
ont envie de faire. Et elle plus, elle le disait d’une manière tellement délicate…Tellement
« Changez de métier ! ». J’ai dis « C’est fini, ça sert à rien que je vois ce qui
se passe, à l’intérieur de mon poignet, ça sert à rien que je demande des conseils
puisque personne ne sait. » Il y a un moment, il faut se rendre à l’évidence. Quand
on a une maladie rare, c’est que, presque personne n’a cette maladie, c’est qu’aucune
étude n’a été faite dessus, c’est qu’il n’y a aucune solution, et qu’il faut que,
personnellement, j’arrive à vivre avec. Pour ma deuxième maladie, ça a été dur
aussi, parce que comme c’est une maladie intime, j’ai été voir des spécialistes
qui sont des femmes, qui sont… Les deux que j’ai été voir ont été très froides,
n’ont pas du tout été compréhensives. Pas forcément désagréable : elles m’ont
expliqués les symptômes, mais aucun compréhension de ce qui est arrivé. Pas, enfin… Je ne
me suis pas retrouvée face à elle, à un bureau, ou… Non, il se passait des choses
en même temps, elles répondaient à mes questions, et puis voilà, c’est tout. Et
j’ai trouvé ça tellement froid, et c’est ça que je reproche un peu, en fait, avec
mes deux maladies aux médecins. Ils font bien leur travail, mais manquent d’humanité,
des fois. Et quand les gens me disent qu’il faut que je change de métier, ou ce genre
de chose, enfin… Ils ne se rendent pas compte qu’ils ont quand même quelqu’un derrière
eux, quelqu’un qui a 20 ans, qui construit son avenir. C’est pareil sur mon problème
de poignet : une seule personne m’a manipulé le poignet. Ce que j’ai trouvé extraordinaire,
quoi. Enfin, le problème, il était sous leur yeux. Ils avaient beau avoir une IRM,
oui… Où on voit l’intérieur, mais… Mais, il y a que… C’est, c’est, il était
là, le problème, en fait. C’était là qu’il fallait toucher. Et… Et même, je
sais pas, juste du fait de toucher mon poignet, quoi. Qu’on me… Enfin, c’était pas
qu’une image d’IRM, j’étais une personne en chair devant eux. Et je veux plus aller
voir de médecins pour mes problèmes, pour mes maladies qui, de toutes façons, n'ont
pas de solution. Les deux sont des maladies rares, mais des maladies orphelines, il n’y
a pas de traitement. Et je veux plus y aller. C’est vrai que des fois, ma famille ou des
gens proches me disent « Mais tu veux pas essayer de chercher un spécialiste ? Peut-être
qu’ils ont des solutions, peut-être qu’ils ont des traitements ». Mais, mais je ne veux
plus. Je ne veux plus avoir affaire à des discours qui sont froids, qui sont désagréables.
Je vais gérer moi-même les problèmes pour l’instant. Je ne sais pas, peut-être, que
dans quelques années, je ne pourrais plus gérer toute seule, mais... C'est à moi de
voir comment mon corps réagit à certaines choses, c’est à moi de trouver les solutions,
puisque personne n’a pu les trouver pour moi.
Donc, ce que je retiens de ces deux ans, c’est vraiment l’errance médicale. C’est pas
cool du tout à vivre, parce qu’on est seuls. Au delà des douleurs, au delà de tout les
symptômes que j’ai peut-être encore aujourd’hui, pendant un temps d’errance médicale, on
est vraiment seuls face au reste du monde. Et ce qui arrive parfois c’est que on nous
répète tellement que… Qu’il n’y a rien aux analyses qu’on commence à s’imaginer,
et peut-être à se dire « Ben, c’est moi, qui invente. Il n’y a rien aux analyses,
il n’y a rien sur les radios, il n’y a rien sur les prises de sang. Peut-être qu’en
fait, ben, j’invente tout ça, et c’est pas vrai. », et c’est pas du tout bon pour
la confiance en soi.
En fait, ce que j’aimerais bien, c’est être... avoir une aide psychologique, psychologique.
Je ne sais pas si ce serait un psy ou quoi que ce soit, mais j’aimerais bien, parce
que je… Je ne suis pas la première malade de toute l’Histoire de la planète, donc
il y a pleins de gens qui ont été malades, et j’aimerais bien qu’on me donne des
conseils psychologiquement. Dans la journée, pour aller mieux, ou pour les moments où
ça va pas très bien. Qu’est-ce que je pourrais faire, qu’est-ce que je pourrais
faire pour aller mieux, et… Et, je trouve que c’est, c’est ça qui manque. Quand
j’ai su que les maladies que j’avais étaient des maladies rare, parce qu’on me l’a
pas dit, hein, on… On ne sait pas, on découvre tout ça grâce à Internet, je me suis dis
« Ah ! C’est une maladie rare. C’est connu, le mot maladie rare, donc il va y avoir
des choses qui vont être faites. ». Donc j’ai été sur les sites des associations,
les sites Internet. En fait, il n’y a rien du tout. Voilà, on est plein de maladie rares,
mais il n’y a pas grand chose. Donc, il y a des maladies rares, qui sont un peu plus
connues, qui sont un peu plus suivies, un peu plus aidées. Mais c’est vrai que quand
on est une petite maladie rare, il n’y a pas d’aide. C’est pareil, c’est la journée
internationale des maladies rares, bon… On est pas trop au courant, ce que je peux
comprendre, c’est pas quelque chose que l’on va crier sur touts les toits. Il n’y
a rien qui est fait, et puis je ne dis pas des manifestations pour crier, mais des manifestations
juste pour être tous ensemble. On est tellement à avoir des maladies rares, on devrait tous
se mettre ensemble pour se soutenir.
Donc cette vidéo est terminée, j’espère qu’elle vous aura plu. N’hésitez pas
à aller voir la vidéo qui va avec qui se trouve donc sur ma chaîne, et à être présent
ce soir en direct, pour la discussion autour de ce sujet, si ça vous intéresse, donc
sur la chaîne de Justine. Vous aurez tout les liens en barre info, et merci d’avoir
regarder cette vidéo. Ciao !