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Deux exemples me viennent à l'esprit. Et chaque fois que je constate les progrès qui
ont été réalisés depuis, je me remémore ces expériences. [Jean Augustine. Commissaire
à l'équité de l'Ontario] L'une des toutes premières fois, c'est lorsque je
me suis présentée dans une grande entreprise, dont je tairai le nom ici, pour passer tous
les petits examens requis afin d'obtenir un emploi de bureau. J'étais titulaire
d'un certificat d'études étranger, obtenu à Cambridge.
J'avais toutes sortes de diplômes et j'avais réussi le petit test qu'on m'avait demandé
de passer. Deux semaines plus ***, je suis retournée là-bas, car je n'avais pas eu
de nouvelles et quand j'ai demandé aux ressources humaines si le poste me serait
confié, on m'a répondu : « Vous avez effectivement réussi l'ensemble du test,
mais nous pensons que votre profil ne convient pas à notre entreprise. »
Et encore aujourd'hui, je repense à cette question de profil.
Le deuxième exemple dont je me souviens et qui est resté gravé dans ma mémoire, c'est
la fois où j'ai vu une annonce sur la porte d'une maison indiquant qu'il y avait des
chambres à louer. Je suis allée frapper à la porte et le propriétaire m'a dit,
droit dans les yeux : « Oui, je loue, mais pas à vous. »
Et quand je l'ai regardé, il m'a répété : « Pas à vous. On ne loue pas aux gens
de couleur. » Je m'en souviens comme si c'était hier. Je n'avais aucun recours.
Les droits de la personne n'ont été mis à l'ordre du jour qu'en 1960-1961. Je
ne pouvais rien faire, à part me servir de cette blessure à l'âme pour ancrer mes
convictions au plus profond de mon être.
Ces deux expériences ont forgé ma détermination à faire de ce lieu, où j'avais choisi
de vivre, un endroit meilleur.
Donc le jour où ce code est arrivé, quand les débats ont commencé à propos de l'adoption
en Ontario d'une loi prenant position sur le racisme, la discrimination et l'aptitude
de chacun à faire partie intégrante de la collectivité, à y contribuer, etc., nous
avons rêvé de ce qui allait changer. Et pour moi, la promulgation de ce code a aussi
été l'occasion de dire qu'il y a désormais un recours.
Aujourd'hui, un locateur ne peut plus dire une telle chose ouvertement, ni un employeur.
Dans ces cas-là, on se demandait toujours si c'était de notre faute, on se remettait
en question -- cette personne avait le droit de dire : « Je ne vous donne pas cet emploi
à cause de qui vous êtes ». En effet, il était assez évident qu'en disant que je
n'avais pas le bon profil, elle voulait en fait dire que ma race, ma couleur ou mon
sexe -- je ne sais pas -- ne convenait pas dans cette entreprise.