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Je t'aime.
(Rires)
Quand vous êtes avec quelqu'un,
à quel moment lui dites-vous « Je t'aime » pour la première fois ?
Comment savez-vous que vous êtes amoureux ?
Quand donnez-vous un nom à cette relation ?
A quel moment l'officialisez-vous sur Facebook ?
(Rires)
Nous connaissons tous les symptômes de l'amour :
L'estomac noué, les mains moites,
vous êtes nerveux, et terrorisé.
Mais vous en voulez plus.
Beaucoup de choses se passent quand on aime.
Il ne s'agit pas simplement de chagrins d'amour et d'argent.
Votre cerveau se transforme de plusieurs façons.
Il est noyé dans l'ocytocine, la peptide de l'amour.
Tomber amoureux est physiologique.
Par ailleurs, tout le monde vous raconte
des histoires d'amour depuis que vous savez marcher.
Cette capacité de tomber amoureux, est-elle programmée génétiquement,
ou bien sommes nous conditionnés pour tomber amoureux ?
Est-ce inné ou acquis ?
Nous n'en savons rien.
Qu'est-ce que ça signifie précisément « inné » et « acquis » ?
Pour nous, est « inné » tout ce qui est génétiquement programmé,
transmis de génération en génération,
à l'exception de mutations exceptionnelles.
Par « acquis », nous pensons à ce qui est appris,
et à ce qui est le produit de notre environnement, comme faire du vélo
ou rester au soleil trop longtemps et développer un cancer de la peau.
Qu'en est-il de notre capacité à gérer le stress ?
Est-ce programmé génétiquement, ou est-ce le produit de l'environnement ?
Et l'identité sexuelle ? Innée ou acquise ?
La capacité d'importuner les autres ?
(Rires)
Ne voulez-vous pas demander à ce casse-pied au bureau :
« As-tu été programmé génétiquement ainsi ? »
(Rires)
« Ou t'entraînes-tu devant le miroir tous les jours ? »
(Rires)
Certains traits ne sont ni innés, ni acquis.
Un phénomène entièrement différent : l'épigénétique.
Epigénétique signifie une couche au-dessus des gènes.
Si vos gènes sont l'ordinateur,
votre épigénétique est le logiciel, ou le système opérateur.
Votre épigénétique permet à l'environnement de modifier vos gènes.
L'exemple le plus courant est la réaction au stress.
Des chercheurs à Montréal ont étudié la question suivante avec des souris :
« Le fait d'être une maman attentionnée influe-t-il sur l'ADN de vos enfants ? »
Ils ont observé deux populations de souris.
Dans le groupe 1,
les mères étaient attentionnées, léchaient et prenaient soins
de leurs bébés. Les souriceaux recevaient un traitement royal.
Maman fait des câlins tout le temps, noue les lacets,
les conduit au foot tous les jours.
(Rires)
Les souriceaux étaient vraiment gâtés.
Sous le microscope, l'ADN des souriceaux semblait normal.
Dans la population 2, les mères n'étaient pas très maternelles.
Pas de lèche, pas de nettoyage, pas de câlins. Pas très attentionnées.
Les chercheurs ont observé l'ADN de ces souriceaux
et y ont trouvé des marques étranges.
Ces marques étaient positionnées précisément sur le gène du stress.
En fait, ces souriceaux étaient incapables de gérer le stress.
Et ce pour toute leur vie.
Juste pour voir, les chercheurs ont décidé d'observer l'ADN des petits-enfants.
Et chez eux aussi, le gène du stress était désactivé.
Comment est-ce possible ?
Comment une maman attentive à ses bébés peut-elle modifier leur ADN ?
Regardons ensemble ce qu'est l'ADN.
L'ADN est une molécule
très fine et très longue.
Votre corps contient suffisamment d'ADN
pour faire le tour de la Terre 2,5 millions de fois.
Comment tout cet ADN peut-il être compressé dans votre corps
de manière si organisée qu'il contrôle tout.
Votre ADN est enroulé
autour de bobines microscopiques.
Il y en a des milliers de milliards.
Voici une représentation atomique de l'ADN, dans toute sa gloire.
Il est enroulé autour de bobines moléculaires,
appelées histones, en bleu.
Au départ, la réaction au stress est désactivée.
Mais quand les souriceaux reçoivent câlins et attention,
de la sérotonine est libérée dans leur cerveau.
La sérotonine active un interrupteur
appelé Lysine 4.
C'est une modification chimique, acylée,
qui déclenche le déroulement des bobines, et déroule l'ADN
pour exposer la partie relative au stress.
Nos souriceaux sont donc heureux et en bonne santé.
C'est un peu comme un tuyau d'arrosage
qui aurait 2 kilomètres de long,
et qui flotterait, en suspension, dans cette salle.
Vous connaissez cet engin en plastique
pour enrouler les tuyaux et les ranger.
Imaginez qu'il y en ait des milliers qui enroulent et déroulent,
et qui activent ou désactivent des gènes avec une précision inouïe.
Ces enrouleurs ont des pouvoirs spéciaux.
Ils savent tout ce qu'il se passe dans les cellules.
Ils peuvent activer et désactiver des gènes
le bon nombre de fois, au bon moment.
Ils sont tellement formidables,
qu'ils transforment une cellule fécondée en embryon, puis en bébé.
Donc, nos bobines moléculaires agissent et contrôlent tout.
Ils sont le chef d'orchestre d'un immense bal, un DJ en quelque sorte.
Si ces tuyaux avaient vraiment une couleur verte fluo,
ça ressemblerait à une rave party.
Vous savez -
♪ Boots and pants and boots and pants and boots and pants and boots and pants ♪
(Rires)
OK. (Rires) (Applaudissements)
C'était l'épigénétique de base :
Une soirée rave dans vos cellules,
où l'ADN et la socialisation se mélangent et s'incorporent.
Qu'en est-il de l'identité sexuelle ?
Suis-je née fille ou bien le suis-je devenue ?
Cette question a détruit
presque toute les relations romantiques que j'ai eues.
En fait, je suis une femme, mais qui est transgenre.
Pendant des années, je me suis battue,
jusqu'au jour où j'ai trouvé le courage d'être la personne que je suis vraiment.
(Applaudissement) (Encouragements)
Vous croyez que l'amour est compliqué.
C'est pire pour les personnes comme moi :
presque aussi compliqué que cette molécule d'ADN.
Heureusement, mes parents m'ont apporté toute leur affection.
J'ai donc plein de sérotonine pour gérer mon stress,
et être parmi vous, sur cette scène, et vous avouer ça.
(Applaudissements)
Je suis les pas de Larvene ***,
Geena Rocero et Janet Mock.
Quand je suivais une thérapie, mon analyste a évoqué ceci :
« Si tu pouvais identifier le gène de la dysphorie de genre,
tu ferais une découverte incroyable. »
Elle a dit que je serais une star du rock
Et qui ne souhaite pas devenir une star du rock ?
A l'époque, je travaillais sur les ARN.
L'ARN est un cousin moléculaire de l'ADN.
Alors, je me suis mise devant mon PC et j'ai fait une recherche
sur « ARN et identité sexuelle. »
Il y a eu un seul lien : « Les activateurs ARN du récepteur des stéroïdes. »
Ils aident l'œstrogène à agir.
Il est aussi directement lié au facteur d'inversion des sexes.
Je suis allée voir mon étudiante postdoctorale, Irina :
« Il y a cette molécule ARN dont personne n'a jamais entendu parler.
C'est si gros que c'est presque impossible de l'étudier.
C'est un bon sujet pour ton nouveau projet, non ? »
« On va essayer », a-t-elle répondu.
Vous vous souvenez des bobines moléculaires ?
Celles qui savent toujours tout.
Elles savent ce qui se passent,
sont toujours présentes au bon endroit, au bon moment.
Comment savent-elles ce qui se passe ?
Des chercheurs partout dans le monde essaient de percer ce mystère.
Beaucoup pensent que l'ARN pourrait faire partie de la solution.
Les molécules d'ARN peuvent détecter leur environnement.
Elles peuvent assembler des médicaments et des vitamines.
Si notre grosse molécule d'ARN est hautement structurée,
elle pourrait parler avec ces bobines,
et les informer de ce qui se passe autour de la cellule.
Par exemple : «Ouuuh, on se les gèle dans cette partie de la cellule. »
Ou : « Mmm, il y a de la caféine dans cette partie de cellule. »
Ou encore : « Sauve qui peut ! Une molécule de sperme. »
(Rires)
D'un autre côté, si notre molécule d'ARN
n'a pas de structure, comme un plat de spaghettis,
elle ne serait capable que de raconter du charabia à la bobine.
Comme ceci : « Bo tosh beer job blue Dee ray ahh *** kook nay. »
(Rires)
Non, en fait, ce n'était pas du charabia.
C'était du Klingon de Star Treck. Mais vous avez compris.
(Applaudissement)
Et voici ce que nous avons découvert :
notre grosse molécule d'ARN était super structurée.
25 hélices, et plein d'interactions.
C'est un tout petit pas,
mais ça prouve que l'ARN pourrait être la clef.
Les molécules d'ARN ont des liens avec Alzheimer et l'autisme.
Les effets épigénétiques en général, ont des liens forts
avec les addictions, la dépression, la schizophrénie.
Il y a 10 ans, personne n'aurait imaginé ça.
Aujourd'hui, nous faisons nos premiers pas.
Un jour, nous pourrons comprendre l'amour.
Ce qui nous ramène à notre question :
comment savons-nous que nous sommes amoureux ?
On n'a pas encore trouvé la réponse.
Mais un jour, quand vos enfants vous poseront la question :
« Comment sait-on qu'on est amoureux ? »
Vous leur répondrez : « C'est facile.
C'est quand la lysine 4,
sur l'histone 3 du gène récepteur de l'oxytocine,
est modifiée chimiquement.
C'est ainsi que l'on sait si l'on est amoureux. »
(Rires) (Applaudissement)