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Salut Devis, c’est l’avocat de la défense Howard Greenburg, ça va ?
La plaidoirie est vraiment un sujet très large.
Je vois ça comme de la sorcellerie,
c’est profond, c’est de l’alchimie.
Il n’y a pas de victoires morales dans ce métier.
Quand on ne gagne pas, c’est une catastrophe pour la personne. Il faut gagner.
Regarde s’il vient avec une autorisation
ou s’il est venu avec un mandat bidon hier soir.
Comme le dit Jessie Pinkman,
on n’a pas besoin d’un avocat criminaliste, mais d’un avocat criminel.
On va donc voir Saul Goodman,
l’adorable raclure pipelette de Breaking Bad.
La saison dernière dans The Real, on a trouvé un vrai Walter White.
Alors cette année, on s’est demandé si on pouvait aussi trouver son avocat.
Quand on a demandé au monde judiciaire new-yorkais
de nous présenter le plus outrageant, le plus excessif
et le plus efficace des avocats de la défense,
tout le monde nous a dit la même chose :
mieux vaut appeler Howard Greenberg.
Personne n’est aussi excentrique que Howard.
On s’étouffe presque quand on entend ce qu’il dit.
Un neveu a eu des ennuis avec la police.
J’ai tout de suite pensé à Howard.
Si j’avais des ennuis, c’est Howard que j’appellerais.
Appelez Howard.
Appelez Howard.
Appelez Howard.
Appelez Greenberg.
Ça va ?
- Bonjour Howard, - Ravi de vous rencontrer, ma belle.
Voilà à quoi ressemble le Professeur Van Helsing de bon matin.
Tu connais Van Helsing ?
- Oui, oui. - Le tueur de vampires. Allez, entre.
Alors c’est là que vous créchez ?
Ma piaule, je suis au regret de vous l’apprendre,
ne se situe pas à l’arrière d’un bar à ongles.
Ah oui. Le bureau de Saul.
Ça, c’est ma maison loin de la maison,
4 jours par semaine.
Beaucoup de grandes victoires ont été échafaudées,
écrites et peaufinées ici.
Et derrière vous, vous avez la prochaine.
C’est une affaire de proxénétisme très médiatisée.
Je travaille dessus.
Vous ne vous êtes jamais retrouvé en position
de devoir défendre quelqu’un qui était coupable ?
Ça n’a aucun sens pour moi.
Je préfère qu’ils me le disent, mais je m’en fous.
J’ai plus peur du gouvernement
que d’une raclure que je représente.
Parlez-moi de votre routine,
vous vous levez à quelle heure ?
Je me lève à 5 ou 6h, je commence par faire du sport.
Je sais pas si ça se voit
mais il y a une vraie machine là-dessous.
Puis je prends un café, une ***,
puis je me mets en route si je plaide
et sinon, je me mets au boulot.
Alors, qu’allez-vous porter aujourd’hui ?
Je pense pas porter cette chemise,
mais j’ai plusieurs costumes suspendus.
Regarde ça.
On peut gagner le droit de porter une tenue
qui pourrait avoir l’air ridicule.
- Vous ? - Toi, tout le monde.
Tout le monde.
Moi, je l’ai.
Si je donne l’impression à un juré
que s’il était dans la merde,
il voudrait que je sois à ses côtés,
je peux faire de lui ce que je veux.
C’est clair ?
D’accord. Ça se mérite.
Travailler dur, dans ce boulot, ça lave de nombreux péchés.
Très bien.
On va se les faire.
On va se les faire.
Je vais pas laisser le gouvernement clouer mes gars au pilori.
Les états de service de Howard Greenberg sont aussi longs
que les casiers judiciaires de ses clients.
En 25 ans de service,
Howard a défendu sans relâche et sans remords
des gens accusés de tout :
meurtre, trafic de drogue, port d’arme ou proxénétisme.
Il a défendu le bien nommé "Avocat aux Lolitas",
qui a reconnu payer une femme pour coucher avec ses filles adolescentes,
et le rappeur Bobby Shmurda,
supposé chef du violent gang GS9.
Mais plus que sa clientèle,
ce sont ses techniques impitoyables et outrancières
qui en ont fait un chouchou des médias.
Vous savez combien il a touché ?
Non, mais je sais comment le savoir !
Pour en savoir plus sur la réputation extravagante de Howard,
on a rencontré certains de ses anciens adversaires
et des alliés de longue date pour savoir de première main
comment c’est de travailler avec lui.
Vous pouvez me raconter
les premières fois que vous avez vu Howard ?
Je me souviens de lui la première fois que je suis allée au bureau.
Ce dont je me souviens le mieux,
c’est qu’on ne savait jamais ce qu’il allait sortir.
Et parfois, ça pouvait être très personnel.
Quand on essayait
d’argumenter un cas devant le juge,
il pouvait s’en prendre à nous.
Howard faisait ça à tout le monde.
Ça a presque un côté mignon
quand j’y repense,
parce qu’il disait des conneries complètement dingues.
Mais je ne peux pas dire ça.
Quand j’ai commencé comme commis d’office,
j’étais avocat de la défense
et je le connaissais
parce que je le voyais entrer et sortir des audiences.
Ce cinglé avec sa crinière noire
qui sortait de la salle d’audience,
difficile de le rater.
Il ne ressemble pas à un avocat classique.
Rien qu’entre ses cheveux et ses mouvements,
sa manière de parler.
Il sait vraiment pousser le bouchon avec beaucoup de gens.
Sans dépasser les bornes, ce qui le mettrait lui-même dans l’embarras.
Une affaire de prostitution défendue par Howard a attiré l’attention des médias,
vous pouvez m’en parler ?
2 hommes étaient accusés
de gérer un réseau de prostitution,
et il a résumé l’affaire.
Il déblatérait et a fini par dire
qu’il adorerait être l’une des putes qui travaillaient pour eux.
Que s’il se faisait autant de blé qu’elles,
il le ferait aussi.
C’est un peu son genre.
Je vous le dis,
il fait des choses qu’aucun de nous n’oserait faire.
Imaginez que vous interrogez la victime d’un vol.
Vous lui dites : “Il faisait nuit ?”
Oui.
Il faisait sombre, non ?
Oui.
Il n’y avait pas de lampadaire ? Non.
L’approche classique voudrait qu’on s’arrête là, qu’on ne pose plus de questions.
Puis qu’on résume en disant que ce témoin n’a pas pu voir qui l’a volée.
Parce qu’il faisait sombre,
qu’il n’y avait pas de lampadaire,
elle l’a dit elle-même.
Mais on ne demande pas au témoin :
”Alors vous ne pouviez pas voir qui vous a volée, non ?“
Parce que cette question ne peut que tout faire foirer.
Mais Howard va la poser,
puis la reposer de cinq manières différentes
jusqu’à la faire pleurer.
C’est Howard.
Le tueur de vampires, l’avocat.
On a rendez-vous.
Attends, t’es chez un avocat ?
D’accord.
Quel que soit son prix, je le bats, tu piges ?
Au fait, tu devrais regarder mes références
avant d’embaucher quelqu’un.
Et si les siennes sont meilleures que les miennes,
alors embauche-le.
C’est impossible. Je sais que c’est impossible.
Alors, tu viens quand ?
Dans 15 minutes ?
Bien, mon garçon, je sais que tu me planteras pas.
OK... Bâ***.
Avec les années,
j’ai appris à m’endurcir face à lui.
Il est très direct.
Ce que beaucoup de gens aiment,
c’est qu’avec lui, on sait qu’on ne perd pas de temps,
il n’y a pas de fioritures, pas de superflu.
On va droit au but, et il se bat vraiment pour le bien commun,
je peux vraiment lui accorder ça.
Il met toutes ses tripes dans ce qu’il fait
parce qu’il sait ce que c’est,
d’avoir l’État de New York sur le dos
ou le gouvernement fédéral sur le dos
et d’être celui qui se bat pour sauver sa peau.
Vous travaillez sur quoi en ce moment ?
Je me prépare pour cet énorme cas de proxénétisme
dans le conté de New York.
Vous pensez que ce procès va durer combien de temps ?
Peut-être 3, 4 semaines.
C’est la connerie habituelle.
Ils veulent faire passer de la prostitution pour du proxénétisme.
C’est quoi la différence
entre proxénétisme et prostitution, au juste ?
Je te donne un exemple et tu me dis.
D’accord.
Esclavage sexuel.
Proxénétisme.
À toi de m’en donner un.
Une prostituée qui a choisi de faire ça.
Ce n’est pas du proxénétisme.
Mais ils font toujours remarquer
que le libre-arbitre n’existe pas,
qu’aucune fille ne devient pute parce qu’elle en a envie.
Et si elle se fait 20 000 par semaine, c’est la faute à quelqu’un.
Tu sais que la plupart du temps, avec les clients,
elles simulent l’acte ?
Les clients sont vraiment cons.
Ouais, enfin, c’est évident,
tout le monde se doute qu’elles font semblant.
Non, je veux dire qu’elles font semblant d’avoir un rapport.
Comment ?
Elles nous ont montré comment faire.
Mais expliquez-moi !
Il faut se mettre sur le ventre,
il faut se caler la main entre les jambes
pendant qu’on est sur le ventre
et prendre le schmeckel dans sa main,
et y a plus qu’à le branler !
Le schmeckel ?
J’avais jamais entendu ce mot.
Et le client croit qu’il a ce qu’il veut
alors qu’il a rien du tout !
Bon. Je vais te faire mon vrai final
de plaidoirie, que je sortirai devant les jurés
pour plaider ce cas.
Ça baigne ?
Je vois cette salle pleine de gens
et je me dis qu’ils sont là pour que je leur lave le cerveau.
Répète après moi, chérie : "C’est vous qui allez décider."
"C’est vous qui allez décider."
"Si ce prévenu..."
"Si ce prévenu..."
"est un proxénète..."
"est un proxénète..."
"Ou si c’est un innocent,"
"accusé à tort, ce que j’entends prouver."
"Ou si c’est un innocent,"
"accusé à tort, ce que j’entends prouver."
Allez, on continue.
Est-ce que l’un d’entre vous
voit rouge quand il entend “proxénète” ?
Y-a-t-il des jurés corrompus ici ?
Quelqu’un avec un plan secret ?
Y-a-t-il des membres ?
Vous avez déjà entendu parler des FAIR Girls ?
Quelqu’un ici lit la colonne de Nicholas Kristof ?
Il est obsédé par le sexe.
Et par l’esclavage sexuel et les gens qu’on force à faire des choses contre leur volonté.
Toutes choses, je dois le dire, qui n’ont pas lieu dans cette affaire.
Au fait, je vous ai dit
que les filles vont venir ici en tant que témoins de la défense ?
Tu vois l’idée, ça se passe comme ça.
Bonjour !
Je m’appelle Kim.
Bonjour, Kim. Je suis Marie Greenberg.
Ça va ? Ravie de vous rencontrer.
Merci de m’accueillir.
Je suis ravie de vous rencontrer.
Voilà la salle à manger.
On y a fait beaucoup de soirées.
Vous vous êtes rencontrés comment ?
Au palais de justice. J’étais journaliste judiciaire.
Et Howard était avocat commis d’office.
Et on a accroché.
Ça a été une sacrée aventure.
Il y a combien de temps ?
C’était il y a 24 ans.
On est mariés depuis 14 ans.
Howard dit que vous l’aidez à s’habiller.
- Mais non. Il a dit ça ? - Oui !
Il me laisse jamais l’habiller.
J’adorerais l’habiller tous les jours.
Il a l’œil, mais pas pour lui.
Donc vous avez rencontré Howard sur son lieu de travail.
Qu’est-ce que vous pensez de son métier ?
Il fait du très bon travail et n’a aucun préjugé.
Il pense vraiment que tout le monde mérite sa chance.
D’être défendu correctement.
Ça vous ennuie,
qu’il y ait un coupable
qui soit libéré tellement qu’il est bon avocat ?
Et qu’il ressorte libre ?
Est-ce que ça m’ennuie ?
Peut-être, deux ou trois fois.
Mais autrement, non.
J’ai travaillé avec beaucoup d’avocats dans ma vie.
Aucun n’est comme lui.
Il a eu une enfance très différente.
Il n’est pas amer, il est reconnaissant.
Et ce n’est pas le cas de beaucoup de monde.
Parlez-moi de votre jeunesse.
Vous avez grandi dans le Lower East Side ?
Exact.
On vivait dans les quartiers pourris, on était 3.
Mon père malade mental, ma grand-mère,
qui m’a élevé comme un père et une mère, et moi.
Mon père était très violent.
Quotidiennement, il déconnait
et frappait ma petite grand-mère.
Une fois, il lui a cassé l’avant-bras sous mes yeux.
Mais j’étais enfant.
Qu’est-ce qu’on peut...
Qu’est-ce qu’on peut faire ?
Nos enfants ne savent pas ça.
Quand je suis parti,
j’ai eu une bourse pour l’Université de Cornell,
que j’ai tout de suite flinguée.
Puis j’ai zoné pendant longtemps.
J’ai rencontré une fille et appris par la suite que son père était un parrain de la Mafia.
Et le bureau du maire Giuliani
m’a mis en examen quand je me suis fait attraper
dans l’affaire opposant les États-Unis à Badalamenti.
Notre avocat dans cette affaire,
c’était le père de ma femme.
Les arrestations et accusations d’hier révèlent un nouveau trafic d’héroïne d’immigrés siciliens,
utilisant des petites pizzerias
pour faire passer de larges quantités de drogues.
Cette affaire a été connue du public sous le nom de "Pizza Connection".
À l’époque, c’est devenu le plus long procès fédéral
de l’histoire des États-Unis.
Mais c’est ce jour-là, avec les agents
et les chiens policiers sur moi
et les gens que j’aimais,
que j’ai décidé de devenir avocat de la défense.
J’ai été pris à l’école de droit de Fordham.
Trois mois après mon diplôme,
je suis avocat résident de la Legal Aid Society.
J’ai du mal à rester politiquement correct,
mais à la Legal Aid Society, ils émasculent les avocats.
Pourquoi ?
Parce qu’ils veulent tellement conserver leurs bonnes statistiques
qu’ils veulent aller en appel,
mais les avocats qui font appel perdent forcément.
Vous, comment vous aborder une affaire ?
Je l’aborde pour gagner !
Je vois.
J’ai laissé tomber l’aide judiciaire,
j’avais fait mon temps.
Je me suis lancé en privé
et Herbert Stern m’a appris comment devenir un bon avocat.
Il a écrit un paquet de bouquins,
“Aller au procès pour gagner”, et je suis devenu lui.
Ça vous énerve, quand on dit que vous êtes comme Saul parce qu’il est un peu à l’arrache,
par certains côtés, et aussi excentrique ?
Pas du tout.
J’ai pas besoin de tricher pour gagner.
D’accord.
On dirait que ma méthode fonctionne.
Et je peux apprendre à n’importe quel avocat
à combattre le gouvernement jusqu’à ce que le public fasse cette tête.
On a contacté plusieurs anciens clients de Howard
pour qu’ils nous parlent de leur expérience
et l’un d’entre eux, Jumps Felix, a accepté de parler à la caméra.
Jumps a été accusé du délit de possession d’arme,
pour lequel il risquait jusqu’à 15 ans de prison.
Howard est allé au procès et il a été acquitté,
alors que les flics ont dit que Jumps avait avoué son crime.
Je risquais entre 7 et 15 ans.
En gros, il m’a sauvé la vie.
Il a prouvé mon innocence quand j’étais ado,
quand on m’a reconnu coupable de possession d’arme.
Cette partie de ma vie est derrière moi,
c’est fini tout ça.
Je veux juste trouver un taf,
avoir des gosses, une vie normale,
mais vu mon passé,
ils ont voulu me coffrer.
Tu avais déjà eu à faire à des avocats avant Howard ?
C’est ton premier ?
C’est le premier que j’avais les moyens de payer.
Mon avocat précédent,
pour toutes mes autres affaires, c’était avec l’aide judiciaire.
Et tu sais comment ça marche, l’aide judiciaire va dans le sens du système.
Ils sont payés à te faire te défiler.
Mais j’ai eu la chance de pouvoir payer Howard Greenberg
pour prouver mon innocence.
Au procès,
il s’est battu comme un guerrier.
Il s’est battu comme si j’étais son fils.
C’est pour ça que je l’appelle parrain.
Comment tu as rencontré Felix ?
Comment il t’a trouvé ?
Son plan cul m’a appelé
et m’a dit qu’il avait besoin d’un avocat.
La première fois que tu l’as rencontré,
quelle était ta première impression ?
Tu t’es dit que c’était un bon jeune ?
Je me suis dit que c’était un connard prétentieux.
Je l’aimais pas.
C’est clair ?
Mais j’ai appris à l’aimer.
D’accord.
Si tu trouvais que c’était un con,
pourquoi le représenter ?
Parce que si je prends ton fric, je te donne tout ce que je peux.
Voilà pourquoi.
Et je veux gagner. C’est clair ?
Vous avez du café glacé ? Le faites pas avec l’eau de la vaisselle.
Ça arrive souvent que vous développiez une relation personnelle avec un client ?
- Je viens de dire... - Par la suite ?
Non, c’est pas ça. C’est pas ça du tout.
C’est pas personnel, c’est de l’affection
pour quelqu’un à qui on a sauvé la vie.
Donc si quelqu’un vous paie, vous lui êtes loyal.
Je rends un service contre de l’argent.
Vous pouvez menacer de me tuer, moi et ma famille...
Je rends un service pour de l’argent.
Un gars a menacé de me tuer
et je l’ai fait acquitter.
Ça se passe comme ça.
Mais pourquoi ?
Comment vous gérez ça ?
De qui j’ai peur ?
Vous avez peur du gouvernement, du système.
Voilà. Et je peux pas reprocher à un gars
qui pourrit en prison de dire quelque chose
et la cible la plus facile, c’est l’avocat, c’est clair ?
À force de passer du temps avec Howard,
j’ai compris qu’il pensait vraiment que tout le monde avait droit à une bonne défense.
Mais certaines de ses affaires me perturbaient encore.
La pire étant sa défense de Levi Aron.
En 2011,
Howard a rejoint l’équipe de défense
d’un des cas de meurtres les plus glauques de l’histoire new-yorkaise récente.
L’accusé, Levi Aron, avait reconnu l’enlèvement, le meurtre
et le démembrement d’un garçon de 8 ans.
L’avocat Howard Greenberg s’attend à être détesté en défendant le tueur d’enfant Levi Aron.
Pour comprendre ce qu’implique moralement la défense d’un meurtrier qui a avoué ses crimes,
j’ai consulté une avocate spécialiste des questions d’éthique, Nicole Highland.
Les gens doivent bien comprendre,
qu’ils soient juristes ou pas,
que l’éthique du monde réel n’est pas la même que l’éthique judiciaire.
Elles se superposent parfois mais les avocats doivent faire des choses
qui n’ont rien à voir avec la morale.
Un avocat d’assise va défendre son client même s’il sait qu’il est coupable.
Donc j’imagine que dans certaines situations, comme une personne accusée
d’un crime vraiment affreux,
le public peut trouver immoral qu’on garde le silence
quand on sait que son client est coupable.
Les gens me demandent toujours
comment on peut défendre des coupables.
J’ai des clients accusés de trucs affreux, dégoûtants, horribles...
C’est mon boulot de les défendre, quelqu’un doit le faire.
Le boulot d’un oncologue, c’est de battre le cancer,
celui d’un avocat d’assise, c’est de battre le procureur.
Un client a droit à une défense zélée.
Des choses peuvent être dites ou faites
qui peuvent offenser le monde extérieur,
mais un avocat d’assise est dans son bon droit
quand il se bat pour son client.
Quand Howard a repris le cas Levi Aron,
l’une des stratégies pour lesquelles il a opté
était de dire que Levi Aron, qui avait été élevé
dans une communauté hassidique orthodoxe,
était potentiellement consanguin.
Ce qui lui aurait causé
plusieurs troubles le menant à commettre ce crime affreux.
À l’époque, Doug Hivekin,
un homme en vue de la communauté juive de Brooklyn,
était très remonté contre cette stratégie qui rejetait la faute
sur la communauté juive pour les actions d’un seul individu.
Il veut défendre Levi Aron,
et il est dans son bon droit.
Mais attaquer, insulter, dégrader
toute une communauté, ma communauté, n’importe quelle communauté,
ce n’est pas l’objet de cette affaire.
J’ai parlé avec Julie Rendelman.
C’était une putain de dure, comme procureur.
Je te le dis.
On s’est mis au tapis
et on a croisé le fer.
Qu’est-ce qui s’est passé ? Racontez-moi.
Commençons par le boucher de Bensonhurst.
Levi Aron.
Quelqu’un avec qui j’ai échoué conceptuellement,
parce qu’il a plaidé coupable.
Et j’ai l’habitude de gagner mes procès,
mais c’est l’accusé qui choisit, pas l’avocat.
Je suis convaincu que si on était allés au procès,
il aurait été déclaré innocent pour troubles mentaux.
Parce que s’il n’était pas cinglé, personne ne l’est.
Vous pensez sincèrement qu’il était fou ?
Pas toi ?
Couper un gamin en morceaux, en mettre la moitié dans le frigo
et l’autre dans la poubelle... À toi de me dire.
Merci, chérie.
Pour vous, quelle aurait été la meilleure issue ? Il allait au procès, et après ?
Ça ne pouvait pas finir bien.
Il aurait fini à l’asile pour le reste de sa vie.
S’il était allé au procès,
ça aurait été fantastique pour moi.
Parce que ça aurait fait les gros titres
chaque jour pendant 3 mois.
Ça aurait été génial.
Une super opportunité de boulot.
Une publicité phénoménale.
Une affaire comme Levi Aron,
c’est beaucoup d’argent ou c’est plus un profil qui vous intéresse ?
Je l’ai fait gratuitement.
Sérieux ?
Et si je l’ai fait gratuitement,
c’est parce que j’avais lu dans le journal
que le juge donnait du fil à retordre à la défense.
C’est déjà arrivé que vous soyez en train de plaider
et que vous ayez l’impression de dépasser les bornes ?
Je me cantonne à la plaidoirie.
Alors, peut-être que quand on dit que le plaignant
est une charogne affabulatrice, ça fait peur aux gens.
Quand on dit que le plaignant a eu ce qu’il méritait, ça fait peur aux gens.
Vous pensez que, pour être un bon avocat d’assise,
il faut pousser les limites ?
Il faut les frôler,
au grand minimum, il faut les frôler.
Parfois les dépasser, selon l’affaire
et selon la cause.
Vous êtes prêt ? Vous êtes à fond ?
Je suis chaud comme la braise.
Je suis prêt.
Si je suis là aujourd’hui,
c’est que je dois plaider
dans une grosse affaire de proxénétisme.
Un procès que je pense honnêtement gagner
grâce aux 3 premiers paragraphes
que je vais déclamer au jury.
C’est prétentieux.
C’est une méthode qui a porté ses fruits, poupée.
Vous allez me donner un aperçu de votre introduction.
Ouais, je vais te faire la totale.
J’ai hâte de l’entendre.
Je serai derrière un pupitre.
Tu veux que je trouve une pierre pour faire office de pupitre ?
Ah, en voilà une bonne. Et c’est parti.
Je vais commencer par faire une pyramide avec mes mains.
Et mon prochain mouvement,
ce sera d’écarter les bras du corps
puis je vais me mettre à gesticuler comme Donald Trump.
Au fait, avant que je commence à m’agiter :
quand le juge me demande de me lever,
je reste figé sur ma chaise.
Je peux rester figé 30 secondes.
Si je fais ça, c’est parce que le meilleur moyen
d’attirer l’attention dans une salle d’audience,
c’est de ne pas faire un geste.
De rester figé,
au point que les gens se posent des questions gênées.
Qu’est-ce qu’il attend ?
Puis je me lève lentement
et je vais au pupitre d’un coup.
Imagine-moi marcher brusquement jusqu’au pupitre,
puis je relâche la tension.
Avec ce geste, je relâche la tension
puis je sors la masse et je commence à frapper.
Voilà ce que je vais dire.
Quoi que fût cette affaire,
ce n’était pas du proxénétisme.
Et je vais prouver que les personnes impliquées
étaient des prostituées offrant des faveurs sexuelles
pour des dollars américains à des clients, rien de plus.
Au passage, les clients sont parmi les gens les plus bêtes marchant sur la surface de la Terre.
Je prouverai que ces jeunes femmes étaient des putes,
comme elles s’appellent elles-mêmes
de leur plein gré.
Et si ce terme leur convient,
il doit vous convenir
et il me convient aussi.
Et je prouverai qu’elles étaient libres de leurs mouvements.
Je prouverai que des termes comme, par exemple,
“Putain, je vais te buter”
sont protégés par la liberté d’expression.
Peu importe la manière
dont les experts interrogés par le procureur
essaieront de faire avaler au public une opinion mal informée,
ça ne changera rien au fait que, dans leur bon droit,
ces filles ne sont pas, je cite, “des victimes”.
Vous pourriez bien, au cours du procès,
voir les victimes supposées,
assises dans le public, nous soutenir et nous féliciter.
Votre tâche n’est pas de rendre un verdict
sur la manière dont elles vivent leur vie.
Si elles veulent vendre leurs charmes
pour 10 ou 20 000 dollars la semaine, qu’elles le fassent.
Au final, cette affaire est très simple.
Faire la promotion de la prostitution,
et rien que ça, ce n’est pas de l’esclavage sexuel.
Et toute personne dotée d’un demi-cerveau le sait.
Je vous demanderai donc de rendre le verdict
“non coupable” pour toutes les charges de proxénétisme.
C’est le seul verdict juste, digne et justifié
étant donné les preuves de ce dossier.
Puis je vais faire une pause et regarder
chacun d’entre eux en disant :
“Je pense qu’on se comprend.”
Et voilà le travail.
Une affaire perdue d’avance, ça n’existe pas.
Hé Felix, souris, tu passes à la télé.
OK gamin. Tu sais que je t’aime.
Qui c’est ton papa ?
Bordel, pourquoi ils foutent de la mayo de partout ?
Je mangerai pas de cette merde.
Je vais l’emballer pour ma femme.
Le petit oiseau va sortir !
Allez, on regarde par là !
C’est quoi ce foutu appareil ?
Appuie sur le bouton.
J’en ai pris plein, j’en ai pris plein !
Ouais, elle a appuyé.
Ça marche comme ça ?
C’est tout ?
Pas besoin d’un gros flash ?
Et un petit flash ?
Pas de flash.