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Une odyssée personnelle
Au bord de l'océan cosmique
Le cosmos, c'est tout ce qui est...
tout ce qui a été, et tout ce qui sera.
La contemplation du cosmos exalte.
Elle donne des frissons, noue la gorge...
et semble évoquer un souvenir lointain...
l'écho d'une chute vertigineuse.
Nous sommes conscients d'aborder le plus grand mystère.
Les dimensions et l'âge du cosmos...
sont des questions qui nous dépassent.
Quelque part au milieu de l'immensité et de l'éternité...
on trouve notre minuscule planète, la Terre.
Pour la première fois, nous pouvons décider...
de l'avenir de notre planète et du nôtre.
Notre époque est dangereuse...
mais l'espèce humaine est jeune et courageuse.
Très prometteuse.
Au fil du temps, nous avons fait...
des découvertes tout à fait inattendues...
sur le cosmos et notre place dans l'univers.
Notre avenir dépendra largement...
de notre connaissance du cosmos...
où nous flottons comme une poussière...
dans le ciel du matin.
Nous allons entreprendre une odyssée à travers le cosmos...
avec des galaxies, des soleils et des planètes...
des vies et des consciences...
qui vint naître, évoluer, et disparaître.
Des mondes de glace et des étoiles de diamant...
des atomes gros comme des soleils...
et des univers plus petits que des atomes.
Nous découvrirons aussi notre planète...
avec sa flore et sa faune.
Nous étudierons notre propre histoire...
notre découverte progressive du cosmos...
son influence sur notre évolution, notre culture...
et notre avenir.
Pour découvrir la vérité, quelle qu'elle soit...
il faut de l'imagination et du scepticisme.
Nous spéculerons parfois...
mais nous ne confondrons jamais spéculations et certitudes.
Le cosmos est rempli de vérités élégantes...
de corrélations exquises...
et d'une éblouissante mécanique naturelle.
La surface de la Terre est la rive de l'océan cosmique.
Nous y avons acquis la plupart de nos connaissances.
L'homme s'est aventuré dans cet océan...
tout près du bord, et l'eau semble accueillante.
Chaque être humain sait qu'il vient de cet océan...
et a envie d'y retourner.
Nous le pouvons, parce que le cosmos est en chacun de nous.
Grâce à nous, le cosmos part à la découverte de lui-même.
Pour nous tous, l'odyssée commence ici.
Nous explorerons le cosmos sur un vaisseau imaginaire...
libéré des contraintes habituelles de vitesse et de taille...
et voguant au son des harmonies cosmiques...
explorant le temps et l'espace.
Aussi parfait qu'un flocon de neige...
naturel tel une graine de pissenlit...
il nous conduira...
à un univers de rêve et de réalité.
Suivez-moi.
Devant nous, le cosmos à la plus grande échelle connue.
Nous sommes loin des rives de la Terre...
aux confins inconnus de l'océan cosmique.
L'écume de cet océan cosmique...
est formée de vrilles de lumière...
rassemblant parfois des centaines...
de milliards de soleils.
Ce sont les galaxies...
qui dérivent sans fin dans la grande nuit cosmique.
Notre vaisseau imaginaire...
nous a conduits à mi-chemin des limites de l'univers connu.
Lors de cette première odyssée cosmique...
nous commencerons à explorer l'univers déchiffré par la science.
Plus ***, nous aborderons un monde lointain et exotique.
D'ici, nous ne voyons même pas...
l'amas de galaxies qui abrite notre Voie lactée...
et encore moins le Soleil ou la Terre.
Nous sommes au royaume des galaxies...
à 8 milliards d'années-lumière de la Terre.
Partout, nous trouverons les mêmes créations de la nature...
ce type de galaxie en spirale, par exemple.
Les mêmes lois physiques s'appliquent...
à travers tout le cosmos.
Nous commençons à peine à comprendre ces lois.
L'univers regorge de mystères.
Près du centre d'un amas de galaxies...
on trouve parfois une galaxie elliptique...
composée d'un billion de soleils...
qui dévore ses voisines.
Ce cyclone d'étoiles est peut-être ce qu'on appelle...
un quasar.
Les unités de distance sont différentes...
dans le royaume des galaxies.
On compte en années-lumière...
la distance que parcourt la lumière en un an : 10 billions de km.
L'année-lumière n'est pas une unité de temps, mais de distance.
Sur Hercule...
les galaxies sont distantes d'environ 300 000 années-lumière.
Autrement dit, la lumière met environ 300 000 ans...
pour aller d'une galaxie à l'autre.
Comme les étoiles, les planètes et les humains...
les galaxies naissent, vivent et meurent.
Elles vivent parfois une adolescence tumultueuse...
avec des risques d'explosion de leur noyau.
De puissants jets d'énergie...
sont alors propulsés à travers le cosmos.
Les mondes proches du noyau ou des jets sont calcinés.
Je me demande combien de planètes et de civilisations...
ont pu disparaître ainsi.
Sur Pégase, on trouve une galaxie en anneau...
résultat d'une collision entre deux galaxies.
Une éclaboussure dans la mare cosmique.
Les galaxies peuvent exploser et se heurter.
Leurs étoiles aussi peuvent exploser.
Dans cette explosion de supernova...
une étoile brille plus que le reste de la galaxie.
Voici ce que les astronomes appellent...
le Groupe local...
avec son diamètre de 3 millions d'années-lumière et ses 20 galaxies.
C'est un chapelet d'îles éparses...
dans l'immense océan cosmique.
Nous ne sommes plus qu'à 2 millions d'années-lumière de la Terre.
Les astronomes ont appelé cette galaxie "M 31".
C'est la galaxie d'Andromède...
un vaste tourbillon d'étoiles, de gaz et de poussière.
En la survolant...
nous apercevons l'une de ses galaxies satellites.
Les amas de galaxies...
et les étoiles de chaque galaxie...
doivent leur cohésion à la gravité.
Autour de M 31...
on trouve des centaines d'amas stellaires globulaires.
Nous approchons de l'un d'eux.
Chaque amas gravite autour du centre de la galaxie.
Certains amas rassemblent un million d'étoiles.
Chaque amas globulaire est comme un nid d'abeilles...
rassemblant, grâce à la gravité, un ensemble de soleils.
Après Pégase, nous avons franchi...
200 millions d'années-lumière vers le Groupe local...
dominé par deux grandes galaxies spirales.
M 31 est voisine d'une galaxie très similaire...
qui tourne sur elle-même...
tous les 250 millions d'années.
Voici notre Voie lactée...
vue de l'extérieur.
Voici la galaxie qui abrite l'espèce humaine.
Dans les tréfonds obscurs de l'un de ses bras spiraux...
les humains ont accédé à la conscience...
et à un certain nombre de connaissances.
Concentrés dans son noyau brillant...
ou éparpillés le long de ses bras spiraux...
on trouve 400 milliards de soleils.
La lumière met 100 000 ans pour traverser la galaxie.
Notre galaxie abrite des étoiles, des mondes...
et, qui sait, un immense éventail de créatures vivantes...
d'êtres doués d'intelligence et de civilisations de l'espace.
Éparpillés dans la Voie lactée, des restes de supernova...
témoignent de la survenance d'énormes explosions stellaires.
Ces filaments de gaz lumineux...
sont les couches externes d'une étoile récemment détruite.
Les filaments se défont...
et renvoient du matériau stellaire dans l'Espace.
Ne reste de l'étoile d'origine...
qu'un fragment stellaire compact appelé "pulsar".
Un phare naturel qui clignote et siffle.
Un soleil tournant sur lui-même deux fois par seconde.
Les pulsars sont si réguliers...
qu'on les a pris pour des engins extraterrestres...
peut-être des balises...
destinées à des vaisseaux parcourant l'espace...
entre les étoiles.
De tels vaisseaux existent peut-être...
mais les pulsars n'ont rien à voir là-dedans.
Ils rappellent seulement la triste réalité...
que rien ne dure...
et que les étoiles meurent aussi.
Notre chute vertigineuse nous conduit maintenant...
vers l'arrête de la galaxie.
Voici la Voie lactée, notre galaxie vue de profil.
Des fourneaux nucléaires...
y transforment la matière en lumière.
Certaines étoiles sont très légères.
D'autres sont 100 billions de fois plus denses que le plomb.
Les étoiles les plus chaudes meurent jeunes...
alors que les géantes rouges sont âgées.
Ces étoiles n'ont sans doute aucune planète habitée.
Mais les naines jaunes comme le Soleil...
qui sont d'âge moyen et beaucoup plus courantes...
peuvent avoir des systèmes planétaires.
Sur ces planètes, pour la première fois...
nous découvrons des matières rares...
de la glace, de la pierre, de l'air et de l'eau.
Près de cette étoile jaune, se trouve un petit monde chaud et nébuleux...
doté de continents et d'océans.
Les conditions sont réunies pour l'apparition d'une autre matière :
la vie.
Mais ce n'est pas la Terre.
Des êtres doués d'intelligence ont transformé cette planète...
en immense site industriel.
La galaxie abrite peut-être d'autres mondes...
où la matière est devenue conscience.
Je me demande s'ils sont très différents de nous.
À quoi ressemblent-ils ?
Quelle est leur politique, leur technologie, leur religion ?
Leur culture échappe-t-elle à ces catégories traditionnelles ?
Se mettent-ils en danger, eux aussi ?
Parmi les nombreux nuages de gaz stellaire...
figure la nébuleuse d'Orion...
à seulement 1 500 années-lumière de la Terre.
Ces trois étoiles brillantes sont censées former...
la ceinture de la célèbre constellation d'Orion le chasseur.
Vue de la Terre, la nébuleuse ressemble à une tache de lumière...
l'étoile centrale du baudrier d'Orion.
Mais ce n'est pas une étoile.
Il s'agit de tout autre chose...
d'un nuage dissimulant un lieu secret de la nature.
Ce lieu est une maternité où les étoiles naissent...
d'une contraction de gaz et de poussière...
qui élève leur température au point de les faire briller.
Ces nuages marquent la naissance d'étoiles.
D'autres témoignent de leur mort.
Une fois qu'une étoile s'est formée dans un nuage interstellaire...
que lui arrive-t-il ?
Les Pléiades sont un amas de jeunes étoiles...
de 50 millions d'années.
Ces jeunes pousses commencent à peine à sortir vers la galaxie.
Elles restent entourées de nébulosités...
formées par le gaz et la poussière dont elles sont nées.
Certains nuages sont comme des taches d'encre...
entre les étoiles.
Ils sont formés de poussière fine...
de matière organique et de glace.
À l'intérieur, quelques étoiles commencent à s'activer.
Les mondes glacés voisins fondent et forment de longues queues...
battues par les vents stellaires.
À des années-lumière de là, des nuages noirs...
dérivent entre les étoiles.
Ils sont remplis de molécules organiques.
Les éléments de base de la vie sont partout.
Ils se créent facilement.
Dans combien de mondes ces molécules se sont-elles assemblées...
pour créer des formes de vie ?
Souvent, une étoile appartient à un système de plusieurs soleils...
liés par la gravité.
Chaque système est isolé des autres...
par les années-lumière.
Voici une naine jaune ordinaire et solitaire...
entourée de neuf planètes...
de douzaines de lunes et de milliards de comètes :
la famille du Soleil.
À seulement quatre heures-lumière de la Terre, la planète Neptune...
et son satellite géant, Triton.
Même à l'orée de notre système solaire...
nous avons à peine entamé nos explorations.
Il y a un siècle, nous ignorions l'existence de la planète Pluton.
Sa lune, Charon, n'a été découverte qu'en 1978.
Les anneaux d'Uranus ont été détectés en 1977.
Il reste des territoires inconnus aux portes de la Terre.
Saturne est un immense monde gazeux.
S'il a une surface solide...
elle est enfouie sous les nuages que nous voyons.
Les anneaux de Saturne...
sont des billions de boules de neige en orbite.
Nous voici à seulement 80 minutes-lumière de la Terre...
soit seulement 1,5 milliards de kilomètres.
La plus grande planète de notre système solaire est Jupiter.
Sur sa face obscure, de puissants éclairs illuminent les nuages.
C'est ce qu'a révélé le premier vol de Voyager, en 1979.
Dans l'orbite de Jupiter...
on trouve d'innombrables petits mondes brisés :
les astéroïdes.
Ces récifs...
signalent qu'on approche des planètes géantes.
Nous abordons les haut-fonds du système solaire.
Des mondes dotés d'atmosphères minces et de surfaces solides.
Des planètes...
dont les paysages ne demandent qu'à être explorés.
Nous arrivons devant Mars.
En 1976, après un trajet d'une année...
deux robots explorateurs...
se sont posés sur cette rive étrangère.
Mars abrite un volcan aussi large que l'Arizona...
et trois fois plus élevé que l'Everest.
Nous l'avons baptisé "Olympus Mons".
C'est un monde de merveilles.
Mars abrite des vallées fluviales...
et des vents soufflant à la moitié de la vitesse du son.
Sa surface est barrée d'une faille de 5 000 kilomètres...
baptisée "Valles Marineris"...
en l'honneur du vaisseau Mariner...
qui est venu explorer Mars en voisin.
Cette première odyssée...
n'a été qu'une première reconnaissance de Mars...
et des autres planètes, étoiles et galaxies.
Nos prochaines odyssées seront plus exhaustives.
Parcourons maintenant quelques minutes-lumière...
en direction d'une planète bleue et nébuleuse...
la destination de ce long voyage...
et notre point de départ.
Nos voyages nous permettent...
de redécouvrir la Terre...
comme si nous venions d'ailleurs.
Il y a cent milliards de galaxies...
et un milliard de billions d'étoiles.
Pourquoi notre modeste planète serait-elle le seul monde habité ?
Il me semble plus logique...
d'imaginer un univers débordant de vie et d'intelligence.
Mais jusqu'à présent, tous les êtres...
et toutes les civilisations dont nous avons connaissance...
ont vécu sur la Terre.
Sous ces nuages...
s'est déroulée la tumultueuse histoire de l'humanité.
Nous voici enfin revenus chez nous.
Bienvenue sur la planète Terre...
avec son ciel bleu azoté...
ses océans...
ses forêts fraîches...
et ses prairies.
Un monde débordant de vie.
Pour l'instant, il fait figure de cas isolé.
C'est le seul monde où nous savons...
que la matière cosmique a pris vie et conscience.
C'est sans doute aussi arrivé ailleurs...
mais notre quête débute ici...
à partir des connaissances que notre espèce...
a péniblement acquises...
pendant un million d'années.
Autrefois, notre petite planète semblait immense.
C'était notre seul terrain d'exploration.
Ses dimensions furent découvertes astucieusement...
par un Égyptien du troisième siècle avant J.-C.
Cette tour était peut-être une tour de communication...
appartenant à un réseau couvrant l'Afrique du Nord...
grâce à un système de feux transmettant les messages officiels.
Elle servait aussi peut-être de phare...
guidant les navires à bon port...
sur la Méditerranée.
Elle est à 50 kilomètres à l'ouest...
de ce qui fut une grande cité de l'Antiquité : Alexandrie.
À l'époque, Alexandrie...
abritait un certain Ératosthène.
On le surnommait "bêta", la deuxième lettre de l'alphabet grec...
parce qu'on l'accusait d'être deuxième en tout.
Pourtant, Ératosthène était souvent "alpha".
Il était astronome, historien, géographe...
philosophe, poète, critique dramatique et mathématicien.
Il dirigeait également la grande bibliothèque d'Alexandrie.
Un jour, alors qu'il lisait un manuscrit sur papyrus...
il a découvert un récit étonnant.
Il a lu qu'au sud du pays...
au poste-frontière d'Assouan...
un phénomène étrange marquait le solstice d'été.
Le 21 juin...
l'ombre des colonnes et des bâtons...
raccourcissait à l'approche de midi.
Toute la matinée...
les rayons du soleil léchaient les parois d'un puits...
habituellement dans l'ombre.
Puis, à midi...
les ombres disparaissaient...
et les rayons du soleil éclairaient verticalement le fond du puits.
À ce moment-là...
le Soleil était à son zénith.
Quelqu'un d'autre aurait peut-être négligé ce récit.
Des bâtons, des ombres, des reflets dans un puits...
la position du Soleil...
relèvent du quotidien.
Quelle importance pouvaient-ils avoir ?
Mais Ératosthène était un scientifique...
et son analyse de ces phénomènes a changé le monde...
l'a même "modelé", en quelque sorte.
En effet, il a eu l'intelligence d'expérimenter...
de se demander si, dans la région d'Alexandrie...
les bâtons avaient une ombre le 21 juin à midi.
Il s'est avéré que oui.
Un sceptique aurait pu en déduire...
que le récit d'Assouan était erroné...
mais sur une question aussi banale...
tout mensonge aurait été absurde.
Ératosthène s'est demandé pourquoi...
au même moment...
les bâtons n'avaient pas d'ombre à Assouan...
alors qu'à Alexandrie, 800 km plus au nord...
leur ombre était clairement visible.
Voici une carte de l'Égypte antique.
J'y ai placé deux bâtons en forme d'obélisques.
L'un à Alexandrie, l'autre à Assouan.
Si, à un moment donné, aucun des deux bâtons...
n'a d'ombre...
c'est tout à fait logique, si la Terre est plate.
Si l'ombre d'Assouan est d'une longueur...
égale à celle de l'ombre d'Alexandrie...
c'est aussi logique, sur une Terre plate.
Ératosthène s'est donc demandé pourquoi...
au même moment, il n'y avait aucune ombre à Assouan...
et une grande ombre à Alexandrie.
Seule réponse possible : la surface de la Terre devait être courbe.
En outre...
la différence des ombres devait être proportionnelle à la courbe.
Le Soleil est si lointain...
que ses rayons sont parallèles.
L'ombre dépend de l'angle par rapport au Soleil.
Vu la différence de longueur des ombres...
la distance entre les deux villes...
devait correspondre à 7 degrés sur la surface de la Terre.
Autrement dit, si les bâtons allaient...
jusqu'au centre de la Terre...
ils se croiseraient à un angle de 7 degrés.
Or, 7 degrés correspondent à un cinquantième...
de la circonférence de la Terre : 360 degrés.
Ératosthène savait que la distance entre Alexandrie et Assouan...
était de 800 kilomètres.
En effet, il avait demandé à quelqu'un de la mesurer...
afin de réaliser le calcul que je viens d'évoquer.
800 kilomètres multipliés par 50 égalent 40 000 kilomètres...
soit la circonférence de la Terre...
la distance à parcourir pour en faire le tour.
Le résultat est bon.
Les outils du calcul étaient...
des bâtons, des yeux, des pieds et un cerveau.
Et le goût de l'expérimentation.
Il a ainsi déduit la circonférence de la Terre...
à quelques points de pourcentage près.
Pas mal, pour un scientifique d'il y a 2 200 ans.
À l'époque, la Méditerranée grouillait déjà d'embarcations...
navires marchands, bateaux de pêche, flottes navales...
mais aussi de navires en partance pour l'inconnu.
400 ans avant Ératosthène, un navire fit le tour de l'Afrique...
avec un équipage phénicien...
mandaté par le pharaon Néchao.
Les marins ont embarqué...
sur des bateaux sans doute aussi fragiles et exposés que celui-ci.
Ils ont longé la côte orientale de l'Afrique...
jusqu'à l'Atlantique puis la Méditerranée.
Ce voyage épique dura trois ans...
le temps qu'il faut à Voyager...
pour arriver jusqu'à Saturne.
Après Ératosthène...
d'autres ont peut-être tenté de faire le tour de la Terre...
mais, jusqu'à Magellan, sans succès.
Nombre de récits pleins d'aventures et d'audace ont dû naître...
de ces paris fous de marins et de navigateurs...
prêts à risquer leur vie...
sur les calculs d'un scientifique d'Alexandrie.
Aujourd'hui, Alexandrie n'a plus la splendeur...
de l'ère où Ératosthène parcourait ses avenues.
Au fil des siècles, les conquérants ont transformé ses temples...
en châteaux et en églises, puis en minarets et en mosquées.
La ville est devenue la capitale d'Alexandre le Grand...
un après-midi d'hiver, en 331 avant J.-C.
Un siècle plus ***, c'était la plus grande ville du monde.
Les civilisations successives y ont laissé leur marque.
Mais que reste-t-il de la cité rêvée par Alexandre ?
Alexandrie reste un lieu d'échanges prospère...
et un carrefour au sein du Proche-Orient.
Mais autrefois, elle rayonnait de confiance, sûre de sa puissance.
Une époque peut-elle renaître...
à partir de quelques statues et manuscrits anciens ?
Alexandrie abritait une immense bibliothèque...
doublée d'un centre de recherche.
Les plus grands esprits de l'Antiquité y travaillaient.
De cette bibliothèque légendaire...
il ne reste que ceci...
une cave humide et oubliée.
Nous sommes dans une annexe baptisée le Serapeum...
un ancien temple...
reconverti en lieu de savoir.
Ces quelques étagères tombant en poussière...
qui ornaient sans doute un entrepôt...
en sont les seuls vestiges concrets.
Mais cet endroit fut un jour...
le cerveau et la fierté...
de la plus grande cité de la planète Terre.
Si je voyageais dans le temps...
je visiterais cet endroit...
la bibliothèque d'Alexandrie à son apogée, il y a 2 000 ans.
C'est ici, dans une large mesure...
qu'a commencé l'aventure qui nous a conduits dans l'espace.
Ces murs de marbre abritaient tout le savoir de l'Antiquité.
Dans le hall, figurait peut-être un portrait d'Alexandre...
portant la crosse, le fléau et la coiffe...
des pharaons de l'Égypte ancienne.
Cet endroit était une citadelle de la connaissance...
une balise dans notre odyssée vers les étoiles.
Ce fut le premier véritable institut de recherche du monde.
Qu'y étudiait-on ?
Tout. Le cosmos tout entier.
"Cosmos" est un terme grec signifiant "ordre de l'univers".
C'est un peu le contraire du chaos.
Il implique que toutes les choses sont profondément liées.
C'est l'étude des mécanismes subtils et complexes de l'Univers.
Ce lieu regorgeait d'êtres de génie.
Outre Ératosthène, un astronome nommé Hipparque...
fit une carte du ciel, en indiquant la luminosité des diverses étoiles.
Puis Euclide, qui systématisa brillamment la géométrie...
et qui dit à son roi, qui peinait sur un problème de mathématiques...
qu'il n'y avait pas de voie royale vers la géométrie.
Denys de Thrace, qui définit les éléments du langage...
noms, verbes, et cetera...
réalisant ainsi presque le même travail qu'Euclide.
Et aussi Hérophile, le physiologiste qui identifia...
le cerveau comme la source de l'intelligence.
Archimède, génie de la mécanique...
comparable à Léonard de Vinci.
Et l'astronome Ptolémée, qui compila une partie de ce qui est devenu...
cette pseudo-science qu'est l'astrologie.
Sa théorie de la Terre comme centre de l'Univers a tenu 1 500 ans.
Preuve qu'aucun être, aussi brillant soit-il...
n'est à l'abri d'une grosse erreur.
Outre ces grands hommes, il y eut une grande femme.
Elle s'appelait Hypatie.
Cette mathématicienne et astronome...
vécut la fin de la bibliothèque.
Son martyre est lié à la destruction de ces lieux...
sept siècles après leur création.
Regardez-moi ça.
Les rois grecs qui succédèrent à Alexandre...
considéraient la science, la littérature et la médecine...
comme des trésors de l'empire.
Pendant des siècles, ils les ont généreusement financées.
Cette attitude était rare à l'époque, et l'est restée.
Ce hall menait à dix grands laboratoires.
Il y avait des fontaines, des colonnes, des jardins botaniques...
et même un zoo avec des animaux d'Inde et d'Afrique Noire.
Il y avait des salles de dissection et un observatoire astronomique.
Mais la richesse de ces lieux...
consacrés au dieu Sérapis...
au sein de la cité d'Alexandre...
était une collection de livres.
Des émissaires sillonnaient...
les cultures du monde entier en quête de livres.
Ils rachetaient des bibliothèques.
La police fouillait les navires arrivant à Alexandrie...
toujours en quête de livres.
Les manuscrits étaient copiés, puis restitués.
Ils attendaient ensuite d'être lus sur des rayonnages...
qui étaient baptisés "livres des navires".
Difficile de donner un chiffre précis...
mais à son apogée, la bibliothèque contenait...
près d'un million de manuscrits.
Le papyrus pousse en Égypte.
C'est l'origine du mot "papier".
Les innombrables volumes de cette bibliothèque...
avaient été écrits à la main sur des rouleaux de papyrus.
Que leur est-il arrivé ?
La civilisation classique qui les a créés a disparu.
La bibliothèque fut détruite.
Seule une petite partie des ouvrages fut sauvée.
Des autres, il ne reste malheureusement...
que des fragments épars.
Mais ces fragments sont absolument fascinants.
Ainsi, nous savons qu'il y avait ici...
un livre de l'astronome Aristarque de Samos...
qui avançait que la Terre était une planète...
qui, comme les autres, tournait autour du Soleil...
et que les étoiles étaient à une distance énorme.
Tout cela était parfaitement exact.
Mais il a fallu attendre 2 000 ans...
pour que ces vérités soient redécouvertes.
Les rayonnages d'astronomie de la grande bibliothèque.
Hipparque...
Ptolémée... Nous y voici.
Aristarque.
Voici l'ouvrage.
J'aimerais tant pouvoir lire ce rouleau...
et découvrir le raisonnement d'Aristarque...
mais l'ouvrage a définitivement disparu.
Si on multiplie ce sentiment de perte irréparable...
par 100 000...
on commence à mesurer l'ampleur...
des trésors de la civilisation classique...
et la tragédie que fut leur destruction.
Nos connaissances scientifiques surpassent celles des Anciens...
mais nos lacunes historiques sont considérables.
Nombre de mystères pourraient être élucidés...
grâce aux livres de cette bibliothèque.
Ainsi, il existait une histoire du monde en trois volumes...
aujourd'hui disparue, écrite par un prêtre de Babylone, Bérose.
Le premier volume couvrait la création du monde, jusqu'au Déluge...
soit, selon l'auteur, 432 000 ans...
une durée 100 fois plus longue que celle de l'Ancien Testament.
Cette histoire du monde devait receler des merveilles.
Pourquoi revenir ainsi 2 000 ans en arrière...
à l'époque de cette bibliothèque ?
Parce que c'est précisément là que les humains...
ont, pour la première fois, fait l'inventaire systématique...
des connaissances du monde.
Voici la Terre vue par Ératosthène.
Un minuscule monde sphérique flottant...
dans l'immensité du temps et de l'espace.
L'homme commençait à comprendre...
sa position véritable au sein du cosmos.
Les savants de l'Antiquité...
ont parcouru un chemin décisif dans cette direction...
avant l'effondrement de leur civilisation.
Après la fin du Moyen-âge, c'est largement...
la redécouverte des travaux de ces savants...
qui a permis la Renaissance...
d'où leur influence énorme sur notre culture.
Quand, au XVème siècle, l'Europe a enfin commencé...
à sortir de son long sommeil...
elle a repris certains outils, livres et concepts...
créés plus d'un millénaire auparavant.
En 1600, les idées longtemps oubliées d'Aristarque...
furent redécouvertes.
Johannes Kepler créa des modèles complexes...
décrivant la position des planètes...
et la mécanique céleste.
La nuit, il rêvait de voyages vers la lune.
Ses outils de travail étaient...
les mathématiques d'Alexandrie...
un respect total pour les faits...
et une lutte permanente contre le découragement.
Son histoire et celle de ses successeurs...
font aussi partie de notre odyssée.
70 ans après la théorie héliocentrique d'Aristarque et Copernic...
était largement admise dans l'Europe des esprits éclairés.
Les planètes étaient vues comme des mondes...
régis par des lois.
Les savants se sont intéressés au mouvement des étoiles.
La mécanique céleste était imitée...
par les horlogers.
Cette mesure du temps a permis des expéditions...
d'exploration et de découverte...
aux quatre coins du monde.
À cette époque, la curiosité...
était redevenue une vertu.
250 ans plus ***, toute la Terre avait été explorée.
Le temps était venu d'explorer le ciel.
On connaissait les galaxies, amas d'étoiles...
situés à des millions d'années-lumière de la Terre.
Dans les années 20, on a commencé à mesurer...
la vitesse de ces galaxies.
- Quelle heure est-il ? - 7h15.
Éteignez.
On a découvert que les galaxies s'éloignaient les unes des autres.
À la surprise générale...
l'univers tout entier était en expansion.
Nous avions commencé à sonder véritablement le temps et l'espace.
Cette réflexion collective...
a permis de donner un âge à l'univers : 15 milliards d'années...
à compter de sa naissance explosive :
le big-***.
Le calendrier cosmique ramène l'histoire de l'univers...
à une année.
Si l'univers était né le 1erjanvier...
la Voie lactée ne serait apparue qu'au mois de mai.
Les autres planètes ont pu apparaître...
en juin, juillet et août...
mais le Soleil et la Terre, en septembre.
La vie est apparue peu après.
Toute l'histoire humaine tient sur cette petite surface...
en bas à droite du calendrier cosmique.
Le big-*** est en haut à gauche...
à la première seconde du 1erjanvier.
15 milliards d'années plus ***, l'époque actuelle...
à la dernière seconde du 31 décembre.
Chaque mois dure 1,25 milliard d'années.
Chaque jour représente 40 millions d'années.
Chaque seconde, 500 années de notre histoire.
Soit un battement de cils à l'échelle cosmique.
Si le calendrier cosmique était un terrain de football...
notre histoire occuperait une zone...
grande comme ma main.
Nous entamons à peine le long et difficile chemin...
qui commence par une boule de feu primitive...
et mène à la condensation de la matière...
du gaz, de la poussière, des étoiles...
et sur notre petite planète...
à la vie, l'intelligence, et des êtres pleins de curiosité.
Nous venons de naître.
Les péripéties de notre histoire...
n'occupent donc que les dernières secondes du 31 décembre.
Pourtant, des événements cruciaux sont arrivés plus tôt...
quelques minutes plus tôt.
Passons à une échelle de quelques minutes.
Les premiers humains font leur apparition...
vers 22h30, le 31 décembre.
Au fil des minutes cosmiques...
dont chacune dure 30 000 ans...
nous avons cherché à comprendre où nous vivons, et qui nous sommes.
23h46...
il y a seulement 14 minutes...
l'homme a appris à maîtriser le feu.
À 23h59'20", la veille du dernier jour de l'année cosmique...
à la 23ème heure, la 59ème minute et la 20ème seconde...
l'homme a domestiqué plantes et animaux.
Il exploite son talent...
pour la fabrication d'outils.
À 11h59'35", des communautés agricoles sédentaires...
deviennent les premières cités.
Les humains sont apparus sur le calendrier cosmique si récemment...
que leur histoire n'occupe...
que les dernières secondes de la nuit du 31 décembre.
Dans l'océan temporel représenté par ce calendrier...
notre mémoire tout entière est confinée...
à ce petit carré.
Tous les hommes que nous connaissons ont vécu là-dedans.
Rois, batailles, migrations inventions, guerres, amours...
Tout ce qu'on lit dans les livres d'histoires se passe ici...
dans les dix dernières secondes du calendrier cosmique.
Nous venons à peine de découvrir...
les océans spatiaux-temporels...
dont nous sommes issus.
Nous résultons de 15 milliards d'années d'évolution cosmique.
Nous avons le choix.
Nous pouvons vivre mieux et explorer l'univers...
ou dilapider un héritage de 15 milliards d'années...
par une autodestruction absurde.
La première seconde de la prochaine année cosmique...
dépendra de ce que nous saurons faire...
de notre intelligence...
et de notre connaissance du cosmos.