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Antibiotiques : pourquoi des médecins et patients lancent-ils un cri d'alarme ?
Ils lancent un cri dalerte face à la gravité du problème.
Plusieurs médecins et associations représentant des patients salarment, jeudi 1er février dans Le Parisien, de la surconsommation dantibiotiques en France.
Un phénomène qui, à terme, accroît sensiblement la résistance des bactéries.
Lantibiorésistance remet en question la capacité à soigner les infections, même les plus courantes, sinquiètent les membres du collectif.
Chaque année, plus de 150 000 patients développent une infection liée à une bactérie multirésistante en France, prévenait en 2015 le ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, dans le rapport dun groupe de travail sur le sujet.
Et plus de 12 500 personnes en meurent, rappelait le ministère.
Alors que Le Parisien annonce une campagne nationale sur le sujet en 2019, Franceinfo revient sur les raisons de cette mise en garde.
Parce que les Français sont de gros consommateurs dantibiotiques.
Selon un récent rapport de Santé Publique France, 786 tonnes dantibiotiques ont été vendues pour une consommation humaine en France, en 2016.
Ce chiffre est particulièrement élevé, en comparaison avec nos voisins.
En 2015, la France était en effet le quatrième pays le plus consommateur dantibiotiques en Europe, derrière la Grèce, la Roumanie et Chypre.
Au sein de lOrganisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont la Roumanie et Chypre ne sont pas membres, la France est le deuxième pays consommant le plus dantibiotiques, derrière la Grèce, selon le Panorama de la santé 2017 de lOCDE.
Cet écart entre la France et le reste des pays membres nest pas léger.
Le recours aux antibiotiques est 45% plus élevé en France par rapport à la moyenne de lOCDE.
Sur 1 000 habitants, on recense ainsi 30,3 doses dantibiotiques consommées chaque jour, contre 21 en moyenne pour lOCDE.
Et cette consommation augmente : de 2006 à 2016, le recours aux antibiotiques en médecine de ville a augmenté de 8,6% en France, selon Santé Publique France.
Parce que la prescription de ces médicaments est souvent inadaptée.
Les antibiotiques continuent dêtre largement préconisés.
En 2016, en médecine de ville, sur 100 patients âgés de 16 à 65 ans et ne souffrant pas daffection de longue durée, lAssurance maladie a recensé 38,6 prescriptions dantibiotiques, note Santé Publique France.
Lorganisme a en parallèle relevé 371 doses dantibiotiques prescrites en établissement de santé, sur un total de 1 000 journées dhospitalisation.
Et certaines de ces prescriptions augmentent, même si dautres reculent sensiblement.
La prescription de pénicilline, le plus ancien des antibiotiques, a ainsi augmenté de 35,3% en médecine de ville, entre 2006 et 2016.
En milieu hospitalier, le recours aux céphalosporines de troisième et quatrième génération a quant à lui augmenté de 28,3% Et dans 30% à 50% des cas, les prescriptions dantibiotiques sont inadaptées aux pathologies diagnostiquées, alertait le ministère de la Santé en 2016.
Cest vrai quon en donne trop, mais parfois sous la pression des patients, explique au Parisien Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France.
La population vieillit, présente des infections quon a tendance à soigner systématiquement par ce biais-là, poursuit auprès du Parisien Eric Senneville, chef du service des maladies infectieuses de lhôpital de Tourcoing (Nord).
C’est compliqué d’expliquer à un patient qu’on ne lui en donne pas.
La population n’est pas consciente du risque car la résistance ne se voit pas..
Parce quun excès dantibiotiques rend les bactéries de plus en plus résistantes.
Du fait de cette surconsommation dantibiotiques, ou dun mauvais dosage, des bactéries deviennent plus difficiles à traiter quavant, notait Santé Publique France en novembre.
Elles développent une résistance à un, voire à plusieurs antibiotiques, relève lInstitut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
La résistance de la bactérie intestinale Escherichia coli (ou E.
coli) aux céphalosporines de troisième génération a ainsi été multipliée par trois en ville entre 2008 et 2016, et par six en établissement de santé, alerte lorganisme.
Du côté des salmonelles, la part des souches résistantes à ces antibiotiques est passée de 1% à 3,2% en seulement dix ans.
Sur cette période, la Salmonella a même développé une résistance à la ciprofloxacine (2,5% des souches contre 0% en 2006), précise Santé Publique France.
Quant aux Klebsiella pneumoniae, bactéries à lorigine dinfections pulmonaires, leur part de souches résistantes aux antibiotiques est passée de 15% à 30% entre 2008 et 2015, selon un rapport du Haut Conseil de la santé publique.
Parce que cette résistance empêche de soigner certaines infections.
Les médecins et associations qui prennent la parole dans Le Parisien évoquent un problème majeur, faisant chaque année des morts.
Avec des bactéries devenues trop résistantes aux antibiotiques, certaines infections, même courantes, semblent de plus en plus difficiles à soigner.
Le Parisien cite ainsi des infections cutanées, pour lesquelles le nombre dhospitalisations et de surinfections augmente.
En seulement deux ans, de 2014 à 2016, le nombre de séjours à lhôpital pour soigner ces infections a augmenté de 5%, selon le journal.
Si la résistance aux antibiotiques continue à progresser à ce niveau d’intensité, sans autre option de soin, il y aura bientôt des infections banales que l’on ne pourra plus soigner, alerte Eric Senneville.
Il y a urgence !.