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Je suis né en 1931.
J'ai 82 ans.
Sensei, où êtes-vous né ?
Ici.
Comment j'ai commencé [le Budo] ?
Eh bien...
parce que c'était amusant !
C'était lorsque la Seconde Guerre Mondiale a commencé.
Les écoles ont été transformées en centres culturels
et dans certaines on enseignait le Budo.
Juste à côté d'ici, il y avait un dojo.
Ils faisaient du Judo et du Kendo.
Moi le Kendo, avec l'épée, l'armure et tout ça, ça m'énervait.
Donc je préférais quand on faisait du Judo.
Pour le Nouvel An,
il y avait l'hatsu-geiko [premier entrainement de l'année].
C'était une occasion rare de manger des bonnes choses
car nous n'avions pas grand chose d'habitude.
Nous le méritions parce les chutes de Judo étaient vraiment douloureuses.
On se jetais les uns les autres comme ça !
C'est comme ça que j'ai commencé.
J'étais à l'école primaire [à l'âge de 7 ou 8 ans].
On portait l'armure et utilisait le shinai,
l'équipement de Kendo.
On mettait juste ça,
on n'avait pas de tenugi [serviettes] à l'école.
On mettait le casque directement sur le crâne nu et quand on était touché,
ça faisait super mal !
C'était la même chose pour le shinai.
A l'intérieur,
on mettait du journal roulé entre les lames de bambou,
le tout attaché très serré.
Lorsqu'on était touchés à la tête ou sur les avant-bras,
ça faisait très mal.
C'est comme ça qu'on avait l'habitude de pratiquer.
Après cela, je suis retourné au Judo
mais mon Sensei m'a dit:
« Le judo c'est bien »
« mais avant, il y avait des atemi [des coups]. »
« Si on ne donne pas d'atemi, l'ennemi ne tombera pas »
Nous avons donc commencé à utiliser les atemi.
Comme ça !
Et à partir de là,
il m'a dit de m'inscrire dans une autre école,
c'était une école de Daito-ryu.
Mais peu de temps après ça j'ai reçu une lettre de l'armée,
ça disait :
« Apte pour le service armé. »
Il était écrit aussi :
« Assigné aux formations de troupes d'assaut. »
C'est ce que cela disait.
Je l'ai eue trois mois avant la fin de la guerre.
C'était un appel aux volontaires.
Pour vous inscrire, vous deviez subir un examen physique,
mais quand je suis arrivé,
l'empereur avait déclaré la capitulation du Japon.
C'est ce qui doit s'être passer, moi je ne savais rien à l'époque.
C'était une époque étrange.
Quelqu'un m'a dit que la guerre était finie
et j'ai pensé : « Ca y est, on a perdu »
Alors vous êtes revenu ici ?
Ca ne servait plus à rien d'être volontaire.
Et à partir de là, on n'a plus rien eu du tout.
L'argent ne valait plus rien.
Debout face à face,
cette technique vient de ippondori mais on la trouve aussi dans 5-kajo,
car il y a de nombreuses façons de la faire.
Donc, on se met en garde...
comme ça...
C'est comme ça qu'on fait en Daito-ryu.
Faire comme ça, directement, c'est assez inhabituel.
Mais en kamae...
vous levez comme ça, à partir de là...
mais pas comme ça !
Parce que si vous ouvrez votre coude, votre adversaire peut entrer.
Comme cela dans un mouvement de rasage
de sorte que vous pouvez saisir,
et à partir de ce moment-là, prendre le centre de uke.
De là, vous coupez,
c'est ça suburi [coupe].
Voila pourquoi on fait comme ça.
J'ai entendu parler d'un endroit où ils pratiquaient le Daito-ryu.
alors je suis allé voir.
On m'a dit que c'était le bureau de quelqu'un du nom de Nakatsu [Heizaburo].
Il était 6ème Dan de Judo [Kodokan].
Il était l'un des 6 experts venus pour protéger le journal Asahi [à Osaka].
L'équipe avait été mise sur pied par Ishii Mitsujiro
parce que le journal avait été attaqué trois fois [par des terroristes d'extrême droite].
Takuma Hisa Sensei était le chef de la sécurité là-bas.
C'est aussi le moment où on [Ishii] a demandé Ueshiba Morihei de venir au journal
parce qu'il connaissait des techniques de koryu violentes.
Ca a duré 5 ans
et à partir de la 6e, ça a été appelé le Asahi-ryu.
Ainsi, les techniques qui sont dans le Soden du Takumakai
correspondant à ces 5 premières années sont celles enseignées par Ueshiba.
La collection de photos [recueil photographique de techniques].
Après ça,
Takeda Sokaku est arrivé...
...et Ueshiba Morihei est reparti pour Tokyo.
Ueshiba a emmené ses élèves avec lui.
A partir de là Takeda Sensei a repris l'enseignement au journal.
Le reste des photos du Soden représente son enseignement.
C'était avant l'époque de Chiba Sensei.
Avant leur rencontre [entre Nakatsu et Chiba].
Donc, c'est le début de la période avec Takeda Sokaku
et la transmission de maître à disciple avec Nakatsu Sensei.
C'était il y a longtemps, mais ils avaient des appareils photo
qu'ils utilisaient au journal.
Imaginez ça, clic ! clac !
C'est comme ça qu'ils ont pris toutes ces photos,
il doit y avoir des milliers.
Tout cela en très haute qualité pour l'époque.
C'est parce qu'ils étaient dans un journal qu'ils pouvaient le faire,
mais même là, les gens se sont plaints.
Il y avait des rumeurs
parce qu'ils utilisaient des quantités astronomiques de film.
Ils prenaient des photos pendant les pauses.
Clic ! Clic ! Clic !
Ils ont pu le faire en prétextant que comme la pratique avait été intense,
Sensei devait aller prendre un bain,
et ils prenaient ces photos derrière son dos.
Mais je pense qu'il n'était probablement pas dupe.
Ils prenaient des photos de techniques qu'ils faisaient pour la première fois.
Donc on peut difficilement les utiliser comme des outils d'apprentissage, mais seulement des aide-mémoire des formes nouvelles.
On ne peut pas comprendre ces photos seules.
Cela signifie que les atemi sont essentiels.
Vous les utilisez pour faire bouger votre adversaire.
Pas comme ça ! Vous devez passer à travers !
Tout se passe sur l'articulation du coude.
Dans cette direction,
et c'est ainsi que vous vous retrouvez là.
Et puis, un autre atemi sur la tête !
Et vous sortez comme ça.
Puis Nakatsu Sensei a quitté le journal Asahi.
Comme il était d'Ikeda, il est revenu ici.
Il a établit un petit dojo dans son cabinet chiropratique.
C'était dans la salle d'attente, une très petite pièce.
Elle faisait environ 4 mètres carrés.
De l'autre côté, il y avait la salle de traitement.
C'était pour ceux avec des mâchoires disloquées,
les articulations blessées ou les os brisés.
Dans la salle d'attente de son cabinet,
il n'y avait pas de rayons X à l'époque,
donc il fallait toucher et faire un diagnostique basé sur l'expérience.
On faisait avec le peu qu'on avait.
On diagnostiquait comme ça et on essayait de remettre les choses ensemble.
On immobilisait les hanches du patient
pour l'empêcher de bouger.
C'était comme ça à l'époque.
Nakatsu Sensei faisait-il de la publicité pour ramener des élèves ?
Pas du tout, il n'aurait jamais fait ça!
Pour lui, n'importe qui convenait.
« C'est bon »
C'était toujours « C'est bon » avec lui.
Il aimait bien aller boire avec quelqu'un,
mais il n'y avait pas beaucoup [d'alcool] à l'époque,
donc c'était une façon de le rendre heureux.
Du saké du marché noir ?
Oui, je lui en ai apporté en lui disant de l'utiliser à sa guise,
et il a dit « Merci ».
C'est comme ça que j'ai commencé.
Je savais comment faire shikko [déplacements à genoux]
et il disait toujours « Il faut commencer par shikko »
J'avais fait du Judo, du Kendo et pas mal d'autres choses...
Votre corps était bien conditionné.
Oui, et j'étais parmi les plus grands à l'époque.
On s'entrainait aussi dans le champs à coté.
Dehors ?
Sur le sol.
Il y avait des cailloux et quand on tombait ça faisait mal!
Il y avait aussi une école de couture
et on trouvait souvent des aiguilles au sol.
Ca faisait mal!
Maintenant avec les tatami, on a l'impression de pratiquer sur des matelas.
Vous ne vous blessiez pas?
On n'avait rien,
mais le parquet était assez flexible donc ça allait.
On rebondissait !
Ou voulait un sac de frappe mais on n'avait pas d'argent.
C'était cher.
Donc on utilisait un sac à grain
qu'on remplissait de graviers.
Et on chargeait là-dedans
comme des joueurs de rugby.
On allait aussi loin que ça pour s'entrainer.