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Bonjour et bienvenue sur la deuxième leçon consacrée à l'oeuvre de
littérature électronique d'Annie Abrahams "Etre humain".
Dans cette leçon on va étudier une pièce en particulier qui s'appelle
"Comprendre?", avec un point d'interrogation,
pour voir comment Annie Abrahams
nous invite à interroger
à avoir un rapport critique
à la question de l'identité
sur internet.
Qui est l'auteur sur internet?
Est-ce un être humain ou une machine?
Et qui nous sommes,
sur internet? On va voir comment
le détournement
des protocoles de communication d'internet permet à Annie Abrahams
de poser ces questions.
La pièce "Comprendre?" fait partie
du site internet "Etre humain".
La pièce "Comprendre?" a été publiée en 2003 sur ce site.
Dans la pièce "Comprendre?" il y a plusieurs sujets.
D'abord il y a le "je".
Mais ce "je", il change d'identité.
Il peut être l'auteur,
il peut être la machine et il peut être le lecteur.
C'est intéressant de voir comment tous ces "je"
montrent différentes facettes
de ce que c'est que l'identité
d'une page internet.
D'abord il y a
le "je"
de l'auteur. On peut supposer que quand on lit "je",
le sujet "je" sur la page internet
c'est Annie Abrahams
qui publie sur internet
des vidéos et des photos
de sa propre personne.
C'est comme un sujet lyrique qui s'adresserait
à ses lecteurs,
ou un narrateur
qui s'adresserait
à son public sous la forme d'un site, d'un journal, etc.
Mais le "je", ça peut être aussi
l'ordinateur.
Dans certains cas c'est même la page internet qui dit "je".
C'est très troublant.
Par exemple,
il y a une phrase dans "Comprendre?"
qui est: "ne me touchez pas".
Et "ne me touchez pas" est un mot
un lien hypertexte,
on peut cliquer sur le mot
pour être rediriger vers une autre fenêtre.
Et quand on clique sur le mot
on a rompu la demande
du mot qui était "ne me touchez pas" parce qu'on a touché le mot
qui disait "ne me touchez pas".
Qui a dit "ne me touchez pas"?
Peut-être que c'est la souris?
Peut-être c'est l'ordinateur?
Peut-être c'est la page internet
elle-même?
Ce "je"
qui incarne le site internet
c'est un "je" que vous trouvez beaucoup sur certaines pages,
qui est typique des protocoles de communication
sur internet.
Par exemple certaines pages internet
veulent imposer à l'usager
des fenêtres intempestives, qu'on appelle des pop-ups
en français aussi.
Souvent un petit message
s'affiche en disant
"j'utilise des pop-ups"
"please enable".
Le site internet s'adresse
à l'usager pour lui dire "autorisez l'usage de pop-ups".
Des fois
le site internet dit "je"
le site internet est
un sujet.
On trouve un autre exemple
de ce sujet ambigu
dans ce qu'on appelle des "chatbot"
des chatbot c'est des "chatter robots".
Ce sont des programmes qui doivent simuler la conversation. On en trouve dans
le télémarketing. Si vous téléphonez
à une machine vous pouvez avoir une conversation avec ses chatbot.
Le but de ces chatbot
c'est de simuler
la convivialité, la chaleur,
l'humanité, la générosité,
d'un humain.
Les sites internet sont capables de dire "je"
pour simuler
le sujet.
On trouve un exemple de cette chaleur
dans le site "Comprendre?".
A un moment on peut cliquer sur "je ne comprends pas".
Là c'est le sujet internaute qui dit "je ne comprends pas".
Et alors
une fenêtre pop-up surgit et dit:
"ce n'est pas grave". Comme si le site internet essayait
des simuler la chaleur, l'humanité pour nous convaincre
de son humanité.
On trouve aussi d'autres formes de "je",
des "je" qui sont l'incarnation de l'internaute lui-même.
Par exemple, dans "je ne comprends pas" c'est l'internaute qui peut
cliquer sur "je ne comprends pas"
et devenir le "je"
de la page internet.
Un autre exemple dans l'une des premières pages de "Comprendre?"
de la pièce "Comprendre?",
la pièce dit
"vous ne me comprendrez jamais",
Et en bas de "vous ne me comprendrez jamais" il y a un autre texte qui dit:
"pourquoi pas?".
Et si vous cliquez sur "pourquoi pas?"
alors vous faites l'hypothèse que c'est vous qui
demandez "pourquoi pas?", vous devenez le sujet.
Et dans la seconde page
en réponse à
"pourquoi pas?"
vous avez un autre mot cliquable, qui est "je ne comprends pas."
Vous êtes le sujet qui ne comprend pas.
Ce "je"
de "je ne comprends pas"
c'est le même "je" que sur le "like"
de Facebook. Vous savez en français
"like", on le traduit par "j'aime".
Ce "je" simule un choix,
un libre-arbitre, une volonté,
le libre-arbitre de l'internaute.
Mais ce n'est qu'une simulation. Vous savez que sur Facebook
on peut dire "j'aime"
mais on ne peut pas dire "je n'aime pas".
Comme sur le site internet de "Comprendre?",
on n'a pas vraiment de choix, on peut juste cliquer sur le "je"
et incarner ce "je", mais cette mais c'est une simulation, une fiction d'identité.
Enfin il y a
ce "je"
qui est à la fois l'auteur, à la fois la page internet
à la fois
l'internaute,
qui est pris dans une désorientation,
une confusion,
et cette confusion est renforcée par
l'ambiguïté de l'interface.
L'interface joue toujours entre
une interface
"user-friendly"
et l'inverse d'une interface "user-friendly". "User-friendly c'est le
concept de design
qui règne sur internet
et qui veut que
les interfaces soient faciles à utiliser.
on a certains éléments de "user-friendliness" sur le site "Comprendre?".
D'abord quand on commence, le site a une belle fenêtre avec un fond uni,
pas compliquée,
et puis très peu de formes sur le fond.
On a des textes
qui sont dans des couleurs douces et apaisantes, le rose, le gris.
Et puis ces textes ont des tailles et des graisses
de caractère
différentes qui
dirigent gentiment
le regard, qui nous aident à lire.
Mai plus
on clique sur ces liens,
plus les fenêtres
se saturent.
Comme dans un phénomène de mise en abyme,
il y des fenêtres qui s'ouvrent dans des fenêtres,
et quelques fois ce qui était une forme détachable sur un fond,
devient lui-même un fond.
Par exemple les mots
qui sont une forme sur un fond,
se multiplient et deviennent comme un papier-peint, qu'il faut regarder
comme un fond.
Certaines formes géométriques comme le cercle,
ou le rectangle, ou le cube,
peuvent servir à la fois de forme
et de forme dans laquelle il y a des formes, donc ça devient un fond.
dans un phénomène de mise en abyme.
Donc l'interface
en fait
détourne le concept du user-friendly
pour désorienter l'internaute,
pour créer des mises en abyme
qui questionnent la tranquillité, la sécurité et la facilité de navigation
des protocoles de communication,
qui invitent le lecteur à se demander
où il est,
qui il est, à qui il s'adresse,
et pourquoi.