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D'après le roman de A. Döblin
Un film en 13 épisodes et un épilogue
Des problèmes, Biberkopf ?
Non, j'ai plus de bière. Je vais en chercher.
Ah oui, la bière !
T'attends que je crève pour m'apporter le lait ?
Vous entendez ?
Elle passe ses journées à vous chicaner.
Ça a été une bonne épouse. Elle a bien changé !
Elle ne pense plus qu'à vous chicaner.
ll arrive, ton lait.
Bonjour, Mme Greiner.
Bonjour, M. Greiner. Je viens au ravitaillement.
Vous avez la descente rapide !
ll faut à l'homme ce qu'il faut.
C'est bien vrai, M. Biberkopf, bien vrai.
Et une bouteille tout de suite, pour le plaisir.
Volontiers.
ll n'y a plus de schnaps, malheureusement.
On est fauchés.
Et Greiner, il se saoule et roupille.
Que faire quand on n'a pas de travail ?
On fait presque tous pareil. On traîne.
Vous avez raison, M Biberkopf.
D'ailleurs, je pense comme vous.
Je voudrais bien savoir :
ils vivent de quoi, en face ?
Où ça ?
Le magasin de chaussures.
Quatre vitrines, superbes, léchées,
mais je n'ai jamais vu personne entrer.
Avec ça, ils ont engagé 6 vendeuses...
Vendeuses, si le cas se présente !
A 80 marks par mois, et par tête.
Une fois grisonnantes, elles monteront à 100 marks !
C'est le magasin de la vieille Grillmann.
Autrefois, le magasin était normal,
des petites vitrines, moins prétentieuses.
Puis elle a épousé son gérant.
Depuis, elle dort dans le fond, et elle va mal.
Lui est un homme chic.
ll a remonté l'affaire, alors qu'il n'a pas 40 ans.
Et voilà le malheur, M. Biberkopf.
ll rentre parfois ***,
et la vieille s'énerve et ne s'endort pas.
Voilà ce que c'est que d'épouser un homme jeune !
UNE POlGNÉE D'HOMMES DANS LA PROFONDEUR DU SlLENCE
L'importance de la graisse dans la nourriture
La graisse enrobe les saillies osseuses, protégeant les tissus des coups.
Les maigres ont la plante des pieds douloureuse en marchant.
Une bouteille !
C'est dur de tenir sur une jambe !
Oui, sur une jambe c'est dur.
A moins qu'on l'ait perdue à la guerre.
Ça non plus, c'est pas normal.
Les voisins de l'avocat sont deux couples obèses.
Le frère et sa femme, la soeur et son mari.
lls ont aussi une fille malade.
A côté, un apprenti boulanger et sa femme.
Elle est apprentie...
margeuse dans une imprimerie.
Elle a une ovarite, il me l'a dit.
Ah bon, une ovarite... Ah les femmes.
Qu'ont-ils de la vie, ces deux-là ?
D'abord l'un l'autre,
et... dimanche dernier,
un spectacle et un film.
Une réunion de la société, ses parents à lui...
C'est tout ?
Dites donc, Biberkopf ! Ça devrait pouvoir suffire !
Et puis ils ont... le beau temps, le mauvais temps,
la chaleur du poêle en prenant le petit déjeuner...
Et votre vie à vous ?
Et celle des autres, du général ?
On a quoi de la vie ? Faut pas se faire d'illusions !
Au-dessus, c'est un avocat, Löwenhund.
Un affreux radin.
ll a une femme de ménage, elle frotte sa salle d'attente,
mais pas question d'aspirateur.
Alors qu'il n'est pas marié !
Et elle récure, elle frotte.
Elle est maigre, mais encore souple, malgré ses 2 enfants.
Eh oui, M. Biberkopf, l'avarice...
Je m'oppose formellement â ce que le tribunal autorise,
dans le grand-duché de Saxe-Altenburg,
la chasse du lapin sauvage...
Sur cour, il y a le serveur et sa femme.
C'est coquet chez eux, il y a un lustre â gaz.
ll reste chez lui le matin, dort et joue de la cithare.
Sa femme travaille dans un grand magasin,
comme surveillante, â ce qu'elle dit.
ll avait déjâ été marié,
avec une femme qui le trompait abominablement.
Elle arrivait â le consoler, et â se réconcilier,
mais un jour, il s'est enfui.
Et au divorce,
c'est lui qui a eu les torts, pour être parti.
ll n'a pu prouver qu'elle le trompait.
ll a connu l'actuelle, alors qu'elle chassait l'homme.
Elle est du même calibre que la précédente,
mais un peu plus rusée.
ll n'y voit rien quand elle le trompe.
Cher Monsieur Tollmann,
dans l'affaire concernant votre fiille, je vous demande un honoraire
de 200 marks,
payable par traites.
A côté de chez vous,
c'est nous, les Greiner.
Et lui est aussi le gérant.
En fait, il ne se saoule pas trop,
mais parfois, il dépasse les limites.
''Les sociétés de surveillance protègent tout.
''Elles contrôlent dehors,
''à l'intérieur,
''branchent des systèmes d'alarme.
''Service de sécurité pour Berlin et environs.
''Surveillance pour l'Allemagne.
''Surveillance pour Berlin,
''et service de surveillance
''de l'Union des propriétaires fonciers.
''Société associée,
''Société de surveillance pour l'Ouest...
''Sherlock Holmes .. OEuvres complètes,
''par Conan Doyle.
''Société de surveillance, Laverie,
''Blanchisserie Apoll,
''Blanchisserie Adler,
''soigne la lingerie fine pour hommes et femmes.''
...comme l'affirme Staub, la relation hors mariage
est une extravagance et présente un danger, virgule...
Pardon, madame...
Eh bien...
C'est que...
je ne sais pas, mais...
vous entrez, et...
Pourquoi ?
ll ne fallait pas ? Vous m'avez fait signe !
C'est bon,
possible que je vous aie fait signe...
Alors, vous ne voulez pas ?
Eh bien bravo,
vous faites signe, puis plus rien !
Eh bien tant pis !
Couille molle !
Et au deuxième étage,
habite un vieux de 64 ans.
ll est polisseur de meubles, et chauve.
Sa fiille est divorcée, elle lui fait son ménage.
Je le vois sortir chaque jour.
ll a le coeur malade, je l'ai remarqué.
ll passe parfois boire une bière chez moi.
ll sera bientôt en congé de maladie.
Pour sclérose des coronaires, selon lui,
et myodegeneratiocordis.
J'ai retenu ça, pourtant c'est difficile.
Avant, il faisait de l'aviron, mais lâ... plus rien.
Le journal, la pipe,
alors que sa fiille
cancane dans le couloir. Une vraie pipelette !
Ça doit être moi.
lncroyable ce qu'on se trimballe dans l'estomac.
Des toiles d'araignées dans le coin gris.
Elles n'attrapent pas les souris.
J'ai envie d'eau.
Ce que je fais ne regarde personne.
Ça ne regarde personne !
Si j'ai envie de flemmarder, je flemmarde
jusqu'à après-demain.
Et si je veux rester couché deux jours,
je le fais, si ça me plaît.
Ça ne regarde personne.
Ce que je fais ne regarde personne !
Je vous ai entendu dégueuler.
Ce n'était vraiment pas beau.
Mais en pleine nuit, je ne pouvais pas vous aider.
J'ai laissé faire.
Premièrement : espèce d'idiot,
vous n'avez rien à dire !
Deuxièmement : si je reste dans ce taudis, de 8 h à midi,
ce que je fais ne regarde personne.
Ne vous en faites pas.
Je nettoierai, j'ai fait ça pendant la guerre,
chez les sanitaires.
J'ai nettoyé pire que ça.
Ça ne me dégoûte pas.
As-tu perdu ton coeur dans la nature ?
Je n'y ai pas perdu le mien.
J'avais l'impression
que l'esprit voulait m'arracher avec lui,
quand j'étais face aux Alpes géantes,
ou sur la plage d'une mer mugissante.
Ça bouillonnait et tremblait aussi dans mon corps.
Mon coeur était ébranlé.
Mais je ne le perdis ni à l'endroit
où niche l'aigle,
ni là où le mineur
extrait, dans les profondeurs,
le minerai.
Où ça alors ?
L'as-tu perdu dans le sport ?
Dans le Mouvement des Jeunes ?
Dans les mêlées politiques ?
Je ne l'ai pas perdu là.
Tu ne l'as donc pas perdu ?
Tu es de ceux qui ne perdent pas leur coeur.
De ceux qui se le gardent,
le conservent soigneusement, le momifient.
Est-ce qu'avec la mort tout est...
terminé ?
Lundi : Où est la foi ?
Mardi : L'homme peut-il changer ?
Mercredi : Etre juste face à Dieu.
Bonjour, M. le Pasteur,
je suis Biberkopf, travailleur occasionnel.
Pour l'instant, je suis chômeur.
J'ai une question :
que faire contre les maux d'estomac ?
Ça remonte dans la gorge. Aïe, ça reprend !
C'est la bile, ça vient de l'alcool.
Excusez-moi de vous parler en pleine rue.
J'entrave votre travail.
Mais comment lutter contre cette bile ?
Faut s'aider entre chrétiens.
Vous, vous êtes bon.
J'irai pas au paradis. Et pourquoi ?
Moi, je peux en parler, des criminels.
Sur l'honneur.
On l'a juré à Liebknecht,
on tend la main à Rosa Luxemburg.
Une fois mort, j'irai au paradis.
On s'inclinera en disant :
''Voilà Franz Biberkopf,
''un homme allemand, ouvrier.
''Honneur au drapeau noir-blanc-rouge.
''Lui au moins, il a pas flanché.
''Ce n'est pas un criminel comme ceux
''qui veulent être allemands
''et trompent leurs concitoyens.''
J'aurais un couteau, je les zigouillerais !
A ton tour d'aller voir le pasteur,
mon vieux,
pauvre vieux.
Si ça t'amuse, et si t'as encore de la voix !
Juré ! J'irai pas chez le curé.
Je vaux mieux que ça.
La prison est trop bien pour la canaille,
trop bien pour elle.
Moi, je connais la prison par coeur.
Une marchandise de première qualité,
c'est indiscutable,
c'est pas pour les crapules.
Deux fois deux font quatre,
c'est indiscutable.
Vous voyez ici... vous voyez ici un homme...
Excusez-moi,
j'ai si mal à l'estomac.
Faudra que je me contrôle !
De l'eau !
De l'eau !
Voilà.
Merci.
Vous êtes là depuis 3 jours,
à vous débattre, à crier,
et à gémir.
Vous en évacuez, de la sueur et des pensées !
Ça fait déjà des jours que...
je suis comme ça ?
Plusieurs jours.
J'ai pensé faire venir le médecin.
Mais je crois qu'il est préférable dans la vie
que l'homme décide ce qui est bon pour lui.
Oui, c'est vrai.
Alors ça fait des jours !
J'ai dû boire pas mal !
ll n'y avait pas que l'alcool,
il y avait autre chose.
Mais non ! Rien d'autre !
J'ai simplement trop bu, voilà tout.
Je vais descendre dans la rue, voir des gens,
me dégourdir un peu.
Trap... trap... trap...
un pied devant l'autre,
et l'autre devant le premier, voilà.
Biberkopf, comme un cobra,
les jambes vacillantes, est allé chez les juifs,
dans la Münzstrasse.
ll veut faire table rase.
Te voilà sur pied, Biberkopf !
ll fait froid, et tu es d'attaque.
Qui voudrait faire du porte à porte
et se geler les pieds ?
Sur l'honneur !
Enfin, j'ai quitté ma chambre !
Finis les cris de femmes !
Franz est à nouveau dans la rue !
Les gens font ce qu'ils peuvent.
lls ont des enfants,
des bouches affamées,
des becs d'oiseaux.
Ouvre le bec, ferme le bec.
Excusez-moi, Monsieur, mais...
les toits peuvent se mettre à vaciller,
à balancer.
lls peuvent glisser, les toits,
glisser en oblique, comme le sable,
comme une casquette.
Oui, ils sont tous...
installés en oblique sur la charpente.
Mais ça ne risque rien,
ils sont... ils sont cloués.
ll y a des poutres dessous, du carton bitumé.
Fidèle est la garde,
la garde du Rhin.
Bonjour,
Franz Biberkopf.
On se tient droit,
on bombe le torse,
nous sommes des Allemands.
Le directeur de prison l'a dit.
Les hommes arpentent tranquillement la rue,
les cochers déchargent,
les autorités gèrent les maisons.
Un appel retentit, semblable au tonnerre,
au cliquetis des épées...
Donc je peux aussi prendre cette rue.
Le type avec le chandail, je le connais.
Je le connais, il a du travail.
Je pourrais faire ça aussi... plus ***.
On saisit de la main droite,
on soulève, on empoigne,
et puis on frappe. Cogne !
Ça, c'est nous, les travailleurs.
Ça, c'est nous, le prolétariat.
Lève à droite, empoigne à gauche ! Cogne !
Lève à droite, descends à gauche ! Cogne !
Hommes et bétail ont le même sort
quand il s'agit de la mort.
quand il s'agit de la mort.
Un taureau est mené à l'abattoir.
Devant lui pendent des moitiés,
des quarts de bêtes.
Le taureau a le front large.
On le pousse devant l'abatteur,
qui lui donne un coup à l'arrière-train.
On empoigne le taureau par le cou.
La bête cède, étrangement facilement,
comme si elle était consentante,
après avoir tout vu et su
que c'était son destin.
Le geste du meneur serait-il une caresse ?
ll a l'air si gentil.
Le taureau suit le meneur,
incline la tête, le museau vers le haut.
Le couteau s'enfonce dans la gorge.
Le sang gicle sur le couteau,
sur le bras de l'écorcheur, le sang chaud.
C'est la métamorphose, ton sang vient du soleil.
Le soleil, caché dans ton corps, reparaît.
L'animal est soulagé.
C'est comme un étouffement, il râle.
Quand Job eut tout perdu,
tout ce que l'homme peut perdre,
ni plus, ni moins, il se retira dans le potager.
Job, tu es dans le potager !
Assez loin de la niche du chien
pour qu'il ne te morde pas.
Tu l'entends grincer des dents,
il aboie, il n'approche que d'un pas.
Si tu tentes de te lever,
il gronde, tire sur la chaîne, bondit,
bave et écume.
Job, voilà le palais,
les jardins et les champs qui t'ont appartenu.
Je ne connaissais pas
le potager où ils m'ont jeté,
ni les chèvres qu'on conduit le matin,
et qui passent devant moi,
en broutant l'herbe,
en mâchant et en se remplissant les joues.
Tout cela... m'a appartenu !
Job, voilà que tu as tout perdu.
Le soir, tu te terres dans la remise.
On craint ta lèpre.
Tu galopais dans tes domaines,
on se pressait autour de toi.
Te voilà le nez collé à la clôture, sur les escargots.
Ah oui...
Etudie les vers de terre.
Les seuls êtres que tu n'effraies pas.
Tu n'ouvres que rarement
tes yeux teigneux, pauvre misérable, fange vivante.
Qu'est-ce qui te tourmente le plus, Job ?
La perte de tes enfants ?
Celle de tes biens ?
Le froid de la nuit ?
Tes ulcères à la gorge... au nez, Job ?
Va-t'en !
Ouvre tout grand les yeux.
lls veulent maintenant me voler mes pensées.
Et s'ils le font, est-ce que ce sera dommage ?
Je ne veux pas de ça.
Même si ce sont tes pensées qui te font souffrir ?
Que personne ne prie à ma mort !
Je suis un venin pour la terre.
ll faut cracher à mon passage.
Tu n'arrives pas à ouvrir les yeux.
lls sont collés.
Tu geins, parce que tu es dans le potager.
La niche est ton dernier refuge...
et ta maladie.
Je n'ai plus la force.
Je n'ai plus la force...
d'espérer.
Aucun désir.
Je n'ai plus de dents.
Je suis mou.
J'ai honte.
C'est ça le pire.
C'est déjà écrit sur mon front.
C'est mon jeu.
Job, c'est ça la pire souffrance.
Tu voudrais savoir résister,
ou plutôt être un grand vide,
sans cerveau, sans pensées, être comme une bête.
- 73 -
- 47 -
Guéris-moi, si tu le peux !
Que tu sois Dieu ou Satan,
ange ou homme, guéris-moi !
T'accepteras cela de n'importe qui ?
Guéris-moi.
Je peux me faire payer cher.
Guéris-moi.
Je suis Satan.
Si je suis Satan, comment en viendras-tu à bout ?
Tu refuses de me guérir.
lls refusent tous : personne ne veut m'aider.
Ni Satan, ni Dieu,
ni l'ange, ni personne.
Et toi-même ?
Comment, moi ?
Tu ne veux pas, toi ?
Pardon ?
Qui t'aidera, si toi tu ne t'aides pas ?
Non, non, non...
Dieu et Satan, les anges et les hommes,
tous veulent t'aider, mais toi, tu refuses.
Dieu par amour, Satan pour te prendre un jour.
Anges et hommes, complices de Dieu et de Satan.
Mais toi, tu ne veux pas.
Dieu et Satan,
anges et hommes veulent m'aider ?
Personne ne veut m'aider.
Reste tranquille.
C'est comme ça,
t'es une brave bête,
tu sais que c'est le destin.
Elevage, abattoirs, boucheries
forment économiquement un tout.
L'entreprise compte 258 employés,
dont des vétérinaires, des contrôleurs,
des employés, des ouvriers...
Règlement du 4 octobre l900,
réglementation de l'essor,
livraison du fourrage,
diverses taxes,
taxe d'enlèvement des auges du marché de porcs.
1 7 fois 3 font 51, et...
tout est cher !
Ça devient difficile de calculer,
et d'affronter la concurrence.
Ce jour, ses premiers ulcères ont guéri.
Ce jour, ses premiers ulcères ont guéri.
Le soleil se lève, se couche,
on a sorti les poussettes. Février 1928.
Franz boit, par dégoût du monde,
par dépit.
Peu lui importe ce qui adviendra.
ll voulait être honnête,
mais il y a des salauds, des voyous,
aussi il renie le monde
et boit, quitte à devenir clochard.
Et au 2e étage, habite un vieux de 64 ans,
il est polisseur de meubles, et chauve.
Sa fille est divorcée, elle lui fait son ménage.
Je le vois sortir chaque jour.
ll a le coeur malade.
ll passe parfois boire une bière chez moi.
ll sera bientôt en congé de maladie,
pour sclérose des coronaires, selon lui,
et myodegeneratiocordis.
J'ai retenu ça, pourtant c'est difficile.
C'est moi.
Toi ?
Mon Dieu,
éteins la lumière,
je t'en prie...
lncroyable que tu m'aies trouvé... ici.
Je sais depuis longtemps où tu es.
J'ai toujours su où tu étais.
Mais cette fois, j'ai pensé
que je n'en finissais pas
d'être obligée de t'aider !
Je n'ai pas besoin d'aide,
je m'aide moi-même !
Franz, tu sais bien,
tu sais très bien, que je t'aime encore.
Et maintenant
que lda n'est plus là...
tu pourrais revenir chez moi.
Ecoute-moi,
je ne veux plus qu'une femme m'entretienne,
qu'elle fasse le tapin pour moi.
Je me le suis juré.
Et même si le monde entier
est plein de bassesses,
de saletés, de saloperies,
je me le suis juré, je ne veux plus.
Comprends-moi, s'il te plaît !
Oui, Franz, je comprends.
Mais sache que tu peux compter sur moi.
Je sais, Eva,
j'ai compris, c'est bon.
Je t'en remercie.
Mais je dois m'en sortir seul,
ou alors je sombre, soit l'un, soit l'autre.
Je n'ai plus le choix.
Maintenant, va-t'en, sois gentille, laisse-moi seul.
Tu veux de l'argent...
Non merci, Eva, je sais que tu veux m'aider.
Cet argent me serait bien utile,
mais je ne peux pas le prendre, je ne peux pas !
Voilà ce que font les gens,
toute la journée, et même la nuit.
lls escroquent.
Faudrait leur balancer un pot de fleurs.
Qu'est-ce qu'ils fichent ici, alors que j'y habite !
Vous êtes assureur ?
- Bauer. - Münzer.
Plus rien à faire, c'est du beau travail !
M. l'lnspecteur,
c'est déjà le 5e vol en 18 mois dans l'entreprise.
lls ont déjà percé le mur
pour éviter le système d'alarme de la porte.
Oui, les murs sont minces,
une véritable coquille d'oeuf de Pâques géant.
Et personne n'a rien vu, ni entendu.
Ou peut-être que si ?
Faites quelque chose. C'est plus possible.
ll n'y a rien à faire.
On devrait prendre les empreintes. On devrait.
C'est en cours, M. l'lnspecteur.
Parfait, c'est parfait, Wichmann.
Je les ai vus, je ne les dénoncerai pas,
mais s'ils osent revenir là où j'habite,
alors qu'ils n'ont rien à y faire, je descends.
Quelqu'un a parlé ?
ll m'a aussi semblé.
Rien entendu ?
Non.
Non.
Toi t'as parlé ?
Non.
Vous auriez peut-être dû parler à la police.
Je ne dénonce pas.
Même ces idiots.
Vous devez avoir raison.
Bonjour.
Bonjour, Baumann.
Vous savez quoi ?
Je sais ce qu'il y a de plus étrange au monde. Et vous ?
Oui, les hommes.
Exact.
Bonjour.
Je peux entrer ?
Entrez donc.
Ça t'a coupé la soif ?
Les hommes sont bien la chose la plus étrange au monde.
N'ayez pas peur, Biberkopf.
J'ai bien compris que les Greiner
veulent s'associer à ces voyous.
C'était leur intention, hier.
Mais cette nuit, Greiner a changé d'avis.
''Pourquoi partager,
''c'est vraiment stupide, c'est pas la peine !''
ll l'a convaincue d'agir avec lui,
sans les autres, aujourd'hui-même.
Tenez, vous êtes à sec.
Merci.
Greiner semble s'être arrangé avec les gars.
Oui, c'était le cas hier soir.
Aujourd'hui, il veut s'en défaire.
Est-ce qu'ils vont y arriver,
à eux deux, qu'en dites-vous ?
Difficilement.
Comme ils se méfient l'un de l'autre,
c'est facile de les posséder.
Elle vient de le confier au gamin.
Je crois qu'elle le reluque, voilà pourquoi.
Alors ?
Rien de spécial.
lls sont encore en bas, les Greiner.
ll en fera une tête, Greiner,
quand les autres débarqueront.
Faudra bien qu'il partage !
''Löser et Wolf, Berlin/Elbing.
''Meilleure qualité, pour tous les goûts.
''Cigares du Brésil, de la Havane,
''le Consolateur, le Liliputien N° 8,
''25 pfennigs pièce. La Balade d'Hiver,
''la boîte de 25, 20 pfennigs.
''Cigarillos N° 10 en vrac.
''Cape de Sumatra, en promotion,
''en boîtes de 100, à 10 pfennigs.''
Je bats tout,
tu bats tout,
il bat tout.
''Par boîtes de 50, par paquets de 10,
''expédition mondiale,
''le Boléro, une nouveauté qui séduit.''
Je bats tout, tu bats...
Tais-toi... je crois qu'ils arrivent.
ll est fâché, Greiner.
Pas mal fâché.
Alors ?
lls se disputent.
Voilà qu'ils se mettent à boire.
lls sont réconciliés !
C'est étrange,
il n'imagine pas qu'elle aurait pu le trahir.
Comment expliquer ça ?
Je suis sûr qu'il y a une explication.
Ça doit signifier...
qu'il l'aime plus qu'elle ne l'aime.
Oui, c'est bien ça.
Tu vas bientôt partir d'ici, non ?
Pourquoi ?
Comme ça.
J'en sais rien.
Mais moi je le sais.
Te voilà guéri. Tu l'as suée, ta maladie.
Baumann,
allons Baumann, réveille-toi !
Les flics sonnent à leur porte comme des dingues.
Tu partiras sans doute aujourd'hui.
Ça me rend triste,
je ne sais pas pourquoi.
Montons dans la voiture !
Vous avez intérêt à quitter les lieux.
Que voulez-vous ?
La clé de mon bistrot !
Allons-y !
ll n'y a personne ?
Mais il vient d'entrer !
ll ne va pas tarder.
Dis-lui que j'ai rapporté la caisse.
C'est terminé !
Eh oui...
Bon, alors...
Bonne chance... Job.
Merci,
Satan !
L'air est glacial, février.
On se balade en manteau.
Si on a une fourrure, on la porte.
Les femmes gèlent dans des bas fins, mais c'est joli.
Sur l'Alexanderplatz, la locomotive à vapeur.
Les gens regardent la machine qui cogne.
Toute la place n'est qu'un chantier.
D'où vient l'argent ? Berlin est riche,
nous, on paie les impôts.
Les ouvriers arrivent tôt,
qu'il fasse froid ou non.
Prépare la cafetière !
Les tartines ! On part.
Les resquilleurs dorment encore et nous saignent.
Celui qui croit pouvoir améliorer le pain
en enrichissant la farine d'additifs,
trompe le consommateur.
La nature a ses lois, et se venge des abus.
L'état de santé déplorable des peuples civilisés
provient d'une nourriture enrichie artificiellement.
Vouloir régler par contrat la vie sexuelle des époux.
Ça alors, Biberkopf !
Ça fait un sacré bout de temps qu'on ne s'est vus !
Oui, un sacré bout de temps.
T'as disparu bien longtemps.
Un problème ?
Non, je n'ai pas eu de problème.
J'ai simplement...
J'ai eu besoin de calme,
d'être un peu seul.
On en a parfois besoin.
Moi en tout cas.
Oui, on a tous besoin d'être seul,
d'avoir le temps de réfléchir.
J'ai pensé...
recommencer avec les journaux.
Eh bien...
les affaires ne marchent pas trop.
J'ai maintenant 65 ans.
Et voilà que j'ai du rhumatisme,
au dos, ça m'a pris d'un coup.
Justement,
le rhumatisme, ça commence à 60 ans.
On n'embauche plus dans les usines.
ll y a 7 mois,
ils m'ont opéré,
là bas, à Lichtenberg.
On m'a enlevé une couille.
ll paraît qu'elle était tuberculeuse.
Envolée, ma couille !
Mais j'ai encore les douleurs.
Eh bien... dans ce cas sois prudent,
sinon ça sera au tour de l'autre.
Eh oui...
t'as 65 ans,
et une couille en moins.
T'as des rhumatismes dans le dos, c'est la vie.
ll faut que t'aies des contacts, voilà tout.
Et un bon emplacement.
Parce que quand il pleut, c'est mouillé.
Et ça dépend un peu de ce qui se passe dans le monde.
Le sport se vend bien.
Les changements de gouvernement.
Après la mort de Ebert, on s'arrachait les journaux.
Ne fais pas cette tête,
tout ça n'est pas si grave.
Si tu reçois une tuile sur la tête,
plus besoin de réfléchir !
Tu vois !
''Attentat à la loi protégeant les locataires.
''Une revanche pour Zörgiebel.
''Je quitte le parti qui trahit les principes.
''Censure anglaise sur Amanullah.
''Les lndes ne doivent pas l'apprendre.
''La crise menace au Reichstag, on parle d'élections en mars.
''La lutte en Allemagne centrale :
''on fait appel à des médiateurs.''
Tu sais que Meck, ton ami,
vend maintenant des fringues, à la Clemensstrasse.
ll fait de bonnes affaires.
Franz !
Meck !
Mon petit Franz !
J'aurais juré...
... que j'avais replongé ?
Non, mon gars, c'est terminé, une fois pour toutes.
T'es sorti avec Lina ?
Oui.
Elle était seule, se sentait seule.
Tu m'en veux ?
Au contraire, je préfère
qu'elle soit consolée, plutôt que seule,
parce que je suis parti. Où est-elle ?
Un jour, elle est partie.
C'est la vie.
On se rencontre, on fait connaissance,
et un jour on se quitte.
Qu'est-ce que tu vends ?
Je vends des fringues.
Des robes, des jupes, des pantalons...
Et tu sors ça d'où ?
Je t'en pose, des questions ?
Vous filouterez jusqu'à ce qu'on vous coffre.
Pas plus longtemps, je vous le dis !