Tip:
Highlight text to annotate it
X
Précédemment, dans Malviviendo...
C'est pas une maison, ça. C'est une merde.
Je pris conscience que ma vie ne valait pas un clou.
CETTE SÉRIE EST GROSSIÈRE ET ABSURDE, UN MAUVAIS EXEMPLE
ÉTANT DONNÉ SON CONTENU, NOUS VOUS CONSEILLONS DE FUMER
AVANT DE LA REGARDER
C'est parti !
J'vais aux Banderilleros voir si j'peux pé-cho
Des boulettes tout juste chiées, du bon pollen, de la marijuana
Je perdrai la journée, je la passerai à fumer
Bande de junkies de merde, me cassez pas les couilles
Quand les flics viendront tu vas te chier dessus
Donne-moi 5€, mon pote, pour manger et me piquer
Viens aux Banderillos, on s'verra dans un bar
Sauvés par le gong.
Vous me direz : "Quel gong de merde !
Mets à ce mec la branlée qu'il mérite !".
J'me le suis dit, la 1ère fois, avant de savoir qui est son père.
Don Luis. Dans les années 90, il était le roi et la loi du quartier,
chef des rues et des portefeuilles. Depuis le bas de l'échelle,
il est arrivé au trône dans les années 80.
Il adore le raconter.
J'étais comme toi, avant.
Un rat en bas de l'échelle.
Mais peu à peu, j'en suis arrivé là. Tu sais comment ?
Grâce à trois qualités importantes.
Numéro un : l'ambition. Le désir d'être respecté.
Parce que quand j'étais petit,
je me suis juré de ne pas être la merde qu'est mon père.
Numéro deux : mon refus total de la drogue.
Dans les années 80, ils étaient tous accros à l'héroïne.
Donc ils étaient tous plus faibles, plus bêtes et plus lents que moi.
La drogue est un fléau, petit. Il faut la contrôler.
Donc,
si tu la vends dans mon quartier, tu dois me le dire, d'abord.
Après, tu me donnes ce qui m'appartient,
pour les frais de direction et d'administration.
Il faut respecter la loi. Sans loi, il n'y pas d'ordre.
Et celui qui désobéit
mérite d'être puni.
Alors,
tu as quelque chose à dire pour ta défense ?
Et ne me dis pas que tu ne le savais pas.
S'il vous plaît, arrêtez d'me frapper !
Numéro trois :
assume les conséquences comme un homme.
Les grands de l'histoire pleuraient ?
Napoléon, Mussolini, Queipo de Llano...
- Tu crois que j'ai déjà pleuré ? - Pardon, Don Luis, s'il vous plaît !
J'le ferai plus, s'il vous plaît ! J'suis désolé !
Non. Les excuses, c'est une ressource tardive.
Il faut penser avant d'agir, petit.
Ces règles sont toujours en vigueur dans ces rues.
Même s'il n'est plus le même : rhumatismes, cholestérol,
hypermétropie, une femme et deux enfants l'ont assez calmé,
les gens le traitaient toujours comme un Corleone.
Même la nouvelle génération, qui ignorait pourquoi
il fallait respecter un plouc à lunettes, le respectait.
Les grands du quartier qui furent ses fidèles commerciaux,
le payent encore, presque pour le geste, maintenant.
La police.
Elle n'est plus corrompue : elle corrompt pour être de son côté.
Même si elle ne lui doit plus grand chose.
On craignait tous qu'un jour il vienne nous chercher
même s'il ne bouge plus trop.
Les voilà, Papa. Y a même les amis du boiteux.
- Ils allaient... - Le noir, dégage.
J'ai dit "noir", pas "latino de merde".
Je suis... des Canaries.
Eh, vieux, un peu de respect.
J't'ai dit quelque chose ? J'te connais ?
Carneperro part parce qu'il veut. Ça pue, ici, ça me dégoûte.
- Et reviens pas ! - Qu'est c'que tu fous ?!
Elle est trop forte, sa tronche. Regarde le noir, comment il court !
On dit "personne de couleur", un peu d'éducation !
- C'était pour ça le flingue à blanc ? - Non, pour le film de la fac.
Putain, rentre !
Ton ami, il rentre chez lui et il prend la sauce tomate de sa mère la pute.
J'en ai ras le cul de bouffer le riz à la cubaine avec du ketchup.
Excusez mon fils. C'est le souci d'épouser une bonne et conne,
les gènes...
Il est en communication audiovisuelle, un truc de tapettes.
J'arrête pas de lui dire.
C'est comme puéricultrice ou couture.
Tu t'fous de la gueule de mon fils ?
Moi ? Me mettez pas ça sur le dos,
les coupables sont les deux en caddie !
Tu as raison. Allons droit au but.
Le soldat,
et le justicier.
Vous faites n'importe quoi. Il y a des règles ici.
On ne voulait pas vous déranger, c'est un problème personnel.
"Personnel" ça n'existe pas entre huit personnes.
- Un problème personnel entre... - T'as des feuilles à rouler ?
Bien sûr ! Tiens.
Qu'est-c'que tu fous là, Papa ? Lui donne rien, toi !
À ton avis, le chieur ?
J'vais t'envoyer en maison de retraite, Papa !
C'est curieux qu'un mec qui contrôlait tout un quartier
ne contrôle pas son foyer. C'est ça qui avait dû l'adoucir.
Bon, on disait,..
On va faire ça comme on l'a toujours fait,
de la façon la plus juste :
un contre un, un duel au soleil.
Deux impliqués,
deux fauteuils.
Et j'veux pas de bande de potes ni de conneries.
Je hais les flipettes qui ont besoin des autres pour s'enhardir.
- Je suis d'accord ! - Bien sûr que t'es d'accord.
On le fera comme à mon époque : au Marchón à 12h 00, en public.
Mulo,
c'est moi qui me charge des paris. Allez, dégagez de chez moi.
On est rentrés avec la sensation qu'on ne dormirait pas beaucoup,
simulant une grande tranquillité et feignant avoir le caleçon propre.
On allait mieux qu'avant, ceci dit. Don Luis nous avait rendu service.
Au moins, c'était plus équilibré et au un contre un, franchement,
je mise sur Kaki. C'était fair-play.
Zurdo, ta voiture ! Viens !
CHAPITRE 10 : À VENDRE
Ma voiture !
Fils de pute ! Fair-play, mes couilles !
Mec, tu peux plus rien faire !
En plus elle était bonne pour la casse.
- Mais elle est chargée, putain ! - Chargée ? De quoi ?
J'ai vu Ramon hier, il était content. Avec Barbara, j'sais pas pourquoi.
D'ailleurs, il est super maigre.
Il m'a fait une super offre, mec.
Comment ça "une super offre" ?
Ces enculés avaient vraiment frappé là où ça fait mal.
Ces chiens auront le sourire aux lèvres.
Si seulement ça n'était pas un duel...
Une heure à poireauter et pas un pompier !
Si c'était chez moi...
- Mec, tu veux un jus de fruit ? - T'es vert, Kaki !
- "Vert", qu'il dit ! - J'ai mal au coeur, j'ai la gerbe.
Oui, ça n'était pas le moment de rire.
Bien sûr, on n'était pas heureux, on avait eu de meilleurs jours.
Mais dans le fond, après une telle journée,
on devait se réjouir d'être encore en vie.
Sérieux, j'suis pas bien.
- Enfoirés, rigolez pas. - T'es près du sol !
Si j'pouvais, j'vous obligerais à tous me sucer la bite.
Le feu avait dû cramer le matériel. De Ramon, pas de doute.
Vive Manysville !
Vous vous en doutez, je n'avais pas assez dormi.
Je m'étais habitué à cette sale tête et ces cernes chroniques.
Ça n'est pas une vie saine.
Toujours impulsif.
On ne devrait pas trop penser les choses : elles s'érodent.
J'avais pris ma décision.
- Tu pars ? - Mateo, ça fait un bail !
- Tu pars ? - Oui, je pars.
- Tu fais ta tapette ? - Quoi ?
- Pourquoi tu pars ? - J'veux être une personne normale,
dans un endroit où les choses avancent.
- Il flippe, le crétin... - Pardon ?
J't'ai raconté le truc de la mouette ?
- Six ou sept fois. - Tu sais comment j't'appelais ?
- Le Corbeau. Tu sais pourquoi ? - De *** ?
Aussi, oui.
Mais parce qu'ils sont des animaux super malins et intelligents,
ils savent construire leurs propres outils et ils s'adaptent à toute circonstance.
Et ils ont des locks. T'es le Corbeau, toi.
Ça fait longtemps qu'on s'est pas vus, j'ai du mal à te comprendre, Mateo.
J'suis un peu pressé, OK ?
Prends soin de toi.
*** !
Un euro, en souvenir du bon temps ?
Enfoiré, ça se comprend sans sous-titres, ça !
Dans ce genre de quartier, c'est comme dans les villages,
le temps libre, le manque de discrétion,
et l'esprit romanesque et excitant qui grandit avec l'ennui.
- Comment ça s'passe ? - L'enfoiré de Don Luis, ça commence.
Bonjour, messieurs, et mesdemoiselles déguisées.
Bien,
je vois beaucoup de nouvelles têtes.
On dirait que le quartier a changé depuis la dernière fois.
Vous savez quoi ?
Il y a quelques années, vos parents étaient où vous êtes maintenant.
Je les connais tous.
Et ils sont pareils que vous :
des parasites de merde.
Et attendez,
je connais aussi vos mères.
Je les connais toutes.
J'vais acheter du ***, vous en voulez ?
- Moi, j'suis couvert. - Moi, j'veux du Poppers.
- Du Poppers ?! - Bah ouais.
À l'époque, il y avait d'autres règles,
un autre climat, d'autres drogues.
Mais vous, vous n'êtes et vous n'auriez pas été
suffisamment résistants pour survivre.
Quand deux gentlemen avaient un différend,
ils le réglaient dans l'arène, avec une bonne paire de couilles.
Maintenant, vous faites un Pro Evolution.
Mais ça, c'est une autre histoire.
Le fait est qu'aujourd'hui, on revient au duel.
Et en réponse au changement de génération
et à la particulière condition des impliqués,
j'ai pensé à un nouveau jeu :
la course des chariots de feu !
C'est bon.
Le jeu est très simple :
cette voiture a deux cordes
auxquelles on accrochera nos soldats.
La voiture parcourra 80 mètres
avant qu'ils se lâchent et continuent seuls.
Perdra le premier qui freinera ou sautera
avant d'atteindre le précipice final.
Putain, c'est chaud !
Excusez-moi, Don Luis.
- Dis-moi, petit. - Juste un truc.
J'vous donne mon point de vue sur ce que vous et...
votre vieille école proposent.
Bien, ***, laisse-moi seul. C'est ma guerre.
OK, Rambo. Mais écoute, je sais qu't'es un type dur mais...
- freine avant de tomber, OK ? - Écoute, Jésus,
j'ai enterré mon argent chez moi, près de l'arbre, sur la colline.
S'il m'arrive quelque chose, tu sais c'que t'as à faire.
Si j'm'en sors et que je retrouve pas l'argent,
- sur ma vie, j'te choppe. - OK. Bonne chance.
- T'as pris les paris ? - Euh... bien sûr.
Faites gaffe, c'est le diable qui mène la danse.
- Accroche les lames. - L'important c'est de participer.
Bien, attention : les remorques sont attachées.
Mesdames et messieurs, le spectacle va commencer.
Ladies and gentleman, the show must go on !
C'est pas un duel entre gentlemen, ni toi ni moi ne le sommes.
Pour ma part, on est quitte.
Vous avez jamais été aussi loin de la paix.
Putain, avant c'était une meuf en bikini.
Une junkie de 40 kilos mais une chatte, pour l'amour de Dieu !
La voiture démarrerait à pleine vitesse
et les emmènerait à Perpète les Oies.
Quoi qu'il arrive au moment le plus intéressant, on verrait rien.
Donc le spectacle serait pourri et les parieurs seraient divisés.
C'est pas commercial. Ça l'était quand t'étais à la mode.
De toutes façons, au final, ce serait un pari nul,
parce que je les connais, ils tomberaient ensemble.
Bordel de merde... Enfoiré, t'as raison !
Et les gens verraient qu'y a aucun précipice, ici.
C'est un terrain vague, comment tu veux qu'y en ait un ?
- Tu proposes quoi, p'*** malin ? - Une bataille à couteaux !
Qui t'a parlé à toi, sale nain ? Bon, foutez-moi la paix !
Vous y connaissez que dalle.
Bon, on change de plan. On oublie la voiture, c'est pourri.
On va le faire traditionnel, comme on l'a toujours fait :
une bataille à couteaux.
Venez là, formez un cercle, et que les chiens se battent.
- T'as pris les paris ? - Euh... Bien sûr.
Faites gaffe, c'est le diable qui mène la danse.
Accroche les lames, accroche-les, bordel !
Merde, j'viens d'avoir un déjà-vu ! J'en ai rêvé, mec !
Il a pas ton habileté, c'est un novice avec la chaise.
C'est gagné d'avance, Kaki.
- J'mise ça sur Kaki. - On sera deux.
Bon, on arrête les conneries. On s'bouge le cul, c'est parti !
Les mecs, j'me suis endormi et c'est tout c'que j'ai pu trouver,
j'les ai pé-ta à ma mère.
- Celui-là pour toi. - Quelle merde.
Et le tien. C'est tout c'qu'y a.
Sergent,
j'sais pas pourquoi vous avez empêché ce re-noi de m'ôter la vie,
mais vous auriez pas dû. Vous aviez tort :
moi, j'suis un gentleman. Et on est quitte.
Par contre, avec un p'*** trou.
J'vais t'tuer ! Lâchez-moi, bordel !
Et bah ! Il t'a défoncé. On a perdu de l'argent.
J'aurais pas dû parier. Attends, le prends pas comme ça !
Attention !
Tu fais quoi, hippy de merde ?! Espèce de pédale !
Ton haleine sent la merde !
Bien sûr que j'suis vivant, soyez lucides, bande de nazes.
Un gilet pare-balles !
J'vais à la plage avec !
Ça s'fait pas, ça. Il a enfreint les règles.
Excusez-le.
Le jury populaire en décidera.
Peut-être que dans ce quartier, il y a peu de culture et de vocations
mais celui qui a si peu, qui vit au jour le jour,
se maintient par la force, l'honneur, la justice objective du bien et du mal.
Les règles de la vie.
Heureusement qu'avec les paris j'ai gagné un paquet de maille !
- Moi aussi ! - Moi aussi !
Moi aussi, j'avoue.
- Qu'est c'que tu fous là, toi ? - J'suis là depuis ce matin.
J't'ai pas vu, ma gueule !
J'suis arrivé, j'ai misé sur lui et j'me suis endormi là.
Eh, l'important c'est moi, on m'a tiré une balle, putain !
C'est ça, ouais. Ce rajouteur !
À part quelques détails sans trop d'importance
qui changent tout à coup, tout sera pareil demain.
Pareil qu'hier.
Mets pas ta bouche !
Va t'faire foutre, hippy de merde.
J'fais quoi avec ça, moi ?!
Tôt ou ***, on se rend compte que rien ne change.
Les mêmes choses, les mêmes rues,
les mêmes gens, le même trafic, le même rythme, les mêmes junkies,
les mêmes ordures,
les jours qui commencent à l'heure où mes cours se terminent,
la même rengaine.
Ça va, *** ?
Ça va, *** ?
Et la sensation intermittente d'être hors de propos.
Quoi d'neuf, mec ? Ça roule ?
Je ne peux pas avancer là où rien n'avance,
là où la monotonie t'écrase et te fait mal,
où rien de nouveau n'arrive jamais, jamais de surp...
Tout s'était bien terminé.
Enfin, Kaki avait résolu ses problèmes avec le sergent et avait triomphé.
Moi aussi j'avais misé et bien gagné. Mais vous savez qu'il est bizarre,
un ermite fou qui ne croit pas en l'argent.
Il enterra tout dans sa cachette avec ses pesetas et ses louis d'or.
Postilla avait gagné aussi, il fêta ça comme il se doit.
Arriva ce qui arrive souvent : il perdit le contrôle
et se réveilla dans un port étranger.
Alors qu'il priait pour que ce soit le Portugal et non le Brésil,
il découvrit qu'il lui restait encore pas mal d'argent.
Il souhaita que ce soit Rio de Janeiro.
Zurdo m'a dit qu'il...
Va-t-en !
Allez !
Regarde !
Va chercher !
Zurdo avait beaucoup misé. Il voulait me montrer quelque chose.
Je me suis dit qu'il avait acheté quelque chose, vert et bourgeonné.
J'avais fait un achat important, moi aussi : mon billet de retour.
Putain !
- Ça va, ma couille ? - Salut, ***.
J'profite du soleil. C'est quoi ce rat ?
- C'est pas un rat, c'est une chienne. - "Une chienne", qu'il dit !
Putain, ils ont retourné ta maison, ces fils de pute !
Mais non, j'ai vérifié, ils ont rien touché.
Ah bon...
Et Zurdo ?
Ça fait un bout d'temps qu'on l'attend, avec Postilla.
Il est mal tombé.
Eh, je sors ma bite, j'lui mets sur la gueule et on fait une photo ?
- T'es content, aujourd'hui ! - Bah tiens !
Et bah, Shumaique ?
- Un peu flashy, non ? - Tu veux dire ?
Écris "je vends de la drogue" sur un latéral.
C'est une grosse caisse pour un mec qui bosse pas.
Putain, cette caisse de dingue !
Si j'avais su, j'aurais crâmé la Peugeot !
Attends, la vraie surprise elle est dedans.
Une p'tite beuh, non ? T'as vu Ramon ?
Je savais qu'on était chez Kaki : cette odeur de merde, c'est la tienne.
Quel enfoiré !
J'ai tellement entendu parler de Rata que je peux le résumer en 7 mots.
Quoi d'neuf, mec ?!
Putain, mon pote, ça fait tellement longtemps !
- Jésus. - Toni, Rata.
Avant que j'arrive, ils étaient 4 aussi.
- Alors, t'étais où, mec ? - J'étais loin.
Dans des endroits que vous pouvez pas imaginer.
C'est un fantôme, ce type. T'as pas changé !
J'ai apporté des bières pour fêter mon retour définitif.
Il a changé, hein !
Le Rata d'avant n'aurait pas dépensé un centime !
Rata avait passé pas mal de temps à l'étranger.
Un jour il avait disparu, comme ça, sans prévenir ni dire au revoir.
Il avait commencé à parier et revendre des billets de spectacle,
donc on a cru qu'il avait des dettes et qu'il devait se cacher quelque temps.
Quand il est parti, tout était assez différent...
HUIT ANS PLUS TÔT
Ça s'appelle "narcolepsie", une maladie du sommeil.
C'est pour ça que j'me suis endormi.
J'ai pas sniffé d'la colle, j'me suis pas branlé, rien à voir.
- Et... ça se soigne ? - Pas du tout. C'est à vie.
Adieu à mon rêve d'être pilote !
Tant pis, je serai prêtre ou fonctionnaire.
Quelle merde...
Moi, je veux toujours être gardien de la paix.
Sinon, bah...
je vendrai du ***.
Le mecs, j'vous présente un pote que j'ai connu au camp de junkies.
Il est trop fort. Il s'appelle Cookie.
- Cookie ? - Mais quel "Cookie" ?!
J'm'appelle Kaki !
Un G.I. Joe sans queue de cheval.
Rigolez pas, bande de gamins !
Avec vos gueules de suce-bites !
Et toi, pourquoi tu rigoles, Kurt Cobain ?!
La prochaine fois, j'vous tue. Tous les deux !
- Trop fort, le vieux. - Du calme, messieurs.
Zurdo et Postilla.
Et vous vous moquez de moi... Bah voyons !
T'es pour Oviedo, toi ?
Il porte que des maillots de foot, mais il est pour...
Zurdo, t'as plein de maillots de foot. T'es pour quelle équipe, en fait ?
Vous le savez pas ? Moi, j'suis pour...
- Le truc de ouf ! - Je l'aurais jamais dit, hein !
Vous rigolez, mais plus *** ou jouera en Coupe d'Europe.
C'est L'Équipe qui le dit.
"Plus ***", qu'il dit. En 2010, au moins ?!
En 2010 y aura plus de foot, y aura d'autres sports.
Des courses de voitures volantes, de Goku, de vaisseaux freestyle...
En 2010, on sera tous morts.
À lui, on lui mettra des jambes de robot sur ressorts,
pour qu'il saute d'immeuble en immeuble.
Toi, tu vas tomber d'un immeuble, ouais.
Et on pourrait te greffier un nouveau cerveau.
- C'est quoi "greffier" ? - On pourra p't'être me soigner !
C'qui est sûr, c'est que j'aurai plein de maille.
Et un château loin de ce quartier pourri.
J'inviterai tout l'monde à mes teufs. J'aurai pas une, ni deux, ni trois,
mais trois caisses de dingue.
"Pas une, mais deux, mais trois", il est trop fort !
Il se surpasse aujourd'hui, Zurdito !
- C'est trop bon de te voir, mec. - Messieurs, j'y vais, j'ai à faire.
- Déjà, enfoiré ? Reste un peu ! - J'peux pas, mec.
- Kaki, tu gardes la chienne ? - Ce rat, là ?!
C'est une chienne, Kaki, elle va grandir. Elle s'appelle Negra.
- Ça, avec du riz, c'est trop bon. - Laisse tomber, t'inquiète.
Avec Zurdo ?
Il a eu de mauvaises expériences avec les animaux.
- Ça roule, mec ? - Ça va, *** ?
C'est mon chat, Nelson.
- Il est beau, hein ? - Ouais.
J'aime pas trop les chats, moi. Je préfère les chiens.
Ils sont affectueux, ils viennent quand tu les appelles.
Mais non, il est super affectueux et trop bien dressé.
Si j'le lâche et je l'appelle, il revient direct.
- Arrête ! - J'te jure. Regarde.
- Tu l'as ramassé aujourd'hui ! - Nelson, bouge !
Nelson, viens !
- Nelson ! - Les chats n'obéissent pas, Zurdo.
Bon, j'me casse, mec. Bonne chance avec le chat.
Pas toi, mon chat, Nelson !
- Qu'est c'qu'il y a ? - Pas toi, mon chat !
- Nelson ! - Il est dingue, ou quoi ?
J'le connais pas, ce type.
Avec Postilla ?... Peut-être. Tu peux pas te fier à ces gens.
Bon j'y vais. À plus.
- Ciao, ***. - À demain, ***.
Adieu.
Ils n'imaginaient pas que c'était mon dernier au revoir.
Je me demande si je leur manquerai.
Kaki ! Si ta bedaine est pleine de gaz comme celui-là, oublie !
Mais non, elle est pleine de bière.
Mate la chatte là-bas, gamin !
Elle t'aurait plu celle-là, Postilla. Des tatouages jusqu'aux yeux !
Il est vieux le maillot que tu portes, là.
- Ça fait belle lurette ! - Il date de quand...
le Recreativo a gagné la Liga, un an avant ça.
Ça fait un bail ! C'est plus vieux que Dubovsky !
C'est dommage que le foot ait disparu en 2015.
Cette mode du badminton...
Quel sport de tapette, le badminton ! Sa mère la pute.
L'autre jour, mon petit-fils m'a demandé 50€.
- Pour aller au cinéma. - 50€ ?! Sa race !
J'me souviens des 100 balles que me donnait mon père.
Avec, j'allais au ciné et j'avais assez pour des réglisses.
- Tu te souviens de... - Tu te souviens de... *** ?
- Qui ça ? - Il adorait le ciné.
- Perro ? Celui qui... - Non.
- ***, la vieille ! - "La vieille" ?!
***, avec des locks.
Toujours crade. Non ?
- Tu te souviens pas ? - J'me souviens de Perro de... non.
J'ai dû le rêver.
Eh ! Tu te souviens de c'que je disais ?
Ça vous faisait rire.
C'était quoi, déjà ?
Pas un, ni deux, ni trois...
- Quatorze ! - Ou quarante ans que tu dis plus ça !
Et que t'as les doigts atrophiés.
Non, non !
Tu vas devoir te débrouiller toute seule.
Bonne chance, Negra.
Ça aurait brisé le coeur du Jésus d'avant de l'abandonner
dans cette jungle parsemée de routes.
Aujourd'hui, ce coeur bat la même mesure :
lente, au rythme de ces rues où rien ne changera jamais.
Et si ça changeait, personne ne le remarquerait.
UN JOUR JE VOUS RACONTERAI L'HISTOIRE DE FORME
Je pourrais inventer l'histoire et laisser une bonne image,
mais dans le fond, vous sauriez que ce n'est pas la vérité.
C'est difficile d'être heureux. Tout est difficile, dans la réalité.
C'est dur de me souvenir de la fin d'une étape importante de ma vie.
Mais bon, ça n'était que le début.
SOUS-TITRES: Juliette Mora juliettemora@hotmail.fr