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D'une crise à l'autre. Qu'est ce qui importe vraiment ?
Ce qui me pose problème c'est que plus on a de médias, plus on croit avoir accès aux "informations",
plus on devient cynique, indifférent
Dans nos pays riches, on devient blasé.
Blasé des problèmes des autres.
Et bien sûr, depuis cette grande crise systémique, financière, économique et sociale
qui nous a frappés il y a tout juste un an,
notre capacité à se rendre compte des ces problèmes s'est encore réduite.
Bon d'accord, nous avons de gros problèmes.
Le chômage augmente, tout comme la violence. Il y a encore de gros progrès à faire pour la condition des femmes.
Mais quand même, voyez ce qui s'est passée en Guinée !
Il y a 10 jours. Un massacre.
Des femmes violées dans un stade, par l'armée. Des femmes enfermées dans des containers,
et jetées dans la mer.
Avez vous vu, ou lu, la moindre information à ce sujet ?
Les Droits de l'Homme sont un élément essentiel de prévention et de la gestion des conflits et des crises
Les violations des Droits de l'Homme, surtout quand elles sont de plus en plus importantes,
sont souvent un très bon indicateur du risque d'escalade vers un conflit meurtrier.
Elles sont aussi, inévitablement, liées à la guerre.
Et nous le constatons de plus en plus sur les zones de conflits où nous opérons.
Nous savons que les violences sexuelles sont de plus en plus associées à la guerre.
Il est difficile de dire si le phénomène est nouveau, où s'il se remarque davantage actuellement.
Cette question des violences sexuelles se pose aussi pour les abus domestiques, l'inceste, le harcèlement sexuel...
Est-ce un phénomène moderne ? J'en doute.
Je pense plutôt qu'il est désormais mis en avant avec plus de force que par le passé.
On a trop tendance à ne voir la paix que comme la fin des combats
en oubliant qu'il s'agit aussi de reconstruire des vies.
Un jour, au Sud-Soudan, j'ai demandé à une jeune fille : "Qu'est ce que la paix pour toi ?"
Elle a regardé ses pieds et m'a dit : "La paix, c'est avoir des ongles de pieds."
Depuis 16 ans, elle n'arrêtait pas de marcher et ne restait pas plus de 5 jours au même endroit.
Elle avait été enlevée plusieurs fois par des rebelles, forcée à leur porter des munitions et de la nourriture,
et elle a sans doute été violée.
Et elle n'avait plus d'ongles aux pieds à force de marcher depuis 16 ans.
Et ce n'est que grâce à un accord de paix
qu'elle a pu enfin s'arrêter et voir ses ongles repousser.
Nous devons donc appréhender la paix du point de vue des ongles de pieds.
D'abord, nous devons donner plus d'argent directement aux femmes.
Actuellement les femmes, et les filles, ne reçoivent que 0,5%
des aides destinées aux causes des femmes.
Il faut faire évoluer cette part de l'argent qui va aux femmes et aux filles.
Ensuite, sur les questions de crise alimentaire, d'agriculture,
il faut s'adresser non aux hommes, mais aux femmes !
Les femmes représentent 70% des agriculteurs.
Enfin, les femmes doivent être présentes en nombre dans les négociations de paix.
Pas seulement une femme entourée de 100 hommes, mais autant de négociatrices que de négociateurs.
Car faire la paix ce n'est pas seulement finir une guerre,
c'est aussi reconstruire la vie pour les civils.