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K:J'ai failli arriver en retard ce matin.
J’ai un gros rhume.
Voulons-nous poursuivre ce dont nous parlions avant-hier?
Oui ?
Il me semble que nous n'allons jamais au fond des choses.
Nous abandonnons à mi-chemin.
Je pense que nous ne sommes pas assez sérieux pour approfondir.
Si vous le permettez, j’aimerais discuter avec vous,
non seulement de ce dont nous avons parlé,
'penser ensemble', mais encore du problème de la sécurité;
pourquoi les êtres humains, partout dans le monde,
sont-ils en quête de sécurité psychologique?
On a besoin de sécurité physique.
Il nous faut nourriture, vêtements et abri.
Et il semble qu'au cours des millénaires l’homme n’ait pas pu
organiser sa société afin que chacun puisse se nourrir, se vêtir et s'abriter.
Bien des révolutions, totalitaires ou autres, se sont efforcées
d’y parvenir, mais elles n’ont apparemment pas réussi.
Notre quête de sécurité physique, ce désir de sécurité physique
se serait-il emparé du terrain psychologique ?
Comprenez-vous ma...?
On a besoin de sécurité physique et c'est le rôle d’une bonne société.
Nous allons voir tout de suite ce qu’est une bonne société.
Pourquoi les êtres humains n'ont-ils pas été capables, bien qu'ayant
la capacité et l'énergie nécessaires, de veiller à ce que
tous les humains aient assez de nourriture, d'habits et un toit.
Voilà un des problèmes.
Voici l'autre : chaque être humain
est en quête de sécurité psychologique, intérieure,
comptant sur une croyance, s’y accrochant,
espérant trouver la sécurité dans une telle croyance,
dans un idéal, une personne, un concept ou une expérience.
Peut-il jamais trouver la sécurité dans aucun de ces éléments?
Comprenez-vous ma question?
Et s’il ne la trouve pas, pourquoi s’y accroche-t-il?
Comprenez-vous ma question?
Si vous permettez, réfléchissons ensemble à cette question.
C’est-à-dire, si vous le voulez bien, écartez votre propre orgueil,
vos préjugés singuliers,
vos conclusions personnelles et réfléchissons ensemble à ce problème.
Ce qui signifie que vous n'acceptez pas ce que dit l’orateur,
pas plus que vous acceptez vos propres conclusions,
puisque vous n’en avez aucune, vous les avez écartées.
Réfléchissons-y donc très attentivement;
cela pourrait être une des raisons pour lesquelles
l'être humain est si terrifié.
Pourquoi l’esprit se cramponne-t-il à un souvenir, à une expérience particulière,
pourquoi s’accroche-t-il à une croyance qui a perdu tout sens? Pourquoi?
Parlons-en ensemble.
Soit il est incapable de voir les faits,
soit il aime vivre dans une illusion,
dans un faux-semblant qu'il s'est forgé et qui n'a rien à voir avec la réalité,
la réalité étant ce qui a lieu maintenant.
Ou bien, il distingue que l'expérience, l'idée, l'idéal,
la croyance ne sont pas justes mais il s’y cramponne
car il est intellectuellement incapable d'investigation.
Vous suivez?
Alors si nous le pouvons, avançons pas à pas.
Avez-vous une croyance quelconque à laquelle vous tenez?
Et si vous croyez à quelque chose, qu'est-ce que cette croyance?
Comment naît-elle?
Soit par des siècles de propagande, comme l’ont fait la plupart des religions,
c’est là leur métier, c'est leur investissement.
Les siècles ont créé une croyance et on l'accepte naturellement
dès l’enfance : il est plus facile de suivre
la tradition que de rompre avec elle.
Suivez-vous tout ceci?
Si vous n’avez pas de croyances, peut-être avez-vous des idéaux.
Le mot 'idée' vient - je crois - du grec
et signifie voir, observer
-vous comprenez? -
pas observer pour en tirer une conclusion qui devient une idée.
Le mot 'idée' signifie effectivement observer.
Alors, avons-nous des idéaux, c'est-à-dire le futur?
Le futur qui va s'accomplir.
L'idéal a été projeté par les expériences du passé,
par certaines conclusions que l’on a collectées
et de là on projette un idéal historique, mondial ou personnel.
N’est-ce pas?
C'est le passé, projetant un concept comme idéal
vers le futur, et se conformant au futur, à cet idéal.
C’est le même mouvement : il vient du passé,
se modifie en traversant le présent, et le futur.
C’est clair, n’est-ce pas?
Alors, si vous voyez ceci : que lorsque vous avez un idéal
il y a forcément une contradiction dans votre vie quotidienne,
car cet idéal est une chose irréelle, - n’est-ce pas? - non factuelle.
mais ce sont des faits qui ont lieu, d'où un conflit,
une adaptation, une imitation, une division.
Il y a donc continuellement
la nécessité d'ajuster nos actions face à quelque chose de non factuel.
Je me demande si vous voyez.
Cela est illusoire, ceci est réel.
Après cette explication très minutieuse, nous pouvons entrer dans les détails.
Voyez-vous effectivement ce fait?
Ou êtes-vous déjà en train de le traduire en idée?
Suivez-vous?
Observez-vous, je vous prie.
Si l’on a un idéal,
vous voyez la nature de l’idéal, comment cet idéal prend naissance.
Lenine, tous les marxistes, les maoistes ont des idéaux.
Après avoir étudié l’histoire, et en avoir tiré leurs propres conclusions
ils ont projeté des idées
et obligé les êtres humains à se conformer à ces idées.
Alors, en tant qu'être humain réfléchissant à ceci avec grand soin,
en voyez-vous l'erreur, et donc l'abandonnez-vous?
Ou vous avez l'impression qu’en ayant un idéal,
vous faites quelque chose,
vous êtes actif, vous accomplissez, vous réalisez votre idéal.
D'où beaucoup de satisfaction, de vanité, l'impression d'avoir un but.
Suivez-vous tout ceci?
Alors, après avoir parlé ensemble - ensemble - rejette-t-on les idéaux?
Si oui, vous vous demandez ensuite
s'il est possible de faire face concrètement à ce qui arrive.
Pas en fonction de l’idéal, mesurant l'événement à l'aune de cet idéal,
mais en ayant la capacité de faire face à ce qui se passe effectivement.
Dans cette observation de ce qui se passe en réalité,
il n'y a pas de conflit, vous observez.
Je me demande si vous le voyez.
Nous accordons-nous là-dessus ou suis-je...?
Gardez à l'esprit que nous y réfléchissons ensemble, je vous prie.
Il est très important, non seulement d'apprendre à écouter correctement,
mais aussi d'être capable
- ce qui vient naturellement si l'on s'y intéresse -
de dire 'ceci est faux' et c'est fini.
Je vais chasser mon opinion, je ne la laisserai pas intervenir.
Pouvons-nous ensemble balayer tous nos idéaux?
Nous réfléchissons ensemble,
nous examinons la question de la sécurité.
Nous pensons être en sécurité en poursuivant un idéal,
même faux, irréel, dépourvu de fondement,
cela nous donne le sentiment d'avoir un but.
Et avoir un but
procure une qualité d'assurance, de satisfaction, de sécurité.
N’est-ce pas?
Pouvons-nous poursuivre?
Pas poursuivre avec des mots, mais ayant en fait écarté vos idéaux.
Penchons-nous maintenant sur la question de la sécurité.
Pourquoi les humains du monde entier s’accrochent-ils à l’expérience?
Posez-vous cette question.
Des expériences sexuelles, physiques, mais aussi
de prétendues expériences spirituelles bien plus dangereuses.
Vous vous promenez tout seul ou en compagnie,
vous ressentez soudain une sorte d’extase,
de ravissement. Et vous engrangez cette expérience, vous la retenez.
La chose est terminée - n’est-ce pas? - il en reste le souvenir,
et l’on retient ce souvenir que l'on appelle expérience.
En fait, le mot 'expérience' signifie traverser, non?
Traverser et en finir,
pas garder en mémoire ce qui s’est passé.
Spécialement en matière d'expériences dites psychologiques
ou d'expériences religieuses dont les manifestations sont très subtiles,
l’esprit humain fait ses délices de quelque chose sortant de l’ordinaire.
L’ordinaire étant ce qui se passe tous les jours.
Et ce qui s’est manifesté de manière soudaine
ou à la suite d’un travail inconscient
- j’espère que vous suivez tout ceci - on le retient.
Cela donne-t-il le sentiment d’avoir expérimenté, connu,
quelque chose de non ordinaire, et procure une joie,
un grand plaisir? Et, dans cette expérience,
réside une certaine qualité de sécurité
car vous avez éprouvé une chose totalement différente de 'ce qui est'.
N'est-ce pas? Suivez-vous tout cela?
Une croyance, un idéal, une expérience, des souvenirs
apportent-ils la sécurité?
Une réelle sécurité, comme la sécurité physique?
Suivez-vous tout cela?
Ou bien, l’esprit aime-t-il vivre dans une certaine zone d’illusion?
Nous réfléchissons ensemble, sans faire de propagande,
sans essayer de vous convaincre de quoi que ce soit.
Mais nous essayons de découvrir ensemble
pourquoi les êtres humains tiennent à des illusions
qui sont flagrantes ! Pour quelqu'un d'autre.
Serait-ce que cela leur donne un fort sentiment de supériorité?
'Ah, j’ai eu quelque chose que vous autres ignorez'.
C’est le grand répertoire des gourous
- vous connaissez - 'je sais, vous ne savez pas'.
Et pourquoi les êtres humains vivent-ils ainsi?
Pourquoi vous-même, ou untel, vivez-vous ainsi?
S'il vous plaît, réfléchissez-y.
Réfléchissons-y ensemble, car votre expérience est personnelle,
close, égocentrique, et pour un autre, c'est pareil.
C'est toujours : 'votre expérience n'est pas la mienne'
'la mienne est meilleure que la vôtre' cette division est toujours en route.
Alors, tout en réfléchissant ensemble, restons-nous accrochés
à nos expériences, croyances, idéaux, conclusions,
sachant bien que ce ne sont que des structures verbales,
qu'elles sont une chose finie, terminée, du passé?
Pourquoi nous accrochons-nous?
Serait-ce que nous avons envie de vivre
avec certaines illusions auxquelles nous prenons plaisir ?
Alors, la sécurité réside-t-elle dans les illusions?
Il semble qu’une grande majorité de gens dans le monde aime vivre
dans les illusions, qu'elles soient scientifiques,
religieuses, économiques ou nationales.
Ils ont l'air d'aimer cela.
Si, peut-être, nous sommes sérieux, pas venus pour la seule distraction,
très préoccupés par la structure sociale, destructrice, dangereuse,
et nous, êtres humains, déclarons qu’il nous faut engendrer
une autre qualité d’esprit et une autre société.
Nous demandons donc : pourquoi trouver une sécurité dans les illusions?
Découvrez-le, s’il vous plaît.
Et pourquoi nous est-il impossible de faire face aux faits?
Par exemple : l'envie est le lot commun de toute l’humanité.
N'est-ce pas?
Envier c'est mesurer, comparer ce que je suis à ce que vous êtes.
Ce calcul.
Maintenant, en réfléchissant ensemble,
pourquoi n’est-il pas possible d'y mettre complètement fin?
Je le demande,
je ne dis pas qu’il faut ou qu'il ne faut pas.
Le fait est la réaction que l’on nomme envie.
Voilà le fait.
Mais le non-fait est : je ne devrais pas être envieux.
N'est-ce pas?
Vous voyez cela?
Le fait, cette réaction nommée envie, est ce qui se passe,
mais l’esprit a projeté le concept
qu'il ne faudrait pas l'être, ce qui est irréel.
Ainsi, vous luttez pour passer du fait au non-fait.
Je me demande si vous voyez tout ceci !
N'est-ce pas, Messieurs?
Nous rencontrons-nous?
Plutôt faire face au fait, sans le non-fait.
Sommes-nous ensemble? Je ne sais pas.
Êtes-vous tous fatigués?
On nous a tellement dressés, éduqués, à considérer les non-faits
comme bien plus importants que la réalité.
Et, dans le non-fait, nous pensons trouver la sécurité.
N’est-ce pas?
Alors, quand vous entendez ceci, est-ce une idée, un concept,
ou écoutez-vous vraiment,
et donc vous voyez le non-fait et vous en avez terminé avec lui.
Je me demande si vous le voyez?
Il nous faut alors aborder la question : qu'est-ce qu'écouter?
Cela fait environ une demi-heure que vous écoutez.
Avez-vous vraiment écouté pendant une demi-heure ce qui a été dit,
c'est-à-dire ce que vous vous êtes dit et non ce qu'un autre dit?
N’est-ce pas?
Ecoutez-vous si complètement que vous voyez réellement l’illusion
et l’absurdité de vivre dans l'illusion, et y mettez fin?
Ce qui veut dire : pouvons-nous rester en présence du fait
et n'avoir aucun rapport avec le non-fait?
Nous l’avons dit, notre esprit est conditionné aux non-faits.
Voyez simplement ce que nous avons fait.
L’autre jour, un homme me dit : 'je ne peux pas enterrer mon fils
au cimetière parce qu’il n’est pas baptisé'.
Vous comprenez?
Comprenez-vous ce que je dis?
Pas baptisé - vous savez, accomplir toute cette ineptie.
Et il était horrifié, malheureux, désolé que son fils
ne puisse être enterré là, en 'terre sacrée', selon lui.
Vous suivez?
Non, je vous en prie, Monsieur, c'est très sérieux.
Vous pouvez en rire ou le rejeter, disant que c’est absurde,
mais vous avez vos propres absurdités.
Pouvons-nous entendre, observer de si près, si attentivement,
avec une attention si totale, que toute illusion disparaît?
Cette illusion fait partie de notre conditionnement.
Si vous êtes catholique, observez vos illusions,
ou hindou, etc. Inutile d’aborder tout cela.
Donc, l'esprit a cherché la sécurité dans le non-fait, y a renoncé
en découvrant qu’il n'y a pas là de sécurité,
alors - suivez bien - quel est l’état de l'esprit
qui observe ce qui est en train de se passer, le concret?
Comprenez-vous ma question?
Est-elle claire?
Je vous en prie !
Très bien.
Supposons - non, on ne suppose pas, fini, je n’ai pas d’illusion.
Ce qui ne signifie pas que je sois cynique ou indifférent,
ou devenu amer, les illusions ne jouent plus de rôle dans ma vie.
Alors, je me demande : quelle est la qualité de l’esprit, de votre esprit,
quelle est la qualité de notre esprit quand il fait face à ce qui se passe?
Comprenez-vous ma question?
La comprenez-vous, Monsieur?
Quel est l’état de votre esprit qui est libre de toutes les illusions?
Illusions à propos de la nation, de la science,
toutes les absurdes illusions des religions, bien entendu,
et l'illusion que vous portez en vous, votre expérience personnelle.
N’est-ce pas?
Quelle est la qualité d’un esprit libre?
Seul un tel esprit peut observer ce qui se passe, naturellement.
Vous suivez ceci?
La question est alors celle-ci : l'esprit recherche la sécurité, n’est ce pas?
Il désire la sécurité. Il ne l’a trouvée dans aucune illusion, n’est-ce pas?
Et pourtant il dit : 'il me faut la sécurité'.
Je me demande si vous suivez tout cela?
Alors il dit : 'je dois trouver la sécurité dans mes relations'.
Evidemment.
'J'ai laché mes croyances, idéaux - oh, je suis fatigué -
expériences, souvenirs,
toutes les absurdités nationalistes, tout cela, tout s'est envolé'.
Mais l'esprit n’est pas libre de l’idée de sécurité.
Et là, pourrait se trouver le commencement de toute peur.
Alors il dit : 'y a-t-il une sécurité dans mes rapports aux autres?'
Allez, c'est vous qui êtes pris là-dedans, donc...
Y a-t-il de la sécurité dans l’image
que je me suis faite de ma femme, de mon mari ou de mon amie?
Bien sûr que non.
Car cette image est la projection de l’expérience passée.
N’est-ce pas?
L’expérience passée a engendré cette image,
et j’agis en fonction de cette image, et c'est le futur.
N’est-ce pas?
Suis-je en train de rendre ceci affreusement difficile?
Dès lors, l’esprit dit : il n’y a de sécurité dans aucune forme d’image.
N’est-ce pas?
Pas dans la relation, mais dans toute création d'une image
à partir de l’expérience passée, au moyen de la pensée.
N'est-ce pas?
Alors, si vous n’avez pas d’image,
qu'est-ce qu'une relation dans laquelle l’esprit cherche encore la sécurité?
N'est-ce pas?
Allons, Messieurs !
Y a-t-il une relation entre deux personnes
si celles-ci ne pensent pas complètement ensemble?
Penser ensemble c'est la sécurité totale !
N’est-ce pas?
On a abandonné toute opinion, jugement, expérience et l'autre
en a fait autant, de sorte que tous deux peuvent penser ensemble.
N’est-ce pas?
Voilà ce qu’est la véritable relation,
sans division entre ma propre pensée et la vôtre.
N’est-ce pas?
Nous disons donc ceci : il y a sécurité psychologique,
une sécurité totale, quand l’esprit est affranchi de toute illusion
et ne cherche la sécurité dans aucune relation comportant de l'attachement.
N’est-ce pas?
Car l’attachement est une des illusions dans laquelle
nous croyons pouvoir trouver la sécurité.
Je vous suis attaché.
Je suis attaché à cet auditoire.
L’orateur vient ici et veut parler, s’exprimer,
s’accomplir, trouvant en cela une certaine sécurité.
Ce qui veut dire que l’orateur vous exploite pour sa propre sécurité.
Et si l’orateur est honnête et suffisamment décent,
il dit : 'quelle horreur' et il se détache de cette absurdité.
Dans l'attachement, nous voulons trouver la sécurité.
Et si vous ne la trouvez pas dans cet attachement-ci,
vous tentez de la trouver dans un autre attachement.
Cela fait 20 ans qu'on est marié, on s'ennuie, et soudain...
...on s'enfuit avec quelqu'un d'autre
- c'est ce qui arrive dans la société - et, comme cela, on espère
trouver une certaine sécurité, excitation - sexe, etc.
Voyez ce que nous faisons, Messieurs.
Ou vous êtes attaché à votre actuel partenaire et cela vous satisfait
- n’est-ce pas? - ce qui est une autre sécurité.
Je me demande si vous voyez tout cela.
Je me demande si vous voyez les tours que vous joue sans cesse votre esprit.
On appelle cela l'amour.
Donc, nous disons : existe-t-il la moindre sécurité psychologique?
Réfléchissez-y.
On a investi le désir de sécurité psychologique dans une croyance,
dans l'idéal, dans l’expérience, dans les souvenirs,
dans l’attachement, en Dieu, etc.
Et la sécurité existe-t-elle?
Ou tout cela n'est qu'illusion?
Dans toute illusion, on peut trouver un énorme réconfort :
'Jésus va vous sauver', quel merveilleux réconfort !
Vous sauvera de quoi, Dieu seul le sait, mais peu importe !
Et ainsi de suite.
Les hindous l'ont, les bouddhistes,
le même schéma se répète dans le monde entier.
Nous ne confrontons jamais le fait, nous préférons vivre dans le non-fait.
Et quand nous faisons cela, nos esprits sont déchirés.
N’est-ce pas?
Nous devenons très cruels, nous pensons que le conflit
est inévitable, qu'il fait partie de la vie.
Pour vous défaire de tout cela, comment vous y prenez-vous?
Voilà la question.
Vous comprenez?
Après avoir écouté ceci pendant trois quarts d'heure,
et, si vous avez découvert votre propre illusion,
de quelle façon l'avez- vous abandonnée?
Vous comprenez?
Suivez bien ceci, je vous prie.
Est-ce un acte délibéré?
Un acte issu d'un choix - je vois que ceci est une illusion, je préfère cela?
Est-ce le résultat d’un concept imposé par quelqu’un d’autre?
Est-ce votre propre clarté d’observation?
C'est-à-dire que vous le voyez vous-même.
La question est alors : comment le voyez-vous?
Suivez-vous tout ceci? N’êtes-vous pas fatigués?
On voit qu'on est happé par une illusion, un idéal.
Comment voyez-vous ce phénomène?
Est-ce une conclusion raisonnée?
La clarté d’une explication verbale?
Seriez-vous sous l'effet d'une persuasion habile?
Ou voyez-vous ce fait de vous-même?
Alors, nous demandons : comment le voyez-vous?
Est-ce seulement une perception visuelle - les faits de ce monde -
et à partir de cette perception, en lisant des livres,
des journaux, des revues et en discutant,
vous en êtes venu à réaliser que les idéaux sont ineptes?
Ceci n’est qu’un processus intellectuel, donc vous vivez
en fait sur un concept et donc sur un non-fait.
Vous pouvez l'observer logiquement, sainement, rationnellement,
et décider ensuite : je vais le lâcher.
Mais cet abandon n’est pas réel,
car il y a d’autres illusions au coin de la rue.
Tandis que nous disons ceci : - écoutez, je vous prie -
en observant, si aucun souvenir n'entre dans votre observation...
Il me faut clarifier ceci, sinon vous penserez que je suis fou.
Ce dont nous parlons ensemble, c'est de 'voir'.
Soit vous en êtes venus à conclure que les illusions sont absurdes
et donc que vous ne vous y laisserez plus prendre,
soit vous avez un 'insight'
du mouvement de l'illusion dans son entier?
Comprenez-vous ma question?
On peut prendre une illusion, une croyance quelconque,
l’étudier, l'approfondir et dire : 'Voilà, c’est fini'.
Et examiner vos idéaux, etc.
Cela ne vous libère pas vraiment, n’est-ce pas?
Voyez cela, le fait d'avoir étudié logiquement, sainement,
rationnellement les diverses formes d’illusion vous libère-t-il vraiment?
C'est-à-dire, comment faites-vous cette étude?
Vous investiguez au moyen de la pensée !
N’est-ce pas?
La pensée a créé ces illusions, et c'est avec la pensée
que vous examinez ces illusions,
et là encore, c’est un tour que vous vous jouez.
La pensée peut toujours créer d’autres illusions et dire :
'je ne veux pas de ces illusions'.
Mais la pensée n’a pas compris
la nature même de l’illusion, ni le créateur des illusions.
Si vous voyez que la pensée elle-même est le créateur des illusions
quand l’esprit lui-même voit
que la pensée est le créateur des illusions,
alors, vous avez un 'insight' de toute la nature des illusions.
C’est cet 'insight' qui va dissoudre toutes les illusions.
Je me demande si vous l’avez saisi?
Devrions-nous discuter, ou aborder la question de l'insight?
Il nous reste 7 minutes.
Monsieur, l'insight n’est pas l’intuition.
L’intuition peut être une forme subtile de désir.
N’admettez pas ce que dit l’orateur, explorez.
L'intuition - ou pressentiment - peut être une projection inconsciente
qu'on prend pour quelque chose de tout à fait réel.
N’est-ce pas?
Nous disons donc que l'insight n’est lié à aucune forme de désir :
'je veux comprendre', 'je dois approfondir cela',
le motif sous-jacent est le désir qui veut comprendre.
Le désir dit : 'je dois découvrir ça'.
Si vous voulez donc aller au fond de cela,
l'insight ne relève pas de l’activité du désir.
L'insight n’est pas la projection d’une expérience passée.
L'insight n’est pas une action gardée en mémoire.
Je vais vous montrer quelque chose.
A savoir : si vous voyez instantanément - pas logiquement,
graduellement, on peut le faire plus *** -
si vous voyez que toute organisation religieuse repose sur la pensée
et n’a donc strictement rien à voir avec le véritable
côté sacré de la religion, vous avez un 'insight' de la chose.
Vous comprenez ce que je dis?
Alors, votre action à l'égard de l'illusion découle-t-elle d'un 'insight'?
Comprenez-vous ma question?
Ou êtes-vous encore en train de l’analyser?
Etes-vous encore mentalement actif dans l'exploration?
Ou bien, vous voyez instantanément la nature de l’illusion, et point final.
Suivez-vous la différence?
Soit il y a détermination, choix, forme subtile de conclusion et action.
L'action nécessite alors un intervalle de temps.
Or nous disons : dans l'insight, il y a perception immédiate et action,
ce qui ne comporte ni regret, ni retour en arrière, c'est comme ça!
Avez-vous saisi?
Messieurs, si l’on veut approfondir ceci,
il faut faire très attention de ne pas se leurrer,
car nos esprits sont si prompts dans leur aptitude à nous tromper.
On peut dire : 'oui, j’ai eu un 'insight' dans telle chose'
et agir en fonction de cet 'insight',
et puis se dire : 'je n'aurais pas dû faire cela'.
Des regrets - vous suivez? - et tout ce qui s'ensuit.
Mais l'insight est tout autre chose.
Il n'y a pas d'écart de temps entre insight et action, ils vont ensemble.
A présent, au terme de toute cette explication
- une forme verbale de communication -
avez-vous écouté si attentivement
que vous voyez instantanément toute la structure de l’illusion?
C’est cela la sagesse.
Bien, Messieurs.
Pouvons-nous partir?
Cinque minuti ancora !
Monsieur, lorsque nous sommes assis de la sorte,
plutôt tranquilles et silencieux, à l'écoute,
est-ce un silence artificiel?
Ou vous êtes si intéressés, non pas à résoudre
vos problèmes personnels, qui prendront inévitablement fin
quand vous aurez compris l’acte d’écouter, l’acte d’observer.
Dans l’acte d’écouter il n'y a pas de désir, vous écoutez simplement.
Mais si vous écoutez Mozart pour dire :
'quelle merveilleuse soirée l'autre jour à écouter cette musique,
je voudrais qu'on la rejoue', vous avez manqué quelque chose.
Si vous écoutez pleinement, la chose même est comme une semence
qui tombe en terre. Elle fleurit, vous n’avez rien à faire.
Il en va de même si vous observez de tout près,
- rien que l'observation, pas l’observateur qui dit 'j'observe' -
alors cette observation et cette écoute
recèlent une étrange qualité d’attention qui est 'insight'.
Bien Messieurs.
Bien.
Cela suffit-il?