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Traducteur: Anna Cristiana Minoli Relecteur: Elise LeCamp
Si je devais vous demander
quelle est le lien entre
une bouteille de détergent Tide et la sueur
vous penseriez probablement que c'est la question la plus facile
qu'on vous posera ici à Edimbourg cette semaine.
Mais si je vous disais que ce sont deux exemples
de nouvelles formes de monnaie alternative
dans une économie mondiale, hyper connectée, fondée sur les données,
vous me croiriez peut-être un peu dingue.
Mais croyez-moi, je travaille dans la publicité.
(Rires)
Et je vais vous donner la réponse,
mais évidemment, après cette courte pause.
Une question plus difficile est celle
que m'a posée, un de nos écrivains
il y a deux semaines et dont je ne connaissais pas la réponse :
Quelle est la monnaie la plus performante au monde ?
C'est en fait le Bitcoin.
Pour ceux d’entre vous qui ne le savent pas
Bitcoin est une monnaie cryptographiée, une monnaie virtuelle, synthétique.
Elle a été fondée en 2008 par ce programmeur anonyme
sous le pseudonyme Satoshi Nakamoto.
Personne ne sait qui c’est.
C’est un peu le Banksy d'Internet.
Et je ne vais probablement pas bien l’expliquer
mais mon interprétation de la façon dont ça fonctionne est que
les Bitcoins sortent par ce processus de minage.
Un réseau d'ordinateurs est défié
pour résoudre un problème mathématique très complexe
et celui qui y arrive en premier reçoit les Bitcoins.
Les Bitcoins sont libérés,
ils sont placés dans un registre public appelé le Blockchain,
puis ils flottent et deviennent une monnaie.
Ils sont complètement décentralisés, c'est un peu effrayant,
et c’est la raison pour laquelle ils sont si populaires.
Cette monnaie n'est pas gérée par des autorités ou par l'État.
En fait, elle est gérée par le réseau.
Et la raison pour laquelle ça a autant de succès,
c’est que c’est privé, c'est anonyme, c'est rapide et pas cher.
On en arrive au point où le Bitcoin subit de folles fluctuations.
Il est passé de 13 dollars
à 266, en l'espace de quatre mois,
ensuite il s’est effondré et a perdu la moitié de sa valeur en six heures.
Et il est actuellement autour de
110 dollars.
Mais il est en train de gagner du terrain,
il gagne en respectabilité.
Il y a maintenant des services, comme Reddit et Wordpress
qui acceptent les Bitcoin comme monnaie de paiement.
Ce qui montre que les gens
ont confiance en la technologie,
ça a commencé à éclipser, bouleverser
et interroger les institutions traditionnelles
et la manière de voir les monnaies et l'argent.
Ce n'est pas surprenant, si l'on pense
au cas désespéré de l'UE.
Il y a eu un sondage Gallup sorti récemment
qui disait qu'en Amérique,
la confiance dans les banques est au plus bas, quelque chose comme 21 pour cent.
Vous voyez ici quelques photos de Londres
où Barclays a sponsorisé le projet des vélos en libre service,
des militants ont donné un beau spectacle
de guerrilla marketing en inventant des slogans.
« Pédaler Subprime. » « Barclays vous emmène faire un tour. »
Ce sont les plus polis que je puisse partager avec vous aujourd'hui.
Mais vous comprenez le sens général, les gens ont vraiment commencé
à perdre confiance en les institutions.
Il y a une société de relations publiques appelée Edelman,
ils font chaque année une enquête très intéressante
précisément sur la confiance et ce que pensent les gens.
Il s'agit d'une enquête mondiale, ces chiffres sont donc mondiaux.
Ce qui est intéressant, c'est que vous pouvez voir que
la hiérarchie est un peu en déséquilibre,
maintenant il s'agit plus d’une hétérarchie,
les gens ont plus confiance en eux-mêmes
qu’en des entreprises et des gouvernements.
Et si vous regardez ces chiffres sur les marchés les plus développés
comme le Royaume-Uni, l’Allemagne et ainsi de suite, ils sont en fait beaucoup plus faibles.
Je trouve ça effrayant.
Les gens ont plus confiance en des entrepreneurs
qu’en des gouvernements et dirigeants.
Ce qui est en train de se produire, si vous pensez à l'argent,
si vous résumez l’argent à son essence,
littéralement ce n’est qu’une expression de valeur, une valeur convenue.
Donc ce qui se passe maintenant, dans l'ère numérique,
c’est que nous pouvons quantifier la valeur en beaucoup de manières différentes
et le faire plus facilement,
parfois la manière de quantifier ces valeurs,
rend beaucoup plus facile
la création de nouvelles formes de monnaie.
Dans ce contexte, vous pouvez voir que les réseaux comme Bitcoin
commencent soudainement à avoir un sens.
Si vous pensez que nous commençons à remettre en question,
bouleverser et interroger ce que la monnaie signifie,
quelle est notre relation, ce qui définit la monnaie,
alors l’ultime extension c'est :
y a-t-il encore une raison pour laquelle le gouvernement
soit responsable de la monnaie ?
Evidemment, je regarde cela à travers le point de vue du marketing,
du point de vue des marques,
les marques vivent ou s'écroulent littéralement sur la réputation.
Et si vous réfléchissez, la réputation est maintenant devenue monnaie.
Vous le savez, la réputation se construit sur la confiance,
la cohérence, la transparence.
Vous décidez de faire confiance à une marque,
vous voulez une relation, vous voulez vous engager avec la marque,
vous participez déjà à beaucoup de nouvelles formes
de monnaie.
Si vous pensez à la fidélité.
La fidélité est essentiellement une micro-économie.
Pensez aux programmes de fidélisation, aux miles aériens.
The Economist a dit il y a quelques années
qu’il y a plus de miles non réclamés dans le monde
que de billets de dollars en circulation.
Quand vous faites la queue chez Starbucks,
30 pour cent des transactions journalières dans un Starbucks
sont faites avec des points Starbucks Star.
C’est une sorte de monnaie de Starbucks
qui reste dans son écosystème.
Et ce que je trouve intéressant est qu'Amazon
a récemment lancé les Amazon coins.
Certes, pour le moment c'est une monnaie uniquement utilisée pour le Kindle.
Vous pouvez acheter des applis et faire des achats à l'intérieur de ces applis,
mais si vous pensez à Amazon,
vous regardez le baromètre de confiance que je vous ai montré
où les gens commencent à faire confiance aux entreprises,
en particulier les entreprises en qui ils ont plus confiance
qu'aux gouvernements.
Soudainement, vous commencez à penser,
Amazon pourrait potentiellement pousser cela.
Çà pourrait devenir une extension naturelle,
vous pourriez aussi bien y acheter des choses --
en dehors du Kindle, vous pourriez acheter des livres, de la musique,
des vrais produits, des appareils, des biens et ainsi de suite.
D'un coup, vous avez Amazon, une marque,
en face à face avec la réserve fédérale
en ce qui concerne la façon dont vous voulez dépenser votre argent,
ce qu’est la monnaie, ce que représente la monnaie.
Je vais revenir au détergent Tide,
comme promis.
Je suis tombé sur un article fantastique dans le New York Magazine,
où on disait que les consommateurs de drogues aux États-Unis
achètent en réalité leurs drogues
avec des bouteilles de détergent Tide.
Ils vont dans les magasins de proximité,
volent du Tide,
et une bouteille de 20 dollars de Tide
équivaut à 10 dollars de cocaïne crack ou d’herbe.
Ce qu'ils disaient, c'est que certains criminologues
ont regardé ça et ils disent, bon, d'accord,
Tide est un produit haut de gamme.
Il coute 50% plus cher que la moyenne de la catégorie.
Il est parfumé avec un mélange très complexe de produits chimiques,
son parfum est très luxueux et très distinct,
et, puisque c’est un produit Procter & Gamble,
il est soutenu par beaucoup de publicité.
Ce qu'ils disent, c'est que les toxicomanes sont eux aussi des consommateurs,
donc ils l'ont dans leurs voies neuronales.
Lorsqu'ils identifient du Tide, il font un raccourci.
Ils disent, là j’ai confiance. Voila de la qualité.
Ça devient donc une unité monétaire,
que le New York Magazine décrit
comme une bizarre vague de criminalité très loyale, attachée à la marque,
et les criminels appellent le Tide « or liquide ».
Maintenant, ce que je trouve amusant, c’est la réaction
du porte-parole de P&G.
Évidemment, ils ont essayé de se dissocier de la drogue,
mais il a dit: « Cela me rappelle une chose,
c'est que la valeur de la marque est restée cohérente. » (Rires)
Ce qui confirme mon point de vue et montre qu'en disant cela
il n'a pas eu chaud du tout.
Ce qui me ramène à la connexion avec la sueur.
Au Mexique, Nike a récemment organisé une campagne
appelé, 'Bid Your Sweat', les enchères de la sueur.
C’est-à-dire,
ces chaussures Nike ont des capteurs,
ou vous utilisez un Nike FuelBand
qui enregistre vos mouvements, votre énergie,
votre consommation de calories.
Voila ce qui se passe : vous avez en fait
choisi de vous joindre à cette communauté Nike. Vous y avez adhéré.
Il n’y a pas de messages publicitaires hurlés ici,
et c'est là que la publicité a commencé à se diriger,
vers des choses comme des services, des outils, des applications.
Nike agit littéralement comme un partenaire du bien-être,
un fournisseur de services de la santé et de remise en forme.
Voila ce qu'ils disent, « Bien,
vous avez un tableau de bord de données. Nous savons combien vous avez couru,
combien vous avez bougé, votre apport calorique, tout ce genre de choses.
Plus vous courrez, plus vous recevez de points,
et nous avons une vente aux enchères où vous pouvez acheter des articles Nike
uniquement en prouvant que vous avez réellement utilisé les produits pour bouger ».
Et vous ne pouvez pas y entrer. C’est uniquement
pour la communauté qui transpire
à l'aide des produits Nike. Vous ne pouvez rien acheter avec des pesos.
C'est littéralement un environnement fermé, un espace de vente aux enchères fermé.
En Afrique, le crédit de communication est devenu
une monnaie à part entière.
Les gens sont habitués, parce que le portable est roi,
ils ont l’habitude de transférer de l'argent,
d’effectuer des paiements par le portable.
Un de mes exemples préférés d'un point de vue de marque
c’est Vodafone. En Égypte,
beaucoup de gens font des achats sur les marchés
et dans des petits magasins indépendants.
Le reste de la monnaie, la petite monnaie est un vrai problème,
ce qui a tendance à arriver, c'est que vous achetez un tas de trucs,
où l’on vous doit, disons
10 centimes, ou 20 centimes de monnaie.
Les commerçants ont tendance à vous donner des oignons
ou une aspirine, ou un chewing-gum,
parce qu'ils n'ont pas de monnaie.
Lorsque Vodafone est arrivé et a vu ce problème,
ce problème du consommateur, ils ont créé
de la monnaie qu’ils appellent Fakka,
que les commerçants
peuvent donner aux gens,
et le crédit va directement sur leur téléphone mobile.
Cette monnaie devient un crédit, qui encore une fois,
est vraiment très intéressant.
Nous avons fait un sondage qui confirme le fait que,
45 pour cent des personnes
qui vivent aux Etats-Unis
sont à l’aise avec l'idée d'utiliser
une monnaie indépendante ou de marque.
Ça devient vraiment intéressant,
c’est une dynamique vraiment intéressante.
Vous pensez que les entreprises
devrait commencer à voir leurs biens
de manière différente et à les échanger.
Vous pensez que c’est un grand saut ?
Ça vous parait exagéré mais si vous y réfléchissez
aux États-Unis, en 1860,
il y avait 1600 sociétés qui distribuaient des billets.
Il y avait 8000 types de billets en Amérique.
Et la seule chose qui a arrêté ça --
le gouvernement contrôlait 4 pour cent de l'approvisionnement --
et la seule chose qui a arrêté ça
c’est la Guerre Civile,
tout à coup, le gouvernement a voulu prendre le contrôle de la monnaie.
Donc le gouvernement, l’argent, la guerre, rien ne change.
Donc ce que je vais vous demander c’est, simplement :
est-ce que l'histoire se répète ?
Est-ce que la technologie rend les billets en papier démodés ?
Sommes-nous en train de dissocier la monnaie du gouvernement ?
Vous le savez, les marques commencent à combler les lacunes.
Les entreprises comblent les lacunes que les gouvernements ne peuvent pas se permettre de combler.
Donc l’année prochaine, sur scène
achèterons-nous du café biologique, issu du commerce équitable
avec des florins TED ou des shillings TED ?
Merci beaucoup.
(Applaudissements)
Merci. (Applaudissements)