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LA HONTE
J'ai fait un rêve étrange.
Tu sais quoi ?
Nous étions au milieu de l'orchestre, l'un à côté de l'autre,
pour une répétition du 4 Brandebourgeois.
Tout était déjà lointain.
Cela semblait un cauchemar.
Je me suis réveillé en pleurant.
Je m'étais mis à pleurer en jouant.
C'était l'adagio, tu sais, le passage...
Tu ne te rases pas ?
Si tu y tiens.
- Pourquoi boudes-tu ? - Je ne boude pas.
Tu es d'une humeur de dogue ces jours-ci.
On prend le bac, dépêche-toi !
On doit être à la mairie à 9h.
Comme si c'était ma faute !
Ce n'est pas moi qui ai décidé cette guerre.
S'il reste assez d'argent, on achètera du vin.
Qu'en dis-tu ?
Tu es horrible.
Habille-toi !
J'ai une dent de sagesse qui sort.
Mais le dentiste est-il encore là ?
On verra.
C'est mauvais, les dents de sagesse.
J'en ai une, en haut...
On a dû l'ôter morceau par morceau.
Il a fallu une journée.
Sans anesthésie.
J'ai eu la fièvre pendant des semaines.
Pourvu que ce ne soit pas aussi grave.
Regarde si tu vois quelque chose.
Non, rien du tout.
Mais je sens que c'est tout enflé !
Je m'habille.
As-tu payé le téléphone ?
Zut, j'ai oublié !
Mais pourquoi payer...
il ne marche jamais !
Qu'ils viennent le réparer...
sinon je ne paye pas.
Il nous faut le téléphone.
Bien sûr.
On a si peu de commandes.
Sans téléphone, autant laisser tomber.
Ils n'ont qu'à appeler chez les Olsson.
On les dédommagera.
Tu entends les cloches ?
C'est fête, ou quoi ?
Non, c'est vendredi. Qu'est-ce que ça veut dire ?
Rien. Dépêche-toi, on est en retard.
Je dé*** entendre les cloches en semaine.
- Quelle heure est-il ? - 6h05.
On dirait qu'il va pleuvoir. Mets ta veste.
Jan !
Qu'est-ce qu'il y a encore ?
Ne sois pas si émotif.
Je ne peux pas m'y faire.
Domine-toi.
Tu vas la fermer !
Pour finir, j'ai oublié ma veste !
Que de soldats ces jours-ci...
Jan, je ne voulais pas te peiner.
C'est aussi de ma faute.
Demain, ça fera exactement 4 ans
que nous sommes arrivés sur cette île.
Et ça fait un an que grand-père est mort.
Il faudra fleurir sa tombe.
Qu'a-t-il dit ?
La radio a parlé de menaces d'invasion.
Ils en parlent depuis des années.
Sale radio toujours détraquée !
Comme la voiture !
Si tu ne la réparais pas sans cesse...
Mieux vaut ne rien savoir.
Toi et ta politique de l'autruche !
Je ne veux pas discuter !
On mange du poisson ce soir.
Chic !
En te regardant parler à Filip, j'étais amoureux de toi.
Tu étais adorable.
Oui, de loin !
On allait justement chez vous !
Ravi de vous voir.
On vous apporte des airelles.
On vous apportait des airelles !
Bonjour, Mme Rosenberg.
Ma femme et moi venions voir la villa.
J'ai dit au Maire qu'on vous portait des airelles.
C'est que... Nous allions chez notre fils...
Ça ne fait rien, on vous les déposera.
Cela ne vous dérange pas ?
Pas du tout. Il y a quelqu'un ?
Oui, la bonne. Vous n'aurez qu'à sonner.
Venez donc un soir.
Nous ferons un peu de musique.
Avec plaisir !
Nos soirées musicales me manquent.
À moi aussi.
Depuis que Kreisler a été rappelé...
Une question :
ces convois militaires, que signifient-ils ?
La situation devient critique.
La radio raconte tant de choses, c'est...
La nôtre est toujours détraquée.
Il n'y a qu'à espérer...
On ne peut prévoir ce qui se passera.
Ma sœur m'a écrit, elle a été évacuée...
elle est dans un camp de transit, bombardé chaque jour.
Nous arrivons.
Tâchons de nous voir un soir.
On vous téléphonera.
Bonjour à votre fils.
On essaie par ici ?
Allons-y.
On m'a payé plus que je ne demandais !
Allons acheter du vin.
Il n'a pas l'air d'être là.
Il ne sort jamais.
Alors tu es rappelé aussi ?
Vous avez vu comment ils m'ont attifé ?
20 ans que je n'ai pas tenu un fusil !
Asseyez-vous.
J'ai personne pour tenir le magasin.
Mais c'est pas grave.
Que puis-je pour vous ?
On voudrait du vin.
Il me reste quelques bouteilles.
J'ai quelque chose à vous montrer.
C'est ma plus belle pièce.
Ancien, hein ?
XVIIIème. Meissen.
Où l'as-tu eu ?
Héritage maternel. Je ne la vendrai jamais.
Essayez-la, je reviens.
Vous écoutez la radio ?
Non, elle est en panne.
J'ai essayé de la réparer, en vain.
Hier, notre radio menaçait de terribles choses.
Aujourd'hui, la leur nous félicite de notre défaite.
On entend ce refrain depuis des années.
Il ne faut pas trop s'en soucier.
On ne voulait pas dire ça !
Goûtez ça si c'est bon !
On veut en acheter une bouteille.
C'est ma tournée.
Quel vin !
C'est quoi ? Montre...
Il m'en reste très peu.
Regardez : 1959.
On peut se l'offrir ?
Je crois.
Assis tout seul parmi mes objets,
je me sens très déprimé.
Je ne sais pourquoi. Je ne manquerai à personne...
si je ne reviens pas. Pas même à Mme Prins.
Mme Prins ?
La femme de ménage.
Elle vient une fois par semaine et fait du café.
Et on fait l'amour.
Non, je ne lui manquerai guère.
Tu seras très vite de retour.
Combien je te dois ?
Je te la laisse pour 10 couronnes. Je vous l'aurais offerte,
mais j'ai besoin d'argent pour Mme Prins.
Elle s'occupera de mes affaires jusqu'à mon retour.
On se dépêche pour prendre le bac.
J'ai mal à un pied. C'est très douloureux.
Ça comptera peut-être ?
On me donnera un emploi dans les bureaux ?
Sûrement ! Ils ne veulent pas de moi.
Ils te renverront peut-être chez toi.
L'essentiel est de montrer sa bonne volonté.
De ne pas s'amener avec un certificat médical.
Mais dis-leur et ils te libéreront peut-être.
Au revoir et merci !
- Bonne chance ! - J'espère !
Au revoir !
Buvons à Filip et à son poisson.
Et à ma cuisine !
Et à ta cuisine !
La radio remarche, tu sais ?
- Tu l'as réparée ? - Oui, finalement.
Tu es intelligent.
Quand tu veux.
Je le suis toujours.
Tu sais à quoi je pense ?
Je suis intelligente aussi.
Je vais apprendre l'italien.
Depuis le temps que tu dis ça !
Mais il faut que tu m'aides !
En me disant chaque soir : ton italien !
Et je te ferai réciter.
Et je serai très sévère.
Et tu sais quoi ?
Chaque matin après avoir nourri les poules,
on fera de la musique !
Le matin, toi ? Je demande à voir !
Ne serait-ce qu'une demi-heure par jour.
Nous avons nos instruments.
Il faut s'exercer.
Je veux des enfants.
Parfois j'en ai terriblement envie !
Maintenant ?
- Non pas maintenant. - Pourquoi non ?
Je ne peux pas expliquer.
Mais si, tu peux !
Je le sens...
Attendons des jours meilleurs.
Non, c'est important maintenant.
Ce qui ne va pas entre nous
vient de ce qu'on n'a pas d'enfant...
que moi, en tant que femme, je n'en ai pas.
J'ai 30 ans, il est grand temps.
Tu peux attendre jusqu'à 40.
Il faut les avoir jeune.
J'en aurai 3 à 40 ans.
Nous serons une famille.
Je suis sérieuse. Pas toi.
Quand on ira en ville,
allons voir un médecin.
Pour un examen. Le fait que je n'en ai pas, c'est...
je me porte bien, mais on ne sait jamais...
Je me porte bien aussi.
On est juste un peu nerveux.
Fais-toi examiner...
Non pas que...
Mais quand nous avons été séparés...
nous savons comment tu vivais.
Je n'ai rien fait.
Peut-être est-ce pourquoi nous n'en avons pas.
Tu as connu beaucoup de femmes et...
Non, mais non...
Ça ne comptait pas. Je t'ai toujours aimée. Je t'aime.
Et la cantatrice ?
Elle n'a pas compté.
Juste une fois. Je t'ai toujours aimée. Je t'aime.
Tu ne sais pas ce que c'est que l'amour.
Si, je sais !
Oui, ton amour pour toi-même.
Je ne suis pas aussi égoïste que tu crois !
Tu es terriblement égoïste.
Je vais m'améliorer.
Promis. On peut changer, il suffit de vouloir.
Je suis déterministe.
Tu es quoi ?
C'est quoi, un déterministe ?
C'est un individu qui...
Je m'en moque tant que tu répares l'évier.
Pas de vaisselle pour l'instant !
On fait quoi, alors ?
Où vas-tu ?
Il faut le secourir.
Si c'est un ennemi ? S'il tire ?
Lâche !
Un homme qui se meurt !
Il faut appeler une ambulance.
Combien ont sauté de l'avion ? 1 ou 2 ?
On n'en a vu qu'un.
Vous lui avez tiré dessus ?
Pourquoi l'aurais-je fait ?
Non, pas vous.
Ne restez pas là.
Ils ont lâché des parachutistes.
Bon, je vais embrayer,
toi, tu pousses.
Ça descend. Que fais-tu ?
Dépêche-toi !
Vous avez tiré sur le pilote, non ?
Non, je ne l'ai pas...
Ça sera pire si vous mentez.
Nous l'avons trouvé mourant.
C'est vrai, n'est-ce pas ?
Il y a eu une patrouille ?
Oui, il y a une demi-heure.
Ils nous ont prévenus de votre arrivée.
Ils étaient une douzaine dans 2 jeeps.
Ils nous ont dit de partir vite.
Très bien. Du calme.
N'ayez pas peur.
Le micro est prêt ? La caméra aussi ?
On va dire aux gens de rentrer chez eux,
de ne pas résister.
On va montrer quelle sorte de gens on a libérés.
Les voix de la libération 78.
Nom ?
Plus fort ! N'ayez pas peur !
Eva Rosenberg.
Parlez-nous de vous.
J'ai 28 ans.
Je joue du violon dans l'orchestre philharmonique.
Nous sommes mariés depuis 7 ans.
On vit ici depuis que l'orchestre s'est séparé.
Continuez !
C'est tout.
Vos idées politiques ?
Je n'en ai pas.
Aucune ?
Non, c'est dur de se tenir au courant
et notre radio est cassée.
Vous ne vous souciez pas
du régime sous lequel vous vivez ?
La guerre dure depuis si longtemps...
on comprend mal...
Donc vous savez ?
Vous vous décidez ?
Parfait ! À vous... Nom ?
Je me sens mal... dois-je vraiment ?
Mon médicament...
La caméra ! Filme l'évanouissement.
Vite, rentrons.
Essaie de m'aider un peu !
Tu sais à quoi je pensais ?
Par bonheur, on n'a pas d'enfant.
Après la guerre, nous en aurons.
Nous n'en aurons jamais.
Mets tes bottes et partons.
Dépêche-toi !
Allons vers la mer.
Tu peux conduire ? Vite !
On n'a rien à manger.
Quand l'aurais-je fait ?
Les poules, c'est bon !
- Qui va les tuer ? - Pas moi.
On peut tirer dessus.
Ça ne s'est jamais vu !
Je ne peux pas les égorger.
J'en prends une et tu tires.
Tu vas me tirer dessus ?
Vas-y, tire !
Je ne peux pas !
J'en ai assez de toi !
Il faut rentrer.
Rentrer à la maison !
Allez, du nerf !
On dirait que...
ils sont déjà au croisement.
Ce vacarme ! C'est insupportable !
Je n'en peux plus !
Descendons à la cave.
C'est plus sûr.
Comme un rat pris au piège, non !
T'ai-je dit qui était Pampini ?
Un contemporain de Beethoven.
Luthier à Vienne, formé à l'école italienne.
Il a combattu avec l'armée russe contre Napoléon.
Il a perdu une jambe et s'est remis à faire des violons.
Celui-ci date de 1814.
L'année du Congrès de Vienne.
Et puis, il est mort du choléra. J'ai oublié la date.
Ma main est salement abîmée.
Tu veux essayer ?
Tu m'aimes bien ?
Oui, je t'aime bien.
Et tu m'aimes ?
Dis que oui !
Oui, je t'aime.
Qu'y a-t-il ?
J'ai une crampe.
Viens là.
Allons, pressons !
Entrez tous !
Je m'appelle Oswald.
Nous nous sommes déjà vus.
À un concert de bienfaisance.
C'est moi qui dirigeais.
Il y a des années.
Ça s'annonce mal, hein ?
Parfois tout semble comme un rêve.
Pas mon rêve, celui d'un autre. Mais j'y participe.
Quand cet autre s'éveillera, aura-t-il honte ?
Nous avons tout lieu de croire
que vous avez collaboré.
La preuve flagrante est votre interview,
où vous approuviez la politique de l'ennemi.
Ce n'est pas vrai.
Nous avons le film.
Vous voulez le voir ?
"Nous avons tant souffert de l'oppression."
"Tant attendu la libération."
"Je souhaite la victoire de nos troupes."
Mais ce n'est pas ma voix !
Dites la vérité sinon votre mari et vous...
Nous n'avons pas collaboré.
Alors pourquoi les parachutistes ont-ils
liquidé tous les civils de la zone,
sauf vous ?
Je n'en sais rien.
Emmenez-la, je désire parler avec lui, seul.
Jan, viens avec moi !
Mme Rosenberg !
Assieds-toi là.
S'il vous plaît, docteur...
Pouvez-vous vous lever ?
Rien de grave. Vous avez vos bras et vos jambes.
Quelle épave ! Debout !
Il faut l'emmener à l'hôpital.
Comment vous sentez-vous ?
Ils vous ont démis l'épaule, on va vous la remettre.
Ça va mieux, non ?
Et celui-là ? Il dort ?
Emmenez-le, qu'il ne crève pas ici.
On vous a donné à manger ?
Désolé, mais nous sommes nouveaux
et pas encore organisés. Je vais réclamer.
Qu'est-ce qu'elle a, la petite dame ?
Rien ? Tant mieux.
Cigarette ?
Bonne journée !
- Il était mort ? - Je n'en sais rien.
Qui était-ce ?
Le rédacteur en chef.
Le bruit a couru que l'invasion avait réussi.
Ils ont titré : "Vive les libérateurs !"
Et vous ?
Ils voulaient que ma congrégation collabore.
Ils m'ont torturé et relâché.
Moi, ils n'ont cessé de me frapper.
Ce sont des monstres.
Regarde...
Celui aux cheveux blancs disait :
"Prends ça pour ta saleté d'interview !"
Vous êtes combien ?
Oh, trois.
Mangez quand vous voulez.
Je peux vous aider ?
Non, ça va. Juste un peu ankylosé.
Ça a l'air douloureux.
Ça fait mal ?
Un peu. Mais plus tellement.
Alignez-vous dans la cour !
Cet homme a collaboré
et nous a entravés considérablement.
Par ordre du gouvernement,
il est condamné au bagne à perpétuité.
Vous autres aurez aussi une peine adoucie.
Certains seront libérés
et renvoyés à leurs foyers.
Vous deux dans mon bureau !
On peut s'asseoir ?
Pas question !
Si Jacobi vous trouve assis, il me tuera !
Alors... ?
Entrez.
Asseyez-vous. J'ai entendu parler de l'interview.
Forgée de toutes pièces.
Mais il fallait un exemple.
Comment vous sentez-vous ?
Pas de blessures ? J'avais donné des ordres.
Ils ont été assez corrects.
C'est déjà ça.
J'espère que nous pourrons bavarder bientôt.
Où sont les chauffeurs ?
Vous devez avoir hâte de rentrer chez vous.
Dès lundi, tout ira mieux.
Je vais tâcher de vous avoir une voiture.
Veuillez m'envoyer une voiture.
Ramenez-les chez eux au plus vite.
Au diable ! Continue si tu veux.
Tu joues à la martyr ?
Tu joues à l'esclave ? Hypocrite !
Comme tu sais haïr !
Pendant la guerre au moins on s'entendait !
Je vais écouter les nouvelles.
Va, que je ne te voie plus !
Jacobi nous a donné la radio pour l'écouter.
Alors vas-y et cesse de faire des bêtises !
Tu l'as dit hier quand il était là :
"C'est bon d'avoir un ami."
Je n'ai jamais dit ça.
Si ! Tu étais ivre, alors tu as oublié.
Je dirai à Jacobi de ne plus revenir.
Filip dit que ça nous vaudra des ennuis.
Filip n'a pas à choisir nos hôtes !
Si tu n'étais pas si servile...
- Et toi alors ? - Je ne suis pas servile.
Oh que si ! Tu rampes !
Répète ça et je te frappe !
Parfaitement : tu rampes devant lui.
La paix revenue, on se séparera.
Quel bonheur ce sera de ne plus entendre tes idioties !
Tu n'es pas le seul dont la vie est ruinée !
Il y en a bien d'autres.
Cesse de te prendre pour le centre du monde.
Pardon.
Tu dis ça, mais tu ne le penses pas.
Ne pouvons-nous être amis ?
Quel jour sommes-nous ?
Je ne sais pas.
Samedi. Non, c'était hier.
On doit être dimanche.
Quelle heure est-il ?
Je parie que c'est ce maudit Jacobi !
Je dérange ?
Pas trop.
Je faisais un tour.
J'ai eu l'idée de passer si je ne dérange pas.
Non, on écoutait la radio.
Elles sont pleines de boue. Jan me prête des savates ?
Mets-les près du feu. Elles sont trempées.
Jan Rosenberg, où es-tu donc ?
Je t'ai apporté un cadeau. Un truc très beau.
Le trio de Dvorak en si bémol majeur. 1ère édition.
Héritage d'un oncle.
On pourrait le jouer un jour.
Fantastique !
J'ai aussi un cadeau pour toi, Eva.
J'espère qu'elle t'ira. Un bijou de famille.
Tu ne devrais pas tant nous gâter.
Eva, parle-moi !
Eva chérie !
Qui était-ce ?
Un voisin qui nous donne du poisson...
Juste un ami.
Il veut de l'essence. Tu nous en as donné.
Au fait, merci !
Ces hommes sont très idéalistes.
Pas toi ?
Eva ne m'aime pas ce soir.
Elle me refuserait un baiser à cause de toi.
Mais tu permets ?
Demande-lui plutôt à elle.
Tu me donnes un baiser ?
Tu es si gentil.
Tu rends la situation délicate en venant souvent.
Donc vous ne voulez plus me voir.
N'interprète pas mal. Elle a voulu dire...
Dommage, je vous aime bien tous les deux.
J'aurais pu vous faire déporter.
Tu as peur ?
Es-tu un artiste ou un fumiste ?
Un fumiste, sans doute. Ou un artiste...
Sacro-sainte liberté de l'art.
Sacro-sainte veulerie de l'art.
Je vais ***.
Si seulement je buvais moins !
Il faut se débarrasser de lui.
Il a fallu que Filip vienne !
Tu sais que les bois sont remplis d'hommes ?
Je me demande ce qu'ils veulent.
J'avoue que cette pensée m'effraie.
Ils n'ont aucune raison de me torturer. Je n'ai aucun secret.
Peut-être veulent-ils me faire du mal ?
Je plaisantais.
Il y a l'armistice de ce côté de l'île.
Touche-moi.
Touche ma tête.
Tu me sens ? Touche mes yeux !
Mets ta main là.
Tu me connais ?
Et toi ?
Bien sûr. Je ne comprends pas...
J'ai rarement connu un réel contact humain.
Et toujours lié à la douleur. Vous aussi ?
Non, pas nous.
Inutile d'en parler.
Il n'y a rien à en dire.
On ne peut se cacher.
Ni excuses, ni échappatoires.
Rien que culpabilité et douleur.
Une grande peur.
Quel froid !
Tu devrais rentrer chez toi.
Je sens le changement de temps avec ma jambe.
Eva, viens que je te donne quelque chose.
23 000 couronnes. Mes économies.
Je ne veux pas de ton argent.
Ne sois pas bête. Disons que tu es mon héritière.
Puis-je te parler ?
Avant-hier... j'étais chez mon fils.
Il est en permission.
Il a un enfant de 19 mois.
Il le mettait au lit
et lui faisait manger sa soupe.
Le petit était blotti comme un animal...
contre son père.
Il s'est endormi.
Je peux te dire autre chose ?
Ma mère est morte il y a quelques années.
Elle avait le cœur malade.
Un matin, on m'a téléphoné qu'elle allait très mal.
J'y suis allé.
J'ai demandé : "Je peux la voir ?"
On m'a dit : "Elle vient de mourir."
Je suis resté à l'observer pendant une heure.
Elle avait du sparadrap à un doigt.
Par moment, elle semblait respirer.
Curieux ce dont je me souviens...
Sais-tu pourquoi j'ai accepté ce poste ?
J'avais le choix.
Et j'avais peur du service actif.
Tu regrettes ?
Je n'avais jamais trompé Jan.
J'ai peur quand j'y pense.
Alors je n'y pense jamais.
Non, pas ici. Viens.
Il dort.
Je vais chercher ta canne.
Pleure, si ça te soulage.
Et cet argent ?
Il y a des gens dehors.
Entrons pour parler.
Entrez.
Nous avons discuté.
Filip dit que je peux sauver ma peau,
car l'organisation a besoin d'argent.
Alors rends-moi ce que je t'ai donné.
C'est Jan qui l'a.
Quel argent ?
Tu ne l'as pas ?
Mais quel argent ?
Dis à ton mari qu'il le donne, s'il l'a.
Si tu l'as caché, donne-le à Filip.
Ce n'est pas à toi.
Je ne vois pas ce que tu veux dire.
Cherchons.
Qu'en as-tu fait ?
J'ignore de quel argent vous parlez !
Lâche !
Où l'as-tu caché ?
Je n'ai rien caché.
Où l'as-tu mis ?
Pourquoi ne lui as-tu pas donné l'argent ?
Ils l'auraient tué quand même.
Ce n'est pas vrai.
Arrête !
Ne tirez pas ! Nous ne sommes pas armés.
Vous avez faim ? On peut vous nourrir.
Attendez !
Vous avez déserté ?
Votre main est blessée ?
Un chien m'a mordu.
Faites voir.
Asseyez-vous, je vais vous soigner.
Tenez, mangez.
Vous n'avez pas faim ?
Quel est votre nom ?
Caché depuis longtemps ?
Plusieurs semaines.
Vous avez un pansement neuf ?
Dans ma poche.
Je le prends.
C'est loin Hammars ?
Pourquoi ?
Ça ne vous regarde pas.
Vous voulez dormir ?
On l'a déjà fait pour d'autres.
Je ne sais pas où sont les autres.
Buvez ça.
Des jours que je ne dors pas !
Que devez-vous faire à Hammars ?
Laisse-le dormir.
Laissez-moi !
Debout !
Vous allez me tuer ?
Que lui as-tu fait ?
Un chalutier part d'Hammars demain.
Un copain qui devait partir le lui a dit.
Il a été tué le jour même.
Qu'en as-tu fait ?
Je prends les chaussures. Les miennes sont fichues.
Dis-moi ce que tu lui as fait !
Je ne viens pas.
Ça simplifiera.
On devrait prendre de quoi manger.
Comment continuer si on ne peut plus se parler ?
Voilà le bateau.
Y a-t-il de la place pour moi et ma femme ?
Il faut de l'argent.
C'est assez ?
J'ai fait un rêve.
Je parcourais une rue très jolie.
D'un côté, il y avait une maison blanche,
avec des colonnes.
De l'autre, un parc ombragé.
Et sous les arbres bordant la rue,
coulait une source vert sombre.
Puis j'atteignais un haut mur,
tout recouvert de roses.
Alors un avion a incendié les rosiers.
Ce n'était pas terrible parce que c'était beau.
Je regardais se refléter dans l'eau
Les roses qui brûlaient.
Je tenais un bébé dans les bras.
C'était notre fille.
Elle s'agrippait à moi...
Je sentais ses lèvres sur ma joue.
Et tout ce temps, je songeais que je devais me rappeler
quelque chose...
mais j'ai oublié quoi.