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Traducteur: Julia Mirecka Relecteur: Hong Khanh LE
Depuis toujours, nous, les humains, nous nous préoccupons de notre santé,
mais, avant, nous n'étions pas capables de déterminer ce qui est important.
Prenons l'exemple des anciens Égyptiens :
très soucieux de leurs corps,
ils étaient sûrs qu'ils en auraient besoin après la mort,
mais ils en enlevaient certaines parties.
Cette partie, par exemple.
Même s'ils préservaient soigneusement l'estomac, les poumons,
le foie etc.,
ils broyaient le cerveau, le retiraient par les narines
et le jetaient,
ce qui semble logique,
pourquoi aurait-on besoin du cerveau ?
Mais imaginez, par exemple, un organe négligé dans notre corps
qui pèserait autant que le cerveau
et qui serait en quelque sorte très important pour nous,
mais on en saurait si peu qu'on le traiterait avec un tel mépris.
Et imaginez qu'à travers les progrès de la science
nous commencions à comprendre
son importance pour la perception de nous-mêmes.
Voudriez-vous en savoir plus ?
Il s'avère que nous avons un tel organe :
nos intestins,
ou plutôt, leurs microbes.
Ce ne sont pas seulement ces microbes qui sont importants.
Les microbes dans tout le corps
s'avèrent cruciaux pour tout un éventail de différences
qui font que nous sommes différents.
Par exemple, avez-vous déjà remarqué
que certaines personnes sont piquées plus souvent par les moustiques ?
Il s'avère que chacune de ces expériences a ses raisons.
Par exemple, les moustiques me piquent rarement,
alors que ma compagne en attire une multitude.
Ce phénomène s'explique par les microbes sur notre peau,
produisant des substances chimiques, qui sont détectées par les moustiques.
Aujourd'hui, les microbes sont importants dans le domaine de la médecine.
Par exemple, les microbes dans nos intestins peuvent
déterminer si un antidouleur particulier est toxique ou non pour notre foie.
Ils détermineront comment votre cœur réagira aux autres médicaments.
Et, si vous êtes une mouche des fruits,
vos microbes détermineront avec qui vous voulez faire l'amour.
Nous ne l'avons pas testé sur les humains
mais ce n'est qu'une question de temps avant qu'on ne le découvre. (Rires)
Les microbes remplissent donc une variété de fonctions.
Ils nous aident à digérer,
à éduquer notre système immunitaire,
à résister aux maladies
et ils peuvent même influencer notre comportement.
Quelle sera la disposition de toutes ces communautés microbiennes ?
Elle ne ressemble pas exactement à cela,
mais cela peut être utile pour comprendre la biodiversité.
Dans les différentes régions du monde on retrouve différents organismes
qui se distinguent automatiquement d'une région à l'autre
ou encore à une autre.
C'est pareil avec la microbiologie, mais je tiens à vous dire :
tous les microbes se ressemblent sous le microscope.
Au lieu d'essayer de les identifier visuellement,
nous observons leur séquençage de l'ADN,
et dans le cadre du projet Human Microbiome Project,
les NIH ont financé ce projet coûtant 173 millions de dollars,
où des centaines de chercheurs ont décidé
de cartographier ces séquençages,
ainsi que les microbes dans le corps humain.
Si nous les mettons ensemble, ils ressemblent à ce schéma.
Il est un peu plus difficile de déterminer d'où ils proviennent, n'est-ce pas ?
Mon labo travaille sur les techniques informatiques qui permettraient
de rassembler ces téraoctets de données séquentielles
pour les présenter plus efficacement sous la forme d'une carte.
Ainsi, on pourrait présenter le microbiome humain
de 250 volontaires en bonne santé
sous la forme d'un tel schéma.
Ici, chacun des points représente tous les microbes
d'une communauté microbienne tout entière.
Je vous ai dit qu'ils se ressemblent tous.
On voit que chacun des points représente une communauté microbienne
provenant de l'organisme en bonne santé.
Vous voyez que les différentes parties sont de couleurs différentes,
comme des continents séparés.
Et il s'avère
que les différentes parties du corps
contiennent des microbes très différents.
Nous voyons la communauté microbienne buccale en vert.
De l'autre côté, nous avons la communauté cutanée en bleu,
la communauté vaginale en violet,
et en bas, nous avons la communauté fécale en marron.
Au cours des dernières années,
nous avons découvert que les microbes de notre corps
se distinguent les uns des autres.
Si on observe les microbes d'une personne,
dans la bouche et dans les intestins,
il s'avère que la différence entre ces deux communautés microbiennes
est énorme.
Cette différence est plus grande qu'entre les microbes de ce récif
et les microbes de cette prairie.
C'est incroyable lorsqu'on y réfléchit.
Cela veut dire que quelques centimètres dans le corps humain
sont plus significatives pour notre écologie microbienne
que des centaines de kilomètres sur Terre.
Ça ne veut pas dire que deux personnes qui se ressemblent
sont identiques.
Vous avez probablement entendu
que nous sommes tous pareils selon notre ADN humain.
Vous êtes identique à 99,99 % selon votre ADN humain
à la personne assise à côté de vous.
Ça ne concerne pas vos microbes :
vous êtes identique à 10 % seulement
à la personne assise à côté de vous selon les microbes dans vos intestins.
C'est la différence qu'entre les bactéries de cette prairie
et les bactéries de cette forêt.
Ces différents microbes
remplissent différentes fonctions dont je vous ai parlé,
allant de la digestion
à l'impact sur des maladies, jusqu'à
la métabolisation des médicaments, etc.
Comment le font-ils ?
D'une part, bien qu'il y ait
juste 1,5 kg de microbes dans nos intestins,
ils sont vraiment nombreux.
Combien y en a t-il ?
Ça dépend de comment nous voyons notre corps.
Ce sont nos cellules ?
Les cellules dans le corps humain sont estimées à environ 10 trillions,
et le nombre de cellules microbiennes à 100 trillions.
Ils sont donc 10 fois plus nombreux que nous.
On pourrait penser qu'on est humain grâce à notre ADN,
mais il s'avère que chacun possède environ 20 000 gènes humains,
selon le type de calcul,
mais également 2 à 20 millions de gènes microbiens.
Voilà, les microbes chez une personne sont largement
plus nombreux et plus variées que ses celles.
Et il s'avère d'ailleurs qu'à part des traces d'ADN humain,
nous laissons des traces de notre ADN microbien
sur tout ce que nous touchons.
Dans une étude, nous avons démontré
qu'on peut retrouver la paume de main d'une personne
qui utilise une souris de façon systématique
avec une précision de 95 %.
Cette étude a été publiée dans une revue scientifique,
et elle est apparue dans « Les experts : Miami »,
donc vous devez y croire.
(Rires)
Donc, tout d'abord, d'où viennent ces microbes ?
Si, comme moi, vous avez des chiens ou des enfants
vous avez probablement des soupçons,
qui sont tous vrais.
Comme on peut identifier votre équipement bureautique
par les microbes que vous partagez,
on peut le faire avec votre chien.
Mais il s'avère que chez les adultes
les microbes sont relativement stables,
donc même si on vit avec quelqu'un,
on garde notre propre identité microbienne
pendant des semaines, des mois, et même des années.
Il s'avère que nos premières communautés microbiennes
dépendent de la façon dont nous naissons.
Les microbes des enfants nés naturellement
reflètent une communauté vaginale, alors que les microbes
des enfants nés par césarienne
s'identifient avec la communauté cutanée.
On pourrait l'associer aux différences de l'état de santé
après la naissance par césarienne,
comme l'asthme, les allergies, l'obésité :
maladies que l'on lie maintenant aux microbes.
Si on y réfléchit, jusque-là, chaque mammifère
passe à travers le canal de naissance,
et l'absence des microbes protecteurs,
qui participent dans l'évolution, peut être cruciale
pour une variété de facteurs dépendant du microbiome.
Lorsque ma fille est née par césarienne
il y a quelques années,
nous avons pris les choses en main
pour lui assurer un contact avec la flore du vagin
dont elle était privée.
Maintenant, il est difficile de dire si cela a eu un impact particulier
sur son état de santé ou non.
En prenant en compte un seul enfant, indépendamment de notre amour,
nous n'avons pas assez de preuves
pour dire ce qui se produit en moyenne,
mais à l'âge de 2 ans, elle n'a pas encore eu d'otite,
donc nous croisons les doigts pour elle.
De plus, nous avons commencé à mener des essais cliniques
sur les enfants pour tester l'efficacité de cette protection.
La façon dont nous venons au monde a un impact immense sur nos microbes,
mais que peut-on faire avec ce savoir ?
Ce que je vous montre, c'est à nouveau le schéma
dont je vous ai parlé,
où chacun des points représente une des parties du corps
d'un adulte en bonne santé parmi 250.
Vous avez observé le développement physique
et cognitif des enfants.
Pour la première fois, nous allons découvrir
le développement microbien d'un enfant de mon collègue.
On observera ses selles,
et notamment
la communauté fécale représentée par les intestins,
récupérées chaque semaine durant presque 2 ans et demi.
Le premier jour de l'enfant.
Il commence comme ce point jaune,
et vous voyez que cela se produit dans la communauté vaginale, ce qui est
prévu pour la naissance naturelle.
Et durant ces 2 années et demie,
il passera vers le bas pour atteindre
la communauté fécale d'un adulte en bonne santé en bas.
Regardons de plus près ce qui va se passer.
Souvenez-vous que chaque étape se déroule en juste une semaine.
Vous voyez que chaque semaine
les différences observées pour les microbes des selles de cet enfant
sont beaucoup plus grandes
que les différences entre des adultes en bonne santé
participants à notre projet
et représentés par ces points marron en bas.
Et vous voyez qu’il se rapproche de la communauté fécale de l’adulte
jusqu’à ses deux ans.
Mais il se passe quelque chose d’incroyable.
Il reçoit des antibiotiques pour soigner une otite.
Vous voyez un changement important dans la communauté,
suivi d’une récupération assez rapide.
Je reviens en arrière pour vous.
Vous voyez que, durant ces quelques semaines,
nous avons un changement radical,
un retard de quelques mois sur un développement normal
suivi d’une récupération assez rapide.
Avant qu’il atteigne 838 jours,
ce qu’on verra à la fin de la vidéo,
vous voyez qu’il présente une communauté fécale
d'un adulte sain malgré la prise d’antibiotiques.
C’est très intéressant car cela soulève des questions importantes
sur l’effet d’une intervention à différents âges de l’enfant.
Une intervention est-elle si importante lorsque le changement du microbiome
est aussi dynamique ?
Ou est-ce comme lancer un caillou dans une mer agitée
où les ricochets vont disparaître ?
Il est fascinant de découvrir que si on leur donne des antibiotiques
au cours des six premiers mois,
ils risquent davantage de devenir obèses à l'âge adulte.
Le risque est moindre s’ils les reçoivent plus tardivement.
Ce que nous faisons au début peut avoir un impact important sur
la communauté microbienne des intestins et sur notre santé à l’âge adulte,
ce que nous commençons à comprendre.
Cela est fascinant, car un jour, en plus de l’effet que les antibiotiques
ont sur les bactéries résistantes,
qui restent très importantes,
ils peuvent également dégrader notre flore intestinale.
Un jour, on commencera à voir les antibiotiques de la même manière
que l’on perçoit aujourd’hui les outils en métal,
que les Égyptiens utilisaient pour le cerveau
avant de le retirer lors de l’embaumement.
J'ai dit que les microbes remplissent des fonctions importantes
et on sait depuis quelques années,
qu’ils ont un lien avec une grande variété de maladies,
dont la maladie intestinale inflammatoire,
les maladies cardiaques,
le cancer du côlon, et même l’obésité.
Il s’avère que l’obésité est un problème d’envergure
et aujourd'hui, on peut dire si vous êtes obèse
avec une précision de 90 %
en examinant les microbes des intestins.
Même si cela semble impressionnant,
il serait difficile d’effectuer un tel examen médical,
car on est capable de dire laquelle de ces personnes est obèse,
sans analyser les microbes présents dans ses intestins.
Il s’avère que même si on séquençait son génome
et qu’on avait son ADN humain,
on pourrait déterminer quelle personne est obèse avec une précision de 60 %.
C’est incroyable?
Cela veut dire qu’un kilogramme de vos microbes
peut être plus important pour votre santé
que chacun de vos gènes.
Grâce aux souris, on peut aller plus loin.
Pour les souris, les microbes ont un lien avec différents types de maladies,
dont la sclérose en plaques,
la dépression, l’autisme et l’obésité.
Comment peut-on savoir si ces différences microbiennes,
liées aux maladies, en sont la cause ou la conséquence ?
Nous pourrions par exemple élever quelques souris,
en les privant des microbes dans une bulle sans germes.
On pourrait ajouter des microbes que l’on pense importants
et observer leurs effets.
Si on prélève les microbes d’une souris obèse
et les transplante dans une souris en bonne santé,
élevée dans une bulle et privée de ses propres microbes,
elle devient plus grosse que si on les prélève d’une souris saine.
Les raisons qui l'expliquent sont fascinantes.
Parfois, les microbes
les aident à digérer la nourriture de manière plus efficace,
et exploiter l’énergie provenant des aliments.
Mais d’autres fois, les microbes influencent leur comportement.
Elles mangent plus qu’une souris normale,
et grossissent si elles mangent autant qu’elles veulent.
C’est vraiment remarquable, n’est-ce pas?
Les microbes peuvent avoir un impact sur le comportement des mammifères.
Vous vous demandez peut-être si on peut le réaliser entre différentes espèces.
Il s’avère que si on prend les microbes d’une personne obèse
et qu’on les transplante à celle élevée dans un espace stérile,
elle sera également plus grosse
qu’une souris ayant reçu les microbes d’une personne mince.
Mais, on peut créer une communauté qu’on leur inoculerait
pour empêcher de prendre du poids.
On peut faire pareil avec la malnutrition.
Dans le cadre du projet réalisé par la Gates Foundation,
on examine les enfants du Malawi
souffrant de kwashiorkor, un extrême de malnutrition.
Les souris qui reçoivent les microbes responsables du kwashiorkor,
perdent 30 % de leur poids
en juste trois semaines.
Mais, on peut rétablir leur état de santé à l’aide du même aliment à base
de cacahuètes comme dans les cliniques.
Les souris ayant reçu des microbes
d’un vrai jumeau sain, guéris de kwashiorkor, se portent bien.
C’est vraiment incroyable car on peut mener des thérapies
et les tester sur une variété de souris, en utilisant
des communautés fécales des hommes
et peut-être orienter ces thérapies jusqu’au niveau de l’individu.
Il est vraiment important que chacun puisse participer
à cette découverte.
Il y a quelques années,
nous avons lancé le projet « American Gut »
vous permettant de retrouver votre place sur la carte microbienne.
C'est le plus grand projet scientifique au financement participatif
qu'on connaît, qui jusque-là, inclut plus de 8000 personnes.
Ils nous envoient leurs échantillons,
on séquence l’ADN de leurs microbes, et on leur envoie les résultats.
Une fois anonymisés, on les partage avec des chercheurs, des formateurs,
et d’autres personnes intéressées, etc.,
donc tout le monde a accès à ces données.
En revanche,
lorsqu’on fait visiter notre labo au BioFrontiers Institute
et qu’on explique l'utilité des robots et des lasers pour examiner le ***,
il s’avère que ce n'est pas tout le monde qui veut le savoir.
(Rires)
Mais j’imagine que vous
voulez le savoir donc j’ai ramené quelques outils,
si vous souhaitez le découvrir par vous-mêmes.
Pourquoi est-ce utile ?
Les microbes sont non seulement importants
pour connaître notre état de santé,
mais ils peuvent surtout guérir des maladies.
C’est une nouvelle découverte que nous avons pu observer
avec mes collègues de l’Université de Minnesota.
Vous voyez à nouveau la carte du microbiome humain.
Ce qu’on voit maintenant,
je vais y ajouter la communauté des personnes souffrant de CPM.
Une forme de diarrhée très sévère qui pousse
à aller aux toilettes jusqu’à 20 fois par jour.
Avant qu’elles ne soient sélectionnées, ces personnes prenaient
des antibiotiques durant 2 ans, sans aucun effet.
Que se passerait-il si on transplantait une partie des selles d’un donneur sain,
que vous voyez en bas,
chez ces patients.
Les bons microbes se batteraient-ils avec les mauvais
pour aider à rétablir leur état de santé ?
Regardons ce qui se passe précisément ici.
Quatre de ces patients vont bénéficier d'une greffe
d’un donneur sain en bas.
Ce que vous pouvez observer,
c’est ce changement radical dans les intestins.
Une journée après la transplantation,
les symptômes disparaissent,
la diarrhée aussi,
ils se rétablissent, avec une communauté pareil à celle du donneur
qui y reste.
(Applaudissements)
Nous ne sommes qu’aux débuts de cette découverte.
Nous savons maintenant que les microbes ont un impact
sur toutes ces maladies différentes, comme
la maladie intestinale inflammatoire, l’obésité,
et peut-être l’autisme et la dépression.
Nous devons cependant
créer une sorte du GPS microbien
qui nous permettrait de nous localiser,
et aussi d’indiquer la direction et les actions nécessaires
pour y arriver.
On doit être capable de faciliter ce processus
de sorte qu’un enfant puisse l’utiliser. (Rires)
Merci.
(Applaudissements)