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D'après le roman de A. Döblin
Un film en 13 épisodes et un épilogue
Biberkopf Franz, relaxé. Ses papiers.
Bonne chance.
LE CHÂTlMENT VA COMMENCER
Un problème ?
Pourquoi ?
T'as peur ?
N'aie pas peur. Aujourd'hui, ça va mal pour beaucoup !
Un de plus passera inaperçu.
T'es mieux loti que d'autres, relaxés avant.
T'as eu 4 ans ?
C'est quoi, 4 ans ?
Rien, bonté divine !
D'autres en ont fait bien plus !
C'est simple, il n'y a qu'à franchir la porte.
C'est tout simple !
Voilà, à toi d'essayer.
Et surtout, ne te retourne pas en partant.
Une superstition souvent inutile,
mais c'est comme ça qu'on fait.
Si ça ne sert à rien !
Qui sait quand quoi sert à qui ?
C'est une loi :
On ne se retourne pas, pour éviter de revenir.
Beaucoup reviennent. Mystère !
Nous autres, on comprend pas.
Tous ces hommes,
et puis la ville,
et le monde, et moi...
Fais pas d'histoires, tu te débrouilleras.
Enfin !
N'oublie pas, ne te retourne pas !
Qu'y a-t-il ? Vous êtes mal ?
lls ont des fourchettes,
ils s'enfournent la viande avec,
ils ressortent la fourchette, sans saigner.
Qu'y a-t-il ? Vous êtes mal ?
Vous souffrez ?
Cognac !
Au signal de la cloche, faut se mettre au travail !
On ne l'interrompt que pour manger,
pour la promenade et pour l'enseignement.
En promenade, les détenus doivent tendre les bras,
et les balancer en avant et en arrière.
Arrêtez-vous. Vous êtes mal ?
Que peut-il arriver ?
Rien de trop grave.
On ne sombre pas forcément, Berlin est grand.
S'il y a de la place pour 1000, y en a pour 1 .
Un appel retentit, semblable au tonnerre,
Au cliquetis des épées, au choc des ondes,
Le Rhin nous appelle, le Rhin allemand,
Nous voulons tous monter la garde.
Chère patrie, sois rassurée...
La garde est forte et fiidèle,
La garde du Rhin,
La garde est forte et fiidèle,
La garde du Rhin.
Les prisonniers sont détenus en cellules.
En régime cellulaire, le détenu est isolé.
En emprisonnement cellulaire,
il rejoint les autres pour la promenade et le culte.
Montez, je vous raconterai une histoire.
Qu'y a-t-il ?
M'enfoncer dans le sol, dans la terre,
là où il fait sombre.
Je vous en prie, vous êtes un hôte ici, comme moi.
Relevez-vous !
Seigneur, calmez-vous, si le vieux vous entendait !
On finira bien par s'accorder, tous les deux.
Personne ne me fera partir d'ici !
Non, personne ne me fera partir d'ici !
Un enseignement, suivant l'exemple de Zannowich.
Vous ne direz pas ce que vous avez,
je vous le raconte.
Ces plaintes, c'est parce qu'il faut se décider,
choisir une voie, et tu n'en connais pas, Franz.
Tu refuses l'ancienne, et dans ta cellule,
tu gémissais aussi, et ne réfléchissais à rien.
ll vaut mieux écouter ce que disent les autres.
Etes-vous vraiment si mal ?
Dieu ne laisse échapper personne de sa main.
Je vais vous raconter l'histoire de Zannowich,
Stephan Zannowich.
Feu mon père racontait beaucoup.
Nous étions 7 bouches affamées.
Quand il n'y avait rien à manger, il contait.
Ça ne nourrit pas, mais ça permet d'oublier.
Gémir ne coûte rien, une souris malade sait le faire.
On sait que sur terre, il n'y a pas qu'or, beauté et joie.
Qui était donc Zannowich?
Qui étaient son père, ses parents ?
Mendiants, comme la plupart d'entre nous,
épiciers, négociants,
il en est quasi mort de faim.
ll a pris un jeu de cartes, a joué avec les gens.
Ça leur a coûté cher.
C'était un tricheur, un escroc,
le vieux Zannowich,
mais c'était un malin !
ll s'est finalement acheté un domaine,
un village entier.
ll a envoyé ses enfants à l'université.
Et une fois vieux,
il est mort paisible et respecté.
Voilà la vie du vieux Zannowich.
Un chameau malade aussi sait gémir.
Un père, s'il est un arbuste, veut que son fils soit arbre.
S'il est une pierre, que son fils soit montagne.
Le jeune Zannowich, Stephan,
était un grand orateur,
déjà au jeune âge de 20 ans.
ll savait se comporter, se faire aimer,
flirter avec les femmes,
faire le distingué avec les hommes.
Et le jeune Zannowich avait toutes les chances pour lui.
lls se bousculaient tous vers lui.
ll avait la clé de tous les coeurs.
Crétin !
Repentis-toi,
reconnais ce qui s'est passé, perçois la nécessité !
Eh bien, je vous le demande :
comment Zannowich a-t-il progressé,
le jeune comme le vieux ?
Vous direz : ''lls étaient des malins.''
ll y a eu d'autres malins,
qui à 80 ans étaient moins avancés que Stephan à 20 ans.
Ce qui compte pour l'homme, ce sont ses yeux...
et ses pieds.
ll faut pouvoir voir le monde,
il faut aller à sa rencontre.
Ecoutez ce qu'a fait Stephan Zannowich,
qui avait vu les hommes et savait
combien il est inutile de craindre les hommes.
Voyez comment les hommes vous aplanissent le chemin,
indiquent quasiment la route à l'aveugle.
lls lui ont dit : ''Sois le baron Warta !''
''Bien'', a-t-il dit, ''je suis le baron Warta.''
Et puis, ça ne lui a plus suffi, ni à eux.
On peut être mieux que baron.
Dites-moi, mon bonhomme,
vous avez perdu la boule ?
Vous me semblez légèrement timbré ?
Perdu la boule, peut-être.
D'abord je suis un crétin, ensuite un timbré.
Vous êtes assis là, bavard comme une pie !
Qui est assis par terre ? Moi ?
Alors qu'il y a un sofa.
Si ça vous dérange, je me tais.
Vous voilà mieux assis !
Cessez donc de radoter !
Comme vous voudrez.
Pourquoi raconter une fois de plus cette histoire,
si vous n'y tenez pas.
Non, non, vous allez continuer !
Je voulais simplement vous ouvrir les yeux.
Zannowich, dont vous venez d'entendre l'histoire,
a donc reçu tant d'argent,
qu'il a pu partir pour l'Allemagne,
et être libre.
Stephan Zannowich nous enseigne
qu'il se connaissait lui, qu'il connaissait les hommes.
ll était aussi pur qu'un oiseau qui gazouille.
Vous voyez,
le monde l'effrayait si peu.
L'histoire se poursuit inopinément,
ce qui encourage le détenu relaxé.
J'ai rarement vu un tordu comme vous.
Vous n'avez pas su regarder,
il y en a d'autres.
Quel commerce faites-vous ?
Vous vivez dans la lune ?
C'est drôle !
On va parler de la lune.
Qui c'est ? Qu'est-ce qu'il fait là ?
Et toi Eliser, que fais-tu ici ?
Je ne le connais pas.
T'as bavardé ?
Ça te regarde ?
T'as encore raconté des histoires ?
ll ne parle pas.
ll se balade et chante dans les cours.
Dis-lui de partir.
Ne te mêle pas de ce que je fais !
J'ai tout entendu derrière la porte.
T'as parlé de Zannowich,
tu ne fais rien d'autre !
Et vous, qui êtes-vous ?
Que faites-vous ici ?
Ne vous mê*** pas de ses affaires !
ll a parlé de Zannowich ?
ll l'a fait ?
Nahum accouche partout de son histoire,
il est perdu quand il est seul.
Ne t'occupe pas de moi !
Tu ne vois pas qu'il va mal, misérable !
Et alors ? Dieu t'a chargé de l'aider ?
Ça alors, Dieu a attendu qu'il vienne.
ll s'en est pas sorti seul ?
ll est méchant !
Méfiez-vous de lui.
ll vous aura raconté les prouesses de Zannowich.
Tu vas t'en aller ?
Ecoutez-moi cet escroc, cette bonne âme.
ll ose me parler ! Est-ce qu'il est chez lui ?
T'as encore raconté des histoires sur Zannowich ?
Si tu étais rabbin, tu serais nourri !
Pas besoin de vos bienfaits !
Ni nous de parasites.
ll vous a raconté comment son Zannowich a fini ?
Crapule, misérable.
ll vous l'a raconté ?
Ne filez pas, calmez-vous.
Laissez-le parler !
ll prend les gens pour des idiots.
Qu'il vous raconte la fin de Zannowich !
Je demande pourquoi il ne le fait pas !
Parce que tu es un misérable, Eliser.
ll est mort à quel âge, ton Zannowich ?
ll a pris 30 ans, pas moins, pour ses méfaits !
ll n'a pu rendre l'argent, et a été dénoncé,
et on a tout appris de ton héros !
Nahum,
tu lui as parlé de ses mains noires, en prison ?
Quand il s'est ouvert les veines, qu'il est mort ?
Une belle vie, une belle fin. Faut le raconter !
Et le bourreau est venu,
avec un chariot pour bêtes mortes.
ll a chargé Zannowich dessus,
l'a balancé derrière la potence
et recouvert d'ordures.
C'est vrai ?
Une souris malade sait aussi gémir.
Voilà pour toi, pour ce que tu es, cher beau-frère !
Ose prétendre que ce n'est pas vrai !
Dites-moi, c'est vrai,
ce qu'il vient de dire sur cet homme,
sur sa fin, son meurtre.
Meurtre, j'ai dit meurtre ?
Non, il s'est donné la mort lui-même.
C'est bien possible.
Et les autres, qu'est-ce qu'ils ont fait ?
Mais qui ?
ll y en aura eu d'autres comme lui,
comme Stephan.
Que pouvaient-ils faire ?
lls l'ont regardé faire.
Regardez mon pantalon.
J'étais gros comme ça.
ll est trop large
de deux gros poings, à force d'avoir le ventre creux.
Mon bide s'est envolé.
On court à sa ruine...
en ayant pas toujours été ce qu'on aurait dû être.
Mais les autres ne valent pas mieux,
je ne pense pas.
lls veulent rendre fou.
Un taulard !
Et alors ?
Un jour on te dit : ''Tu es relâché.''
Et te revoilà dans la merde.
C'est la même merde qu'avant.
ll n'y a pas de quoi rire.
Regardez ce qu'ils ont fait de cet homme !
lls le sortent de taule,
et le salaud, avec son chariot à bêtes,
charge l'homme qui s'est suicidé.
Quel satané salopard !
lls auraient dû l'abattre !
Quelle insulte à l'homme !
Quoi qu'il en soit !
Eh bien... quoi dire ?
Ne sommes-nous plus rien, pour avoir fauté un jour ?
Un relaxé peut remonter la pente, quoi qu'il ait fait.
Regretter quoi ?
ll faut passer à l'offensive,
laisser son passé derrière soi, sa peur, et le reste.
Je vous disais seulement
de ne pas croire mon beau-frère.
Tout ne se passe pas toujours comme on veut.
Quelle injustice de le balancer,
et de le recouvrir d'ordures.
C'est ça, la justice faite à un mort ?
Pouah !
Je vous quitte, serrez-moi la pince.
Vos intentions sont bonnes, les vôtres aussi.
Je m'appelle Biberkopf, Franz.
C'est gentil de m'avoir accueilli.
Je commençais à dérailler sérieusement.
Bougre, ça passera.
Vous allez vraiment bien ?
Vous pouvez partir seul ?
Ne vous en faites pas, vous pouvez me laisser partir.
Vous m'avez parlé
des yeux et des jambes.
Je les ai encore, personne ne me les a fauchés.
ll me faut un cognac.
Et je casse la gueule à celui qui me cherche !
Voyons où il y a du cognac.
Pas mal, pourquoi ne pas s'y remettre,
mais par ce temps de cochon...
Et d'ailleurs c'est stupide.
Quel temps de cochon.
A quel prix, la fille ?
Lâche-moi !
Qu'est-ce que tu as ?
Tu déchires mes fringues.
Tu tiens à les payer ?
Tu m'étrangles, imbécile !
T'es cinglé !
Donne-moi les 3 marks avant, c'est comme ça.
Comment tu me regardes !
Je me suis payé quelques années de taule,
alors, imagine...
lls étaient 2 enfants de roi...
qui s'aimaient tant.
Le chien décampe avec sa saucisse.
Oh, mon poulet,
mon coq...
Qu'est-ce que tu as ?
C'est qui, le mec à côté ?
C'est ma logeuse.
Elle fait quoi ?
Elle est dans sa cuisine.
Qu'elle arrête de marcher !
Je ne le supporte pas.
C'est bon, je vais le lui dire.
Mme Priese, soyez tranquille un instant,
j'ai à causer avec un monsieur...
Sois rassuré.
Rassuré,
et fier comme la garde, la garde du Rhin.
On peut encore ressemeler mes chaussures.
Le fiancé de Kitty le fait pour 2 marks, s'il veut bien.
Je ne le lui piquerai pas.
ll me les teindra du même brun que mon chemisier,
qui n'est plus qu'une loque.
ll faut repasser ses rubans,
je demanderai à Mme Priese.
D'ailleurs que cuisine-t-elle ?
Je te plais pas.
Allons, recouche-toi.
Tu ne vas pas pleurer chez moi !
J'arrive, avec quelque chose de bon,
et tout ira mieux.
Ouvre ton bec, le grand homme doit boire.
Chez nous, on a de l'humour, on s'amuse !
60 pfennigs en supplément.
Allons, grand homme, ''si tu es triste,
''va chez Mampe et jette-t-en un derrière la cravate.''
J'ai quelque chose pour toi.
Si tu lis ça,
tout s'arrangera sans problème.
La puissance sexuelle
découle de l'action commune de :
1 . Du système endocrine,
2. du système nerveux,
3. des organes génitaux.
Les glandes agissant sur la puissance sont :
l'hypophyse, la glande thyroïde,
la capsule surrénale, la prostate,
la vésicule séminale et l'épididyme.
Dans ce système, la glande génitale domine.
Sa sécrétion alimente
l'ensemble des organes génitaux,
du cortex cérébral aux parties génitales.
La sensation érotique
déclenche la tension érotique du cortex.
Le courant circule, comme une excitation érotique,
du cortex cérébral à l'encéphale intermédiaire.
Puis l'excitation passe par la moelle épinière.
Non sans peine,
car avant de quitter le cerveau,
elle doit passer le barrage des complexes,
surtout des complexes moraux,
la peur de ne pas assurer.
Mais je n'y peux rien.
Et les 60 pfennigs pour les 2 ''Mampe'' ?
Monsieur Biberkopf,
je vous attendais bien plus tôt.
Mlle Eva a payé votre loyer.
Vous deviez venir, mais plus tôt...
Entrez donc.
Vous vous rappelez où était votre chambre ?
Ce n'est pas si vieux. Cette porte.
Vous pouvez aussi passer par là.
Ça fait 4 ans.
Mon Dieu, toi, Franz !
Ouvre, laisse-moi entrer.
Boum, badaboum...
J'ai un bout de fil dans la bouche.
Qu'est-ce que tu fais ici ? Si on t'avait vu !
Et alors ?
Quel mal à ça, qu'ils aillent se faire...
Bonjour !
Ce sacré bout de fil sur la langue,
il s'incruste.
C'est pas grave,
ça fait bizarre sur la pointe.
Que viens-tu faire, Franz ?
Tu es fou !
Je m'assieds.
Je me suis rendu,
corps et âme.
L'empereur rend l'épée,
l'empereur doit me rendre l'épée,
ainsi vont les choses.
Si tu ne pars pas, je crie.
Je crie à l'agresseur.
Et pourquoi ?
Boum, badaboum...
J'arrive de si loin à pied,
me voilà,
assis ici...
lls t'ont déjà relâché ?
Oui, j'ai fait mon temps.
Puisqu'ils m'ont relâché, je suis ici.
lls m'ont relâché.
Et comment !
Le clairon s'est tu,
c'est fini...
Qu'est-ce qui te prend !
Franz, je vais crier, lâche-moi !
Karl peut rentrer à tout instant.
T'as commencé comme ça, avec lda.
Que vaut une femme entre amis :
Le capitaine Bacon demanda
son divorce à Londres,
sa femme l'ayant trompé avec un camarade à lui,
le capitaine Furber.
Le tribunal lui accorda, 750 livres de dédommagement.
Le capitaine ne semble pas
avoir beaucoup estimé son épouse infidèle,
sur le point d'épouser son amant.
ll n'y a rien à faire.
Des bras d'homme tels que ceux-là sont d'acier.
J'appelle au secours !
Franz, mon Dieu,
aie pitié !
ll regardait lda ainsi.
C'est lda qu'il serre dans ses bras.
C'est lda qu'il a dans ses bras, lda est ma soeur.
ll n'y a plus d'affreuses bagarres,
plus de dérives,
plus de prison,
mais un jardin paradisiaque,
et des feux d'artifice.
Ni maison, ni pesanteur, ni force centrifuge.
La diffraction des rayons dans le champ de force du soleil
a disparu, ainsi que la chaleur convertible en travail,
les pulsions électriques,
l'induction,
la densité des métaux,
les fluidités des corps solides non métalliques.
Etrangle-moi donc...
je ne crie pas, si tu y parviens.
Tu le mérites !
Les clairons sonnent,
pour appeler les hussards...
Alléluia !
Franz Biberkopf est relâché !
Franz Biberkopf est revenu !
ll est libre !
Je le dirai à Karl !
Tu aurais dû faire 4 ans de plus !
Tout ça c'est Franz, Franz est de retour.
Franz est libre.
Prends ton chapeau, file !
Si mon mari te croise,
s'il voit mon oeil au beurre noir !
Et ne te ramène plus,
sinon je le dis à Karl !
Dis-le-lui, dis-lui tout, Minna.
Minna, je suis si heureux !
Si content, je suis redevenu un être humain.
Qui rembourse mon tablier ?
Typique pour un mec, vraiment stupide !
Je voudrais être aussi gonflée,
une seule fois !
Franz a tué lda, sa fiancée, dans la fleur de l'âge.
lnutile de mentionner
son nom de famille.
C'est arrivé lors d'une dispute.
Les organes suivants de la femme ont été touchés d'abord :
la peau à la racine du nez et au milieu,
l'os et le cartilage situés dessous.
Cela a été découvert à l'hôpital et a figuré au dossier.
Puis les deux épaules,
légèrement tuméfiées.
Franz ne se servit que d'un batteur à crème,
avec lequel il frappa par deux fois violemment
la cage thoracique d'lda, son interlocutrice.
Jusqu'à ce jour, sa cage thoracique était intacte.
Par contre, la charmante petite ne l'était plus.
Notons ceci :
Celui qu'elle nourrissait la soupçonnait de vouloir le lâcher,
au profit d'un nouveau venu, originaire de Breslau.
La cage thoracique ne s'attendait pas
au contact du batteur à crème.
Au premier coup, la fille cria ''aïe'',
en le nommant ''créature'', et non plus ''sale mec''.
Pour donner le deuxième coup, Franz s'était calé,
après un quart de tour à droite.
lda resta muette,
mais ouvrit bizarrement la bouche.
Ce que venait de subir le thorax a un lien
avec les lois du rigide et du flexible,
du choc et de la résistance.
C'est inexplicable
sans ces lois.
On s'appuiera
sur la première loi de Newton :
un corps reste figé
jusqu'à ce qu'une force le fasse changer d'état.
(Ce qui se rapporte aux côtés d'lda.)
La deuxième loi de Newton :
Le mouvement est proportionnel à la force qui agit.
(Franz est la force qui agit,
ou plutôt son bras
et son poing, avec ce qu'il serre.)
Entrez.
M. Biberkopf, de la visite.
Franz !
Bonjour, Franz !
Pourquoi n'es-tu pas passé chez nous ?
Je n'en sais rien.
Qu'est-ce que tu as ?
Je ne veux pas recommencer !
Pas comme avant !
Je ne veux pas recommencer !
Qu'est-ce...
ll est cinglé.
Je ne veux pas recommencer.
Je t'ai dit d'aller ton chemin !
Mais Minna, j'ai les tabliers !
Quels tabliers ?
Choisis !
Garde-les, tes trucs volés.
Maman, il y a un étranger dans la maison.
N'imagine rien. C'est pour qu'on te voie pas.
Je viens pour les tabliers.
Je t'ai dit de garder tes trucs volés.
lls ne sont pas volés.
Regarde...
vraiment pas volés.
Je t'assure, Minna.
Tout ça, c'est pour toi.
Je suis content, Minna,
je me suis réjoui toute la journée.
Cette nuit, j'ai rêvé de toi.
Tu rends les gens malheureux.
Qu'est-ce que tu as ?
Karl n'a pas cru
que je m'étais fait un oeil au beurre noir
en me cognant à l'armoire.
C'est possible, si le battant est ouvert...
il n'a qu'à essayer !
Mais il ne veut pas me croire.
Je ne comprends pas, Minna.
Parce que j'ai aussi des marques au cou.
J'avais pas remarqué.
Mais que dire, s'il me les montre,
et si je ne sais pas d'où ça vient ?
On peut s'être gratté ! Ça peut vous démanger.
Ne laisse pas Karl te couillonner !
Je l'aurais remis à sa place !
Et toi qui reviens sans cesse,
les gens t'auront vu.
Pars, Franz, ne reviens plus.
Tu me rends malheureuse.
Va-t'en.
Tu veux recommencer !
Pourquoi ?
Je veux juste m'asseoir avec toi.
Tu veux ?
Non merci.
Ne reviens pas, Franz.
Eh ! Mina,
comment tu traites les gens !
Et pourquoi je ne reviendrais pas ?
D'accord, je ne reviendrai pas.
Non, ne reviens pas.
Franz !
Ça alors, Meck !
Je te suis, depuis chez toi.
Pourquoi tu n'as rien dit ?
Pourquoi tu ne dis rien ?
J'en sais rien, un sentiment bizarre.
Tu fiches quoi, là-haut ?
C'est la soeur d'lda.
Eh oui, c'est la soeur d'lda. Et alors ?
Ça ne t'a pas suffi ?
Si, ça m'a suffi.
J'ai pas pu faire autrement.
Pourquoi, j'en sais rien.
ll fallait que je fasse ce que j'ai fait.
C'était nécessaire pour moi.
A toi de savoir.
Oui. Buvons un coup ensemble,
il y a longtemps qu'on ne l'a pas fait.
Oui, assez longtemps !
Exactement 4 ans, et quelques jours.
Dis-moi franchement...
- C'était comment, en taule ? - Comme dehors.
Ça t'étonne, mais c'est la vérité.
Et la vérité, c'est la vérité,
c'est la vérité...
Tu la connais ?
Lina, la Polonaise, toujours ici.
Dis-moi, elle a un problème ?
Personne n'en sait rien.
Mais c'est une fille chouette.
Elle me plairait bien.
Rien de particulier à signaler à son sujet ?
Non, vraiment pas,
elle vit, chacun essaie de vivre,
chacun se débrouille comme il peut.
Oui, chacun essaie de vivre.
Et toi, qu'est-ce que tu deviens ?
Oh, tu sais...
Je bosse à gauche et à droite,
chaque jour ailleurs.
Eh oui, c'est comme ça.
On a besoin de changer, c'est juste,
de voir du nouveau,
du jamais vu.
On devient raisonnable.
Oui, c'est juste.
Chacun devient raisonnable un jour...
même le plus raisonnable !
Santé !
Remets-en trois.
Et un cognac pour la dame.
Et si ça lui dit, qu'elle vienne ici,
et sinon, tant pis.
Eh ! Lina !
Pour toi, ce monsieur te l'offre.
Tu peux soit le boire ici,
soit avec eux,
comme tu voudras.
Alors, tu ne trinques pas ?
Plus ***.
Merci.
Ne dites pas merci,
on remercie après, ou pas du tout,
ça n'a pas d'importance.
Vous avez été malade, ou alors...
Oui, si on veut...
Oui, si on veut...
Vous avez été en prison
pendant... trois ans...
Non, plutôt quatre ans.
Moi...
Ne vous en faites pas,
ces choses-là, je les sens.
Je les vois.
Je ne sais pas d'où ça me vient.
Je sens une chose, en fin de compte j'ai raison.
J'ai fait 4 ans, à Tegel.
Alors maintenant, tout va bien.
Santé !
Santé !
Que faut-il croire ?
On peut croire à ceci, à cela.
La réalité n'est pas réelle,
elle change sans arrêt,
un jour c'est comme ci, un jour comme ça.
Eh oui !
Quatre ans !
Qu'est-ce que ça représente !
Tu sais ce que c'est, le mal du pays ?
Quand le coeur se déchire... le mal du pays.
Tout autour de soi,
tout est si vide, si froid !
La mer murmure doucement.
Tu sais ce que c'est, le mal du pays ?
''Testifortan.''
Ça vient d'où ?
D'un type, qui est venu ici... c'était quand...
il y a 10... 20 jours... il prenait ça.
''Testifortan.
''Marque déposée.
''N° 365 635.
''Traitement sexuel,
''proposé par les docteurs Hirschfeld
''et Schapiro.
''lnstitut de sexologie, Berlin.
''L'impuissance est due à :
''A) troubles fonctionnels
''des glandes endocrines.
''B) importante résistance
''provoquée par des complexes psychiques,
''l'épuisement du muscle érecteur.
''L'homme impuissant déterminera lui-même
''le moment de refaire une tentative.
''Une pause est souvent recommandée.''
''Une pause est souvent recommandée.''
Qu'est-ce que tu as ? Avec moi, c'est comme ça !
Oui ?
T'es vraiment comme ça ?
Bon,
c'est bien.
Oui ?
T'as une si belle peau.
C'est de ça que rêve un homme,
sans trop savoir de quoi il rêve.
Et tes oreilles,
la racine de tes cheveux,
ton sourire,
ta manière de me regarder.
Tu l'as senti.
Y a-t-il beaucoup de gens
qui ne savent pas,
quand ils rêvent, de quoi ils rêvent...
quand ils sont allongés, les yeux fermés,
et qu'ils rêvent.
Je sais maintenant...
ce que je voulais faire aujourd'hui :
je voulais avoir une bonne raison
de faire ce que je voulais faire.
Maintenant je le sais,
c'est bien ce que je voulais faire,
mais je ne le savais pas.
J'ai voulu jurer,
j'ai voulu faire le serment
de rester honnête...
De ne plus jamais rien faire,
de ne plus jamais rien faire d'autre
que ce que font les autres.
J'ai voulu le jurer.
J'ai voulu jurer
de ne plus jamais être malhonnête.
J'ai voulu le jurer.
Voilà, je l'ai juré, et tu l'as entendu.
J'ai prêté serment,
j'ai juré de rester honnête...
J'ai prêté serment, tu es mon témoin.
Tu l'as entendu.
T'as entendu que je veux rester honnête.
J'ai prêté serment, et tu es mon témoin.
Je veux rester honnête pour toujours.
Rester honnête
pour toujours, pour toujours honnête...
Bonjour !
Bonjour, Franz !
Je t'attendais plus.
Tu sais qu'on peut compter sur moi !
Diablotin un jour, diablotin toujours !
Oui...
Eh oui, c'est comme ça.
Eh oui...
Madame Bast ?
Vous n'êtes pas rentré de la nuit.
C'est la vie.
C'est Lina, Mme Bast, tout simplement Lina.
Vous vous y ferez.
Oui, mais...
Pas de mais...
Allons, donne-lui la main.
Faudra t'entendre avec elle.
Allons, c'est quelqu'un de bien.
Je m'appelle Lina.
Je ne sais pas comment c'est arrivé,
mais je l'aime vraiment.
C'est tout ?
Comment ça ?
C'est simplement...
que je l'aime bien, voilà tout.
Bon, alors s'il n'y a plus rien à faire,
soyez la bienvenue.
Je suis content qu'elle t'accepte, Lina.
Celui qu'elle accepte est quelqu'un de bien.
Bonjour, M. Meck.
Toujours aussi rigolo ?
Pour autant qu'on puisse l'être à notre époque...
Vous avez raison.
Au fait, je ne sais pas ce que ça signifie,
il y a une lettre pour vous.
Une lettre ? Pour moi ?
Officielle, oui, mais pas forcément inquiétante.
''Affaire Biberkopf :
''Selon votre dossier,
''vous avez été condamné pour blessures corporelles
''avec issue fatale.
''Vous êtes donc un danger pour la sécurité publique.
''Aussi, habilité par le § 2 de la loi de 1842,
''et par le § 3 de la loi sur la liberté de circulation de 1867,
''ainsi que par les lois du 12 juin 1889 et du 13 juin 1900,
''j'ai décidé de vous expulser
''des quartiers de Charlottenburg, Neukölln,
''Wilmersdorf, Lichtenberg,
''Friedenau, Schmagendorf,
''Tempelhof, Britz,
''Reinickendorf, Pankow et Tegel. Je vous invite
''à quitter ces territoires dans les 15 jours...
''Si après expiration du délai,
''vous étiez repéré sur ces territoires,
''vous seriez passible,
''selon le § 132 N° 2 de la loi sur l'administration publique,
''d'une amende de 100 marks,
''et en cas d'insolvabilité,
''d'une détention de 10 jours.
''Vous êtes aussi informé
''que si vous deviez résider dans les lieux
''voisins de Berlin : Potsdam,
''Spandau, Friedrichshagen,
''Oberschöneweide, Wuhlheide,
''Fichtenau, Carow,
''Frohnau, Cöpenick,
''Steglitz, Dahlem, Wannsee,
''Klein-Glienicke, Nowawes, Neuendorf,
''Eiche, Bornim et Bornstedt,
''vous devez vous attendre à en être expulsé.
''Formulaire N° 968a.
''Préfecture de Police de Berlin.''
Ne fais pas cette tête, puisque je t'aime.
Eh oui...
Dis quelque chose.
Parle, dis enfin quelque chose !
Que veux-tu que je dise ?
Que dire ?
Je dis : Prunestrasse, 1, Assistance aux détenus.
Bien, écrivez :
M. Biberkopf s'est placé sous notre surveillance...
Vous vous présenterez chaque mois.
Tous les mois... d'accord.
Nous vérifierons s'il travaille.
Et il s'est engagé à se présenter ici chaque mois.
Au revoir.
Au revoir, respectez vos engagements.
Oubliée la peur, la prison de Tegel, et le mur rouge...
Une vie nouvelle commence. L'ancienne est finie !
Biberkopf est revenu, les Prussiens crient Hourra !
Gagné ! Lina, nous avons gagné !
T'as compris, on a gagné, Lina !