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- Quel est ton nom ? - Amaneh.
UN TEMPS POUR L'IVRESSE DES CHEVAUX
Quel âge as-tu ?
Je ne sais pas, je suis plus jeune que Madi.
Qui est Madi ?
C'est mon frère, il est estropié, toujours malade.
Là-bas... celui qui porte le blouson jaune.
Aujourd'hui, nous l'avons emmené chez le médecin,
à l'hôpital de Bàneh.
Que fait ton père ?
II est muletier, contrebandier,
il transporte des marchandises en Irak,
puis en rapporte d'autres ici.
Que fait ta mère ? As-tu une mère ?
Non, elle est morte quand ma petite soeur est née.
Je n'ai plus de mère. Rojine la remplace.
Qui est Rojine ?
C'est ma soeur... ma soeur aînée.
Elle est ici, Rojine ?
Non, elle est à la maison, elle s'occupe de ma petite soeur.
Là-bas, c'est mon grand frère, Ayoub...
Scénario, Réalisation, Production BAHMAN GHOBADI
- Vous êtes combien ? - Trois soeurs et deux frères.
Que faites-vous ici ?
On emballe les objets dans du papier journal
pour les protéger.
Ayoub et moi, avec d'autres gosses du village,
on vient presque tout le temps ici.
Où est votre village ?
II est loin, très loin,
près de la frontière irakienne.
Monsieur, je peux emballer vos verres ?
Madi chéri, tu n'es pas fatigué ?
Je vais te donner tes cachets.
Je veux pas les prendre.
Je cherche cinq ou six ouvriers, vite, vite.
Amaneh, viens me remplacer, je reviens.
Moi, je peux venir ? Moi !
Six personnes, pas plus !
Plus vite, avant que les agents arrivent.
Attention, c'est fragile.
Dépêchez-vous,
surtout ceux qui veulent rentrer chez eux.
Montez vite, je pars dans cinq minutes !
Frérot, viens vite, la camionnette s'en va !
Dépêche-toi, la camionnette s'en va !
J'arrive !
La vie est en train de me faire vieillir,
de me faire errer par monts et par vaux,
de me voler ma jeunesse, de me conduire vers la mort.
Dans la camionnette,
ils ont raconté que plusieurs contrebandiers
avaient sauté sur des mines.
Notre village est à la frontière.
Beaucoup de gens sont morts à cause des mines.
Mon père était avec eux.
Je suis inquiète.
Hier soir, j'ai rêvé de mon père.
Je vais te donner tes cachets.
On n'a pas d'eau. Avale avec ta salive.
Avale !
Avale, comme ça.
Demande-leur de cacher les cahiers sur eux.
Le temps de passer la frontière.
Les Irakiens, dépêchez-vous. Sautez, on arrive à la frontière !
On vous retrouve de l'autre côté.
Où vas-tu ? Que transportes-tu ?
Je n'ai pas de chargement. Que des passagers.
Tu as des Irakiens ?
Non, je n'en ai pas.
Ceux-là, où vont-ils ?
Ils vont à Sardab.
Descendez, les enfants !
Sergent, alignez-moi tout ça !
Descends vite !
C'est quoi, ça ?
Des cahiers.
Dépêche-toi, va dans la ligne !
Où transportes-tu ces cahiers ?
C'est ceux des gosses.
Qu'est-ce que tu fais avec ces cahiers ?
- Tu savais pas, pour les cahiers ? - Non, je savais pas.
Sergent, contrôle-moi tout ça !
Que tout le monde montre ce qu'il a dans sa chemise !
Ramasse-moi tout ça !
Sergent, récupère-les tous !
Chef !
II y en a plein la camionnette !
Tu sais que c'est illégal ?
J'ai rien fait !
Monte dans ta camionnette !
Mais j'ai rien fait de mal !
J'ai rien fait !
Saisissez cette camionnette !
Va te garer là-bas !
Amaneh !
Attends !
Attends que je donne les cachets à Madi.
Madi, on sera bientôt de l'autre côté de la colline
là où il n'y a plus de neige. Tu n'auras plus froid.
Avale !
J'en veux plus, c'est amer.
Prends un peu de neige,
ça va faire descendre le cachet.
Il est ***.
Avale.
Mon père
ne reviendra plus jamais.
L'oncle a dit
qu'Ayoub remplacerait notre père.
Ayoub a abandonné ses études
car notre oncle, avec huit enfants,
ne peut pas s'occuper de nous en plus.
Ayoub m'a dit que je devais continuer l'école
et qu'il payerait mes études.
- Bonjour, M. Le docteur. - Bonjour, Ayoub.
Dépêche-toi d'amener Madi que je lui fasse sa piqûre.
C'était prévu pour ce matin.
Je dois partir en ville !
Bonjour. Aide-moi à monter.
Où vas-tu ?
Je vais à la maison.
Je vais emmener Madi chez le Dr Rahim.
- Il n'est pas là. - Où est-il ?
II vient juste de partir avec Amaneh au cimetière.
- Je peux laisser ça ici ? - Oui, pose-le.
Mon Dieu, aide Madi ! Mon Dieu, guéris-le.
Amaneh !
Qui t'a permis de venir ici ? Rentre à la maison !
Madi allait très mal.
Pourquoi tu l'as amené ici ?
II doit faire sa piqûre !
II est malade !
Mais il allait très mal.
On s'en va.
Monsieur Rahim !
Docteur !
Ayoub, c'est toi ?
Je t'ai dit de m'amener Madi,
car je dois aller en ville et je serai absent quelques jours.
Madi, où as-tu mal ?
Où encore ?
Tu as mal partout donc !
Je vais lui faire sa piqûre.
Amène-moi ma sacoche !
Tu lui as bien donné ses cachets ?
Oui, mais il a gémi de douleur toute la nuit.
Quel est ton nom ?
Madi.
Quel âge as-tu ?
Deux, non, trois...
Il a quinze ans !
Assieds-toi.
Baisse son pantalon.
Voyons, tu es un adulte.
Un adulte ne pleure pas.
Un grand garçon ne pleure pas. Bravo !
Ayoub, viens ici un instant.
Hier soir, j'ai dit à ton oncle ce que je t'avais déjà dit.
On ne peut plus continuer à faire des piqûres à Madi.
Son état s'aggrave de jour en jour.
Il faut l'opérer d'urgence,
sinon dans un mois, ou même moins,
il risque de mourir.
Le Dr Rezaï vous a prévenus quand vous êtes allés à l'hôpital.
Si on ne l'opère pas, il risque de mourir.
Mais on n'a pas d'argent.
C'est à vous de décider.
Il faut l'opérer le plus rapidement possible.
Et même si on l'opérait,
il ne vivrait que sept ou huit mois.
Sa maladie
est incurable.
- C'est vrai ? - Oui.
Tu es fâchée après moi ?
Oui.
Pourquoi ?
Tu m'as frappée.
Pourquoi tu l'as emmené sans ma permission ?
Madi s'ennuyait.
Il ne fallait pas l'écouter.
Il s'ennuyait...
On fait la paix ?
- Non. - Pourquoi ?
Parce que tu m'as frappée.
Je promets de ne plus te frapper. On fait la paix ?
D'accord.
Serre-moi la main.
J'ai fini mon cahier.
- Tu veux le même cahier ? - Oui.
J'ai eu deux vingt à l'école.
Je t'en achèterai un demain.
Je vais dîner puis je te ferai travailler tes mathématiques.
Comment ça va ?
Bien, merci.
Madi, ça va ?
Tu es allé voir M. Yassin ?
Oui, mais il n'était pas là.
De l'eau !
J'ai entendu ce que disait le médecin.
Madi va de plus en plus mal chaque jour.
Ayoub a dit qu'il allait sûrement
trouver l'argent nécessaire à l'opération de Madi.
Ayoub est encore allé voir M. Yassin.
Peut-être que mon oncle
pourra convaincre Yassin
de lui trouver du travail.
Ici, on ne donne pas de travail à celui qui n'a pas de mulet.
Au bazar, on charge des marchandises pour l'Irak
et, de là-bas, on ramène d'autres produits.
Mon cher Yassin, c'est à propos d'Ayoub.
Est-ce que tu pourrais lui donner un travail ?
C'est un brave garçon.
Il est dans une mauvaise situation.
Apporte ça, on va les charger.
Est-ce que tu peux faire quelque chose pour Ayoub ?
Ayoub peut-il faire un chargement ?
- Pourquoi pas ? - Où est-il ?
Appelle-le.
Tu peux faire des chargements ?
Oui.
Alors viens le matin
et fais comme les autres.
Rahouf !
Donne un chargement à Ayoub !
Tu m'as compris ?
Entendu.
Il ne fait pas trop froid.
Ne donne pas plus d'une bouteille aux mulets.
- Tu es fatigué ? - Oui, la route est difficile.
Je le sais.
D'où es-tu ?
Du village de Tchampara.
Tu n'as pas de mulet ?
Non. Mon père a sauté sur une mine avec.
Tu travailles pour toi-même ?
Quel est ton nom ?
Reboir.
Tu n'as pas un lopin de terre ?
Si, on en a beaucoup !
Alors, pourquoi tu la cultives pas ?
Nos terres sont pleines de mines.
Vous ne pouvez pas déminer ?
II y en a trop.
Allez, on est presque à la frontière.
On est à la frontière ? Où est-ce ?
Tu vois ?
Là-haut, c'est l'Irak.
Qu'est-ce qui se passe ? II y a une bagarre !
Paie-moi mes chargements précédents !
Je ne te dois pas un sou !
C'est le destinataire qui paye !
C'est toi qui nous embauches, tu dois nous payer !
M. Yassin vous salue
et m'a dit de vous demander
de me payer pour le chargement.
Tu veux qu'on te paye ?
On lui a déjà expliqué
qu'on ne pouvait pas payer les porteurs.
Alors, que dois-je faire de ces chargements ?
Non, je ne veux pas le savoir !
Alors, qui va payer ?
Ça ne me regarde pas.
C'est à eux de les payer.
Je ne paye pas un sou.
Débrouille-toi. C'est à eux de payer.
Alors, que faire ?
Tu les laisses ici ou tu les ramènes en Iran,
mais on paie pas.
Un thé, s'il vous plaît.
Bienvenue.
Merci. Ces photos sont à vendre ?
- C'est combien ? - Deux, trois, quatre dinars...
- C'est combien, la petite ? - Deux dinars.
En monnaie iranienne, ça fait combien ?
- Tu n'as pas de dinars ? - Non.
Ça fait rien, je te la donne.
Tu me paieras quand t'auras des dinars.
- Merci. - Je te l'apporte.
Merci.
Tu es de Sardab ?
Comment tu sais ?
On t'a pas payé ton chargement ?
Non.
Pourquoi ?
Le propriétaire du chargement dit
qu'on aurait dû me payer en Iran.
Tu débutes dans ce travail ?
Oui.
Ecoute. Tant qu'on a pas payé ton chargement,
faut pas le prendre.
Ne leur fais pas confiance.
Ils bougent tous les jours.
Tu ne peux jamais les retrouver.
Ayoub !
Viens, on rentre !
Au revoir.
Bonjour, Rojine.
On t'a payé ?
Non, ils me paieront demain.
Madi ! Tu dors ?
Ça va ?
Regarde ce que je t'ai apporté.
Quand le premier avion fut prêt à s'envoler,
ils ont invité leurs amis à voir ce spectacle.
Quand le moteur de l'avion s'est allumé,
les deux frères étaient anxieux.
Finalement, l'avion a décollé, pris son envol
et c'est ainsi que l'homme a conquis le ciel.
Cela fait maintenant plus de 90 ans que ce vol a eu lieu.
Aujourd'hui, des avions gigantesques transportent l'homme
en quelques heures d'un bout à l'autre du monde.
Depuis, l'homme a conquis la Lune...
Il veut maintenant atteindre les autres planètes.
Je vous en prie.
Je voulais voir Amaneh.
Pourquoi ?
J'apporte un cahier.
Amaneh, tu peux sortir.
Je t'ai acheté un cahier.
Merci.
C'est celui que tu m'as demandé.
Au revoir.
Ayoub a travaillé dur pendant 2 mois,
mais il n'a pas pu réunir l'argent pour l'opération de Madi.
Il a dû tout dépenser pour nous.
Après la bagarre où il s'est cassé le bras,
notre oncle a proposé son mulet à Ayoub
pour qu'il puisse travailler avec.
Arrêtez !
Bakhtiar !
C'est une embuscade ?
Fuyez !
C'est une embuscade !
Hé, le gendre !
Taher, tu es un brave homme.
Ton fils aussi.
Tu m'es cher et ton fils aussi m'est cher.
Quand le garçon et la fille sont d'accord pour se marier,
moi aussi je suis d'accord.
Tu as ma bénédiction
pour que ton fils épouse ma nièce.
Acceptez mon fils pour gendre,
vous me ferez un grand honneur.
Si vous acceptez mon fils pour gendre,
il sera votre serviteur...
Les bonnes actions doivent se faire le plus vite possible.
Je vous offre ma nièce.
Il faut faire vite.
C'est une bonne chose qu'ils se marient rapidement.
Je suis sûr que vous ne le regretterez pas.
Ne t'inquiète pas,
Madi est la prunelle de nos yeux.
Ce soir, en rentrant, on va discuter tous ensemble
au sujet de son voyage et de son opération en Irak.
Demain, je répondrai.
Son avenir est entre tes mains.
Merci.
Bonjour.
Bonjour. A qui sont ces chaussures ?
A M. Taher et à son fils.
Notre oncle est là ?
II est là aussi.
Pourquoi sont-ils venus ?
Je sais pas.
Va chercher l'oncle.
Pourquoi tu n'y vas pas toi-même ?
Je te dis d'y aller !
Oncle, viens voir un instant.
Bonjour, mon oncle.
Pourquoi tu n'entres pas ?
Pourquoi sont-ils là ?
Pour une bonne action.
Laquelle ?
Demander la main de Rojine.
La main de Rojine ? Comment ça ?
Je suis ton oncle.
Tant que je suis là, tu n'as pas la parole !
Compris ?
Quoi ? Je suis quand même son frère !
Tu vas la fermer, oui ?
Rojine est ma soeur.
Tu ne m'as rien dit ! II faut qu'ils partent.
Va-t'en ! Ne t'en mêle pas !
Pourquoi tu as réagi comme ça ?
Pourquoi tu ne m'as pas prévenu ?
Mais de quoi ?
Pour le fils de M. Taher.
Je n'étais pas au courant non plus.
Pourquoi tu mens ?
Ne me mens pas !
Je suis ton frère, non ?
Je pensais que l'oncle t'avait prévenu.
Il ne m'a rien dit.
Pourquoi es-tu tellement en colère ?
Pourquoi pas ?
Je suis l'homme de la famille, non ?
J'ai fait ça pour Madi.
Si je me marie, ils le feront opérer en Irak.
Tu n'arrives pas à trouver l'argent pour l'opération.
C'est décidé ?
Je ne sais pas.
Ayoub ! Attends !
Comment vas-tu, Madi ?
Bonjour, M. Rahim.
Va le chercher pour sa piqûre.
Ne bouge pas ! Tu es un homme.
Quand on est un homme,
on ne pleure pas.
Je viendrai jeudi lui faire sa dernière piqûre.
Au revoir.
Mme Mahboubeh, s'il vous plaît,
je vous prie de vous occuper des enfants.
Pourquoi vous l'avez amené ici ?
Je ne veux pas de lui !
On a fait venir la mariée.
Je ne veux pas de celui-là.
Reprenez-le !
Mon oncle !
Sa mère dit qu'elle ne veut pas de Madi.
Vous aviez promis.
M. Taher avait donné son accord.
Il peut dire ce qu'il veut.
Moi, je n'en veux pas.
Moi-même, j'ai déjà dix enfants.
Nous n'avons pas pris la dot...
Madi devait accompagner la mariée.
Je ne laisserai pas faire ça.
Alors, elle demandera le divorce.
On refusera le divorce.
A la place de la dot, on peut vous donner un mulet.
J'offre un mulet mais le garçon doit repartir.
Quand Madi est rentré, il allait très mal.
Il n'y avait personne pour lui faire sa piqûre.
Cela fait maintenant huit jours que le médecin n'est pas passé au village.
Sans rien dire à notre oncle,
Ayoub a emmené Madi et le mulet au bazar.
Il m'a dit qu'il allait vendre le mulet en Irak,
car là-bas, on achète les mulets...
Il a dit qu'il emmenait Madi pour le faire opérer là-bas
et qu'après, il reviendrait.
Il m'a dit de rester à la maison et qu'il rentrerait très rapidement.
- Bonjour. - Bonjour.
Que veux-tu faire avec lui ?
Je veux aller en Irak.
Pourquoi ?
Je veux vendre mon mulet.
Juste pour ça ?
Je veux aussi le faire opérer.
Préparez-vous !
Les enfants ne peuvent pas venir. Il y a des embuscades, des mines.
La route est dangereuse.
Les adultes peuvent venir.
- Je ne suis pas un enfant. - Et lui, c'est pas un enfant ?
Lui non plus, c'est pas un enfant.
Si quelque chose lui arrive, que vais-je faire ?
J'en prends la responsabilité.
Puisque tu insistes, viens, mais tu en prends la responsabilité.
D'accord ?
Mais on ne te payera pas.
D'accord.
Pas un sou !
Ne reviens pas sur ta parole.
Aujourd'hui, il fait très froid.
Donnez deux bouteilles aux mulets.
Ayoub mon frère !
J'ai quelque chose pour toi.
Que fais-tu là ?
Je vous ai apporté
du pain pour la route.
Merci.
Fais attention à toi et occupe-toi de Kolsoum.
Frérot !
Quoi ?
J'ai fini mon cahier,
tu m'en achètes un autre ?
D'accord.
Rentre à la maison, je t'en achèterai un.
Je t'adore, mon chou.
On arrive à la frontière.
Repartez ! C'est une embuscade !
De ce côté aussi ! Repartez !
Fuyez vers la vallée !
Ils sont saouls,
on leur a donné trop d'alcool.
Déchargez-les, ils se relèveront peut-être.
Debout, je t'en supplie... Lève-toi !
Ils approchent !
M. Rahim !
Je t'en supplie, viens sauver mon mulet !
Ne me laisse pas tout seul.
Je dois emmener Madi en Irak !
Aidez-moi ! Je vous en supplie, aidez-moi.
Debout !