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Traducteur: Luc Bertrand Relecteur: eric vautier
Ça, c'est une forêt créée par l'homme.
Elle peut s'étendre sur plusieurs hectares,
ou tenir dans un petit espace,
aussi petit que votre jardin.
Chacune de ces forêts n'a que deux ans.
J'ai une forêt à l'arrière de ma propre maison.
Elle amène une biodiversité importante.
(Chant d'oiseau)
Chaque matin, j'entends ça au réveil,
comme une princesse de Disney.
(Rires)
Je suis un entrepreneur
dont le métier est de faciliter la création de ce type de forêts.
Nous avons permis à des usines,
des fermes,
des écoles,
des maisons individuelles,
des lieux de vacances,
des immeubles d'habitation,
des parcs publics
et même un zoo
d'avoir une de ces forêts.
Une forêt n'est pas un lieu isolé où vivent ensemble des animaux.
Une forêt peut faire partie intégrante de notre vie urbaine.
Pour moi, une forêt,
est un endroit si plein d'arbres qu'il n'est pas possible d'y pénétrer.
Qu'il soit petit ou grand importe peu.
Le monde dans lequel nous vivons était jadis composé de forêt.
Ça, c'était avant l'intervention humaine.
Puis nous avons construit nos villes sur ces forêts,
comme São Paulo,
en oubliant que nous faisons aussi partie de la nature,
autant que 8,4 millions d'autres espèces sur la planète.
Notre lieu de vie n'est plus notre habitat naturel.
Mais ce n'est plus vrai pour certains d'entre nous.
Moi et quelques autres faisons de la conception de forêt notre métier,
partout dans le monde.
Je suis ingénieur industriel.
Je suis spécialisé dans la fabrication de voitures.
Dans mon précédent job, chez Toyota,
j'ai appris comment transformer des ressources naturelles en marchandise.
Par exemple,
on extrayait la sève d'un hévéa
pour la transformer en caoutchouc
et en faire un pneu, la marchandise.
Mais ces marchandises ne peuvent plus redevenir des ressources naturelles.
On extrait les éléments de la nature
et on leur donne une forme irréversible.
C'est ça, la production industrielle.
La nature, elle, fonctionne de manière opposée.
La nature fabrique ses éléments en les agrégeant ensemble,
atome par atome.
Tous les produits de la nature redeviennent une ressource naturelle.
C'est quelque chose que j'ai appris
en implantant une forêt dans mon propre jardin.
Et c'était la première fois que je travaillais avec la nature,
plutôt que contre elle.
Depuis lors,
on a créé 75 forêts de ce type dans 25 villes à travers le monde.
À chaque fois qu'on travaille dans un nouvel endroit,
on voit que les éléments nécessaires pour créer une forêt
sont disponibles autour de nous.
Notre unique rôle est d'agréger ensemble ces éléments
et de laisser faire la nature.
Pour créer une forêt, on commence par la terre.
On la touche, on la ressent et on va jusqu'à la goûter
pour savoir quelles propriétés lui manquent.
Composée de petites particules, la terre devient compacte,
si compacte que l'eau ne peut pas s'y infiltrer.
On ajoute de la biomasse trouvée aux alentours,
qui peut favoriser la porosité de la terre.
L'eau peut ainsi y pénétrer.
Si la terre n'a pas la capacité de retenir l'eau,
on lui ajoute de la biomasse,
des matériaux hydrophiles comme la tourbe,
pour qu'elle retienne l'eau et reste humide.
Pour pousser, les plantes ont besoin d'eau, de lumière et de nutriments.
Que faire si la terre n'a aucun nutriment ?
On n'ajoute pas directement des nutriments à la terre.
Ça, c'est l'option industrielle.
C'est contre la nature.
À la place, on ajoute à la terre des micro-organismes.
Ils produisent naturellement des nutriments dans la terre.
Ils se nourrissent de la biomasse mélangée à la terre.
Leur seul rôle est de manger et se multiplier.
Et quand leur nombre augmente,
la terre recommence à respirer.
Elle prend vie.
On cherche les essences d'arbres locales.
Comment on sait si elles sont locales ou non ?
Eh bien, tout ce qui était présent avant l'intervention humaine est local.
C'est une règle simple.
On fait des relevés dans un parc national
pour trouver les derniers restes d'une forêt naturelle.
On inspecte les bois sacrés,
ou les forêts sacrées autour des temples.
Et si on ne trouve rien,
on va dans les musées
pour trouver les graines ou un échantillon des arbres qui existaient là auparavant.
On compulse de vieilles peintures, des poèmes et la littérature locale,
pour identifier les variétés d'arbres appartenant à cet endroit.
Une fois qu'on a trouvé les arbres,
on les divise en quatre groupes :
Le groupe des arbustes, les petits arbres, les arbres et les canopées.
On fixe un ratio pour chaque groupe,
et on décide le pourcentage de chaque essence dans le mélange.
Si on fait une forêt fruitière,
on augmente la part d'arbres fruitiers.
Ça peut aussi être une forêt de fleurs,
ou une forêt qui attire de nombreux oiseaux ou abeilles,
ou simplement une forêt tropicale.
On collecte les graines et on fait germer de jeunes pousses.
On fait en sorte que les arbres appartenant au même groupe
ne soient pas plantés à côté,
sinon ils se battront pour le même espace vertical en poussant.
On plante les jeunes pousses à proximité.
À la surface, on étale une épaisse couche de paillis,
pour que la terre reste humide quand il fait chaud.
S'il fait froid,
il gèlera uniquement sur le paillis,
donc la terre continuera à respirer quand il gèle.
La terre est très meuble,
si meuble que les racines peuvent la pénetrer facilement
et rapidement.
Au début, on ne voit pas que la forêt grandit,
mais elle pousse sous la surface.
Les trois premiers mois,
les racines atteignent un mètre de profondeur.
Ces racines forment un réseau
qui consolide le sol.
Les microbes et les champignons évoluent dans ce réseau de racines.
Et si certains nutriments ne sont pas disponibles près de l'arbre,
les microbes vont lui amener ces nutriments.
Dès qu'il pleut,
comme par magie,
des champignons apparaissent.
Ça veut dire que la terre a un réseau fongique sain.
Dès que les racines sont implantées,
la forêt commence à pousser à la surface.
Pendant que la forêt pousse, on l'arrose en continu.
On l'arrose pendant les deux ou trois années suivantes.
Comme on veut garder toute l'eau et les nutriments pour nos arbres,
on retire les herbes qui poussent au sol.
En grandissant, la forêt bloque le soleil.
À la fin, la forêt est si dense,
que le soleil ne peut plus atteindre le sol.
Et les herbes ne peuvent plus pousser car elles ont besoin de soleil.
À ce stade,
chaque goutte d'eau qui pénètre la forêt
ne peut plus s'évaporer dans l'atmosphère.
Cette forêt épaisse condense l'air humide
et retient l'humidité.
Graduellement, on réduit l'arrosage jusqu'à l'arrêter.
Et même sans arroser,
le sol reste humide et parfois même sombre.
À présent, quand la moindre feuille tombe au sol,
elle se décompose instantanément.
La biomasse en décomposition forme l'humus,
la nourriture de la forêt.
Quand la forêt pousse,
des feuilles tombent au sol,
ce qui produit plus d'humus,
donc plus de nourriture pour que la forêt continue à pousser.
Et la forêt continue de croitre exponentiellement.
Une fois établies,
ces forêts vont se régénérer constamment,
pour l'éternité.
Dans une forêt naturelle comme celle-ci,
la meilleure gestion, c'est de ne rien faire.
C'est une mini garden party.
(Rires)
Cette forêt grossit collectivement.
Si les mêmes arbres,
les mêmes variétés,
avaient été plantées indépendamment,
la forêt ne grandirait pas aussi vite.
Et c'est comme ça qu'on fabrique une forêt centenaire
en seulement 10 ans.
Merci beaucoup.
(Applaudissements)