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Si vous m'aviez demandé il y a 5 ans :
"Robert, tu feras quoi dans 5 ans ?"
J'aurais pas su quoi répondre.
Même si j'adore ce que je fais aujourd'hui.
Je m'appelle Robert Alexander
et je suis spécialiste en sonification de données au sein du
Groupe de recherche sur le soleil et l'héliosphère.
Sonifier quelque chose, ça signifie prendre
des données et les transformer en son.
Ça peut être un indicateur boursier,
Ça peut être le nombre de personnes qui rentrent
et sortent d'une pièce,
des battements de cœur.
Un cardiofréquencemètre,
c'est la sonification
d'un pouls.
Je me vois comme un explorateur.
Je suis entre l'art, la science et
la technologie.
Et le projet de l'Univers Toroïdal est un très bon exemple.
J'ai travaillé avec une plasticienne incroyable,
Danielle Battaglia.
On a créé une expérience multi-sensorielle
où les gens peuvent se perdre dans des dimensions spatiales théoriques.
Elles étaient habillées par les sons que j'ai générés
à partir des données brutes d'un satellite et qui servaient de guides
dans les déplacements.
L'observatoire solaire et héliosphérique est un satellite de la NASA et de l'ESA qui étudie le soleil. Il permet d'anticiper les éruptions solaires qui peuvent dérégler les réseaux électriques et les systèmes de communication sur Terre. Robert utilise ses données pour composer.
Je dois vraiment garder à l'esprit ce que
ça veut dire d'être connecté au monde des sons de
manière tangible, viscérale.
Car après, quand j'interagis avec le soleil,
je garde les pieds sur terre.
Ça me permet de compléter ma vie et de
maintenir un équilibre sain,
pourrait-on dire.
Je finissais mon master quand j'ai été
approché par Thomas Zurbuchen, qui dirige le groupe de
recherche solaire et héliosphérique.
Il voulait se procurer d'autres données et
les transformer en sons.
J'ai rencontré ses équipes
et ils m'ont expliqué leur plan.
Ils me parlaient de trous coronaux et parlaient
en jargon scientifique.
Je comprenais vraiment pas tout.
Puis ils m'ont montré des images et des films.
Et là, j'ai compris pourquoi
ils étaient aussi motivés.
C'est parce que ce qui se passe là-haut est totalement
incroyable, mais c'est silencieux.
Donc ils voulaient créer
la bande-son de ces phénomènes
qui se déclenchent dans l'espace.
Il nous a donné l'idée de sonification des données,
c'ets une vrai innovation, et même
une transformation.
Je savais pas ce qu'était
l'audification de données.
Mais c'est ce que je faisais. Je prenais
les donneés du soleil et je les retranscrivais en fichiers audio.
J'ai appuyé sur play
et j'ai entendu ce "hum" lancinant.
Ça ressemblait à une structure.
Le "hum" s'amplifiait puis redescendait.
PLus ***, quand j'ai analysé tous les chiffres, j'ai réalisé
que ce que j'écoutais
revenait de manière cyclique tous les 27 jours.
C'est la période de rotation du soleil.
C'est à partir de là que j'ai réalisé
que j'écoutais les cycles du soleil, soit l'augmentation
et la diminution de l'activité solaire.
Et c'est là que j'ai compris que ça pouvait
vraiment nous apprendre quelque chose.
Au début, c'était très cérébral.
Il y avait une tonalité qui montait et descendait.
Mais il n'y avait pas vraiment d'émotion
et on savait vraiment pas comment on voulait
enquêter sur ces sons.
Et ça a évolué, ils ont voulu créer
un voyage émotionnel.
Je suis revenu une semaine après et j'avais composé cette
boucle qui fait faire un voyage de la Terre
au soleil aller-retour, avec un habillage de sonification qui sous-tend
toute l'expérience.
Chaque élément de ce morceau est influencé,
par sa forme, par ces données.
Et les variations d'augmentation ou
de diminution sont basées sur les données.
Elles sont toutes fidèles aux données,
dans leur implication, leur direction ou leur forme.
On va commencer avec ce qui
s'entend le plus, la rythmique.
On peut se demander s'il y a des percussions africaines
à la surface du soleil.
La réponse est non.
Mais sur les graphiques scientifiques, il y a
des repères.
On a besoin de ces repères pour que ça ait du sens.
Les percussions servent de métronome grandiose,
dans un sens.
Elles permettent de savoir où on se trouve
au milieu des données.
Dans ce morceau avec les percussions, qui couvre toute
l'année 2003, les percus permettent de savoir
que toutes les 8 mesures, on a fait une
rotation entière du soleil.
D'un côté, si vous entendez un truc précis
au début de la mesure et que vous entendez la même chose
8 mesures plus loin,
vous savez que c'est un élément récurrent
pendant toute une rotation solaire, et on vous le montre
sous forme musicale.
Le soleil nous fournit ces structures et
ces thèmes récurrents.
Les percussions encadrent la structure
dans laquelle on peut évoluer.
J'ai renregistré la voix de ma sœur, Amanda Alexander.
Elle a une super voix d'alto.
Au début, je pensais aux arches
de carbone. Quand l'une grandit, une autre
s'écrase.
Quand une voix grave s'oppose à une voix aigüe,
il y a plus d'énergie qui vient
des notes aigües.
Donc quand je représente un état plus riche en énergie,
j'utilise une voix plus énergique.
Donc ça fait directement appel à
l'intuition de celui qui écoute puisque
quand il y a plus d'énergie dans les voix, ça correspond à un plus haut
niveau d'énergie émanant du soleil.
Je crée une structure,
un cadre.
Et sans les données qui définissent ce cadre,
il ne se passe rien.
La structure existe d'elle-même.
Ce sont les données qui créent le mouvement,
l'interaction
et la progression de la musique.
Au début, c'était plus pour
voir quelle esthétique associer à la sonification des vents solaires.
C'était une approche musicale.
Mais ça a évolué vers une approche scientifique
et de l'analyse de données.
Quand il travaillait ici avec les scientifiques, Enrico Landi,
qui est le signataire du papier, a remarqué
qu'il entendait mieux certains motifs
dans certains éléments.
J'explorai 20, 30
paramètres de données différents et je les écoutais tous.
J'ai remarqué qu'en écoutant le carbone,
je percevais une présence harmonique très forte.
Je me suis dit que moi j'entendais le carbone, mais personne
dans le groupe ne m'avait jamais
parlé du carbone.
C'est pas quelque chose
qu'ils trouvaient important.
Pourtant, ici, c'est l'un des signaux
les plus forts que j'ai entendus.
Je me suis dit que c'était peut-être intéressant de regarder ça
d'un peu plus près.
On a remarqué qu'en suivant le carbone,
on pouvait tracer l'origine des vents solaires
plus précisément.
On peut déduire d'où sur le soleil ils sont originaires.
Ce sont des résultats de recherche importants
qu'on a trouvés grâce à ce concept d'audification.
Ça a donné l'impulsion nécessaire à Robert pour faire
des choses beaucoup plus intéressantes à partir de la sonification des données.
On a tout écrit.
On a dit que l'oreille était un outil extrêmement puissant
dans l'analyse de ce type de données.
J'imagine que ça a intrigué des gens de la NASA.
Ils ont dit qu'ils voulaient essayer.
C'est ma deuxième année de boursier à la NASA
L'été dernier, j'ai travaillé au centre Goddard de la NASA.
J'étais surpris parce qu'ils étaient tous très intéressés
par la sonification.
C'était vraiment motivant d'être dans ce
genre d'endroits, avec ce genre de personnes et de s'attaquer
à ce genre d'idées.
on oublie que l'outil le plus important qu'on ait
pour explorer l'univers est entre nos 2 oreilles.
Et ces oreilles nous fournissent aussi
des informations que nos yeux ne peuvent pas voir.
Si on ouvre les oreilles et nos esprits, on s'ouvre
à une nouvelle manière
de comprendre l'univers.