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J'ai peu de choses à dire, au fond je cherche peu de choses
Et tout le reste c'est un habit sur moi à peu près ajusté
Je peux bien partager votre combat, vos certitudes : papier buvard
Le mal au fond le mien c'est ailleurs un fanal resté allumé
J'écris, ma femme dort, je rassemble un maigre bagage
Un maigre bien, des idées vagues, des tentatives de notions
Tout ce à quoi je souscris et qu'en bon entendement il faut admettre
Des restes de vos garde-robes, des idées de révolution
Qu'est-ce que j'ai à moi ? Ma mère, le lundi, qui lave
Quand elle pleure, c'est qu'elle a les yeux pleins de savon
Le linge sèche, la cuisine est humide, la radio couvre les cris des gosses
Je n'ai rien qu'une enfance banale comme un cartable en carton
Ô les appartements tièdes, les belles dames
Messieurs qui parlez fort bien et lisez des journaux avancés
Comme si le monde vous appartenait ô fils de familles
Vous êtes les meilleurs jusque dans la révolte ô impeccables révoltés
Qu'est-ce que j'ai à moi ? Le silence des enfants des pauvres
Et deux ou trois détails à dire aux copains les jours d'abandon
Un dimanche matin d'hiver, un jour quand j'étais gosse
Il fait chaud, dehors j'entends passer les dynamos
Qu'est-ce que c'est mon bien ? Qu'est-ce que je peux mettre dans la balance ?
Un souvenir sans intérêt, une nuit de Vendredi saint
Nous allions boire un café à vingt-cinq francs sur une table de campagne
En ville, des messieurs-dames parlent des poètes avec du maintien
Qu'est-ce que j'ai à dire ? On ne m'a pas donné la parole
J'ai le manteau troué au vent aux étoiles de la révolution
Je suis sur mon vélo, je rentre à la maison par la Croix-Blanche
Ô mon père et ma mère, laissez le garage allumé, je rentre à la maison