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Salut, content de te voir.
C'est ma petite amie, Shelley.
Le décor.
Je ne comprends pas pourquoi...
C'était très profond.
C'est sur le Viêt-Nam.
C'est sur ce qu'on veut que ce soit.
- Richard, on a adoré la pièce.
- Merci.
Tu as assuré.
Désolé, je ne connais pas votre nom.
Shelley, mon amie. Je suis Richard.
Et je suis assoiffé, alors...
On se reparlera plus ***.
UNIVERSITÉ DE MILLFIELD, MAI 1972
La pièce était très bien. Vraiment.
- Je crois que je ne connais pas...
- Mike.
Shelley, je vais parler à ce type, OK ?
- Qu'est-ce que c'est ?
- C'est de la part de nous tous.
Shelley... Merci.
Regarde-moi ça. Tout le monde a signé ?
- Merci. Où as-tu signé ?
- À l'intérieur.
Il y avait un agent dans la salle.
Il a dit que la pièce était peut-être
assez bonne pour Broadway.
Croisons les doigts.
Allez, prenons un peu de gâteau.
Penelope. Super.
Ce qu'on devrait faire...
Tout le monde a du gâteau ? Tiens.
On ne devrait pas couper le masque.
On garde, on coupera la prochaine fois.
Reviens-moi.
- C'était qui ?
- Je ne l'ai jamais vue de ma vie.
Qu'est-ce qu'elle t'a donné ?
Comment était la pièce ? Tu as aimé ?
Ça va ?
TROP DE PRINTEMPS
DE RICHARD COLLIER
CHICAGO, HUIT ANS PLUS ***
- Ah, ah !
- Ah, ah, quoi ?
- Ah, ah, tu pars où ?
- En voyage.
- Où ça ?
- J'en sais rien.
- Et la pièce ?
- Elle n'est pas prête.
Quand le sera-t-elle ?
- Je ne sais pas.
- Bon sang.
Richard, il y a des gens
qui attendent cette pièce.
- Jill t'accompagne ?
- Je ne pense pas. On a rompu.
Les White Sox jouent à domicile
ce soir, contre les Yankees.
- Combien de nuits ?
- Une seule.
- Si vous voulez bien signer.
- Bien sûr.
Arthur, c'est pour la 313.
- Bon séjour.
- Merci.
- Par ici ?
- C'est votre premier séjour ici, M ?
Collier. Oui.
Je n'ai jamais eu l'occasion de venir.
- Mais on m'a dit du bien de l'hôtel.
- Quand ?
Il y a huit ans.
J'étais étudiant à la fac de Millfield.
Les étudiants viennent de temps à autre
profiter du restaurant. Et des chambres.
Je crois qu'ils ont fait
un bal de fin d'année en 47, c'est ça ?
- Vous êtes ici depuis tout ce temps ?
- Je suis ici depuis 1910.
Je suis arrivé à l'âge de cinq ans.
Mon père était réceptionniste.
Je jouais au ballon dans le hall,
ça le rendait fou.
À tel point que j'ai eu de la chance
d'atteindre l'âge de six ans.
Au troisième, George.
- On a une belle vue, d'ici.
- Faites voir.
Splendide.
Voyons voir... Voilà.
Merci. Si vous avez besoin de moi,
je suis là.
Arthur.
Je vis dans le bungalow derrière l'hôtel.
Merci beaucoup. À plus ***, Arthur.
On ne s'est pas déjà rencontrés ?
Si on s'est déjà ? Je ne pense pas.
Non. Je suis sûr que non.
Bon séjour, M. Collier.
Merci.
- Monsieur ?
- Quand ouvrez-vous ?
Dans environ 40 minutes.
MUSÉE DE L'HÔTEL
Arthur.
Vous savez, dans le musée de l'hôtel,
il y a la photo d'une jeune femme ?
- Il n'y a pas de nom.
- C'est Elise McKenna.
C'était une actrice célèbre. La vedette
d'une pièce jouée au théâtre de l'hôtel.
Il y a un théâtre ici ?
Près du lac.
Quand a été donnée cette pièce ?
En 1912.
Vous pouvez prendre mes bagages
et les remettre dans ma suite ?
- Où est la bibliothèque la plus proche ?
- En ville, après l'église.
Super. Attention. Merci. Génial.
Merci beaucoup. À plus ***.
McKenna. Oui.
Mon Dieu.
"L'une des plus grandes
comédiennes américaines".
"Pendant des années,
elle a été en tête du box-office."
"Sous la férule de son manager,
William Robinson,
elle a été la première grande figure
énigmatique du théâtre américain."
"Jamais vue en public à la fin de sa vie,
sans vie en dehors de la scène,
la solitude même."
Vous avez des bios de gens de théâtre ?
Des livres rares, des magazines ?
On a des magazines,
mais il faudrait que je les retrouve...
Vous le feriez pour moi,
s'il vous plaît ?
D'accord.
Merci. Je suis dans le fond.
Vous êtes géniale.
Voilà.
Merci.
ELISE MCKENNA.
C'EST LA DERNIÈRE PHOTO D'ELLE.
Mlle Roberts ?
Je m'appelle Richard Collier.
J'ai lu votre livre sur les grandes actrices.
J'ai adoré.
- Qu'est-ce que vous voulez ?
- Des renseignements sur Elise McKenna.
Quel genre de renseignements ?
J'écris pour le théâtre,
je voulais faire...
- Je suis désolée.
- M'dame, je vous en prie.
Ce n'est pas pour une pièce.
C'est quelque chose de très personnel.
Je ne comprends pas.
Où avez-vous eu ça ?
Elle me l'a donnée.
À la première d'une pièce que j'ai écrite,
à la fac de Millfield, il y a huit ans.
Elle tenait beaucoup à cette montre.
Elle l'avait toujours avec elle.
Cette montre a disparu la nuit de sa mort.
Elle est morte cette nuit-là ?
Vous ne voulez pas entrer ?
Merci.
J'ai gardé des choses
pour la collection du théâtre.
C'est un costume
qu'elle a porté dans une de ses pièces.
Mlle Roberts, comment était-elle ?
Quand je l'ai connue,
elle était gentille et prévenante,
mais elle était trop renfermée.
Elle semblait vide, en quelque sorte.
- Elle n'a pas toujours été comme ça ?
- Pas du tout.
Il paraît que jeune,
elle était vive, intelligente et pétillante.
Forte, déterminée.
Pas du tout comme par la suite.
- Que s'est-il passé ?
- Je ne sais pas.
Mais le changement
a dû s'opérer vers 1912,
après une pièce
dans laquelle elle a joué au Grand Hôtel.
C'était son manager, William Robinson.
Il était vraiment aussi bizarre
que vous l'écrivez ?
Il y avait quelque chose de bizarre
dans leur relation.
Ouah, regardez ça.
- Je peux ?
- Bien sûr.
Incroyable. Ce type, Finney,
c'était mon prof de philo à Millfield.
Vraiment ?
Elle lisait et relisait ce livre sans cesse.
LES VOYAGES DANS LE TEMPS
Ça, elle l'avait fait faire.
Qu'est-ce qu'il y a ?
C'est ma musique préférée.
Je ne comprends pas ce qui se passe.
Dr Finney.
Venez. J'ai un cours.
Comment vous appelez-vous ?
- Richard Collier.
- Étudiant ?
Je l'ai été. Il y a 9 ans.
J'essaie de faire des cours intéressants,
mais 9 ans... Que puis-je faire pour vous ?
J'ai une question.
Peut-on voyager dans le temps ?
Ça, c'est une question.
Je vais vous dire quelque chose...
Richard, c'est ça ?
J'étais à Venise en 1971,
dans un hôtel très ancien.
Vraiment très ancien.
Les murs, les meubles, tout.
L'atmosphère était ancienne,
si vous voyez ce que je veux dire.
Dans ma chambre, j'avais l'impression
d'être plus d'un siècle avant 1971.
Vous comprenez ?
Le lieu est donc très important.
Plus qu'important, essentiel.
Le reste est là-dedans.
Une après-midi,
j'étais allongé dans cette chambre,
tout ce que je voyais appartenait
au passé, tout ce que j'entendais aussi.
Et j'ai eu l'idée suivante.
"Que se passerait-il", me suis-je dit,
"si j'essayais d'hypnotiser mon esprit,
de lui suggérer que nous ne sommes pas
en 1971, mais en 1571 ?"
J'ai fermé les yeux
et me suis fait cette suggestion.
"Je suis en août 1571."
"Dans l'hôtel del Vecchio."
Et je me suis répété tous les détails,
encore et encore.
Et ?
Eh bien, je ne le saurai jamais vraiment.
Je n'ai pas refait cette expérience depuis.
Et je ne suis pas sûr de vouloir la refaire.
J'étais épuisé après coup. Vidé.
Et si ça a vraiment marché,
ça n'a duré qu'un instant,
une fraction de seconde.
Je comprends bien, mais vous y étiez.
C'est ce que je me suis dit.
C'était imparfait, bien sûr.
Comment pourrait-il en être autrement ?
Il y avait des objets autour de moi
qui étaient bel et bien du présent,
et je savais qu'ils étaient là.
Si je devais refaire cette expérience,
mais je n'en ai nullement l'intention,
je me séparerais
complètement du présent,
et je ne garderais autour de moi
rien qui puisse me le rappeler.
Alors, qui sait ?
Désolé.
Vous avez des pièces de 1912 ?
De 1912, très précisément.
Voilà.
Pas trop mal. C'est pas mal.
Bonsoir. Vous ne me connaissez pas,
mais ça viendra.
Bonsoir, Mlle McKenna.
Vous ne me connaissez pas,
mais ça viendra.
Nous sommes le 27 juin 1912.
Mince, alors.
Tu es allongé sur ton lit au Grand Hôtel,
et il est 18 heures, le 27 juin 1912.
Ton esprit accepte cela pleinement.
Il est 18 heures.
Nous sommes le 27 juin 1912.
Elise McKenna est dans cet hôtel
en ce moment même.
Son manager, William Fawcett Robinson,
est dans cet hôtel en ce moment même.
Maintenant, en ce moment, ici.
Elise McKenna et toi...
Ce n'est pas très malin. 1912.
1912. Il est 18 heures, le 27 juin 1912.
Elise McKenna et toi.
Au revoir.
Maintenant, dans cet hôtel.
Elle et sa troupe
sont dans cet hôtel en ce moment même.
Alors même que tu es allongé sur ton lit
au Grand Hôtel, le 27 juin 1912.
Il est 18 heures, le 27 juin 1912.
On est en train de monter le décor
pour la représentation de demain.
Ton esprit accepte cela pleinement.
Il est 18 heures, le 27 juin 1912.
Tu viens de voyager dans le temps.
Bientôt tu ouvriras les yeux,
tu iras dans le couloir,
tu descendras,
et trouveras Elise McKenna.
Elle est à l'hôtel en ce moment même.
C'est pas vrai !
Il n'y a aucun doute là-dessus.
Il est 18 heures, le 27 juin 1912.
Ta pensée devient réalité.
Ça doit arriver. Tu le sais.
Tu le sais.
Ça doit arriver. C'est comme ça.
Tu le sais. Ça doit arriver.
Détends-toi et accepte-le.
Détends-toi et accepte-le.
Non !
Pas mal. Regarde ces photos.
Je parie qu'elles ont cent ans.
Tu les aimes ? Elles sont à toi.
- Je parie que c'est tout en cristal.
- Tu crois ?
Oui. Regarde le reste de la pièce.
REGISTRE DES CLIENTS
Arthur.
Allez, réveillez...
Désolé de vous réveiller,
mais vous êtes le seul qui puisse m'aider.
Les objets du musée de l'hôtel,
d'où viennent-ils ?
Vous les entreposez quelque part ?
D'où viennent-ils ?
Du grenier, M. Collier.
Merde.
Allez.
20.
60.
12.
McKenna. Robinson.
J'y étais.
18 heures, le 27 juin 1912.
Mais oui.
Bien sûr.
416.
9 h 18, demain matin.
Elise.
Elise McKenna.
Il faut y croire.
1912...
J'ai réussi.
Ça, alors.
J'ai réussi.
Maude.
Je suis là.
Tu es prête ?
Je ne sais pas pourquoi tu fais ça.
- C'est bien ce qu'il me semblait.
- Que dois-je comprendre par là ?
Ce que tu veux, Rollo.
Doit-on en arriver là à chaque fois
que je remarque une autre femme ?
Que tu en remarques une ? Ça décrit mal
ta façon de les déshabiller du regard.
- De les déshabiller du...
- Tu ne m'aimes plus.
- C'est pas vrai.
- Je vais m'allonger.
- Bonne idée.
- En effet.
- J'arrête de discuter.
- C'est tout ce que tu sais dire.
À moins que tu ne reviennes à la raison,
je partirai sans toi.
Excusez-moi. Vous avez vu
quelqu'un essayer d'entrer ?
Oui. Un jeune garçon. Il est parti par là.
Ça, alors. Je devrais le signaler.
En effet. Je l'aurais fait moi-même
si j'avais su que...
Bonjour, Mlle McKenna.
Vous ne me connaissez pas...
Bonjour. Je viens de parcourir 68 ans.
Puis-je vous parler ?
Oui, monsieur ?
- Mlle McKenna est là ?
- Je crains que non.
- Pourriez-vous me dire où elle est ?
- Je suis désolée, je n'en sais rien.
Essaie encore.
Je vous demande pardon.
Est-ce que vous sortez ?
Pas à l'intérieur, Arthur.
C'est toi, Arthur ?
- Tiens.
- Arthur. Pas à l'intérieur.
MLLE ELISE MCKENNA
DANS LA SAGESSE DU CŒUR
Partir d'ici dans les deux heures suivant
la représentation ? Impossible. Il est fou.
- Tu connais Robinson.
- Malheureusement.
S'il est si pressé de partir,
qu'il nous aide à démonter le décor.
- Quoi ?
- Désolé. Vous avez vu Mlle McKenna ?
Si c'est un message, passez-le-moi,
je le lui ferai parvenir. Bon...
- Je ne la considère pas comme telle.
- Mais si.
Et vous ne l'épouserez pas.
- Et moi je dis que si.
- Jamais de la vie.
Enfin, Cecily.
Ce n'est pas à vous de dire ça.
Abandonnez !
Braves gens,
C'est une comédie, pas Le roi Lear.
N'enterrons pas l'auteur avant son heure.
Excusez-moi.
Excusez-moi. Je me demandais
si vous saviez où était Mlle McKenna.
Bien. On reprend.
Depuis le début.
Disons une rente annuelle,
payée au mois.
- Comme vous voudrez.
- Bonjour.
On reprend.
Pourquoi ne pas la peser
et la vendre à la livre ?
Puis-je vous parler, Mlle McKenna ?
Elise, puis-je...
Oh, là là.
Bonjour, Mlle McKenna.
- Je suis...
- Mon ange, qu'est-ce que c'est ?
Vous n'avez jamais vu
une actrice en déshabillé ?
Je cherche Mlle McKenna.
- Elle doit être près du lac, mon cher.
- Merci.
- Attention.
- Excusez-moi.
Est-ce que c'est vous ?
C'est vous ?
Est-ce que ça va ?
Désolé, si je vous ai fait peur.
- Ce n'est pas le cas.
- Je croyais.
Je t'emmène dîner.
Puis-je vous parler ?
C'est important ?
Qui était ce jeune homme ?
- Je n'en ai aucune idée.
- Il ne s'est pas présenté ?
- Il n'en a guère eu le temps.
- Vous discutiez, McKenna.
Pas vraiment.
Ne te retourne pas. Il nous suit.
Continue à marcher.
Je reviens tout de suite.
- Vous êtes à l'hôtel ?
- Vous êtes Robinson.
Êtes-vous un client de l'hôtel ?
Oui.
Alors il faut arrêter
d'ennuyer Mlle McKenna.
Sinon je vous ferai mettre à la porte.
- Que lui as-tu dit ?
- Ce que je dis à ceux de son espèce.
Cette robe que tu portes dans l'acte deux.
Je n'en raffole pas. Il faudra revoir ça.
Dis à Marie que j'en discuterai avec elle.
Bonsoir. Une table pour quatre
réservée sous le nom de Woods.
- Pour quelle heure ?
- 20 heures.
- Monsieur, je peux vous aider ?
- Je dîne avec Mlle McKenna.
Bonsoir.
On aurait dû aller à Poughpeepskie.
- Poughkeepsie.
- Poughpeepskie.
J'arrête de discuter.
...pas du tout les répliques.
Si seulement les acteurs...
Ce n'est pas le nigaud qui croyait
pouvoir faire Hamlet l'an dernier ?
Mon chéri, on se croise de nouveau.
J'admire les hommes qui ne se soucient
pas des diktats de la mode.
Un costume comme celui-là.
Ça fait dix ans que je n'en ai pas vu.
Dix ans ?
- Vous cherchez toujours Mlle McKenna ?
- Oui.
Elle est là-bas.
Merci.
- Qu'est-ce que vous croyez faire ?
- Je danse avec vous.
On ne se connaît même pas.
- Je sais tout de vous.
- Je n'en doute pas.
- Comment ça ?
- Excusez-moi.
- Vous n'y êtes pas.
- Si.
Ne partez pas. Vous n'avez aucune idée
du chemin que j'ai parcouru pour vous.
N'ayez pas peur de moi.
Cet homme n'a rien à faire là. Veillez
à ce qu'il soit raccompagné dehors.
Monsieur.
Attendez.
Je vais l'accompagner.
McKenna.
Es-tu sûre de vouloir faire ça ?
Ne t'en fais pas, William.
Je ne serai pas longue.
- Merci. J'étais tellement embarrassé...
- Votre nom.
- Richard Collier.
- Lieu de résidence ?
- Chicago.
- Votre profession ?
- J'écris pour le théâtre.
- Un auteur dramatique.
- Mais ce n'est pas pour ça...
- Vous prétendez tout savoir de moi.
Ce qui est absurde. Impossible.
On ne se connaît pas.
Je ne vous ai jamais vu.
Alors, pourquoi
avez-vous dit : "C'est vous ?"
- Je n'ai pas à répondre à ça.
- Je sais.
Mais ce serait bien.
Qu'est-ce qu'il a ?
Il fait attention à moi, comme toujours.
Pourquoi ? J'ai l'air dangereux ?
Attendez.
Quand puis-je vous revoir ?
Je ne sais pas.
- Terminez d'ici demain matin.
- Je tâcherai.
Tu souris, McKenna ?
Ça semble de circonstance.
Il est plutôt bel homme, mais cavalier.
- Je le tiendrai à l'œil.
- Je n'en doute pas.
C'est lui, William ?
C'est lui ?
Toi seule peux en être sûre.
Passons à la représentation de demain.
Sois toujours en avance sur eux.
Préserve le mystère, toujours le mystère.
L'excès maîtrisé.
Bonne nuit, McKenna.
- Qui est-ce ?
- Richard Collier.
Bonjour.
- Bien dormi ?
- Magnifiquement.
Je suis désolé.
Je n'ai pas très bien dormi non plus.
Mais j'étais sur une chaise, dehors.
- Vous n'avez même pas de chambre ?
- J'en aurai une. À 9 h 18. Chambre 416.
Voulez-vous prendre
votre petit-déjeuner avec moi ?
- À 6 heures ?
- Eh bien, plus *** ?
Je ne mange rien le matin quand je joue.
- Bien sûr. Et à midi ?
- M. Collier...
- Pas M. Collier.
- Ce n'est pas votre nom ?
Si, mais...
- Quoi ?
- Marie. Elle dort.
- Marie ?
- Ma femme de chambre.
Je suis désolé.
Je m'appelle bien M. Collier,
mais j'espérais
que vous m'appelleriez Richard.
- Pourquoi ferais-je ça ?
- Je ne sais pas. J'espérais, c'est tout.
- Peut-on se voir ?
- Je répète toute la journée.
- C'est fou.
- Vous allez la réveiller.
Une balade, vous pouvez faire ça ?
Non.
Si vous ne venez pas vous balader,
je vais devenir fou, bel et bien fou.
Venez. Je vous en prie.
Dites : "Richard" - c'est moi -
"Je serais ravie
de faire votre connaissance...
de ne pas avoir peur de vous,
et de tout arranger." Dites oui.
Oui.
13 heures.
Devant l'hôtel.
Elle est folle de moi.
Puis-je vous convaincre
de m'accompagner ?
D'où venez-vous, Collier ?
Chicago. Et vous, monsieur ?
Je crois comprendre
que vous écrivez pour le théâtre.
Vous comprenez bien.
Je suis sûr que vous rêvez de voir
Mlle McKenna dans l'un de vos opera.
C'est le pluriel de "opus".
Vous avez dû écrire plus d'une pièce.
- Et je les ai vu monter.
- Vraiment ?
Je connais un peu le théâtre américain
de la dernière décennie.
- J'en ai peut-être vu une ?
- J'en doute.
Et je doute que Mlle McKenna vous fasse
l'honneur de jouer dans l'une d'elles.
Vous ne croyez pas vraiment
que c'est pour ça que je suis là, si ?
Qu'est-ce qui vous intéresse ?
L'argent ?
- Vous ne le croyez pas non plus.
- Il y a une loi, Collier.
- Je n'hésiterai pas à y faire appel.
- De quoi m'accuserez-vous ?
Le sujet est clos.
Vous pouvez y compter.
Bonjour, monsieur. Excusez-moi.
Arthur.
Excusez-moi encore, monsieur.
- Je suis désolé.
- Il n'y a pas de problème.
- Je voudrais une chambre.
- Vous n'en avez pas une ?
J'étais malade hier soir,
alors je suis resté chez un ami.
Je vois.
Vous avez une chambre, monsieur ?
Merci.
Lit simple, trois dollars par jour.
Salle de bains, avec supplément.
Vous voulez bien signer le registre,
monsieur ?
Vous êtes sûr
que c'est la bonne chambre ?
La bonne chambre ?
Je ne comprends pas.
Désolé, M. Beals.
Celle-ci est réservée.
- J'ai oublié de le signaler.
- Je suis vraiment désolé.
- Bien. Je signe ?
- Je vous en prie.
Excusez-moi.
Je vais le faire.
9 h 18.
Merci, monsieur.
- Génial.
- Pardon ?
Rien.
Dans quelle chambre
se trouvent vos bagages ?
Ce n'est pas un problème.
Je m'en chargerai.
Merci beaucoup.
À plus ***, Arthur.
Bonjour.
Étonnant.
- Bonjour.
- Vous êtes splendide.
Merci. On y va ?
Excusez mon retard.
Quelques complications.
- Qu'est-il arrivé ?
- Le rasoir.
La lame n'était pas affûtée.
Je n'ose pas imaginer
votre tête si elle l'avait été.
Non. C'est pas possible.
Au moins, il monte bien la garde.
Vous voulez que je lui parle ?
Ça ne servirait à rien. Mais je crois
que je sais ce qu'on peut faire.
Attendez-moi !
M. Collier, ce n'est pas facile
d'être une actrice à succès.
Au fil des années, j'ai jugé
qu'il était nécessaire que je me protège.
Il faut que vous compreniez.
On est là ensemble aujourd'hui
alors qu'on ne s'est rencontrés qu'hier...
Pourquoi avez-vous dit :
"C'est vous ?"
J'attendais...
Moi ?
- Quelqu'un.
- Qui ?
Dites-le-moi.
- Vous allez rire.
- Pourquoi ? C'est drôle ?
D'une certaine manière.
William savait que vous viendriez.
Robinson ?
Il savait, étrangement.
Il le savait vraiment.
Il a prédit des tas de choses
qui me sont arrivées. Ma carrière, ma...
Il m'a dit qu'un jour
je rencontrerais un homme...
qui changerait ma vie.
Vous a-t-il dit
que vous auriez peur de cet homme ?
Et qu'en pensez-vous maintenant ?
Vous y croyez ?
Non. À l'évidence, non.
C'est magnifique.
C'est quoi ?
Rachmaninov. La "Rhapsodie".
Je l'ai déjà vu au Philharmonique.
J'adore sa musique,
mais ça, je ne connais pas.
Vraiment ? Je vous le ferai découvrir.
Désolé qu'on ait mis tout ce temps. Merci.
Vous avez vu sa tête ? Il a failli
nous pendre pour séquestration équestre.
Tirez la langue.
Pourquoi ? Oh, non.
L'un des moments
les plus singuliers de ma vie.
Je crois que vous survivrez,
Mlle McKenna.
Quelle heure est-il ?
16 h 30.
- Je dois rentrer.
- Restez encore un peu.
Non, il faut que je me repose.
La pièce.
Elle est superbe.
Où l'avez-vous eue ?
On me l'a donnée.
Vous permettez ?
Quand la troupe reprend-elle la route ?
Ce soir.
- Où allez-vous ?
- À Denver.
Merci pour cet après-midi
des plus agréables.
- On discute encore un peu ?
- Je dois me reposer.
Je vous en prie.
D'accord. Mais juste un instant.
De quoi vouliez-vous discuter ?
Oh, mon Dieu.
Que se passe-t-il ?
McKenna ?
Entrez.
- Vous devriez y aller.
- Tu nous as attendus ?
- Ce n'est guère le...
- Alors ?
- Ça te surprend ?
- Nos relations sont professionnelles.
Je suis une actrice, pas un paillasson.
N'essaie pas
de t'essuyer les pieds sur moi.
Richard.
Il y aura un billet pour vous
au guichet du théâtre.
Un excès maîtrisé, McKenna ?
- Bonsoir, Mlle.
- Pas bon du tout.
Désastreux.
- Je ne redescendrai pas.
- Qu'y a-t-il, Mlle ?
Je viens de dîner avec l'homme
que mon père veut me faire épouser.
Le banquier Harwell.
67 ans, 1 m 62 et plus de 100 kg.
- Mais il a de l'argent, Mlle.
- Et il aime à le répéter.
C'est même étonnant
qu'il désire se marier.
Il file déjà le parfait amour avec son or.
Il ne sera peut-être pas si mal. Il y a bien
quelque chose que vous aimez chez lui.
Oui. Son absence.
L'homme de mes rêves
a presque disparu.
Et quel genre d'homme est-ce, Mlle ?
Celui que j'ai imaginé.
Le genre d'homme...
dont chaque femme rêve
au plus profond d'elle-même.
Je peux presque le voir en ce moment.
Que lui dirais-je s'il était vraiment ici ?
"Pardonnez-moi."
"Je n'ai jamais ressenti
une chose pareille."
"De toute ma vie."
"Est-il étonnant, dans ces conditions,
que je ne vous aie pas reconnu ?"
"Vous qui me l'avez fait ressentir
pour la première fois."
"Comment vous dire
à quel point vous avez changé ma vie ?"
"Et combien vous l'avez embellie ?"
"Il y a tant de choses à dire,
je n'arrive pas à trouver les mots."
"Si ce n'est ceux-ci :
Je vous aime."
Voilà ce que je lui dirais
s'il était vraiment ici.
Mais qu'est-ce que vous avez fait ?
- Rien.
- Vous avez réécrit toute la 1ère scène !
- Je suis revenue au texte.
- Il faut vraiment prendre cette photo.
Très bien. Un instant.
Il faut que je me change.
Vite.
Oui. Et faites un petit geste.
Oui, très bien. Attendez.
Voilà. Je fais la mise au point. Excellent.
Je n'ai plus qu'à mettre la plaque.
Un instant. Voilà.
Un petit sourire, s'il vous plaît.
Encore un petit effort. Essayez
de penser à quelque chose de ***.
Voilà. Gardez la pose.
C'est parfait.
M. Collier ?
Pour vous.
Je dois vous voir tout de suite.
C'est une question de vie ou de mort.
Je vous attends derrière le théâtre.
Vous savez depuis combien de temps
je suis avec Mlle McKenna ?
Depuis mars 1903.
Mars 1903.
C'est bien ça. Elle avait 16 ans à l'époque.
Elle était là, sur cette scène minable,
dans cette pièce pitoyable.
Rayonnante.
Il ne m'a pas fallu longtemps pour
comprendre ce qu'elle devait devenir.
Mme Robinson ?
Vous croyez vraiment que je l'ai élevée,
protégée, formée, instruite,
fait évoluer pendant toutes ces années,
simplement pour l'épouser ?
Pour quoi d'autre ?
Pour en faire une vedette.
Seul quelqu'un d'aussi jeune
et immature que vous peut croire
que ma passion pour cette femme
n'est que charnelle.
Vous ne comprenez donc pas
qu'elle a ça en elle,
qu'elle sera l'une des plus grandes, voire
la plus grande actrice de sa génération ?
- Je vous dois des excuses.
- Pourquoi ?
Je vous comprends maintenant.
Vous n'avez
que les meilleures intentions pour elle.
- Et...
- Mais moi aussi.
Elle continuera à jouer la comédie,
elle continuera à progresser,
elle sera
tout ce que vous voulez qu'elle soit.
Avec vous à ses côtés ?
Oui. Avec moi à ses côtés.
- Jamais.
- Bon sang.
Vous pensez vraiment
qu'elle est à vous, hein ?
Collier, je sais qui vous êtes.
Depuis que vous êtes arrivé ici.
Je le sais depuis le début.
- Vous êtes venu la détruire.
- Vous avez perdu la tête.
Ça suffit.
Les spectateurs vont être furieux.
- Vous l'avez trouvé ?
- Non.
- Dans sa chambre ?
- Il n'y était pas.
- Et à la réception ?
- Ils ne l'ont pas vu.
- Aucun message ?
- Non. Je suis désolée.
C'est complètement absurde.
Qu'est-ce qui a bien pu lui arriver ?
Marie, aidez-moi à me changer, vite.
Attendez, Marie.
Merci, Marie.
Votre performance dans l'acte un
était assez originale.
Où est-il ? Que lui as-tu fait ?
Je n'ai rien fait, McKenna.
M. Collier n'est plus là, c'est tout.
- Comment ça ?
- Il est parti.
De l'hôtel, et de ta vie.
Je ne te crois pas.
Je dois admettre
qu'il était plus séduisant que ceux
qui ont croisé notre chemin par le passé.
- Un tantinet plus sincère, peut-être.
- Ce n'est donc pas celui dont tu parlais.
Donc tu t'es trompé sur son compte.
Tu t'es trompé.
Je l'aime, et il va me rendre très heureuse.
Tu comprends ?
Je l'aime.
Qu'est-ce que ça change, à présent ?
Il est parti.
Je le retrouverai, William.
Ne t'avise pas d'essayer de m'arrêter.
Et laisse-moi, je dois me changer.
Entendu.
Je te rappelle
que nous partons dans l'heure.
Merci.
Elise.
Monsieur ?
Est-ce que ça va ?
La troupe. Elle est partie ?
Les gens de la troupe de théâtre.
Où sont-ils ?
Ils sont partis
dès qu'ils ont eu plié bagage.
Viens, Arthur. On va être en retard.
Richard.
Ça va ? Je pensais t'avoir perdue.
Jamais.
Tu vas m'épouser, n'est-ce pas ?
- Désolé.
- Tu ne veux pas ?
Si, bien sûr. C'est juste ta façon
de poser la question qui m'a fait rire.
J'ai cru un instant
que tu avais une femme et des enfants.
- Je veux être tout pour toi.
- Tu l'es déjà.
Dis-m'en plus à ton sujet, mon amour.
Quel genre de pièces écris-tu ?
Il y a des rôles pour moi ?
J'adorerais jouer dans l'une de tes pièces.
En supposant que je remonte sur scène.
Tu le feras.
- De bonnes pièces.
- Quoi ?
J'écris de bonnes pièces.
Je ne t'ai pas laissé répondre. Désolée.
- Quelle heure est-il ?
- Je ne sais pas. Je m'en fiche.
Je t'aime.
Ne regarde pas.
- Il est cinq heures.
- Vraiment ? Je n'ai pas sommeil, et toi ?
- La première chose que je ferai pour toi...
- Tu l'as déjà faite.
- La deuxième, alors.
- Oui ?
Je vais t'acheter un nouveau costume.
Bizarre. Personne n'aime mon costume.
- Ça t'étonne ?
- Mon costume est sensass.
Même s'il date d'il y a dix ans !
- 15 ans, au moins.
- 15 ans ? Eh bien, je le trouve formidable.
Regarde. Il est vraiment bien.
Il est parfait, les manches tombent bien,
C'est bien, car mes bras font 3 m de long.
Il y a plein de poches,
c'est bien pour la magie.
Et pour couronner le tout, une petite
poche à pièces, en cas d'urgence...
Le 29 juin 1912.
Le 29 juin 1912. Seigneur, je vous en prie.
Le 29 juin... Je reviens.
- M. Collier ?
- Vous êtes sûr qu'il est là ?
La femme de chambre dit
qu'il est là depuis des jours.
- Ça va, monsieur ?
- Utilisez le passe.
M. Collier ?
- C'est pas vrai !
- Mettons-le sur le lit.
- Doucement.
- Attention.
Je l'ai.
Prenons-le par les jambes.
Par ici.
Le standard ? Faites monter
le Dr Powell dans la suite 313.
Il est très faible. Envoyez une ambulance.
- Tout de suite.
- C'est terrible. Si seulement j'avais su.
- Appelez une ambulance.
- Il va vivre ?
- Je ne sais pas.
- Ils arrivent. Alors ?
- Il nous faut de l'oxygène.
- On en a en bas.
Mettez cette couverture sur lui.
Un homme comme lui. C'est terrible.
Je me demande ce qui a pu lui arriver.
Il faut le garder en vie en les attendant.
Gladys, c'est encore Arthur,
dans la suite de M. Collier...