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LE TAMBOUR
D'après le roman de Günter Grass
Scénario
Image
Schnitt
Musique originale
Mise en scène
Je commencerailongtemps avantmoi.
Lorsque le temps futvenu
de concevoir mapauvre maman,
ma grand-mère, Anna Bronski,
une jeune femme innocente,
était assise
dans ses quatre jupes
au bord d'un champ de pommes de terre.
C'était en I'an 99,
au coeur du pays kachoube.
A I'horizon, quelque chose bougeait.
Quelque chose sautait.
Par pitié!
Vous n'avezvu personne?
Un nommé Koljaiczek?
- Un incendiaire.
- Un petit trapu.
J'aivu quelqu'un comme ça.
Il courait comme un diable!
Par où?
Je n'y crois pas.
Il a filé!
Il doit être à Bissau.
S'il n'est pas ici.
L'un ou I'autre!
Il n'y apas d'autre endroit.
Voilà qu'il pleut.
Viens, Koljaiczek.
Je m'appelleJoseph.
Mon grand-père était un incendiaire,
un incendiaire récidiviste.
A I'époque,
dans toute la Prusse occidentale,
les scieries animaientla flamme
du patriotisme des Polonais.
Joseph et Anna trouvèrentrefuge
chezles flotteurs de bois
ety restèrentpresque un an.
Il a fallu tout ce temps àlapolice
pour retrouver la trace
de mon grand-père.
File!
Ne tire pas sur lui!
Après ce plongeon,
Koljaiczek ne reparutjamais.
Certains racontaient qu'il s'étaitnoyé,
d'autres,
qu'il s'était enfuijusqu'en Amérique
où, à Chicago,
sous le nom deJoe Colchic,
il était devenu millionnaire.
Il aurait fait fortune
dans la fabrication des allumettes
etles assurances incendies.
Ma grand-mère, elle,
restait assise dans ses quatre jupes,
etvendait
ce qu'elle apportait au marché.
Des oies!
Pas trop grasses, pas trop maigres!
Et elle vieillit.
La Première Guerre mondiale arriva
et au lieu d'oies,
il n'y eutplus que des navets.
Navets!
Mapauvre maman vieillissait,
elle aussi.
Elle s'inquiétaitpour son cousin Jan.
Jan devaitpartir àla guerre,
mais préféraitrester chez elle.
- Nom?
- Bronski, Jan.
- Classe?
- 1898.
Toussez!
Encore!
Inapte!
Pas bon, pas pris,
un an de sursis!
Mapauvre maman prit
pour lapremière fois
son cousin Jan dans les bras
etje ne sais pas
si elle I'ajamais tenu
avec plus de bonheur.
Ce jeune amour de guerre resta fldèle
jusqu'àl'apparition de Matzerath.
Alfred Matzerath, natif de Rhénanie,
était,
àl'hôpital militaire Silberhammer,
le favori des inflrmières.
Qu'est-ce qu'elle dit?
Que vous êtes un cuisinier né,
M. Matzerath.
Vous saveztourner
vos sentiments en potages.
La guerre s'achevait enfln.
Danzig futproclamé territoire autonome.
Les Polonais
obtinrent dans la ville
leur propre poste
où Jan Bronski trouva un emploi.
Alfred Matzerath resta à Danzig,
lui aussi.
Nous autres Kachoubes,
nous avons toujours vécu ici.
Longtemps avant les Polonais
et longtemps avant les Allemands,
naturellement.
Des vieilles neiges, Jan.
C'est lapaix!
Allemands, Polonais, Kachoubes,
tous vontvivre en paix.
Je ne sais pas.
Tu sauras bien.
Les deux messieurs
si différents, mais unanimes
dans leur goûtpour maman,
se plurent,
et c'est cette trinité
qui m'amis au monde,
moi, Oscar.
Le Soleil était
dans le signe de la Vierge.
Neptune, qui entrait
dans la dixième maison,
ancra Oscar entre le prodige
etle simulacre.
Pousse!
Pousse, Agnès, pousse!
Ca vient!
Je découvris lalumière du jour
sous la forme d'une ampoule de60 watts.
Alfred, c'est un garçon!
Je savais bien que ce serait un gars,
même sije disais
que ce serait une gamine!
Moins chaud!
Tout en criant et en me faisantpasser
pour un nourrisson,
je me montrais déjà très critique
quant aux premières paroles
de mes parents.
Nous savons pourquoi
nous nous crevons au travail.
Quand le petit Oscar aura trois ans,
on lui donnera un tambour en tôle.
Seule lapromesse du tambour me retint
d'exprimer plus énergiquementmon désir
de retourner dans maposition foetale.
D'ailleurs la sage-femme
avait déjà coupé le cordon,
il n'y avaitplus rien à faire.
J'attendis donc avec impatience
mon troisième anniversaire.
Qu'est-ce qu'ily a?
C'est toi, Oscar!
Encore de la tarte?
Tu as labouche toute sale.
Encore une goutte, grand-mère?
Avant tout,
prendre soin de notre corps...
Ce qu'il faut àl'homme,
c'est une monnaie stable.
Et un verre plein, Alfred!
Buvons au mark stabilisé!
A lajeunesse!
A labeauté!
Je peux te tutoyer, Gretchen?
Alors je dis Lina!
Nous ne serons plus jamais
aussijeunes!
Ce que c'est beau!
Allons, je t'en prie.
Va chercher les cartes.
Je vais mettre ça au linge sale.
Je lave quelques verres.
12 septembre
1927.
L'an prochain, tu seras haut comme ça.
Puis comme ça, comme ça...
et finalement tu seras comme moi.
Attention!
Toute fraîïche de la cave!
Voici les verres.
Vous jouez, M. Scheffler?
Allez-y, je préfère regarder.
D'ailleurs je vais bientôt me coucher.
Toujours fatigué!
Il ne fallait pas épouser
un boulanger, Gretchen.
C'est fini le temps où ta grand-mère
invitait quelqu'un sous ses jupes.
Tu comprends?
J'y comprends rien.
On va voir qui a un valet.
Tu sais bien qu'elle n'apas de carreau.
Pas de disputes, jouez!
Voilàles deux carreaux!
Je ne pouvais pas savoir!
Ce jour-là,
réfléchissant au monde des adultes
et àmon propre avenir,
je décidai de mettre un point flnal.
Désormais je ne voulais plus
grandir d'un pouce,
je resterais àjamais
I'enfant de trois ans,
le gnome.
Un... deux... trois...
Mon Dieu, il est là!
Que s'est-il passé?
Il est...
Il est tombé dans I'escalier!
Faites quelque chose!
Pourquoi la trappe était ouverte?
Alfred, c'est toi
qui I'as laissée ouverte!
Je suis allé vous chercher labière.
Appelons le médecin!
Ca al'air grave.
C'est toi!
Toi qui as laissé
la trappe ouverte!
Arrêtez donc!
Lâche-moi!
Calmez-vous! C'est un accident.
Oscar, mon petit Oscar.
Mon petit garçon...
Mais comment ça apu arriver?
Une ou deux semaines de lit,
et il pourra se lever.
Ce n'est qu'une petite
commotion cérébrale.
Continuezles compresses.
Ma chute était un plein succès.
La version officielle fut désormais;
le jour de ses trois ans,
notre petit Oscar est tombé
dans I'escalier de la cave.
Il s'en est tiré entier,
seulement depuis, il n'aplus grandi,
pas du moindre centimètre.
- Déjà debout, Oscar!
- Encore ce tambour!
Eh bien, Oscar, te voilàremis.
Bonjour!
J'ai dit, pas dans lamaison!
Et le tambour est cassé,
c'est dangereux!
- Tu restes?
- Je dois retourner àlaposte.
Laisse ce tambour!
Si tu te fais mal,
ce sera encore ma faute!
Qu'est-ce que je disais!
Donne-moi le tambour,
et tu auras du chocolat.
Donne-leur donc.
Je t'en apporterai un neuf.
Non, Oscar veut pas!
On va voir ça!
Alfred, pourquoi toujours de force?
Mon tambour!
Je découvrais ainsi
que ma voix tenait une note si élevée
que personne n'osait
me prendre mon tambour.
Le verre blanc porte bonheur!
Quand on me prenait
mon tambour,je criais,
et quandje criais,
ma voix pulvérisaitles objets de prix.
La sorcière noire est-elle là?
Non, non, non!
Tu dois faire trois tours
Au quatrième, tu perds la tête
Au cinquième, tu viens avec nous
La voilà! La voilà!
Ca vabientôt changer!
Vauriens!
Gare à vous, je descends!
Mais personne n'ose élever la voix
Le soleil nous appelle
Dame Nature nous offre
Ses feuilles de bouleaux
et ses teintes verdoyantes
D'un air implorant
Pour que nous soyons tout à elle
Je laprends!
Regardez cette pomme de terre
extraordinaire.
Cette chair végétale gonflée,
foisonnante,
sans cesse àl'affût
de formes nouvelles,
et cependant si chaste!
J'aime lapomme de terre,
parce qu'elle me parle.
Elles sont plus grosses
que I'an dernier!
Que fais-tu là?
Oscar apprend à écrire!
Arrête, tu n'apprendras jamais
à écrire et àlire...
Les grands classiques.
Les vérités éternelles.
Mourir et devenir.
Rapprochez-vous,
que je vous voie tous!
Tiens, pour ton premier jour d'école!
Regardeztous!
Je m'appelle Spollenhauer
et je suis votre maîïtresse.
Sivous chantiezune petite chanson,
les enfants?
Tu dois être le petit Oscar.
On nous abeaucoup parlé de toi.
Comme tu joues bien!
N'est-ce pas qu'Oscar
est un bon tambour?
Maintenant nous allons
ranger le tambour.
Il est fatigué et doit avoir sommeil.
Après la classe, on te le rendra.
Tu es un vilain, Oscar.
Je vais vous lire I'emploi du temps.
Lundi, écriture, calcul, lecture,
religion.
Tous ensemble: écriture!
Veux-tu t'arrêter, Oscar!
Dehors!
Etrange, très étrange.
Quel âge a-t-il maintenant?
Six ans, docteur.
DéshabillezOscar.
Ily a combien de temps
qu'il est tombé dans cette trappe?
Trois ans le 12 septembre.
Je vais examiner la colonne vertébrale.
Sois sage, mon petit,
je te rendrai ton tambour.
Oscar, je vais te le tenir.
Tu ne vas pas pouvoir
enlever ta chemise.
Si tu n'es pas gentil,
le docteur ne te guérirapas!
Allons, petit, donne-moi ce tambour.
Extraordinaire!
Je vais décrire ce phénomène
dans une étude
pour notre revue scientifique.
Sivous n'y voyezpas d'objection.
Extraordinaire!
Vraiment extraordinaire!
"Lapuissance de ce phénomène
vocal destructeur
"permet de supposer
"une formation particulière
de I'arrière-larynx
"chezle jeune Oscar Matzerath.
"On ne peut pas exclure I'hypothèse
"d'un développement accidentel
des cordes vocales."
Tu entends, dans une revue médicale!
C'est écrit aussi,
pourquoi il ne grandit pas?
Demande à celui-là.
Pourquoi il ne grandit pas?
Arrête enfin!
Il est à toi autant qu'àmoi,
sinon plus!
Et qui alaissé la trappe ouverte?
Oncle Heilandt,
crache voir dans la soupe.
Regarde ce que j'ai trouvé
dans I'étang!
Deux grenouilles!
Elles sont toujours en vie.
Faisons goûter la soupe à Oscar!
A ton tour!
Ca va te plaire!
Ouvre labouche!
C'est pas méchant.
C'est bon, hein?
Larue familiale etles cours
me devenaient trop étroites,
j'avais besoin de lointains,
je saisissais toutes les occasions
d'échapper aux cuiseurs de soupe
et de m'éloigner de labanlieue
pour aller en ville,
seul ou àlamain de maman.
Le tambour est cassé!
Tu veux encore que je te le répare?
Il en aura un neuf.
Mes hommages.
Bonjour, Oscar.
Bonjour, oncleJan.
Tu y arrives?
Je vous quitte.
J'ai quelques courses à faire.
C'est pour ton tambour. Caira?
Viens, Oscar. Au revoir.
Bonjour, Monsieur Markus.
Quivoilà? Madame Matzerath
et le petit Oscar.
Tu veux un nouveau tambour?
Oui, Monsieur Markus, déjà.
Il n'arrête pas de jouer.
Je ne sais jamais I'année,
jamais le jour,
sauf quandvous entrezici.
Mon instinct me dit
que nous sommes encore jeudi.
Vous avez de si belles mains
qu'on les achèterait leur poids en or.
Ily a une boîte là-dessous,
passe-la-moi!
Regardez, Madame Agnès!
De beaux bas de soie,
de lapure soie,
un vrai produit de luxe.
Une, deux, trois paires de bas
pour Madame Agnès!
Ils vous iront très bien.
Une affaire.
Trop cher pour moi.
Ca vaut lapeine!
Une autre fois.
Je vous les laisse à un demi-florin.
Si peu?
Non, Markus, c'est un cadeau!
Prenez-les!
Et ne posezpas de questions.
A nous, Oscar!
Qu'est-ce qui te ferait plaisir?
Un nouveau tambour!
Va en prendre un.
Tu sais où ils sont!
Tu vois, Oscar!
Il est heureux.
M. Markus, est-ce que
je pourrais vous laisser
mon Oscar pour une demi-heure?
J'ai quelques courses à faire.
Je veillerai sur lui
comme sur laprunelle de mes yeux.
Faites donc vos courses.
Le petit prince attendraici avec moi.
Pendant que vous faites vos courses.
Comme tous les jeudis.
Nous bouclons larue!
Danzig est etrestera
une ville allemande.
Le couloir de Danzig est etrestera
allemand.
Toutes ces régions doivent
leur ouverture culturelle
exclusivement au peuple allemand.
Sans le peuple allemand,
toutes ces régions de I'Est
seraientplongées dans labarbarie.
Une belle promenade?
Le Führer parle partout!
Sauf cheznous!
Qu'est-ce qui t'arrive?
Qu'est-ce que tu as?
J'ai attrapé une maladie.
Quel genre de maladie?
J'ai un oiseau!
Et maintenant,
Mesdames et Messieurs,
les plus petits des petits!
Bebra et ses lilliputiens!
Tiens, tiens!
Les enfants de trois ans
ne veulent plus grandir!
Je m'appelle Bebra.
Je descends en ligne directe
du prince Eugène,
dont le père était Louis XIV,
et non quelque Savoyard
comme on I'affirme.
Le jour de mes dix ans,
j'ai décidé de ne plus grandir.
Un peu ***,
mais enfin...
Dites-moi, cher Oscar,
vous devezbien avoir 14, 15ans.
Douze ans et demi.
Pas possible!
Et quel âge me donnez-vous?
Trente-cinq ans?
Vous êtes un flatteur!
Trente-cinq! Celame paraîït loin.
J'aurai cinquante-trois ans en août.
Je pourrais être votre grand-père.
- Vous êtes aussi un artiste?
- Pas exactement,
bien que...
Comme vous voyez,
j'ai un certain don artistique.
Vous devezabsolument
vous joindre ànous!
Savez-vous, M. Bebra...
Je préfère rester parmi les spectateurs
et cultiver mon petit art en secret.
Mon cher Oscar,
croyez-en I'expérience d'un collègue.
Notre place n'est pas
parmi les spectateurs.
Nous devons monter sur la scène,
mener I'action.
Sinon, les autres le feront!
Et les autres viendront.
Ils occuperont les champs de fête.
Ils organiseront des défilés,
construiront des tribunes,
peupleront les tribunes,
et des tribunes,
ils prêcheront notre catastrophe.
On vous cherche, cher ami.
Nous nous reverrons.
Nous sommes trop petits
pour nous perdre.
Allez, viens!
Ils viendront!
Une radio!
Bonjour, Oscar.
Merci, oncleJan.
Bonjour, tout le monde!
Ces foutues molletières glissent!
Il me faut des bottes!
C'est trop cher, tu sais bien.
Alors au moins des guêtres de cuir.
De quoij'ai I'air!
Tu vas au défilé?
Sur la Prairie de Mai.
Grande manifestation!
Le Gauleiter Lobsack parle,
et on val'entendre, je te garantis!
De toute façon,
nous vivons des journées historiques,
et on ne peut pas rester àl'écart.
Il faut être là.
Tu ferais mieux
de lire le journal allemand.
Qu'est-ce qui t'apris
d'opter pour la Pologne?
Je te I'ai toujours dit.
Je suis Polonais!
Réfléchis encore!
Ilvapleuvoir, prends le parapluie.
En uniforme? Pas possible!
Le pot-au-feu cuit.
Tourne de temps en temps.
C'est prêt dans vingt minutes.
- Tu ne manges pas avant?
- Pas le temps.
Le service c'est le service,
le schnaps c'est le schnaps!
Chers camarades
de Danzig et de Langfuhr,
d'Ohra, de Schiedlitz et de Praust,
venus du mont et de laplaine,
tous, je le sais,
vous n'avezau coeur
qu'un seul désir ardent.
C'est notre désir à tous
depuis qu'un diktat honteux
nous a séparés de notre
bien-aimée patrie allemande.
Nous voulons revenir au Reich!
Qu'est-ce donc que ce territoire autonome
qu'on nous a généreusement octroyé?
On amis les Polonais dans notre port
comme des poux dans les cheveux!
Et au milieu
de notre chère vieille ville,
on nous a offert une poste polonaise!
Merci pour le cadeau!
Nous autres Allemands
nous avions déjà une poste
quand les Polonais
n'avaient rien à se dire
par lettre!
Nous leur avons apporté I'écriture!
Et maintenant, chers camarades,
nous saluons notre hôte venu du Reich,
que le Führer nous envoie.
Le camarade Albert Forster
arrive àl'instant sur le pré!
J'ai du sable dans les chaussures.
Viens, Oscar!
Ca va aussi avec une corde àlinge?
Oui, oui, ça va.
Du poisson ou des vieilles chaussures?
On va voir un peu
ce que j'ai pris!
Le sac!
Vous trouvez ça gras!
Il fallait les voir
après labataille du Jutland
contre les Anglais...
Le drapeau noir, blanc, rouge
flotte fièrement.Vous comprenez?
Après labataille,
grosses comme ça!
Il en voulait un cinquante,
mais je lui ai donné un florin.
N'imagine pas
que je vais manger ces anguilles.
Fais pas tant de manières!
Je ne mangerai plus jamais
de poisson!
Surtout pas d'anguilles!
Tu les as toujours aimées,
sans demander d'où elles venaient!
Silence!
Fini, le tambour!
Une fois pour toutes!
- Laisse Oscar tranquille!
- Etviens t'asseoir!
Qui alaissé la trappe ouverte?
De I'histoire ancienne!
Assieds-toi!
Goûte un peu
comment je les ai préparées.
On verrabien qui n'en veut pas!
Anguilles àla sauce au fenouil
avec une feuille de laurier
et un zeste de citron!
C'est ridicule.
Ne la force pas àmanger.
Ne t'en mêle pas!
Si çane lui dit rien.
Et si elle les rend après!
Je n'ai pas acheté
les anguilles pour rien.
Goûte d'abord!
Bien vidées et lavées.
Sans bile, le foie est bien clair.
Toutes fraîïches!
Oscar, à table!
Je passe des heures àla cuisine!
J'en connais qui seraient contents
de manger ça.
Je ne sais pas quoi faire.
Calme-toi, Alfred!
Je ne peux plus lui parler!
Et le poisson refroidit.
La sensibilité des femmes.
Valui parler, toi. Calme-la.
Tu ne veux pas que je les réchauffe?
Pas avec Bronski.
A laposte polonaise,
il amal choisi son camp.
Ne misezpas sur le Polonais!
Misezsur les Allemands,
sivous y tenez.
Ils ont le vent en poupe.
N'imaginezpas
qu'ils toléreront le Bronski,
ce fou de Polonais!
Ne croyezpas ça.
Cane marcherajamais.
Restez donc avec Matzerath.
Ou, sivous voulez
me faire I'immense honneur,
venezavec moi!
Avec Sigismund Markus.
Je viens de me faire baptiser.
Non, Markus, je vous en prie.
Nous pourrions aller à Londres.
Comme tout le monde,
avant I'arrivée des Allemands.
Tiens, le voilà!
Nous I'emmènerions aussi à Londres.
Ilvivrait comme un prince!
Merci, Markus.
Mais c'est impossible,
et pas à cause de Bronski.
Tant mieux,
si ce n'est pas à cause de lui.
Evitez Bronski.
Restezavec Matzerath!
Alors?
Vas-y!
Un, deux, un, deux...
Tu ne peux pas
ou tu ne veux pas, garnement?
Puisque tu peux tout!
J'ai péché en pensée,
en parole et en acte.
Seule ou avec d'autres?
A deux.
Où et quand?
Tous les jeudis àlapension Flora.
Mon enfant,
toujours cet endroit mal famé!
Je ne peux pas m'en empêcher,
je voudrais mais je ne peux pas.
Et les conséquences,
chère Mme Matzerath?
Elles sont déjàlà, mon père.
Descends de là!
Qu'est-ce qui te prend? Garnement!
Mon père, que vais-je faire de lui?
Je I'aime, le petit Oscar,
mais il a déjà quatorze ans
et toujours ces ennuis,
et maintenant ça!
Mon Dieu!
Priez, Madame Matzerath!
Arrête, Oscar!
Qu'est-ce que je disais?
Encore du poisson!
Elle ne mange pas, elle dévore,
et puis s'étonne d'être malade!
Comment est-ce possible?
Ca fait trois semaines!
D'abord des sprats et des sardines,
maintenant des harengs, par paquets.
J'ai tout essayé,
je ne sais plus quoi faire.
Il fallait me chercher plus tôt.
Qu'est-ce qui te prend, Agnès?
Toi qui ne supportes pas le poisson!
C'est moi quivous le dis!
Pour moi, le Führer
préfère un communiste repenti
à un bureaucrate petit-bourgeois...
Pas envie de vivre,
pas envie de mourir.
Je ne sais pas.
Ily a trop de tout, et de plus en plus.
Je disais ça aussi,
et c'est allé quand même.
Tu crois que ça a été facile
quand Koljaiczek,
ton père,
s'est retrouvé sous le bois
et qu'il n'est plus ressorti.
Au moins il n'était plus là!
Plus là, I'homme!
Tu dis ça, toi qui t'en paies deux.
Tu n'en as jamais assez.
Ca vabien, mère!
Tu es enceinte, et alors?
Comme s'il n'y avait pas
assez de place ici.
C'est pour quand?
Jamais!
Agnès!
Je ne pouvais pas savoir.
Val'aider!
Pourquoi tu ne veux pas de cet enfant?
Cane fait rien, de qui il est!
Pas de trompette ici!
Si tu en as envie, vajouer cheztes SA.
Vous serezbientôt essoufflés,
salauds de Nazis!
Cochon de rouge!
Qu'est-ce que vous faites ici?
Vous n'avezrien à faire ici.
Vous voulezsavoir ce que vous êtes?
Vous savez quoi? Un youpin!
Tu vois ce qu'ils font à Markus?
Lui qui est baptisé comme eux.
Ton tambour est cassé?
Viens me voir.
Je t'en donnerai un neuf.
Quelle belle journée!
Là où elle est, tout est bon marché.
Oui, Leo-Meschugge, une belle journée!
Une journée inoubliable!
Moi aussi, j'aivu le Seigneur!
Vous avezvu le Seigneur?
Belle journée!
Le Seigneur... Il est passé,
et II était pressé.
Il était une fois un tambour
qui s'appelait Oscar.
Il perdit sapauvre maman
qui avaitmangé trop de poisson.
Il était une fois un peuple crédule
qui croyait au père Noël.
Mais en réalité, le père Noël
étaitle préposé au gaz!
Il était une fois un marchand de jouets
qui s'appelait Sigismund Markus
etvendait des tambours
rouges etblancs vernis.
Il était une fois un tambour
qui s'appelait Oscar.
Il était une fois
un marchand de jouets
qui s'appelait Markus
et qui emporta avec lui
tous les jouets de ce monde.
Lapatience du Führer est àbout.
Danziger Vorposten!
C'estle 1er septembre 1939,
je suppose que vous connaissez
cette date,
que je me rendis coupable
pour la deuxième fois;
moi, Oscar le tambour,
je n'ai pas seulementmené
mapauvre maman au tombeau.
C'est aussi moi qui ai entraîné
mon pauvre oncle
etpère présuméJan Bronski
àlaposte polonaise
et ainsi causé samort.
Halte, on ne passe pas!
Zone interdite! Personne n'entre!
Nous allons voir le portier Kobyella.
C'est un Polonais, arrêtez-le!
Il était temps.
A la distribution d'armes!
Qu'est-ce que tu viens faire ici?
Kobyella. Réparer le tambour!
Il n'apas le temps
de s'occuper de toi!
Va te cacher, Oscar!
Je dois rester ici. File!
Agression contre le territoire du Reich!
Cette nuit, pour lapremière fois,
les provocations
depuis le territoire polonais
sontvenues de troupes régulières.
Depuis 5h45, nous répondons àleur tir.
Désormais les bombes
répondent aux bombes!
- Où est Jan, oncleJan?
- Dans la cave.
Le tambour!Jan, le tambour!
Je veux le tambour!
Oscar! Descends!
Ne reste pas ici!
Ne flanche pas!
Je t'installe, tu ne tomberas pas.
Partie gagnée, quatre trèfles,
quarante-huit points,
ça fait douze pfennigs!
Ne gâche pas le jeu maintenant!
Je ne peux pas jouer tout seul!
Reprends-toi!
Qu'est-ce que tu as?
Kobyella, je t'en prie!
J'ai un jeu formidable!
Agnès!
Elle est morte.
Nous capitulons! Ne tirezpas!
Cessezle feu!
On nous fllmapour les actualités,
qui passèrent dans toutes les salles.
Car ce qu'Oscar avaitvécu
àlaposte polonaise de Danzig
est entré dans I'Histoire
comme le début
de la Deuxième Guerre mondiale.
Ils ont fusilléJan Bronski?
Ils ont ramassé
toutes les douilles.
Toutes, sauf une.
On en oublie toujours une.
La ville libre hanséatique de Danzig
fêtale rattachement
de sabrique gothique
au Grand Reich allemand.
C'est un grand moment de ta vie!
Fais bien attention,
pour pouvoir tout raconter!
S'il me regarde,
je crois que je vais m'évanouir!
Le voilà!
C'est Maria, elle voudrait
se faire embaucher ici.
Tu disais bien qu'il te fallait quelqu'un
pour les clients.
Tu ne peux pas continuer comme ça.
Et lui non plus.
Je vous salue Marie pleine de grâce...
Seigneur, donne-moi...
la foi pour que j'aille au ciel.
Tu as été au petit coin?
Je joue quelque chose?
"Aimer Marie seramon sort".
Va-t'en!
Sije ne tiens pas compte
d'engouements anonymes,
Maria futmon premier amour.
Quel âge as-tu?
Juste seize ans.
Moi aussi.
On ne le dirait pas.
Maria sentaitla vanille.
D'où cela venait-il?
Est-ce qu'elle se frictionnait
avec une racine?
S'agissait-il d'un parfum bon marché?
Oscar décida d'en avoir le coeur net.
Qu'est-ce que tu fais?
Arrête!
Quel polisson!
Tu viens voir là-dedans,
et tu ne sais rien.
- Vous rentreztard?
- Possible, petite.
Trop de victoires à fêter.
Tu peux dormir avec Maria.
On tient dans un lit, avec Oscar.
C'est un huitième de portion!
Vite, sous les couvertures!
Allez, dépêche-toi!
Ilva être bien content!
Il est moins le quart!
Encore un peu, Alfred!
Mais fais attention!
Mais oui, mais oui.
Ca vient.
Encore un peu, mais...
Je fais attention!
Va-t'en!
- Qu'est-ce qui te prend?
- Arrête!
C'est pas sa faute,
si tu ne peux pas faire attention!
Et qui a dit: "Encore un peu?"
J'ai dit: "Fais attention, ça vient!"
Vous n'en avezjamais assez!
Toutes les mêmes!
Tu crois que moi,
c'est I'aller-retour vite fait?
Tu peux t'en chercher une autre!
Ma sonnerie ne se déclenche pas
comme ça!
Tu ne fais même pas attention!
J'en ai assez de t'entendre gueuler!
Alors va voir ton chef de cellule,
couille en bois!
Ilva falloir changer de ton.
Les bonnes femmes!
Encore des gicle-vite comme toi!
Fous le camp!
Si tu es en chaleur,
prends un prisonnier de guerre!
Le Français qui livre labière,
il fera sûrement çamieux!
Pour moi, I'amour c'est pas
que des cochonneries!
Je préfère encore jouer aux cartes.
Petit nain vicieux,
espèce de gnome timbré!
On devrait te mettre au cabanon!
Je ne le pensais pas, Oscar!
Tu auras ta chambre à toi.
Bientôt 17 ans!
Viens donc!
Tu vas te geler!
Tu ne veux pas monter?
Entre.
Approche-toi, Oscar.
Viens sous I'édredon, il fait chaud.
Il fait froid,
Greff ne chauffe pas.
Entre!
Greff veut durcir son corps!
Il aime lajeunesse, I'austérité.
Il préfère les garçons aux filles.
J'ai les pieds gelés.
Un éclaireur n'apas froid!
Ca avance, àl'Est!
Leningrad tombe d'un jour àl'autre.
Kiev compte plus, à cause du pétrole.
Beaucoup mieux qu'en quinze,
quand j'étais là-bas.
Le principal, c'est Moscou!
Alfred, découpe-la!
Si on n'avait pas les grands-mères!
Pour fournir des oies,
les Kachoubes sont toujours assezbons.
Je regrette de ne pas y être.
Mais je suis indispensable
sur le front intérieur.
Moscou doit être rasée
pour ne pas avoir ànourrir ces gens.
Le Führer le sait bien.
Ils ont transféré mon Herbert au front,
pour qu'il se batte.
Bataillon disciplinaire!
On les aurapar la faim!
Et la guerre sera finie.
Le blanc ou la cuisse?
Je voudrais la cuisse.
Elle est bien croustillante.
Toute I'Europe avec nous!
L'héroïque Finlandais...
Pas d'oie sans sauge.
Les Magyars, les Roumains!
Oscar, quel beau repas de baptême!
Nous triomphons même en mer.
Greff, pas d'oie?
Jamais de viande!
Maintenant, Oscar, tu as un petit frère.
Tu pourras jouer avec lui plus ***.
L'aîïné du boucher aussi est tombé!
Il a eu la Croix de fer
première classe!
Deuxième!
Kurt, mon fils.
Tu es bien mon fils.
Quand tu auras trois ans,
je te donnerai un tambour.
Et si tu ne veux pas grandir,
je te montrerai comment t'y prendre.
Un autographe.
Excusez-moi.
Un autographe, s'ilvous plaîït.
Mon cher Oscar!
Comme je suis heureux de vous revoir.
Ne I'avais-je pas dit?
Nous sommes trop petits
pour nous perdre.
Très bien, vous n'avezpas grandi.
Roswitha!
Je vous présente Oscar,
un vieil ami qui brise
le verre avec sa voix.
La grande somnambule!
Lajoie des soldats sur tous les fronts
et de mes vieux jours.
Mon accoutrementvous étonne.
Le ministère de la Propagande
nous a sollicités.
On nous aproposé
de paraîïtre
devant les plus hautes sommités.
Saleté de politique!
Nous nous consacrons aux combattants.
Un cadeau d'Oscar!
Merci mille fois, cher Oscar.
Vous avez du talent.
Venezavec nous.
Qu'est-ce quivous retient ici?
Venezavec nous, jeune homme,
jouez du tambour, brisez des verres,
des ampoules,
des flûtes de champagne!
L'armée d'occupation allemande
en France,
dans le *** Paris,
vous en serareconnaissante!
Connaissez-vous Paris?
Et bien, alors!
Chers soldats de plomb de Paris,
le Théâtre aux armées
de Bebrajoue pour vous,
chante pour vous,
vous aide àremporter
la victoire finale!
Tous à Paris!
Tous sur les boulevards!
A quoi penses-tu?
Aux jupes de ma grand-mère.
Et maintenant, cher public,
pour lapremière fois en France,
une nouveauté de notre programme,
I'homme àl'arme-miracle
dont nous avons
tellement entendu parler.
Oscar le tambour!
Oscar le vitricide!
Mazel tov.
Un caporal, cinq hommes,
rien à signaler.
Merci. Repos, caporal.
Vous voyez, mon capitaine,
rien à signaler.
Ca dure depuis des années.
Enfin, lamarée...
Le spectacle de lanature!
C'est ce que nos hommes
ne supportent plus.
C'est pourquoi nous construisons
bunker après bunker.
Etvous croyezau béton, lieutenant?
Ici on ne croit plus àrien.
Caporal?
A plus rien, mon lieutenant.
Mais vous coulezle béton.
Oscar, regarde comme lamer est belle!
Pique-nique au grand air!
Lanature nous creuse I'estomac!
Un vrai salami hongrois...
Et du chocolat de Hollande.
Bon appé*** à tous!
Et maintenant, Signorina Raguna,
pouvez-vous nous dire,
ànous et ànotre cher public,
la date de naissance exacte
du lieutenant Herzog?
11 avril
1915...
A Brême!
Oui, c'est exact!
Le lieu aussi!
Signorina Raguna,
la grande somnambule!
Je vois qu'on lui apporte du champagne.
Mais vous ne le boirezpas.
Je regrette.
Pourquoi pas?
Tous ensemble!
La sorcière noire est-elle là?
Non, non, non!
N'aie pas peur.
Il ne t'arriverarien.
Mon petit homme...
Entrez!
Vite, les enfants!
Qu'est-ce qui se passe?
Les Américains arrivent!
Il faut que je prenne un café!
Roswitha, on part!
Roswitha,je ne connais pas ton âge,
je sais seulement
que tu sentais la cannelle
etlamuscade,
que tu pouvais lire
dans le coeur des hommes
mais pas dans ton propre coeur.
Cher Oscar,
nous autres, nains et fous,
ne devrions pas danser
sur un béton coulé pour des géants.
Allez, il fauty aller.
- Au revoir, Oscar!
- Bon courage!
- Sois brave!
- Bonne chance!
Regarde, Kurt. Oscar est rentré
pour ton anniversaire!
Ton petit frère a trois ans aujourd'hui.
Je t'ai apporté un cadeau.
Tu as le droit de porter cet uniforme?
Où étais-tu?
On t'a cherché partout, lapolice aussi.
Nous avons dû jurer
que nous ne t'avions pas descendu.
Enfin, te voilàrevenu!
Beethoven, voilà un génie!
Arrête ça. Tout est fini.
Victoire finale!
Débarrasse-toi donc de ton insigne,
les Popovvont arriver!
Enterre-le sous les pommes de terre.
Allez, pressons un peu.
J'ai encore des bottes àréparer.
Lamain!
Cane fait plus rien.
Arrête de lancer des pierres!
Dois-je ou ne dois-je pas?
Tu as vingt-et-un ans!
Oscar, dois-tu ou ne dois-tu pas?
Tu es orphelin!
Je le dois, il le faut,
je veux grandir!
Kurt, qu'as-tu encore fait?
Il grandit!
Regardez comme il grandit!
J'aivu le Seigneur!
C'est comme ça, les Kachoubes.
Ils en prennent toujours sur la tête.
Mais vous partezpour I'Ouest,
où toutvamieux.
La grand-mère sera seule àrester.
Les Kachoubes,
pas moyen de les faire partir.
Eux, ils restent sur place,
pour que les autres tapent dessus.
On n'est pas des vrais Polonais,
pas des vrais Allemands,
et ceux-là, ils veulent toujours
qu'on soit I'un ou I'autre.
Ca fait mal?
Pourvu que tu ne deviennes pas
hydrocéphale!
A 3 ans, il est tombé dans la trappe
et n'a plus grandi.
Maintenant il est tombé dans la fosse
et ilveut de nouveau grandir.
Adaptation: Bernard Eisenschitz
Sous-titrage: Titra-Film Paris
synchro: himan